La peinture belge de 1830 à 1914 est l'ensemble de la production picturale par les artistes belges depuis l'indépendance politique et territoriale en 1830, et jusqu'à la veille de la Première Guerre mondiale.
La fin du XIXe siècle voit apparaître en Europe un foisonnement de mouvements et cercles artistiques dont le point commun est de se démarquer des académies et de rendre visibles les artistes moins conformistes, en organisant des expositions. La Belgique joue un rôle important dans cette activité intense de cercles, associations et mouvements de peinture.
L'Académie royale des beaux-arts de Gand est fondée entre 1748 et 1751 en tant qu'école privée, au domicile du peintre Philips Karel Marissal (1698-1770)[3]. Elle devient « académie royale » en 1771[4].
La Société royale d'encouragement des Beaux-Arts fondée en 1788, crée un Salon à partir de 1792. Grâce à ce Salon, le musée des Beaux-Arts de Gand s'enrichit régulièrement d'œuvres qu'il y achète[5],[4].
L'Académie devient « royale » en 1835, sous la direction du peintre néo-classiqueFrançois-Joseph Navez qui ouvre une classe de peinture et donne une impulsion à la classe de sculpture[6].
Le Salon de 1851 marque une étape décisive dans la vie artistique belge par l'invitation de nombreux artistes étrangers, en particulier français[7].
Le 2 janvier 1835, le Conseil de Régence de la Ville de Liège décide de réorganiser l'école de dessin sous le nom d'Académie des Beaux-arts.
Mons
L'Académie royale de dessin, de peinture, de sculpture et d'architecture est instituée en 1781 à Mons par les États du Hainaut et les magistrats de la ville. Le décret du 24 septembre 1789 met cet établissement sur le même pied que ceux de Flandre et du Brabant[8]. L'empereur Joseph II lui accorde le titre d' « Académie royale de dessin, de peinture et d'architecture ».
Parmi les disciplines enseignées, on trouve la peinture, l'aquarelle et le dessin et la gravure. L'école s'établit rue de Nimy 106 à Mons.
Le système triennal
Les expositions périodiques d'artistes vivants de Bruxelles, d'Anvers et de Gand sont les seules à revendiquer un caractère national et ont une plus grande ampleur du fait de leur inscription au sein du système triennal, mis en place en 1813 et fixant leur alternance[9].
Tous les trois ans, à l'occasion des Salons triennaux des Beaux-Arts de Bruxelles est attribué le prix Godecharle institué en 1878 et qui octroie des bourses pour trois ans, permettant des voyages à l'étranger pour les artistes.
Les cercles littéraires et les journaux
Le cercle Les Joyeux est fondé le par une vingtaine d'amis, dont l'écrivain Charles De Coster est un des plus connus[10]. Il compte aussi parmi ses membres le compositeur Léon Jouret. Par la suite des personnalités comme Félicien Rops rejoignent le cercle[11]. Ils constituent le vivier de l'équipe rédactionnelle du journal Uylenspiegel, le Journal des ébats artistiques et littéraires, un hebdomadaire qui parait à Bruxelles de 1856 à 1863 et dont la création bouscule le conformisme de l'époque. Ce cercle est très proche de la Société des Agathopèdes.
Le peintre Louis Dubois contribue également à la revue l'Art Libre où il adopte des positions théoriques[7] et devient le défenseur de Courbet sous le pseudonyme de Hout. Camille Van Camp en sera un des animateurs.
En 1877, le poète et peintre Théodore Hannon devient directeur de la revue bruxelloise L’Artiste[13],[14].
Le peintre réalisteCourbet (1819-1877) a pu admirer en Belgique les tableaux de Rubens à l'été 1846, alors qu'il était invité par le marchand néerlandais Hendrik Jan van Wisselingh (1816-1884), qui lui avait acheté deux tableaux dont Le Sculpteur.
Il y retourne l'année suivante d'abord en compagnie de Jules Champfleury, le futur co-cofondateur de la revue Réalisme en 1856, puis seul. En 1847, Courbet passe beaucoup de temps dans les brasseries pour se consoler du refus de toutes ses toiles au Salon de Paris[16].
Il expose pour la première fois au Salon de Bruxelles de 1851[7] et y séjourne en septembre de la même année. Félicien Rops et Charles De Groux le rencontrent à plusieurs reprises lors de ses expositions en Belgique, en Allemagne et aux Pays-Bas. Son influence est manifeste dans les choix esthétiques posés par de Groux dès 1853[17].
De nouveau à Bruxelles dans les années 1860, Courbet s'y constitue un réseau d'acheteurs[18].
Ces artistes condamnent toute méthode académique car, à leurs yeux, elle éloigne l'artiste de sa véritable vocation. Auguste Oleffe qui deviendra une figure marquante de Labeur, est également le centre de ce groupe de peintres qui compte environ cinquante membres. C'est dans cet atelier que les bases de ce qui deviendra le fauvisme brabançon ont été posées[19].
