Un nombre irrationnel est un nombre réel qui n'est pas rationnel, c'est-à-dire qu'il ne peut pas s'écrire sous la forme d'une fractiona/b, où a et b sont deux entiers relatifs (avec b non nul). Les nombres irrationnels peuvent être caractérisés de manière équivalente comme étant les nombres réels dont le développement décimal n'est pas périodique[N 1] ou dont le développement en fraction continue est infini.
L'irrationalité de π et celle de e ont été établies bien plus tard, au XVIIIe siècle ; ce sont les premiers nombres transcendants dont on a prouvé l'irrationalité. Il a de plus été montré au XIXe siècle que presque tous les nombres réels sont irrationnels, et même transcendants. En 2018, on ignore le statut de plusieurs constantes importantes telle que la constante d'Euler-Mascheroni.
Histoire
Les travaux antiques les plus connus concernant les irrationnels ont été produits dans le monde grec[1].
Antiquité grecque
L'historiographie a longtemps décomposé l'étude de l'irrationalité en trois grandes étapes : la découverte, sans doute par un pythagoricien[2], d'un cas particulier de grandeurs non commensurables, puis l'établissement de l'irrationalité de quelques exemples analogues et enfin, l'étude systématique de celle-ci, notamment par Euclide. Il n'est cependant pas aisé de reconstituer l'enchaînement précis des différentes phases, car tous les textes de l'époque ne sont pas connus et ceux qui le sont ont fait l'objet de controverses, concernant notamment leur interprétation.
Vocabulaire employé
L'une des difficultés de l'étude des textes antiques traitant d'irrationalité réside dans le fait que les termes employés pour ce faire ainsi que leur sens varient selon les époques, et que certains peuvent apparaître conjointement dans un même texte. En grec ancien, le concept d'irrationalité peut ainsi être représenté par les mots suivants[3] :
ἂρρητος / arrêtos : inexprimable ;
ἀσύμμετρος / asymmetros : incommensurable, ce terme pouvant être précisé :
μήκει ἀσύμμετρος / mêkei asymmetros : incommensurable en longueur ;
σύμμετρος δυνάμει / symmetros dynamei : commensurable en carré ;
ἄλογος / alogos : littéralement qui ne peut former de rapport ; c'est le plus proche du terme moderne irrationnel.
De tous ces termes, seul ἂρρητος n'apparaît pas dans le livre X des Éléments d'Euclide[3]. En revanche, le mot ῥητος (qui d'un point de vue strictement lexical est le contraire du mot ἂρρητος) est employé comme le contraire du mot ἄλογος signifiant irrationnel ; sa définition inclut cependant le concept σύμμετρος δυνάμει (commensurable en carré)[4] : le nombre √2 serait donc « rationnel » selon cette définition, ce qui n'est pas le cas dans des textes plus anciens comme ceux de Platon[3]. Il y a donc eu un glissement de sens entre les époques des deux auteurs, et la notion moderne d'irrationalité ne se superpose pas parfaitement à celle d'Euclide. De plus, il n'existe pas pour les Grecs de nombre irrationnel, mais des couples de grandeurs telles que la première n'est pas un multiple rationnel de la seconde[5].
La compréhension des textes est rendue difficile également par l'utilisation de termes techniques traduisant des concepts n'ayant pas d'équivalent dans les langues actuelles. Par exemple, le nom δύναμις / dynamis signifie « puissance » dans la langue courante, mais cette acception n'a pas de sens dans les textes mathématiques antiques. Il a souvent été traduit par « racine carrée » en raison du contexte dans lequel il est employé. Cependant, son sens véritable, probablement emprunté à la finance où il exprime la valeur d'une monnaie, est plutôt la désignation d'un carré dont l'aire est égale à celle d'une surface déjà identifiée[3] ; ainsi, le δύναμις d'un rectangle de longueur 2 et de largeur 1 est un carré d'aire 2. Ce terme, attesté dès l'époque d'Hippocrate de Chios, a introduit de nombreux contresens dans l'interprétation de plusieurs textes, dont le Théétète de Platon[3].
Découverte des irrationnels
La date à laquelle la notion d'irrationalité a été découverte par les Grecs n'est pas connue avec certitude : elle est généralement située entre le début du Ve siècle av. J.-C. et le premier quart du IVe siècle av. J.-C.[3]. Elle est en tout cas antérieure au livre de Démocrite intitulé Des Nombres irrationnels et des Solides, qui date de cette période.
Contrairement à une idée reçue, rien n'indique avec certitude que la découverte de l'incommensurabilité provienne de l'étude de la diagonale et de l'un des côtés d'un carré[6], propriété équivalente à l'irrationalité de √2. La découverte est parfois attribuée au mathématicien Hippase de Métaponte pour ses travaux sur la section d'extrême et de moyenne raison, maintenant appelée nombre d'or, qui est également le rapport de la longueur de la diagonale d'un pentagone régulier sur celle d'un de ses côtés[7]. Il est également possible que la notion d'irrationalité ait été mise à jour par l'étude du problème arithmétique de la recherche d'un entier qui soit à la fois un carré parfait et le double d'un autre carré parfait[3] ; l'insolubilité de ce problème est en effet équivalente à l'irrationalité de √2. Si la découverte en elle-même reste entourée de mystère, l'exemple le plus connu chez les intellectuels de l'époque de Platon est celui de l'incommensurabilité de la diagonale et du côté d'un carré[3].
