Artiste prolifique, elle a enregistré plus de sept cents chansons au style enjoué et festif, ainsi qu'été à l'affiche d'une vingtaine de comédies musicales et d'opérettes. Elle a par ailleurs tourné dans une quarantaine de films, une trentaine de séries et téléfilms, joué la comédie dans une dizaine de pièces de théâtre et donné près de dix mille galas. Très énergique et toujours de bonne humeur lors de ses apparitions en public, elle vante les mérites du sourire, même s'il lui arrive d'incarner des personnages plus graves au cinéma ou dans des fictions à la télévision.
Anoblie en 2005 avec le titre personnel de baronne, elle choisit pour devise « La passion fait la force ».
Biographie
Jeunesse et formation
Léonia Juliana Cooreman naît à Laeken, commune de la ville de Bruxelles. Son père, Jan Cornelius Cooreman, est menuisier ; sa mère, Maria de Leeuw[2], lui donne le goût des chansons en lui faisant écouter la TSF. Elle a un frère aîné, Louis, et une sœur, Jeanne[3].
À huit ans, comme elle est de constitution fragile, sa mère l'inscrit au cours de danse des filles de François Ambrosiny. Elle apprend le piano et le solfège, tout en poursuivant ses études, puis participe à des galas de bienfaisance. Entre les numéros dansés, elle chante les succès du moment. Très vite, tout s'enchaîne : radio-crochets, concours… Aussitôt, elle est remarquée par le directeur artistique du Lido, qui réussit à la convaincre de quitter Bruxelles, où elle jouait au Bœuf sur le toit. Elle débarque à Paris le , engagée comme meneuse de revue.
En 1951, elle rencontre celui qui deviendra son mari et imprésario, François-Henri Bruneau dit Bruno (1911-1989)[4],[5]. Ils se marient le , à la mairie de Bièvres, où ils habitent, dès , dans leur grande maison « La Roseraie ». Le couple n'eut jamais d'enfants[6].
Selon ses déclarations qu'ont rapportées certains médias, elle n'aurait pas demandé la nationalité française, ou du moins, aurait demandé à conserver sa nationalité belge à l'occasion de son mariage[7],[8],[9], toutefois selon d'autres sources cette nationalité aurait été acquise[10] et avant 1992 selon le gouvernement français[11].
Débuts
Annie Cordy mène ensuite diverses revues au Lido et à l’ABC. Elle accompagne également la caravane du Tour de France.
En 1952, Annie Cordy commence à montrer les autres facettes de son talent : elle signe un contrat avec Pathé-Marconi, obtient à Deauville le prix Maurice-Chevalier, puis est engagée pour La Route fleurie avec Georges Guétary et Bourvil. Tout en continuant l'opérette, Annie Cordy enregistre ses premiers succès — Les trois bandits de Napoli, Bonbons Caramels, Fleur de papillon, Léon, La tantina de Burgos, La ballade de Davy Crockett, etc. — qui l'imposent définitivement. Elle apparaît également au grand écran dans Si Versailles m'était conté... de Sacha Guitry (1953), Poisson d'avril avec Bourvil et Louis de Funès (1954) et Bonjour sourire avec Henri Salvador (1955). La même année, elle passe en vedette à l'Olympia et à Bobino, et reçoit le Grand Prix de l'Académie Charles-Cros pour la chanson Oh Bessie ! Le , elle chante lors de la cérémonie de fiançailles du prince Rainier III de Monaco et de l'actrice Grace Kelly.
Après le succès au cinéma du Chanteur de Mexico avec Luis Mariano et Bourvil, c'est l'Amérique qui l'accueille : le Plazza à New York, le Copacabana à Rio de Janeiro, puis Cuba, Mexico ou encore Porto Rico. Un contrat pour une grande comédie musicale lui est alors proposé aux États-Unis, mais son manager et mari n'appréciant pas l'Amérique, elle abandonne une carrière internationale prometteuse.