L'association est active jusqu'après la Première Guerre mondiale[19].
Elle est animée à Bruxelles par le peintre Louis Dubois, fervent adepte de la « Nouvelle école », et porte-parole du réalisme, en réaction contre la peinture officielle[7]. Il s'agit pour ces peintres de reproduire la réalité de manière objective, sans inclure d'éléments imaginaires ou symboliques. Ils visent à rompre avec les sujets historiques et poétiques propres à l'académisme[21].
Pour le Salon de Bruxelles de 1869, vingt-et-unième édition de ce Salon, installé dans les serres de l'ancien Jardin Botanique, la Société libre des beaux-arts, s'associe avec le Cercle artistique et littéraire de Bruxelles pour proposer une liste de candidats. Cette alliance semble constituer une réussite[24]. Les médailles distribuées sont très favorables à la jeune école et aux réalistes, puisque parmi les treize peintres médaillés, figurent six artistes progressistes dont Louis Artan, Constantin Meunier, Charles Hermans et Gustave Courbet. La récente École de Tervueren est déjà bien représentée.
Beaucoup d'entre eux se retrouvent dans la Colonie d'Anseremme. Aucun lien structurel ne les lie, hormis leur passion pour l'art et les jeux nautiques[25] qui les rassemble à l'auberge Au repos des Artistes dans le village pittoresque d'Anseremme, en bord de Meuse, au sud de Dinant[26].
La Société libre organise des expositions jusqu'en 1876[24]. Certains membres rejoignent ensuite La Chrysalide ou le Groupe des XX.
Il réunit ses amis les plus motivés de la Société libre des beaux-arts et fonde la Société internationale des aquafortistes le . Parmi les autres membres fondateurs on retrouve Louis Artan de Saint-Martin, Eugène Smits et Constantin Meunier.
L'Essor est une continuité du « Cercle des anciens élèves et élèves des académies des beaux-arts de Bruxelles », créé en 1876. Le Cercle modifie son nom en L'Essor en et n'a plus aucun lien avec l'Académie. La devise de L'Essor est « un art unique, une vie unique » et met donc l’accent sur le lien qui doit unir l’Art à la Vie. Les fondateurs sont perçus comme progressistes et veulent se rebeller contre le Cercle artistique et littéraire de Bruxelles, bourgeois et conservateur.
Le Groupe des XX (ou Les XX) fondé en 1883, émane d'une scission du cercle L'Essor jugé trop conformiste. Octave Maus est nommé secrétaire[7]. Les membres du groupe des XX sont appelés « vingtistes ». Ils organisent des Salons annuels dans les locaux des musées nationaux[33].
La dissolution est décidée à la majorité en 1893 suite à la proposition de Maus « les cercles d'avant garde ne doivent pas durer trop longtemps sous peine de déchoir ou de reculer ». Ensor tente vainement de s'opposer à cette décision[34]. Le groupe est perpétué après 1894 par La Libre Esthétique[35].
Les premières réunions ont eu lieu en . Le siège social est situé à la taverne Guillaume, place du Musée, à Bruxelles. Ils organisent des Salons et des conférences. L'un des conférenciers est le « gourou » du symbolisme, Sâr Péladan. L'association sera dissoute en 1939.
En 1893, Octave Maus après dix ans du Groupe des XX, fonde La Libre Esthétique. Les artistes sont écartés de la gestion, ce qui permet d'éviter les rivalités, jusqu'en 1914[7]. Ce cercle prône une confrontation très large de toutes les disciplines artistiques et organise des expositions annuelles[40].
Elle regroupe des artistes, adeptes de la peinture lumineuse. Émile Claus conseille à Rodolphe De Saegher, un de ses disciples, avocat de profession inscrit au barreau de Gand, de susciter ce regroupement en vue d'organiser annuellement un salon qui ne dépende pas des jurys officiels[42].
Au salon de La Libre Esthétique de 1905, Claus et Heymans sont, avec Ensor, les invités vedettes de la section belge, qui se présente collectivement sous le nom de Vie et Lumière.
Les mouvements artistiques
Le réalisme
Le peintre Alfred Stevens, frère du marchand d'art Arthur Stevens, a fait l'essentiel de sa carrière à Paris mais a beaucoup contribué aux échanges artistiques avec la Belgique.
Quand Boulenger participe au Salon de Bruxelles de 1866 avec Jules Raeymaekers, il fait imprimer à la suite de son nom, dans le catalogue, la mention « École de Tervueren »[45]. Bien qu'il fût ironisé sur ce groupe d'artistes, la modernité picturale des œuvres fut bientôt reconnue dans les différents Salons.