La nature exacte des premières grandeurs non commensurables découvertes n'est pas connue, et la manière dont cette non-commensurabilité a été établie ne l'est pas plus et plusieurs
idées de démonstration ont été imaginées. L'une d'elles repose sur le principe du pair et de l'impair[8],[9], elle est notamment citée par Aristote[10]. D'autres reconstitutions des preuves antiques sont envisagées : certaines ont recours à une descente infinie, d'autres à un algorithme qu'en termes modernes on apparenterait aux fractions continues. Cette dernière technique serait héritée des cultures de Mésopotamie[11].
Étude ultérieure des irrationnels
À la suite de la découverte d'un cas particulier d'irrationalité, il y a longtemps eu consensus pour affirmer que l'étude des grandeurs incommensurables s'était poursuivie par l'établissement par Théodore de Cyrène d'autres exemples se ramenant aux nombres √n (pour n entier non carré compris entre 3 et 17)[12]. Cette supposition a donné lieu à des recherches concernant la méthode utilisée pour ce faire, et les raisons qui ont empêché Théodore de Cyrène d'aller plus loin que √17[13] ; il est cependant probable qu'elle soit erronée[3]. En effet, elle résulte d'un passage du Théétète, mais le texte de Platon ne mentionne pas de démonstration et n'indique donc pas que Théodore en aurait produit une[3]. Une autre hypothèse est que les premières preuves d'irrationalité reposent essentiellement sur la notion de parité, ce qui ne permet pas de montrer l'irrationalité de √17[14].
Il est difficile, en l'état actuel des connaissances, de proposer une chronologie précise des débuts de l'étude grecque de l'incommensurabilité[3]. Le livre X des Éléments, écrit vers -300, présente une classification des grandeurs irrationnelles ; on ne sait cependant pas de quand datent les propositions qui y sont démontrées, les textes mathématiques antérieurs étant perdus[3].
Débat sur l'existence antique d'une « crise des fondements »
Une légende, plusieurs fois rapportée, indique qu'un pythagoricien, parfois nommé Hippase de Métaponte, périt noyé (jeté à la mer depuis une barque) pour avoir révélé aux profanes l'incommensurabilité[15]. Cette légende indiquerait que la découverte serait bien pythagoricienne et qu'elle aurait fait l'objet d'un tabou[16] ; elle est souvent citée pour accréditer la thèse selon laquelle l'irrationalité aurait posé un problème fondamental aux mathématiciens antiques.
L'existence d'une crise profonde chez les mathématiciens et les philosophes grecs due à la découverte de l'irrationalité a été longtemps admise par les historiens[17], et ce dès les travaux de Paul Tannery en 1887[18], et plus encore dans les premières décennies du XXe siècle[19]. D'autres historiens ont par la suite émis l'hypothèse que la crise engendrée par les irrationnels était plutôt une reconstruction a posteriori par laquelle les mathématiciens du XXe siècle auraient calqué leur crise des fondements sur l'Antiquité, en jugeant les travaux mathématiques grecs à l'aune de concepts mathématiques modernes. Des recherches menées dans la seconde moitié du XXe siècle ont ainsi battu en brèche le concept de « crise antique des fondements »[20].
Moyen-Orient médiéval
Le Moyen Âge voit le développement de l'algèbre au sein des mathématiques arabes, ce qui permet aux nombres irrationnels de devenir des objets de même nature algébrique que les entiers et les nombres rationnels[21].
Les mathématiciens du monde arabo-musulman cessent en effet, contrairement à ceux du monde grec qui les ont précédés, de ne manipuler des grandeurs géométriques que par leurs rapports[22].
Dans son commentaire du livre X des Éléments, le mathématicien persanAl-Mahani étudie et classifie les irrationnels quadratiques et cubiques, en les considérant comme des nombres à part entière bien qu'il utilise également un point de vue géométrique pour les désigner[22].
Il donne en outre une approche algébrique des irrationnels, en expliquant que si l'on additionne ou multiplie un irrationnel et un rationnel (non-nul dans le cas du produit), le résultat est irrationnel[22].
Les mathématiciens arabes ont aussi repris et perfectionné des méthodes d'approximation numérique ; les 16 premières décimales de π sont par exemple trouvées par Al-Kashi grâce à des méthodes géométriques[24].
Époque moderne
Débats sur la nature des nombres irrationnels
« IRRATIONNEL, adject. (Arithm. & Alg.) les nombres irrationnels sont les mêmes que les nombres sourds ou incommensurables. Voyez Incommensurable, Sourd, & Nombre. » « INCOMMENSURABLE, adj. (terme de Géométrie.) il se dit de deux quantités qui n’ont point de mesure commune, quelque petite qu’elle soit, pour mesurer l’une & l’autre. Voyez Commensurable, Sourd & Irrationnel. » « SOURD, adj. en termes d’Arithmétique, signifie un nombre qui ne peut être exprimé, ou bien un nombre qui n’a point de mesure commune avec l’unité. Voyez Nombre. C’est ce qu’on appelle autrement nombre irrationnel ou incommensurable. Voyez Irrationnel & Incommensurable. »
Au XVIe siècle, la communauté mathématique accueille les fractions. Au XVIIe siècle, les mathématiciens emploient de plus en plus fréquemment les fractions décimales et représentent déjà ces nombres avec la notation moderne. La notation décimale permet des calculs numériques sur les nombres irrationnels[25]. Pourtant bien que ceux-ci soient utilisés couramment, le débat sur leur nature n'est pas tranché. Simon Stevin et Isaac Newton considèrent que les irrationnels, appelés à l'époque « nombres sourds », sont des nombres au même titre que les entiers et les rationnels[25] tandis que d'autres comme Blaise Pascal conservent le cadre fourni par les Éléments d'Euclide, dans lequel les irrationnels ne sont pas des nombres[25]. Dans l'Encyclopédie, D'Alembert rend compte des deux positions et prend parti pour l'idée selon laquelle les irrationnels ne sont pas des nombres, mais qu'ils sont approchables par ceux-ci avec une précision aussi fine que l'on veut[25],[26],[27]. Abraham Kästner propose par la suite d'expliquer les propriétés algébriques des nombres irrationnels par celles des rationnels, qu'il peut étendre grâce à la densité des rationnels dans les irrationnels[25].