Artiste de music-hall
En 1957, Annie Cordy commence une nouvelle opérette, Tête de Linotte, avant de retrouver Luis Mariano dans Visa pour l'Amour (de 1961 à 1964), et Bourvil dans Ouah ! Ouah ! (1965). Avec Darry Cowl comme compositeur et partenaire, elle crée Pic et Pioche en 1967 et en compagnie de Pierre Doris, Indien vaut mieux que deux tu l'auras.
En 1964, elle retrouve la scène de Bobino pour une rentrée parisienne. En , sur les conseils de Maurice Chevalier, elle présente aux Parisiens un véritable « Show », où chaque chanson donne lieu à une mise en scène, à des ballets et à des costumes : Annie Cordy en deux actes et 32 tableaux. Un an plus tard, elle enchaîne sur une tournée internationale qui la mène de Berlin à Madrid, en passant par Moscou, où elle retourna pour dix-neuf concerts l'année suivante.
En 1972, elle crée la version française de Hello, Dolly !, ce qui lui vaut l'Award de la meilleure show-woman européenne, triomphant avec Nini la Chance (1976) et Envoyez la musique ! (1982). Elle connaît le succès également au théâtre, en interprétant Madame Sans-Gêne et Madame de Sévigné. En 1994, son interprétation de la Célestine consacre définitivement son talent dramatique.
Chanteuse
Malgré une vive présence au devant de la scène théâtrale, Annie Cordy continue d'enregistrer des chansons qui rencontrent le succès auprès du public : Cigarettes, Whisky et P'tites Pépées (1957), Hello le soleil brille (no 1 durant 26 semaines en 1958[12]), Nick nack paddy whack (1959), Salade de fruits (1959), Un clair de lune à Maubeuge (1962), Six roses (1964), Le p'tit coup de chance (1965), T'as vu Monte-Carlo ? (1969), Hello, Dolly! (1972), La Bonne du curé (plus d'un million de disques vendus[13] en 1974), Frida oum papa (1975), La Bébête (1976), Ça ira mieux demain (1976), Nini la chance (1976), Le Kazou (1979), Señorita Raspa (1980), Tata Yoyo (1980), Cho Ka Ka O (1985) ainsi que Les Enfants de la Terre (1998).
En 1987, elle interprète une chanson composée pour elle par Gilbert Bécaud sur des paroles de Julian More[14] : Ah bravo, tirée de la comédie musicale Madame Roza sur la Rafle du Vel' d'Hiv. Jouée à Broadway, la comédie musicale est restée inédite en France, seule une vidéo en témoigne[15].
Elle enchaîne ainsi les galas à un rythme effréné, en ayant effectué près de 10 000 et ayant enregistré plus de 700 chansons. Lors d'une interview, elle révèle que, en comptant les reprises, les hommages sur les plateaux TV et bien sûr les enregistrements, elle a chanté près de 2 000 chansons.
Annie Cordy était considérée par la critique musicale comme une chanteuse « fantaisiste », dont l'univers gravitait autour de registres de chanteurs populaires comme Bourvil, qu'elle connaissait bien, Boby Lapointe, ou le chanteur fantaisiste Carlos. Elle n'était ni autrice, ni compositrice de ses chansons, et ces dernières étaient généralement insouciantes, festives, jamais engagées, et n'abordaient pas de sujets graves ou polémiques. Bien entendu, la critique musicale voyait dans le cabaret le lieu idéal pour chanter son répertoire, et donc, le cabaret était son tremplin artistique, qui la conduisit non seulement à la chanson, mais aussi au théâtre, ou au cinéma, en tant qu'actrice.[réf. nécessaire]
Actrice de cinéma
En 1969, Annie Cordy tourne Le Passager de la pluie sous la direction de René Clément, où elle dévoile un talent dramatique, qui sera confirmé dans Le Chat (1971) aux côtés de Jean Gabin et Simone Signoret, mais aussi dans Rue Haute (Récompense de la meilleure comédienne en 1976) et Un été après l'autre (1989).
Tout au long de sa carrière, elle tourne dans une quarantaine de films, auxquels elle se consacre à plein temps dès les années 2010.
Actrice de télévision
Durant sa carrière, Annie Cordy tourne dans une trentaine de séries télévisées et téléfilms.
