La genèse de l'œuvre est des plus surprenantes. En 1850, Berlioz compose un soir chez des amis, parmi lesquels se trouve « un de [s]es anciens condisciples de l'Académie de Rome, le savant architecte Duc »[2], un chœur, « L'Adieu des bergers à la Sainte Famille », qu'il fait exécuter à Paris le sous le nom de Pierre Ducré, prétendument « maître de musique à la Sainte-Chapelle de Paris, 1679 » (« Ducré » venant de « Duc » auquel a été accolée la note ré)[3]. « C'était, déclare-t-il plaisamment, écrit sur parchemin en vieille notation que j'ai eu beaucoup de peine à déchiffrer ». Le succès est unanime. Berlioz révèle alors qu'il est en fait l'auteur de cette page. Par la suite, il compose la première partie (« Le Songe d'Hérode »), suivie de « La Fuite en Égypte » (où se trouve inclus « L'Adieu des bergers ») et de « L'Arrivée à Saïs », qui termine l'œuvre.
L'Enfance du Christ est créée dans son intégralité le à la salle Herz sous la direction de Berlioz lui-même et remporte d'emblée le plus vif succès. Celui-ci ne se démentira pas au fil des années.
La partition complète a été publiée à Paris, chez Richault, en 1855. On utilise aujourd'hui l'édition critique procurée par David Lloyd-Jones[4].
Le roi Hérode se lamente sur la grandeur et la solitude des monarques. Sujet à une vision nocturne récurrente, il convoque des devins juifs, qui lui déclarent qu'« un enfant vient de naître qui fera disparaître [son] trône et [son] pouvoir ». Pour se prémunir des maux qu'on lui annonce, il décide la mise à mort de tous les premiers-nés.
(Indication de Berlioz : « Après un silence dont la durée devra représenter la valeur d'environ 8 ou 9 mesures, on passera, sans autre interruption, à la « Scène de la Crèche ». »)
Dans une étable, la Vierge Marie prend soin de l'Enfant Jésus. Les anges informent la Sainte Famille qu'un danger la menace et qu'elle doit quitter au plus tôt la Judée.
Éconduits brutalement par les Romains puis par les Égyptiens, les fugitifs épuisés sont recueillis par un père de famille ismaélite, qui leur offre l'hospitalité sous son toit. Pour divertir leurs hôtes, ses enfants exécutent un trio pour deux flûtes et harpe. Le récitant, accompagné par un chœur a cappella, conclut l'œuvre après avoir annoncé le sacrifice de Jésus une fois devenu adulte.
Analyse
Bien que l'œuvre soit destinée au concert, Berlioz attache une grande importance à la spatialisation sonore : « Pendant toute la première partie de la trilogie, les choristes hommes doivent seuls être en vue du public sur l'un des côtés de la scène. Les femmes, soprani et contralti, sont derrière le théâtre, groupées autour de l'orgue mélodium et du maître de chant. Au commencement de la seconde partie, elles viennent se placer sur la scène au côté opposé à celui qu'occupent les hommes, ne laissant au post-scenium que 4 soprani et 4 contralti qui doivent y rester jusqu'à la fin pour l'Alléluia et l'Amen. Si le chef d'orchestre n'a pas de métronome électrique, le maître de chant conduira le chœur invisible du post-scenium, et le chef d'orchestre suivra de l'oreille ses mouvements ».
Phonographie
Ne figurent ci-après, classées dans l'ordre chronologique des enregistrements. que les versions intégrales de la partition originale (sont donc exclus les arrangements de l'œuvre pour effectif réduit). Concernant les chanteurs, seuls sont mentionnés les interprètes des rôles principaux, dans l'ordre suivant : Marie, le Récitant, Hérode, Joseph.
Mary Davenport, Léopold Simoneau, Martial Singher, Art Society Choral, Little Orchestra, dir. Thomas Scherman (Columbia) [enregistré en ]. Réédité en CD par HAFG en 2007, puis par Cantus Classics en 2015.
Jean Rigby, John Aler, Alastair Miles, Gerald Finley, Corydon Singers, Choir of Saint Paul's Cathedral, Corydon Orchestra, dir. Matthew Best (Hyperion) [enregistré en ].
Miyaghi Osada, Yves Saelens, André Cognet, Gérard Théruel, Coro della Radio svizzera, Orchestra della Svizzera italiana, dir. Serge Baudo (Forlane) [enregistrement de concert effectué en ]. Avait été publié aussi en vidéocassette. Disponible sur YouTube[16].
Sophie Rehbinder, Patrick Garayt, Jacques Bona, Philippe Georges, Chœur français d'oratorio, Orchestre symphonique Leopolis de Lviv, dir. Jean-Pierre Loré (Erol) [enregistrement de concert effectué en ].
Lena Hauser, Hans-Jürg Rickenbacher, Michel Brodard, Peter Brechbühler, Akademiechor Luzern, MSL-Singknaben Luzern, MSL-Mädchenchor inVOICE, Luzerner Sinfonieorchester, dir. Alois Koch (Euro Classics) [enregistrement de concert effectué en ].
Johanna Moffitt, Chris Lysack, Miroslaw Witkowski, Justin Moore, Indiana University Symphonic Choir, Indiana University Conductors' Orchestra, dir. Stephen Mager [enregistrement de concert effectué en et disponible sous conditions sur le site de la William and Gayle Cook Music Library de Bloomington][21].
Sasha Cooke, Andrew Staples, Matthew Brook, Roderick Williams, Melbourne Symphony Chorus and Orchestra, dir. Andrew Davis (Chandos) [enregistré en ]. Disponible sur YouTube[22].
Vidéographie
Les principes suivis dans cette section sont les mêmes que ceux de la section Phonographie.
Fiona Kimm, Anthony Rolfe Johnson, Richard Van Allan, William Shimmel, John Alldis Choir, English Chamber Orchestra, dir. Philip Ledger (Thames Television) [spectacle conçu pour la télévision et associant le chant et la danse. Diffusé en , il a été disponible en vidéocassette. L'enregistrement sonore a été édité en CD par ASV, comme indiqué dans la rubrique Phonographie].
Miyaghi Osada, Yves Saelens, André Cognet, Gérard Théruel, Coro della Radio svizzera, Orchestra della Svizzera italiana, dir. Serge Baudo [concert télévisé enregistré en et disponible à l'origine en vidéocassette. Pour l'édition en CD, voir la section Phonographie].
François-René Tranchefort, « Hector Berlioz », dans François-René Tranchefort (dir.), Guide de la musique sacrée et chorale profane : De 1750 à nos jours, Paris, Fayard, coll. « Les indispensables de la musique », , 1176 p. (ISBN2-213-02254-2), p. 68-78.
↑Berlioz s'est expliqué en détail à ce sujet dans une lettre adressée le 15 mai 1852 à son ami anglais John Ella (Correspondance générale, tome IV, Paris, Flammarion, 1983, pages 156-159).
↑Hector Berlioz, New edition of the complete works, volume XI, Kassel, Bärenreiter, 1998. La lettre de Berlioz à J. Ella y est reproduite à la page 227.