Méthodes d'approximation numérique
Isaac Newton met au point à la fin du XVIIe siècle un algorithme permettant le calcul numérique de racines de polynômes, a priori irrationnelles[N 3]. Cet algorithme, connu depuis sous le nom de méthode de Newton, a ensuite été adapté pour calculer les zéros de fonctions non polynomiales.
Une amélioration de cette formule par Jurij Vega lui permet en 1789 de calculer π avec une précision de 126 décimales[N 4].
D'autres formules permettant d'exprimer ont été exhibées au XVIIIe siècle, notamment la résolution par Euler du problème de Bâle qui donne une identité, peu utile pour un calcul pratique, reliant π et la série des inverses des carrés des entiers[28] :
.
Un autre exemple d'identité, lui aussi peu utile pour un calcul pratique, permettant le calcul numérique de π est fourni par la formule de Leibniz, découverte en Europe au XVIIe siècle, mais qui était déjà connue de manière indépendante en Inde depuis deux siècles par l'école du Kerala[N 5] :
Les fractions continues (dues à Cataldi en 1613[30]), étroitement liées aux nombres irrationnels, sont prises en considération par Euler, qui montre ainsi[N 7] notamment, en 1737, l'irrationalité de e et de e2[31].
Lambert démontre en 1761 que π n'est pas rationnel. Pour cela, il montre que la tangente et la tangente hyperbolique de tout rationnel non nul sont des irrationnels[31], en les approchant par des suites de rationnels issues de fractions continues généralisées particulières[N 8]. Il conjecture par la suite la transcendance de π et e, mais ne remarque pas que sa méthode fournit une démonstration que π2 est lui aussi irrationnel[N 9]. Cette constatation est faite plus tard par Legendre[32],[33].
Lambert montre également que l'exponentielle et le logarithme de tout rationnel non nul (et également différent de 1 dans le cas du logarithme) est un irrationnel[25].
Jusqu'au XIXe siècle, l'existence et les propriétés des nombres irrationnels sont admises sans qu'en soit proposée de définition rigoureuse. En effet — contrairement aux rationnels, qu'il est facile de construire algébriquement à partir des entiers — la notion de nombre réel est encore mal définie au début de la seconde moitié du XIXe siècle. L'une des premières tentatives en ce sens remonte aux travaux de Bernard Bolzano dans la première moitié du XIXe siècle, mais ces travaux sont peu diffusés et n'influencent guère les constructions ultérieures[34]. Karl Weierstrass travaille également sur la formalisation des nombres réels comme limites de rationnels, mais il ne publie rien à ce sujet et cette partie de son œuvre n'est connue que par les notes prises par son étudiant Adolf Hurwitz ayant suivi ses cours ; notes qui ne sont cependant pas publiées avant les années 1880[34].
Méray, puis Cantor et Heine après lui, fondent leur construction sur des propriétés analytiques des suites de rationnels[34] ; les nombres réels y sont les classes d'équivalence des suites de Cauchy de rationnels par la relation d'équivalence telle que deux suites sont en relation si et seulement si leur différence tend vers0. Cette approche revient intuitivement à définir les réels comme les limites de suites de Cauchy rationnelles. On construit ainsi comme un espace complet ;
l'approche de Dedekind, poursuivie par Tannery et Kronecker[35], se fonde elle aussi sur la théorie des ensembles. Un réel y est défini comme une coupure de Dedekind, correspondant intuitivement à l'ensemble des rationnels qui le minorent strictement : ainsi, √2 correspond à l'ensemble des rationnels négatifs ou de carré inférieur à 2.
Étude de sous-ensembles particuliers d'irrationnels
Plusieurs sous-ensembles particuliers de nombres irrationnels sont étudiés durant les XIXe et XXe siècles. Il était connu depuis l'Antiquité que certains nombres irrationnels tels que √2 sont constructibles, mais ce n'est qu'au XIXe siècle que Wantzel caractérise l'ensemble des nombres constructibles[N 11], qui est le plus petit corps stable par la racine carrée contenant . Cela permet de montrer[N 11] que les problèmes antiques de trisection de l'angle et de duplication du cube sont impossibles à l'aide de la règle et du compas seuls.
À la même période sont aussi étudiés les nombres transcendants, dont les premiers exemples sont exhibés par Liouville en 1844[N 12],[N 13]. Hermite montre en 1873 la transcendance de e[N 14] et en 1882, Lindemann montre celle de π[N 14]. Ce dernier résultat permet de répondre par la négative[N 11] au problème de la quadrature du cercle, qui était ouvert depuis l'Antiquité grecque. Les nombres transcendants sont par ailleurs l'objet du septième problème de Hilbert, qui demande si le nombre ab est transcendant dès que a est algébrique et différent de 0 ou 1 et que b est algébrique et irrationnel. La réponse, affirmative, est apportée en 1934 par le théorème de Gelfond-Schneider.