En 1981, elle devient la première héroïne récurrente dans une série télévisée en interprétant Madame S.O.S., et tient le rôle principal dans plusieurs autres téléfilms au cours de la décennie.
Elle a été de nombreuses fois invitée du Gala de l'Union des artistes, comme en 1953, 1959, 1970 ou 1981. Également, elle chante lors de la soirée électorale de 1969, ainsi que celle de 1974.
Elle anime et participe en tant qu'artiste, en février et , à l'émission de variétés Annie sur la 2, diffusée sur la seconde chaîne de l'ORTF (ORTF 2).
En 2006, elle est la voix off de Moi, Belgique, une série de documentaires sur l'histoire de la Belgique diffusée en première partie de soirée sur la RTBF[18].
Durant sa carrière, Annie Cordy a prêté son image à plusieurs marques pour de la publicité. Les canapés-lits Beka sont les premiers à faire appel à elle[19]. En 1958, elle devient ambassadrice de la bière à table, notamment avec la Triple Piedboeuf, où un livret est même édité.
L'une de ses principales publicités est celle pour les parapluies Aka, en 1960, accompagnée de la chanson Mon chouette pépin[20].
Dans les années 1970, elle réitère la publicité pour les bières, avec cette fois-ci la gueuze de la brasserie Belle-Vue. En 1975, elle prête son image aux robots ménagers Steca.
Le , dans TV Magazine, elle vante aux lecteurs les mérites de la cure « Vitaélix » un « élixir de jouvence » censé redonner de l'énergie aux organismes affaiblis.
Au moment de la création du club de football parisien en 1970, elle participe avec d'autres personnalités au lancement de souscription des supporters, organisé par Europe 1 dans les rues de Paris. Devenant ainsi « Marraine du club », elle enregistre le premier hymne du PSG, Allez Paris !, en 1971[22],[23].
Années 1990-2020
Le , Annie Cordy perd son mari François-Henri Bruno[24]. Le début des années 1990 s'annonce difficile, mais la chanteuse retrouvera le sourire par le travail et la scène.
En 1998, elle fête son 70e anniversaire et ses 50 ans de carrière sur la scène de l'Olympia, et publie ses mémoires sous le titre Nini la Chance. Elle effectue plusieurs apparitions remarquées à la télévision, notamment avec Michaël Youn dans Morning Live sur M6, où elle chante Stach Stach avec les Bratisla Boys, et dans un sketch de l'émission des Frères Taloche.
Au début des années 2000, elle revient dans le domaine de la publicité en devenant l'égérie des produits à l'eau de javel La Croix, dans un spot publicitaire[25].
Elle repart en 2003 sur les routes avec son spectacle Que du bonheur !, qui connaît un grand succès durant trois années, puis entame deux nouvelles pièces de théâtre, Lily et Lily (2006) et Laissez-moi sortir[26] (2009) avec lesquelles elle part en tournée.
À partir de 2008, elle participe avec d'autres chanteurs des années 1960 à 1980 aux saisons 3, 6 et 8 de la tournée Âge tendre et tête de bois.
En , elle participe à l'album de Thierry Gali Il était une fois, en soutien de l'action de l'Unicef[27], ainsi que, un an plus tard, au single caritatif Je reprends ma route en faveur de l'association Les Voix de l'enfant[28].
Son dernier album de chansons originales paraît en novembre : Ça me plaît… Pourvu que ça vous plaise[29], suivi d'une tournée en 2013 : Cordy et ses Gus[30].
Le , est publié un album composé de chansons de Noël, Annie Cordy chante Noël. Elle cessera par la suite de publier des disques. La même année, elle enregistre le titre Histoire d'amours, pour l'association Le Refuge, qui a créé un collectif de 200 artistes, Les Funambules.
