John Hoyer Updike, né le à Reading (Pennsylvanie) et mort le à Beverly Farms (Massachusetts), est un écrivainaméricain, auteur de romans, de nouvelles, de poésie et d'essais critiques sur l'art et la littérature. Après avoir accédé à la notoriété internationale avec son roman Le Centaure en 1963 (National Book Award), il rencontre un très grand succès public et critique avec sa tétralogie sur le personnage de Harry « Rabbit » Angstrom : Cœur de lièvre, Rabbit rattrapé, Rabbit est riche et Rabbit en paix, ces deux derniers volumes ayant chacun reçu le prix Pulitzer. John Updike est l'auteur de vingt-six romans et de centaines de nouvelles, de chroniques et de poèmes, travaux publiés en particulier régulièrement dans le New Yorker et la New York Review of Books, et qui ont donné lieu à plusieurs recueils. Il dépeint l'Amérique des petites villes, protestantes et bourgeoises, et accorde une importance récurrente aux thèmes universels du sexe, de la foi, de la mort, et à leurs entrelacements. Son œuvre abondante et variée, quoique souvent considérée comme inégale, vaut à John Updike d'être considéré comme l'un des écrivains américains les plus importants du XXe siècle.
Biographie et carrière
John Updike est le fils de l'écrivaine Linda Grace Hoyer Updike et de Wesley Russell Updike, professeur de mathématiques dans le secondaire. Il grandit à Shillington jusqu'à l'âge de onze ans, puis à Plowville(en) (comté de Berks)[1]. Là, il commence à s'intéresser à la littérature et au métier même d'écrivain en regardant sa mère au travail : « L'un de mes premiers souvenirs est de la voir à son bureau. Je contemplais le matériel de l'écrivain, le ruban effaceur pour la machine à écrire, les rames de papier vierge. Et je me souviens des enveloppes brunes dans lesquelles les récits étaient envoyés, et dans lesquelles ils revenaient[2]. » Ayant achevé son enseignement secondaire à Shillington en 1950, John Updike entre à l'université Harvard. Il en sort diplômé de premier cyclesumma cum laude en 1954, mais aussi marié (depuis 1953) à Mary Pennington, diplômée de Radcliffe. John Updike aura également dirigé la publication du Harvard Lampoon. Intéressé par l'art, il poursuit ses études à la Ruskin School, à Oxford. Après un an, en 1955, il rentre aux États-Unis où il rejoint l'équipe du New Yorker. Sa fille Elizabeth naît en 1955, suivie de David en 1957, Michael en 1959 et Miranda en 1960[1].
À Ipswich (Massachusetts), où il vit à partir de 1957, John Updike achève ses premières œuvres de fiction, un premier roman qu'il préfère ne pas publier (Home, 1957) et des poèmes et nouvelles. Il publie d'ailleurs d'abord de la poésie (The Carpentered Hen, 1958), avant son premier roman publié, The Poorhouse Fair (Jour de fête à l'hospice, 1959). Le premier volet de la série Rabbit Angstrom, Rabbit, Run (Cœur de lièvre) paraît l'année suivante, et en 1963 la carrière de John Updike est définitivement lancée avec The Centaur (Le Centaure) qui remporte le National Book Award. À 32 ans, il est également élu membre du National Institute of Arts and Letters. En 1968, le scandale causé par la publication de Couples, dont le thème est l'adultère, lui vaut la couverture de Time[3].
John Updike remporte de nouveau le Prix Pulitzer pour le dernier volume de la tétralogie Rabbit, Rabbit at Rest (Rabbit en paix, 1990). Il continue d'explorer de nouveaux terrains en s'essayant notamment à la science-fiction dans Toward the End of Time (Aux confins du temps, 1997). Il garde intacte sa capacité à explorer l'identité américaine comme dans Terrorist publié après le traumatisme des attentats du 11 septembre (Terroriste, 2006). Dans son dernier roman publié, The Widows of Eastwick (Les Veuves d'Eastwick, 2008), il revient après plus de vingt ans aux sorcières d'Eastwick, qui restent l'un de ses principaux succès.
« Je pourrais écrire des pubs pour les déodorants ou des étiquettes pour les bouteilles de ketchup, s'il le fallait. Le miracle qui consiste à transformer des idées en pensées, et des pensées en mots, et de donner vie aux mots par le métal et l'encre d'imprimerie, ne perd jamais de sa force pour moi[7]. »
Sa grande versatilité, son aisance de la critique à la fiction, de la poésie à la prose, de la nouvelle au roman, vaut à John Updike d'être souvent qualifié comme un humaniste, un authentique « homme de lettres », peut-être le seul véritable de son temps[8],[9]. Certains thèmes récurrents sont cependant plus spécifiquement associés à son œuvre.