Le XXe siècle voit également l'étude des nombres univers qui contiennent l'ensemble des séquences de chiffres possibles dans leur développement décimal, ainsi que des nombres normaux qui sont des nombres univers particuliers dans le développement décimal desquels toutes les séquences de chiffres d'une longueur donnée sont équiprobables. Bien que Borel ait prouvé en 1909 que presque tous les nombres irrationnels sont normaux en toute base[N 15], on connaît peu de nombres normaux. Parmi ceux dont la normalité a été établie au moins pour la base 10, on peut citer la constante de Champernowne (qui est même transcendante), ou celle de Copeland-Erdős. De plus il est conjecturé que les nombres √2 (et même tous les nombres algébriques irrationnels[36]), π et e sont normaux mais bien que cela semble vrai expérimentalement[36], cela n'a pu être démontré pour aucun de ces exemples.
Le développement de l'informatique théorique dans les années 1930 a, parallèlement à cela, mené à l'étude des nombres calculables, c'est-à-dire pour lesquels il existe une machine de Turing capable d'en énumérer les décimales ainsi que de quantifier l'erreur d'approximation. L'ensemble des réels calculables contient l'algèbre des périodes, donc tous les nombres algébriques et π, et il est stable par l'exponentielle. En particulier, tous les nombres non calculables sont transcendants et a fortiori irrationnels. Bien que l'ensemble des réels non calculables soit codénombrable, on connait peu de nombres qui en fassent partie. Parmi ceux-ci on trouve par exemple toute limite d'une suite de Specker, dont la définition est liée au problème de l'arrêt.
Informatique et calcul numérique
Avant l'essor de l'informatique à la fin des années 1940, il était extrêmement laborieux de calculer effectivement plus de quelques centaines de décimales d'un nombre irrationnel donné. En 1940, on ne connaissait par exemple que 527 décimales exactes de π, grâce au travail de William Shanks publié en 1873[37],[N 16]. En 1949, l'ordinateur ENIAC en donne 2 037 en 70 h, en utilisant la formule de Machin[37].
Des algorithmes spécifiques sont également conçus pour le calcul de certains nombres en particulier. Dans le cas de π, les premiers algorithmes utilisant des formules proches de la formule de Machin sont ainsi abandonnés au profit d'autres formules plus efficaces, comme celle obtenue par Ramanujan en 1914[37] :
.
Les premiers calculs d'approximations de nombres irrationnels donnaient toutes les décimales de la première jusqu'à une borne plus ou moins élevée, mais on ne savait pas calculer une décimale donnée sans connaître celles qui la précèdent[37]. En 1995, les mathématiciens Simon Plouffe, David H. Bailey et Peter Borwein découvrent la formule BBP, qui permet de calculer tout chiffre du développement de π en base 16 sans avoir à déterminer ceux qui précèdent[37],[N 17]. Avant de découvrir cette formule, ils avaient déjà établi qu'il est possible de calculer séparément tout chiffre du développement binaire du logarithme de 2 grâce à l'égalité[37] :
On démontre de même la caractérisation analogue via le développement dans n'importe quelle base (entière et supérieure ou égale à 2).
Ainsi le calcul du développement d'un nombre rationnel est aisé puisqu'il n'y a qu'un nombre limité de chiffres à calculer pour le caractériser complètement, tandis que le calcul des développements de nombres irrationnels nécessite généralement la mise en œuvre de techniques mathématiques d'autant plus avancées que la précision souhaitée est élevée (voir supra).
Les fractions continues permettent entre autres de caractériser l'irrationalité, d'identifier des types particuliers d'irrationnels, et de fournir de bonnes approximations des irrationnels par des rationnels.
Caractérisation de l'irrationalité à l'aide du développement en fraction continue
Pour tout nombre réel , le caractère fini ou infini de son développement en fraction continue peut être lié à son caractère rationnel ou irrationnel. Plus précisément[41] :
Théorème —
Tout nombre rationnel peut être représenté par une fraction continue simple finie.
Toute fraction continue simple infinie converge vers un nombre irrationnel et tout nombre irrationnel peut être représenté de manière unique par une fraction continue simple infinie.
Théorème de Lagrange[N 18] — Un irrationnel est quadratique si et seulement si son développement en fraction continue est périodique[N 1].
Application à l'approximation des irrationnels
La suite des réduites du développement en fraction continue d'un irrationnel converge vers « rapidement » : toute réduite du développement vérifie [41].
Par exemple, le début du développement en fraction continue de π est [3, 7, 15, 1, 292, …]. À partir de ce début de développement, on trouve comme approximation de π : avec une erreur inférieure à , c'est-à-dire que l'on a au moins 9 décimales exactes.
Il est possible de comparer la précision obtenue en approchant un irrationnel par les premiers termes de son développement en fraction continue ou par les premiers chiffres de son développement décimal.
En effet pour presque tout irrationnel , le théorème de Lochs affirme que les premiers entiers du développement en fraction continue de donnent asymptotiquement décimales exactes.
L'ensemble des nombres rationnels est dense dans celui des réels. Par conséquent, pour tout nombre réel , rationnel ou irrationnel, il existe une suite de nombres rationnels qui converge vers . Cependant, tous les réels ne sont pas aussi facilement approchables les uns que les autres. On peut ainsi définir la mesure d'irrationalité de n'importe quel réel . Il s'agit de la borne supérieure de l'ensemble des réels μ pour lesquels il existe une infinité de couples d'entiers tels que et . Intuitivement, cela signifie que si un réel a une mesure d'irrationalité supérieure à celle d'un réel alors, à dénominateur égal, il est possible d'approcher plus finement que avec un nombre rationnel.
