Elle est rebaptisée « esplanade de la Libération », le , afin de « rendre hommage aux résistants, aux Français libres, aux alliés et à tous les insurgés qui ont libéré Paris dans la nuit du 24 au »[4].
Place de Grève
« Grève » signifie un endroit uni, couvert de gravier, sur le bord de mer ou d'une rivière. Avant que la place de Grève fût haussée et que le quai de la Grève, devenu « quai de l'Hôtel-de-Ville », fût pavé, cet endroit était réellement une grève.
Description de la place de Grève
La place de Grève était d'une superficie d'environ le quart de la place de l'Hôtel-de-Ville actuelle et avait une forme plus ou moins trapézoïdale, dont le petit côté était situé au nord et le grand côté était situé au sud.
Cette place était également coupée en deux parties par une rangée de pieux qui séparaient la partie basse, qui descendait en grève vers le port de Grève, de la partie haute qui était la place proprement dite.
Le site était occupé autrefois par une ancienne grève, donc une sorte de plage faite de sable et de gravier, où il était facile de décharger des marchandises arrivant par la Seine[6].
Ainsi très vite s'y installe un port remplaçant, progressivement, le port Saint-Landry situé sur l’île de la Cité[7]. Le port de Grève devient le plus important de Paris : le bois, le blé, le vin, le foin y sont déchargés, facilitant ainsi l’installation d’un marché. C’est autour de ce port que va ainsi se développer sur la rive droite, un quartier très dense.
Ce port permet l'installation, dès le début du XIIe siècle, d'un marché public qui portait en raison de sa proximité à la Seine le nom de « place de Grève ».
Aussi les hommes sans emploi y trouvaient-ils facilement du travail. L'expression « faire grève » a donc d'abord signifié « se tenir sur la place de Grève en attendant de l'ouvrage » avant d'évoluer vers le sens qu'on lui connaît aujourd'hui, à savoir « cesser le travail en se liguant pour obtenir une augmentation de salaire » (Littré, 1872)[8].
En vertu d'une charte du roi Louis VII le Jeune, de 1141, sur la demande des bourgeois de Paris des quartiers de la Grève et du Monceau, le marché fut supprimé moyennant la somme de soixante-dix livres parisis que ces bourgeois paieraient au trésor royal. La place resta ainsi libre et on n’y éleva aucun bâtiment. Depuis ce temps, on organise sur cette place différentes cérémonies. En 1242, vingt-quatre charretées du Talmud y sont solennellement brûlées en présence du Prévôt et du clergé[9], ce qui est l'une des manifestations de l'antisémitisme alors naissant. La ville y donne aussi des fêtes ainsi que le feu de la Saint-Jean. Celui-ci, qui était traditionnellement allumé par le roi de France en personne, perdura jusqu’en 1648, date à laquelle Louis XIV officia pour la dernière fois[10].
C'est également là que se déroulaient ordinairement les exécutions. On ignore à quelle époque la place de Grève servit la première fois de lieu patibulaire. La première exécution date de l’année 1310, époque à laquelle une femme hérétique, nommée Marguerite Porette, y fut brûlée.
Le siège de la municipalité parisienne s'y installe vers 1357, quand Étienne Marcel, prévôt des marchands, acquiert là à tel effet la maison aux Piliers.
En 1362, l'hôpital du Saint-Esprit est fondé au nord de l'Hôtel de Ville. Son église est construite en 1406. L'ensemble est détruit en 1798[11].
À son retour des guerres d'Italie, François Ier décide de substituer la maison aux Piliers par un nouvel édifice qu’il commande à l'Italien Dominique Boccador. Le nouveau bâtiment, conçu en 1533, n’est achevé qu’en 1628.
La place de Grève est agrandie vers 1770 en vertu des lettres-patentes du [6].
Le eut lieu en place de Grève la première exécution par guillotine. Le condamné, Nicolas Jacques Pelletier, était un simple voleur. La foule, accoutumée depuis le Moyen Âge à des supplices plus « raffinés », se montra déçue de la rapidité du procédé. Le lendemain, une chanson courait les rues : « Rendez-moi ma potence de bois, rendez-moi ma potence[15]. »
La place de l'Hôtel-de-Ville, ainsi nommée le [18],[19].
Une décision ministérielle du fixe la largeur de cette voie publique à 67 mètres.
Durant les Trois Glorieuses, et plus particulièrement le , la place et l'Hôtel de Ville feront l'objet de furieux combats entre la troupe et les insurgés. La place et le bâtiment seront plusieurs fois perdus et repris au cours de la journée, avant de finir par rester aux mains des insurgés.
La place est alors prolongée vers le nord jusqu'à la rue de Rivoli, tracée à la même époque. Le côté occidental de la place est aligné dans l'axe de la rue du Renard élargie[21]. La place absorbe alors la rue du Mouton au nord et la rue Jean-de-l'Épine à l'ouest.
Après sa destruction lors de la Commune, l'hôtel de ville de Paris, qui avait fait l’objet au début du XIXe siècle d’importants remaniements qui avaient altéré son style initial, est reconstruit.
La place est devenue un espace réservé aux piétons en 1982.
Par décision du Conseil de Paris en date du , la place prend officiellement le nom de « place de l'Hôtel-de-Ville - esplanade de la Libération », en hommage aux libérateurs de Paris en 1944[1].
