Son œuvre est abstraite (plongeant dans les fondements de l'analyse économique) et novatrice dans la forme (elle puise aux dernières avancées en mathématiques).
Biographie
Gérard Debreu est né à Calais en 1921[2]. Son père, Camille Debreu, est l'associé de son grand-père maternel dans l'entreprise de dentelle familiale, une activité traditionnelle de Calais. Bachelier à la veille de la Seconde Guerre mondiale, il part pour Ambert afin d'étudier en classe préparatoire[réf. souhaitée], puis Grenoble alors en zone libre. Il étudie ensuite de 1941 à 1945 à l'École normale supérieure et à la faculté des sciences de l'université de Paris, et est lauréat du concours d'agrégation de mathématiques[3] en décembre 1945 avec un an de retard à la suite du jour J et de son enrôlement dans l'armée française comme élève officier à l'École militaire de Cherchell avant son service en Allemagne avec les troupes d'occupation où il sert jusqu'en .
Il part ensuite travailler aux États-Unis en 1948 grâce à une bourse Rockefeller qui lui permet de visiter plusieurs universités américaines ainsi que celles d'Uppsala et d'Oslo. En 1950, il accepte un poste à l'université de Chicago.
En 1954 il publie une contribution majeure intitulée Existence of an Equilibrium for a Competitive Economy en collaboration avec Kenneth Arrow qui caractérise les conditions d'existence d'un équilibre général en économie de marché en se fondant sur une méthode topologique plutôt que sur la résolution d'un système d'équations.
Il rejoint l'université Yale en 1955. Il obtient le doctorat des sciences mathématiques devant la faculté des sciences de l'université de Paris avec une thèse principale sur la théorie de la valeur soutenue en . En 1959, il publie La Théorie de la valeur, une analyse axiomatique de l'équilibre économique, qui constitue une reformulation en termes rigoureux de la théorie de l'équilibre général inaugurée par Léon Walras en 1874 :
« Elle en précise les conditions d'existence, de stabilité et d'optimalité. Cet exercice qui se situe à un degré d'abstraction élevé passe pour un renouvellement complet des instruments de calcul “à la marge” utilisés par ses prédécesseurs. » (Debreu fait appel à la topologie et à la notion d'ensemble convexe)[4].
Cependant aux yeux de certains comme Maurice Allais (prix Nobel 1988) : « La construction de Debreu n'a aucune valeur scientifique, tant elle est totalement étrangère au monde de l'expérience[5]. »
À la même époque, Debreu se penche sur quelques problèmes économiques comme celui de l'utilité cardinale.
Debreu établit la fondation axiomatique de l'économie de marché, l'existence d'un équilibre général en utilisant une approche nouvelle : l'idée principale est de montrer qu'il existe un système de prix pour lequel l'excès de demande agrégée disparaît et pour ce faire, il utilise le théorème du point fixe de Kakutani. Dans le chapitre 7, il introduit un principe d'incertitude et montre comment l'intégrer au modèle déterministe : avec la notion de contingence qui est la promesse de livrer un produit si un état futur se réalise. Cette notion est très utilisée en finance sous l'appellation d'« Arrow-Debreu ».
Au début des années 1960, Debreu travaille au Center for Advanced Study in the Behavioral Sciences, un institut de recherche basé à Stanford, en Californie, pour approfondir ses recherches sur la preuve complexe d'un théorème général sur l'existence d'un équilibre en économie. Cette preuve est publiée en 1962. En , il rejoint l'université de Californie à Berkeley. Aux quelques années sabbatiques près, passées dans les universités de Leyde, Cambridge, Bonn et Paris, il fera le reste de sa carrière académique au sein de l'Université de Californie à Berkeley[6]. Il est naturalisé américain en 1975[7].
Gérard Debreu, Théorie de la valeur. Une analyse axiomatique de l’équilibre économique (Theory of Value. An Axiomatic Analysis of Economic Equilibrium), Wiley, 1959, traduit en français, Dunod, Paris, 1984 (ISBN2100042858)
Debreu et Arrow, Existence of an Equilibrium for a Competitive Economy, Econometrica, 1954, vol. 22, p. 265 à 290.
(en) Autobiographie sur le site de la fondation Nobel (le bandeau sur la page comprend plusieurs liens relatifs à la remise du prix, dont un document rédigé par la personne lauréate — le Prize Lecture — qui détaille ses apports)