Le théorème suivant permet de différencier un rationnel d'un irrationnel par leur mesure d'irrationalité[42],[43] :
Théorème —
La mesure d'irrationalité de tout nombre rationnel est égale à 1.
La mesure d'irrationalité de tout nombre irrationnel est supérieure ou égale à 2[N 19].
On peut renforcer le second point du théorème : si un réel est irrationnel, l'existence d'une infinité de couples d'entiers tels que et est garantie non seulement pour tout , mais même pour . Cela se déduit par exemple de l'approximation d'un irrationnel par la suite infinie des réduites de sa fraction continue (voir supra), ou du théorème d'approximation de Dirichlet.
Ces théorèmes servent de base à divers résultats permettant de montrer, sous certaines hypothèses, l'irrationalité de la somme d'une série dont le terme général est rationnel et qui converge suffisamment rapidement[44].
Valeurs particulières de mesure d'irrationalité
Tout irrationnel a une mesure supérieure ou égale à 2 ; elle vaut même exactement 2 pour presque tout réel[N 13]. Il n'est cependant pas toujours aisé de la calculer précisément. Elle est tout de même parfois connue ou au moins estimée :
En exploitant le fait que est irrationnel (voir infra) et donc a une mesure d'irrationalité supérieure à 2, on peut montrer que le terme général de la série ne tend pas vers 0 et donc que celle-ci diverge[48];
La nature, convergente ou divergente, de la série n'est pas connue en 2023, mais si elle converge cela impliquerait que la mesure d'irrationalité de est inférieure ou égale à 2,5[49].
Approximations simultanées
La mesure d'irrationalité de tout nombre irrationnel est supérieure ou égale à 2 (voir supra). Par conséquent si l'on se donne un nombre et un nombre irrationnel , il est possible de trouver un entier tel que le produit soit à une distance inférieure à d'un entier[N 21].
On peut en fait trouver un tel entier même si l'on se donne un nombre arbitraire d'irrationnels quelconques à approcher d'un entier avec une erreur arbitrairement petite[42]:
Théorème d'approximation de Dirichlet — Soit des nombres irrationnels et soit . Il existe un entier tels que tous les produits diffèrent d'un entier d'au plus .
Il est possible, avec quelques restrictions, d'étendre ce résultat à l'approximation de nombres quelconques[50] :
Théorème de Kronecker — Soit des nombres quelconques et soit et . Soit des nombres irrationnels ℚ-linéairement indépendants. Alors il existe un entier tel que pour tout , diffère d'un entier d'au plus .
Propriétés de l'ensemble des irrationnels
Propriétés de clôture
L'ensemble ℚ a une structure de corps commutatif, cela permet de déduire des résultats généraux sur l'irrationalité de sommes et de produits impliquant à la fois rationnels et irrationnels.
L'ensemble des irrationnels vérifie par exemple la propriété de clôture suivante : si le carré (ou plus généralement, une puissance entière) d'un réel est un irrationnel, alors ce réel lui-même est irrationnel (par contraposée de la proposition selon laquelle tout produit de rationnels est rationnel). Cela permet, connaissant un nombre irrationnel, d'en construire une infinité d'autres.
On peut aussi, sachant que pour tout nombre irrationnel et tout rationnel , les nombres et sont irrationnels[51], faire agir le groupe projectif linéaire (ou [N 22]) :
Théorème —
Soit un nombre irrationnel. Alors, pour tous rationnels tels que , le réel est irrationnel.
pour tout angle tel que soit irrationnel, les nombres , et sont irrationnels[52], d'après les identités trigonométriques.
En revanche, la somme et le produit de deux irrationnels peuvent être rationnels : par exemple, et .
Un irrationnel (strictement positif) élevé à une puissance irrationnelle peut être rationnel[N 23] ou irrationnel, voire transcendant[N 24]. D'après la sous-section suivante, on a même : pour tout réelx > 0 différent de 1, xy est transcendant pour « presque tous » les réels y (tous sauf un ensemble dénombrable), en particulier pour « presque tout » irrationnel y.
Cardinalité
L'ensemble ℝ\ℚ des irrationnels a la puissance du continu, c'est-à-dire qu'il est en bijection avec ℝ, comme le prouve, au choix, l'un des trois arguments suivants :
Ceci revient à une démonstration par l'absurde : comme ∪ , l'ensemble des rationnels (ℚ) et l'ensemble des irrationnels (ℝ\ℚ ou ℚ’) sont complémentaires en ℝ ; or comme l'ensemble ℚ est dénombrable, si ℝ\ℚ était dénombrable, leur réunion ℝ serait dénombrable[53]. Or, comme Cantor l'a démontré avec son célèbre « argument de la diagonale », ℝ est indénombrable, alors l'un au moins de ses sous-ensembles complémentaires l'est, et « l’ensemble ℝ\ℚ des nombres irrationnels n’est pas dénombrable »[53].
Dans ℝ, les irrationnels forment un Gδ (c'est-à-dire une intersection dénombrable d'ouverts) mais pas un Fσ (c'est-à-dire une union dénombrable de fermés)[N 26]. Autrement dit[N 27] : l'ensemble des points de discontinuité d'une fonction à valeurs réelles peut être égal à ℚ[N 28] mais pas à ℝ\ℚ[54].