L'École de Laethem-Saint-Martin 1870
À partir des années 1870-1880, les jeunes peintres de Gand passés par l'Académie royale des beaux-arts, se regroupent à Laethem-Saint-Martin et forment une communauté pérenne. Victor Horta, qui révolutionne l'architecture moderne, est issu de cette école.
Le Symbolisme 1880
On considère généralement que le symbolisme désigne une partie de la production artistique franco-belge puis européenne entre 1880 et 1914, avec un premier manifeste en 1886, et une apogée dans les années 1890. Il se développe d'abord en littérature dans les années 1880, puis en peinture, au théâtre et en musique dans les années 1890[46],[47].
L'Art nouveau naît en Belgique en 1893, lorsque Victor Horta construit l'hôtel Tassel. C'est une réaction à l'architecture éclectique en Belgique. Il s'impose non seulement en architecture, mais aussi dans toutes les disciplines des arts décoratifs belges : sculpture, vitrail, sgraffite, céramique, mobilier, papier-peint, lithographie, orfèvrerie, bijouterie… Il influence fortement la France, l'Allemagne, les Pays-Bas et la Sécession viennoise.
D'emblée émergent deux courants différents : la tendance « Art nouveau floral » initiée par Victor Horta et la tendance « Art nouveau géométrique » initiée par Paul Hankar pour l'architecture et Gustave Serrurier-Bovy pour les arts décoratifs, caractérisée par une décoration géométrique et abstraite, plus sobre, mais tellement plus moderne et qui mènera à l'Art déco.
Dans le contexte belge, le terme luminisme doit être compris comme la fusion de deux tendances : d'une part, l'influence presque simultanée de l'impressionnisme français et du néo-impressionnisme et d'autre part, la perpétuation d'une tradition réaliste propre à l'art belge.
En 1912, le peintre Rik Wouters signe un contrat d'exclusivité pour une durée de dix ans avec la Galerie Georges Giroux qui lui verse une rente mensuelle en échange de la moitié du produit de la vente de ses œuvres[52]. Il y expose avec Ramah (Henri Ramaeker), Ferdinand Schirren et Pierre Bonnard, peintre français membre du groupe des nabis, du au . Cela lui apporte la consécration[53].
L'expressionnisme est la projection d'une subjectivité qui tend à déformer la réalité pour inspirer au spectateur une réaction émotionnelle. Cela correspond à une vision pessimiste de l'époque, hantée par la menace de la Première Guerre mondiale et de la crise sociale et spirituelle lié à l'industrialisation[56]. Les œuvres expressionnistes mettent souvent en scène des symboles, influencées par la psychanalyse naissante et les recherches du symbolisme.
↑(en) Stephen Duffy et Jo Hedley, The Wallace Collection’s Pictures : A complete catalogue, Londres, Unicorn Press and Lindsay Fine art, , 515 p. (ISBN0-906290-38-4), p. 418
↑ ab et cHenri Trianon, « Recherches sur l'art contemporain, état de la peinture en Belgique », La Revue indépendante, vol. 9, , p. 396-421 (lire en ligne, consulté le ).
↑ a et bProsper Claeys, Les expositions d'art à Grand, Gand, Société royale pour l'encouragement des beaux-arts à Gand, , 115 p. (lire en ligne), p. 6-13
↑ a et b[SREBA 1888] Société royale d'encouragement des beaux-arts, Salon triennal : exposé administratif et tirage de la tombola, Anvers, , 23 p. (lire en ligne), p. 2
↑« La Société libre des Beaux-Arts et les stratégies d'émergence de l'artiste indépendant », dans Denis Laoureux, Ségolène Le Men, et al., La Société libre des Beaux-Arts (1868-1876) : D’Artan à Whistler, Namur, Musée provincial Félicien Rops, 1993, p. 91-101
↑Laurence Brogniez et Tatiana Debroux, « Une exposition à l'échelle de la ville », Contextes, vol. 19, (lire en ligne, consulté le )
↑Francine-Claire Legrand, Gisèle Ollinger-Zinque et Danielle Derrey-Capon, James Ensor précurseur de l'art moderne, Collection Références, éditions Renaissance du livre,, , 144 p., p. 48-49
↑Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Les XX - La Libre Esthétique : Honderd jaar later - Cent ans après, Bruxelles : Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, 1993
↑(en) Brendan Cole, Jean Delville : Art between Nature and the Absolute, Cambridge Scholars Publishing, , 520 p. (ISBN9781443870979, lire en ligne), p. 80
↑« Petite chronique », L'Art moderne, vol. 11, no 6, , p. 49 (lire en ligne, consulté le ).
↑« Les XIII », La Nation, no 42, , p. 2 (lire en ligne, consulté le ).
↑Pierre Sanchez, Le Salon des "XX" et de La Libre Esthétique. Répertoire des exposants et liste de leurs œuvres (Bruxelles 1884-1914), Dijon, L’Échelle de Jacob, , 415 p. (ISBN9782359680331 et 2359680331, OCLC1249903483).
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