Peintre du quotidien et de la classe moyenne
Sans doute la partie la plus connue de la production de John Updike, les quatre romans du cycle Rabbit Angstrom traitent de la vie de ce dernier, basketteur à la retraite enfermé dans une vie détestable de vendeur d'automobiles, et dans un mariage dépourvu d'amour. Publiés à intervalles réguliers de dix ans environ, entre 1960 et 1990, les quatre volumes suivent également le personnage à l'époque de l'écriture, à travers trois décennies complètes. Cette tétralogie conçue avec une ambition de cohérence globale[10] traite de la vie de cet américain moyen avec humour et ironie, tout en révélant le profond sens éthique et religieux de son auteur[11]. Updike admettait s'intéresser particulièrement à cet univers : « Mon sujet, c'est la classe moyenne américaine et protestante des petites villes. J'aime le milieu. C'est au milieu que les extrêmes s'entrechoquent, que l'ambiguïté ne cesse de régner[12]. »
Ces thèmes de la vie quotidienne de la classe moyenne, dans les quartiers résidentiels de l'Amérique contemporaine, se retrouvent dans la plupart des autres romans de John Updike, et dans nombre de ses nouvelles, que ce soit avec l'adultère (Les Quatre faces d'une histoire, Épouse-moi, Couples et plus récemment Villages) ou l'évocation très provinciale (et souvent partiellement autobiographique) de la Pennsylvanie (Les Plumes du pigeon, Le Centaure, La Ferme).
Autre personnage récurrent, Henry Bech est à la fois l'alter ego et l'opposé de John Updike. Au centre d'un recueil de nouvelles publié en 1970 (Bech voyage), cet écrivain juif, solitaire, vaniteux, atteint de blocage chronique, est également au centre des romans Bech est de retour (1984) et Bech aux abois (2002). L'influence de Vladimir Nabokov, fréquente chez Updike, est la plus évidente en ce qui concerne Bech, apparenté au Humbert Humbert de Lolita[13].
Enfin, le thème de la religion est présent dans beaucoup de ses récits, dès Jour de fête à l'hospice, son premier roman (1959). L'exemple le plus remarquable demeure cependant Dans la splendeur des lis (1996), saga familiale s'étendant sur quatre générations et quatre-vingts ans, nourrie de questionnements religieux, spirituels et existentiels sur l'individu et la société contemporaine, qui en font l'un de ses romans les plus ambitieux[14].
Autres explorations romanesques
Régulièrement, John Updike a montré le besoin de sortir de ce rôle de chroniqueur de la vie quotidienne américaine. Une première fois dès 1975 dans Un mois de dimanches qui raconte sur un ton volontairement provocateur les penchants charnels d'un prêtre, un récit qui rappelle La Lettre écarlate de Nathaniel Hawthorne, une référence retrouvée dans Ce que pensait Roger (1986) et S (1988), charge contre le féminisme.
Comme on le voit enfin (Brésil, Gertrude et Claudius), le recyclage de récits mythiques ou universels est un procédé fréquent chez Updike, que l'on remarque dès Le Centaure (1963).
Poésie
Peut-être la partie la moins connue de son œuvre, la poésie de John Updike traite des mêmes thèmes importants que ses romans, comme l'enfance, la religion ou la mort[17]. Quoique cette production ait été constante et importante, depuis 1953[18], et que certains poèmes aient connu un succès indéniable, comme Ex-Basketball Player (1957)[19], la poésie d'Updike est considérée comme penchant vers la poésie légère, de son aveu même[15],[17].
D'autres thèmes sont au centre de certains essais, comme le sport, dans un célèbre article sur la fin de carrière du joueur de baseball Ted Williams, Hub Fans Bid Kid Adieu, paru dans le New Yorker en 1960[15], ou encore dans Rêves de golf (1996). L'art, en particulier l'art américain, est également une préoccupation majeure affichée par Updike, à travers de nombreux articles réunis dans deux importants recueils, Un simple regard (1989) et Still Looking: Essays on American Art (2005). Certaines faiblesses dans la connaissance et la réflexion ont cependant été relevées dans cette partie de son œuvre[21].
D'autres écrits ont une plus forte connotation autobiographique, en particulier Être soi à jamais (1989).
John Updike a reçu de nombreuses récompenses au long de sa carrière. Cette liste est une sélection[22]. Souvent évoqué comme possible lauréat du prix Nobel de littérature, le fait qu'il ne l'aie jamais remporté est souvent évoqué comme une injustice par de nombreux acteurs de la vie littéraire[15].
↑Andrea Barrett, « Nibbled at By Neighbors », The New York Times, (consulté le ) : « One of my earliest memories is of seeing her at her desk. I admired the writer's equipment, the typewriter eraser, the boxes of clean paper. And I remember the brown envelopes that stories would go off in - and come back in. »
↑Paris Review, 1967, cité par Christopher Lehmann-Haupt, « John Updike, a Lyrical Writer of the Middle-Class Man, Dies at 76 », The New York Times, (lire en ligne) : « I would write ads for deodorants or labels for catsup bottles, if I had to. The miracle of turning inklings into thoughts and thoughts into words and words into metal and print and ink never palls for me. »
↑Interview pour Jane Howard dans LIFE, 1966, cité par Christopher Lehmann-Haupt, « John Updike, a Lyrical Writer of the Middle-Class Man, Dies at 76 », The New York Times, (lire en ligne) : « My subject is the American Protestant small-town middle class. I like middles. It is in middles that extremes clash, where ambiguity restlessly rules. »