Exemples de nombres irrationnels et de preuves d'irrationalité
Prouver qu'un réel est irrationnel, c'est prouver qu'il n'existe aucun couple d'entier tel que , or un résultat d'inexistence sur un cas particulier est généralement bien plus difficile à établir qu'un résultat d'existence[55]. Ainsi même s'il est possible de montrer qu'un réel ne peut pas s'écrire sous la forme où et sont inférieurs à une certaine constante , cela ne suffit pas pour prouver son irrationalité. Par exemple, on sait que si la constante d'Euler-Mascheroni est rationnelle alors ce ne peut être qu'une fraction dont le dénominateur comporte au moins 242 080 chiffres[N 29] mais même si cela conduit à supposer son irrationalité, cela n'en constitue aucunement une preuve. Il existe cependant plusieurs techniques de démonstration qui ont permis de statuer sur l'irrationalité de certains cas particuliers.
Irrationalité de nombres manifestement algébriques
Le nombre √2 est l'un des premiers dont on ait prouvé l'irrationalité. Celle-ci peut en effet être obtenue grâce à des considérations élémentaires de parité[13],[N 30] :
Preuve élémentaire de l'irrationalité de √2
On raisonne par l'absurde. Supposons que soit un nombre rationnel, il existe alors deux entiers et premiers entre eux tels que ce qui est équivalent à dire que . L'entier est donc pair, et par conséquent est pair, ce qui s'écrit où est un entier. Mais alors comme , il s'ensuit que et donc et sont pairs.
et sont donc tous les deux pairs et ne sont donc pas premiers entre eux. On a donc abouti à une contradiction en supposant rationnel. C'est donc un nombre irrationnel.
Propriété des polynômes à coefficients entiers
Lorsqu'un nombre algébrique est irrationnel, le théorème suivant permet souvent de le vérifier :
Les coefficients extrêmes du polynôme, dont le nombre d'or est racine, sont et , qui ne sont divisibles que par . Comme et ne sont pas racines du polynôme, on retrouve ainsi (voir supra), sans même résoudre l'équation du second degré, que est irrationnel.
La racine réelle du polynôme est strictement positive et ne fait pas partie de l'ensemble (car P(3/4) < 0 < P(1)) ; elle est donc irrationnelle.
Le nombre est racine du polynôme [N 11], dont aucun rationnel n'est racine[N 31]. Il est par conséquent algébrique de degré 3, donc irrationnel et même non constructible[N 11] (si bien que pour tout entier relatif , , et sont non constructibles)[N 32].
Corollaire[56] — La racine n-ième d'un entier N > 0 est irrationnelle, sauf si N est la puissance n-ième d'un entier.
Nombre d'or : une seconde preuve
Toute fraction continue simple infinie représente un irrationnel, et si cette fraction continue est périodique alors l'irrationnel est quadratique (voir supra).
La fraction continue la plus simple est celle du nombre d'or, que l'on peut obtenir directement à partir de l'équation :
.
On retrouve ainsi à nouveau que le nombre algébrique est irrationnel.
Théorème — Si un angle en degrés est rationnel et n'est pas un multiple de 30° ni 45°, alors son cosinus, son sinus et sa tangente sont irrationnels[57],[N 34].
Irrationalité de nombres définis par leur développement décimal
Non-périodicité du développement dans une base
Tout rationnel ayant un développement périodique dans toute base, il suffit, pour prouver qu'un réel est irrationnel, de montrer que dans une certaine base, son développement n'est pas périodique. Cela peut parfois être fait directement comme dans le cas du théorème suivant :
On peut en effet montrer que la suite de Prouhet-Thue-Morse est sans cube, c'est-à-dire qu'aucun bloc ne se répète trois fois consécutivement : a fortiori son développement binaire est non-périodique et est donc irrationnelle[N 35].
Recherche de suites de zéros de longueur arbitraire dans le développement
Dans la pratique, la non-périodicité peut être obtenue en établissant l'existence de suites finies de de longueur arbitraire[N 36],[N 37]. En effet si le nombre est périodique il ne peut comporter des séquences de zéros plus longues que la longueur de sa période à moins d'avoir un développement décimal fini.
Une application élémentaire est fournie par le résultat suivant :
En effet, son développement en base n'est pas périodique parce qu'il contient les entiers de la forme pour arbitrairement grand, et donc des suites de finies arbitrairement longues. Ce nombre est en fait même normal et transcendant.
Pour tout entier naturel , d'après le théorème de la progression arithmétique, la suite arithmétique contient une infinité de nombres premiers, donc au moins un. Il existe donc au moins un nombre premier dont l'écriture en base dix contient une succession d'au moins zéros, encadrée par deux chiffres autres que (le second étant ). Le développement décimal de contient ainsi des suites de zéros finies mais arbitrairement longues, ce qui prouve qu'il n'est pas périodique, et donc que n’est pas rationnel.
L'irrationalité de peut également se déduire du résultat plus général, mais plus difficile à démontrer, selon lequel la constante de Copeland-Erdős est un nombre normal en base 10, joint à la propriété élémentaire suivante :
Propriété[N 15] — Tout nombre normal dans au moins une base est irrationnel.
Cela lui permet de montrer que pour tout entier b > 0, le nombre b! e a une partie fractionnaire non nulle donc n'est pas entier, et donc que e n'est pas rationnel[61].
Plus généralement :
la même méthode[62] permet de prouver que pour tout entier x > 0 (et donc aussi pour tout rationnel x ≠ 0), ex est irrationnel ;
pour toute suite bornée de nombres entiers, les nombres réels et ne sont rationnels que si la suite stationne à 0[63].
Il est possible (voir supra) de prouver l'irrationalité d'un réel x en exhibant une suite de rationnels convergeant vers x « suffisamment vite », c'est-à-dire telle que, pour un certain μ > 1, on ait pour tout n. C'est grâce à une telle technique que Roger Apéry a montré en 1978 le résultat suivant, sur l'image de 3 par la fonction ζ de Riemann :
Théorème — Soit et deux suites d'entiers positifs tels qu'au delà d'un certain rang on ait pour tout l'inégalité . Si la série converge vers un nombre rationnel, alors on a pour tout au-delà d'un certain rang : l'inégalité large est en fait une égalité[N 38].
