Il naît à Moscou d'un père arménien originaire de Tbilissi, dont le nom de famille serait Kalantarian[2]. Sa mère russe, originaire de Noguinsk, est fonctionnaire au ministère du Commerce extérieur soviétique[3]. Il étudie à l'école secondaire no 2 de Noguinsk, puis reçoit une médaille d'argent de l'école no 607(ru) de Moscou avec enseignement renforcé en anglais, à la fin de ses études secondaires.
Sergeï Lavrov est marié à Maria Lavrova depuis 1971[5].
Carrière de diplomate
En 1972, il est attaché auprès de l'ambassadeur de l'URSS au Sri Lanka. De 1976 à 1981, il travaille au département des organisations internationales du ministère des Affaires étrangères de l'URSS. De 1981 à 1988, il est premier secrétaire, conseiller puis conseiller en chef de la représentation permanente de l'URSS auprès de l'ONU[3]. De 1988 à 1990, il est le chef adjoint du département des relations économiques internationales du ministère des Affaires étrangères de la Russie. De 1990 à 1992, il est le directeur du département des organisations internationales et des problèmes globaux du ministère des Affaires étrangères.
De 1992 à 1994, il est vice-ministre des Affaires étrangères de la fédération de Russie, sous la présidence de Boris Eltsine. De 1994 à 2004, il est le représentant permanent de la fédération de Russie auprès de l'ONU. Il acquiert durant cette période une bonne connaissance du fonctionnement du Conseil de sécurité de l'ONU[2].
Il entretient de mauvais rapports avec la secrétaire d'État américaine Condoleezza Rice[6]. Le Daily Telegraph révèle le que le ministre a employé dans une conversation téléphonique avec son jeune homologue britannique David Miliband, dans le contexte du conflit russo-géorgien en Ossétie du Sud d' : « Who are you to fucking lecture me[7]? », ce qui fait la une des tabloïds anglais[8]. Entre 2008 et 2012, sous la présidence de Dmitri Medvedev, plus libéral que son prédécesseur et successeur Vladimir Poutine, Sergueï Lavrov se fait plus mesuré, s'abstenant de critiquer l'intervention militaire franco-britannique en Libye et s'opposant à des lois anti-américaines votées par la Douma[9].
À partir de 2013, il est particulièrement actif dans la défense d'un statu quo à propos de la guerre civile syrienne en refusant une intervention militaire non encadrée par l'ONU[10] et en signant avec son homologue américain John Kerry à Genève une résolution mettant sous contrôle international les armements chimiques de l’État syrien[11]. La médiation de Lavrov et l'intervention russe en Syrie seront analysées comme un véritable « succès international » pour la Russie[6]. Il n'a par ailleurs pas donné suite à la politique de « reset »(en) entre les États-Unis et la Russie voulue par Barack Obama[9].
En 2014, il est en première ligne face au secrétaire d'État américain John Kerry, qu'il rencontre plusieurs fois dans le cadre de la crise de Crimée et des suites de la révolution de Maïdan.
Lorsque la Russie attaque l'Ukraine fin février 2022, il continue d'exécuter fidèlement la politique du président russe. Sa crédibilité internationale, longuement construite au fil des décennies, en est grandement affectée. En mars 2022, son intervention à l'ONU est ainsi boycottée par de nombreuses délégations, dont celles des pays occidentaux, en signe de solidarité avec le peuple ukrainien[12]. Il nie également les frappes russes sur une maternité à Marioupol, et rejette la responsabilité sur l'Ukraine[13].
Sergueï Lavrov se donne pour modèle Alexandre Gortchakov, ministre des Affaires étrangères d'Alexandre II, qui après la défaite de la guerre de Crimée avait restauré la position de la Russie face aux puissances européennes[6]. Il a été marqué par la gestion américaine de la guerre du Kosovo, confirmant le déclassement international de la Russie[6]. La proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo (2008) formera un précédent que Lavrov rappellera lors du rattachement de la Crimée à la Russie en 2014[14],[15].
Il est l'un des hommes clefs du gouvernement de Vladimir Poutine et l'un des rares dirigeants à occuper un tel poste depuis le début de ses présidences[6]. Il bloque par veto cinq résolutions devant ouvrir la voie à une intervention militaire en Syrie sous couvert de l'ONU, ce qui lui vaut dans les chancelleries occidentales le surnom de « Minister Niet »[16]. Suivant le président russe dans son entreprise de retrouver l'influence de son pays du temps de l'URSS, il est un défenseur résolu de la non-ingérence et de l'inviolabilité des frontières (en particulier lors des crises libyennes et syriennes), ce qui l'a parfois placé dans une situation délicate, notamment après la crise ukrainienne de 2014[2].
Condamnant l'extension de l'OTAN vers l'Est, « toujours plus près de la frontière russe », il affirme qu'elle constitue « la source de tous les problèmes systémiques qui ont surgi dans les relations que la Russie entretient avec les États-Unis et l'Union européenne »[6] ; c'est à ce titre que l'historien Georges-Henri Soutou le comparait à un « nouveau Metternich »[17].
Pour Evguenia Obitchkina, professeur au MGIMO, « à la différence des diplomates soviétiques contaminés par l'idéologie, Sergueï Lavrov perpétue la tradition étatiste de la puissance russe et maintient parfaitement le cap fixé par le président »[9].
Controverses
Sanctions
Dans le cadre des sanctions de 2022, sa fille Ekaterina Vinokourova et Polina Kovaleva[5], fille de sa maîtresse supposée Svetlana Poliakova, sont sanctionnées par les autorités britanniques[18].
Antisémitisme
Le , lors d'une interview pour la télévision italienne, Sergueï Lavrov déclare à propos du président Zelensky qu'être à la fois juif et nazi n'est pas incompatible, en affirmant que « Hitler avait aussi du sang juif »[19],[20],[21]. Israël s'alarme alors de propos « scandaleux, impardonnables et une horrible erreur historique », tandis que le gouvernement ukrainien dénonce des « théories du complot » révélatrices d'un « antisémitisme profondément enraciné au sein des élites russes »[19],[20]. Le , Moscou répond en accusant Israël de soutenir le « régime néonazi de Kiev », en affirmant dans un communiqué que « l'histoire connaît malheureusement des exemples tragiques de coopération entre juifs et nazis »[22],[20]. Le , Israël affirme avoir reçu des excuses de la part de Vladimir Poutine[23].