Le sort le film Les Souvenirs, de Jean-Paul Rouve, où Annie Cordy tient le rôle principal, aux côtés de Mathieu Spinosi, Michel Blanc, Chantal Lauby et Audrey Lamy. Les critiques sont unanimes pour souligner la performance de la chanteuse[31]. Elle apparaît dans beaucoup d'émissions à l'occasion de la sortie du film et de ses 70 ans de carrière. France 2 lui consacre un prime-time, C'est votre vie !, présenté par Stéphane Bern. Le sort l'album Joyeux anniversaire M'sieur Dutronc, hommage à Jacques Dutronc, avec la participation d'Annie Cordy. Elle enregistre la même année, en duo avec Cyrille Gallais, une reprise de L'Indifférence de Gilbert Bécaud, ainsi qu'un duo avec le directeur de cabaret Michou intitulé 85 % d'amour et 60 ans de cabaret à l'occasion du 85e anniversaire et des 60 ans du cabaret de ce dernier. Elle tourne également le film Le Cancre, de et avec Paul Vecchiali, Catherine Deneuve et Mathieu Amalric, projeté au festival de Cannes.
En 2019, à 91 ans, Annie Cordy reçoit le prix d'interprétation au festival international Entr'2 Marches organisé parallèlement au Festival de Cannes pour sa performance dans le court-métrage Les Jouvencelles de Delphine Corrard[34],[35].
Mort
Annie Cordy meurt à l'âge de 92 ans le , à son domicile de Vallauris[1], dans les hauteurs de Cannes, d'un malaise cardiaque[36]. Sa nièce, Michèle Lebon, dite Mimi, qui vivait avec elle, a prévenu les pompiers aux alentours de 18 heures, mais ils ne réussissent pas à la réanimer[37].
De nombreuses personnalités du cinéma, de la musique et du monde politique lui rendent hommage[38].
Ses obsèques se déroulent le à Cannes, suivies de l'inhumation dans le caveau familial au cimetière Abadie annexe de cette même commune[39],[40].
Hommages
Le , à la suite d'une consultation publique, le plus long tunnel de Belgique, précédemment nommé « Tunnel Léopold II », prend le nom de « Tunnel Annie Cordy » en hommage à la chanteuse six mois après sa mort. Cette décision se justifie par la volonté de féminiser les noms d'ouvrages publics[41],[42].
Numéro un Annie Cordy, le : Joe Dassin, Dave, Michel Drucker, Enrico Macias, Dany Saval, Sacha Distel (invités qui ont fait des duos lors de l'émission)
Numéro un Annie Cordy, le : Poivre et sel, Renaud (invités qui ont fait des duos lors de l'émission)
Annie Cordy est anoblie en Belgique le , date des lettres patentes accordant à Léonie Cooreman « concession de noblesse personnelle avec le titre personnel de baronne ».
Ses armoiries dessinées par Fernand Brose[82], se blasonnent ainsi : Un écu en losange, coupé de gueules et de sable, chargé d'un épi de blé d'or feuillé de deux pièces, accompagné de deux masques de la commedia dell'arte, celui à dextre riant posé en bande, et celui à senestre pleurant, posé en barre. L'écu sommé d'une couronne de baronne et supporté par deux lions d'or, lampassés de gueules. Devise : « LA PASSION FAIT LA FORCE », en lettres d'or sur un listel de sable[83].
Selon l'artiste, l'épi de blé représente son père (coor signifiant « blé » en flamand), les lions représentent sa mère (leeuw signifiant « lion » en flamand) et sont au nombre de deux, car c'était une femme très énergique. Enfin, les masques de la commedia dell'arte représentent son métier d'artiste[84].
En 2004, Annie Cordy est faite citoyenne d'honneur de la Ville de Bruxelles[87].
À l'occasion de ses 90 ans, Bruxelles lui rend hommage lors de l'édition 2018 de l'Ommegang, début juillet, en donnant son nom à un lieu célèbre de la ville, ainsi qu'en dévoilant une fresque à son effigie[88]. Le parc attenant à l'ancienne gare de Laeken devient le parc Annie Cordy le [33].
↑20 Minutes avec AFP, « Mort d'Annie Cordy : 500 personnes font leurs adieux à Tata Yoyo pour les obsèques de la chanteuse », 20 minutes, (lire en ligne, consulté le ).