En considérant la suite constante égale à 1, la contraposée de ce théorème permet de prouver l'irrationalité de la somme des inverses des nombres doubles de Mersenne[N 39] mais pas de retrouver l'irrationalité de la série des inverses des nombres de Fermat, et ce bien que son terme général croisse comme une exponentielle double[N 40] ; ce nombre est cependant bien irrationnel (voir infra) et même transcendant, ce qui fut démontré en 1967[65].
Autres séries
La constante d'Erdős-Borwein, obtenue comme la somme de la série des inverses des nombres de Mersenne, et la somme de la série des inverses des nombres de Fermat[66],[N 41] sont irrationnelles. En effet, des suites arbitrairement longues de zéros ont été mises en évidence dans leur développement en base 2. Le raisonnement mis en œuvre pour ce faire est cependant bien plus technique que dans les exemples précédents.
Ivan Niven redémontre par l'absurdece résultat de Lambert, en supposant que avec et entiers et en construisant, à partir de cette hypothèse, une expression qui est égale à un nombre entier tout en pouvant être strictement comprise entre 0 et 1, ce qui est absurde. Supposer que est rationnel conduit donc à une contradiction, et donc est irrationnel.
Démonstration analogue de l'irrationalité de π2
Hardy et Wright, reprenant la méthode de Niven, démontrent de la façon suivante[13],[69] l'irrationalité de π2, qui implique celle de π (voir supra).
Considérons, pour tout entier naturel , la fonction polynomiale définie par . Ses dérivées jusqu'à l'ordre 2n prennent une valeur entière en 0 (donc aussi en 1 par symétrie) et la dérivée suivante est nulle.
Supposons que avec et entiers strictement positifs et posons . D'après ce qui précède, et sont des entiers.
Cependant, sur ]0, 1[, la fonction est continue et strictement comprise entre 0 et donc.
De plus, pour n suffisamment grand, (la série exp(a) est même convergente). L'entier est alors strictement compris entre 0 et 1, ce qui est absurde.
Logarithmes d'entiers
Puisque (à part e0 = 1) toute puissance rationnelle de e est irrationnelle (voir supra), le logarithme népérienln x de tout rationnel positif x ≠ 1 est irrationnel[62]. Le nombre log10 2 est lui aussi irrationnel puisqu'il n'existe pas d'entiers a, b ≠ 0 tels que 2a = 10b ; plus généralement, logn m = ln m/ln n est irrationnel[N 43] pour tous entiers m, n > 1 qui n'ont pas le même ensemble de facteurs premiers[13] (ou encore : le même radical). Par exemple : log10 15 et log2 6 sont irrationnels.
Problèmes ouverts
On ne sait pas si les nombres π + e et π – e sont ou non irrationnels[N 44]. On conjecture cependant que π, e et 1 sont ℚ-linéairement indépendants[N 45].
On ne sait pas plus si 2e, πe, π√2, la constante de Khintchine ou la constante γ d'Euler-Mascheroni sont irrationnels.
On ignore également, pour tout entier impair n > 3, si ζ(n) est irrationnel. En effet, pour les entiers positifs impairs[N 46], seul le cas de ζ(3) est connu grâce au théorème d'Apéry. Cependant, il a été prouvé que ζ prend une valeur irrationnelle pour une infinité de nombres impairs, dont au moins l'un des quatre nombres 5, 7, 9 ou 11[N 47].
De plus, des calculs en haute précision rendent extrêmement vraisemblable l'irrationalité et même la transcendance de tous ces nombres.
↑ ab et cDans tout cet article, « périodique » signifie « périodique à partir d'un certain rang ».
↑Ces propriétés sont énoncées ici avec une formulation moderne, ni π ni les racines carrées n'étant considérés comme des nombres à proprement parler dans l'Antiquité grecque.
↑Les nombres rationnels potentiellement racine d'un polynôme donné sont en nombre fini, et ne nécessitent pas de calcul approché pour être identifiés (voir infra).
↑ a et bEn fait il n'est pas prouvé que la constante γ d'Euler est irrationnelle, mais des calculs numériques poussés laissent penser que c'est bien le cas (voir infra).
↑Le théorème de Hurwitz raffine ce résultat en énonçant que pour tout irrationnel x, il existe une infinité de rationnels p/q tels que et que la constante √5 est optimale : avec n'importe quelle constante plus grande, le théorème est faux pour certains nombres, par exemple le nombre d'or. Pour plus de détails, voir l'article sur le spectre de Lagrange.
↑Plus généralement, les nombres analogues à la constante de Champernowne en base quelconque à une mesure d'irrationalité égale à .
↑Par exemple on détermine un entier tel que , il existe alors deux entiers et tels que et donc d'où le résultat.
↑En restreignant l'action à , on trouve tous les irrationnels équivalents à un irrationnel donné.
↑Par exemple eln 2 = 2 alors que e et ln 2 sont irrationnels (voir infra).
↑Cette preuve est traditionnellement attribuée à Pythagore, bien que l'on ne sache pas si elle est de lui ni s'il s'agit de la première à avoir été proposée (voir supra).
↑Ce théorème a été redémontré par de nombreux auteurs, notamment Niven : voir Théorème de Niven et Niven 1956, corollaire 3.12 et notes, p. 41.
↑De plus, Kurt Mahler a démontré en 1929 que la constante de Prouhet-Thue-Morse est un nombre transcendant[60].
↑Dans le cas de la constante des nombres premiers (voir supra), on aurait pu aussi montrer l'irrationalité de la constante des nombres premiers en utilisant le fait que pour tout entier , les entiers consécutifs sont tous composés.
↑Certains développements non-périodiques peuvent cependant ne pas comporter de séquences de 0 arbitrairement longues. Par exemple le développement binaire de la constante de Thue-Prouhet-Morse (voir supra) étant sans cube, on n'y trouve jamais trois 0 consécutifs.
↑La série des inverses des termes de la suite de Sylvester est un exemple d'une telle série convergeant vers un rationnel, puisqu'elle converge vers 1.
↑Nommée par erreur « Constante de Prévost » par (en) Gérard Michon, « Numerical Constants », sur Numericana, , alors que l'article de Marc Prévost sur ce sujet ne date pas de « vers 1977 » mais de 1998 et contient une généralisation de l'article de Richard André-Jeannin.
↑On sait cependant que l'un au moins de ces deux nombres est irrationnel et même transcendant, puisque leur somme, 2π, l'est ; on sait de même qu'un des deux nombres s = π + e et p = πe est transcendant, car π et e sont racines du polynôme X2 – sX + p.
↑En effet une somme finie de termes rationnels est rationnels(voir supra). Par contraposée, si la série des inverses des nombres premiers jumeaux converge vers un nombre irrationnel, alors elle comporte une infinité de termes non nuls et il y a donc une infinité de nombres premiers jumeaux.
Références
↑Certains historiens ont estimé que les Śulba-Sūtras, des traités difficiles à dater qui auraient été composés entre 800 et 200 av. J.-C., témoigneraient de la connaissance de l'irrationalité dans l'Inde de l'époque ; ils se fondent sur une construction de la diagonale du carré qui peut s'interpréter comme une (bonne) approximation rationnelle de √2, et sur la mention que cette construction n'est pas exacte, voir (en) Bibhutibhusan Datta, The Science Of The Sulba: A Study In Early Hindu Geometry, (lire en ligne), p. 195-202. Mais pour d'autres, il s'agit là de « spéculations injustifiées » qui ignorent tant la vraie signification de l'irrationalité que l'objet pratique des Śulba-Sūtras (en) S. G. Dani, « Geometry in the Śulvasūtras », dans C. S. Seshadri, Studies in the History of Indian Mathematics, Hindustan Book Agency, coll. « Culture And History Of Mathematics », (ISBN978-93-86279-49-1, lire en ligne), p. 9-38.
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↑(en) Thomas Heath, Mathematics in Aristotle [« Les mathématiques chez Aristote »], Oxford, , 310 p. (ISBN978-1-317-38059-7, présentation en ligne), partie III, chap. 1 (« Incommensurability of the diagonal (of a square with its side) »).
↑Voir, pour un exposé des différentes méthodes possibles : Caveing 1998.
↑Sous la forme indiquée ici, la légende est critiquée. Le narrateur principal, Jamblique, est à la fois tardif et imprécis dans ses témoignages. La référence suivante précise que : « Hence, when late writers, like Iamblichus, make ambitious claim for Pythagorean science […], we have occasion for scepticism. », cf. (en) Wilbur Richard Knorr, The Evolution of the Euclidean Elements : A Study of the Theory of Incommensurable Magnitudes and its Significance for Early Greek Geometry, D. Reidel, (lire en ligne), p. 5.
↑Paul Tannery, La Géométrie grecque, comment son histoire nous est parvenue et ce que nous en savons., Paris, Gauthier-Villars, (lire en ligne).
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↑(en) Jacques Sesiano, « Islamic mathematics », dans Helaine Selin, Mathematics Across Cultures: The History of Non-Western Mathematics, Springer, (ISBN1-4020-0260-2, lire en ligne), p. 148.
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↑A. M. Legendre, Éléments de géométrie, Paris, (lire en ligne), « Note IV. Où l'on démontre que le rapport de la circonférence au diametre et son quarré, sont des nombres irrationnels ».
↑Voir cependant (en) Rolf Wallisser, « On Lambert's proof of the irrationality of π », dans Franz Halter-Koch et Robert F. Tichy, Algebraic Number Theory and Diophantine Analysis (Graz, 1998), Berlin, Walter de Gruyer, (lire en ligne), p. 521-530.
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G. H. Hardy et E. M. Wright (trad. de l'anglais par François Sauvageot, préf. Catherine Goldstein), Introduction à la théorie des nombres [« An Introduction to the Theory of Numbers »] [détail de l’édition], particulièrement les chapitres 4 (« Nombres irrationnels »), 9 (« L'écriture décimale des nombres »), 10 (« Fractions continues ») et 11 (« Approximations des irrationnels par des rationnels »).
Éliane Cousquer, La fabuleuse histoire des nombres, Diderot multimédia, coll. « Jardin des sciences », , 259 p. (ISBN2-84352-114-9), chap. 9 (« Des irrationnels aux réels »).
Édouard des Places, « Le passage mathématique de l’Épinomis (990 c 5-991 a 4) et la théorie des irrationnelles », Revue des Études Grecques, t. 48, no 228, , p. 540-550 (lire en ligne)
Árpád Szabó(de) (trad. de l'allemand par Michel Federspiel), L'aube des mathématiques grecques [« Entfaltung der grieschischen Mathematik »], Vrin, (1re éd. 1993), 367 p. (ISBN2-7116-1279-1, lire en ligne), partie III, « L'irrationalité mathématique ».
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