Aujourd'hui, la place de l'Hôtel-de-Ville est un lieu d'animation :
pour Paris Plages de 2004 et 2011, une grande partie de la place était transformée en un terrain de volley-ball ;
en hiver, depuis 1997, on y installe souvent une patinoire géante[22] ;
des « salons » s'y tiennent, par exemple pour les étudiants ;
au printemps, une manifestation pour le don du sang y a lieu ;
en , une partie d'une exposition sur les jardins se déroulait place de l'Hôtel-de-Ville ;
chaque été, elle accueille les concerts gratuits de Paris Plages du festival Fnac Indétendances depuis 2009 (ces concerts étaient auparavant situés sur les berges de Seine) ;
en , la place fut le siège de la ronde des obstinés, une ronde qui dura plus de mille heures (> 40 jours, nuit et jour, sans interruption)[23]. Cette ronde avait pour but de protester contre le projet Pécresse de réforme des universités.
Fêtes de la Saint-Jean
Chaque année, la veille de la fête de la Saint-Jean,une cérémonie avait lieu sur cette place. Les magistrats de la ville faisaient entasser des fagots au milieu desquels était planté un arbre de 30 mètres de hauteur, orné de bouquets, de couronnes et de guirlandes de roses. On attachait à l'arbre un panier qui contenait deux douzaines de chats et un renard. Aussitôt que les trompettes annonçaient l'arrivée du roi, le prévôt des marchands et les échevins, portant des torches de cire jaune, s'avançaient vers l'arbre et présentaient au monarque une torche de cire blanche garnie de deux poignées de velours rouge, et sa Majesté venait allumer le feu.
Les chats et le renard étaient brûlés vifs au milieu des acclamations de la foule. Le roi montait, ensuite, à l'Hôtel de Ville où il trouvait une collation composée de dragées musquées, de confitures sèches, de massepains, etc.
Dans un compte de la ville, à la date de 1573, on peut lire à l'article concernant cette cérémonie :
« À Lucas Pommereux, l'un des commissaires des quais de la ville, 100 sols parisis, pour avoir fourni durant trois années tous les chats qu'il falloit au dit feu, comme de coutume ; même pour avoir fourni il y a un an où le roi assista, un renard pour donner plaisir à sa Majesté, et pour avoir fourni un grand sac de toile où étoient les dits chats. »
C'est sous le règne de Philippe le Bel, le jour de la Pentecôte1310, que les premiers suppliciés furent exécutés. La nomenclature des exécutions de la justice commença par une hérétique appelée Marguerite Porette, un prêtre de Beauvais également accusé d'hérésie et un juif relaps qui furent brûlés[24].
La Révolution continua la tradition : la première exécution par guillotine eut lieu en place de Grève en 1792.
La dernière exécution sur cette place fut celle de Jean-Pierre Martin, condamné à mort pour vol et assassinat et exécuté le .
Le , jour anniversaire de l'exécution des quatre sergents de La Rochelle, 3 000 à 4 000 francs-maçons se rassemblèrent place de Grève pour réclamer l'abolition de la peine de mort et signèrent une pétition en ce sens[25].
Le , Félix Barthe, ministre de la Justice demanda la substitution de la place de Grève, où s'exerçait depuis plus de 520 ans la justice criminelle pour les exécutions capitales, pour un autre endroit patibulaire.
Ainsi, la Grève, cette place si célèbre dans les annales du crime, va cesser de mériter son horrible renommée. Après avoir choisi le , la place Vauban puis la place d'Italie, le , le préfet de la Seine signe, le , un arrêté officialisant le nouveau lieu : l'extrémité de la rue du Faubourg-Saint-Jacques[20] :
Considérant que la place de Grève ne peut plus servir de lieu d’exécution depuis que de généreux citoyens y ont glorieusement versé leur sang pour la cause nationale[26] ; considérant qu’il importe de désigner de préférence des lieux éloignés du centre de Paris et qui aient des abords faciles ; considérant en outre que, par des raisons d’humanité, ces lieux doivent être choisis le plus près de la prison où sont détenus les condamnés ; considérant que sous ces différents rapports la place située à l’extrémité de la rue du Faubourg-Saint-Jacques parait réunir les conditions nécessaires ;
Avons arrêté :
Les condamnations emportant la peine capitale seront à l’avenir exécutées sur l'emplacement qui se trouve à l’extrémité de la rue du Faubourg-Saint-Jacques.
: François Belot, garde du corps du Roi pour complicité avec la fruitière, blanchisseuse, fabricante de poisons Anne Chéron, dite « La Chéron », dans l'affaire des poisons (roué vif)
« Il ne reste aujourd'hui qu'un bien imperceptible vestige de la place de Grève telle qu'elle existait alors. C'est la charmante tourelle qui occupe l'angle nord de la place, et qui, déjà ensevelie sous l'ignoble badigeonnage qui empâte les vives arêtes de ses sculptures, aura bientôt disparu peut-être, submergée par cette crue de maisons neuves qui dévore si rapidement toutes les vieilles façades de Paris. […] La Grève avait dès lors cet aspect sinistre que lui conservent encore aujourd'hui l'idée exécrable qu'elle réveille et le sombre Hôtel de Ville de Boccador, qui a remplacé la Maison-aux-Piliers. Il faut dire qu'un gibet et un pilori permanents, une justice et une échelle, comme on disait alors, dressés côte à côte au milieu du pavé, ne contribuaient pas peu à faire détourner les yeux de cette place fatale, où tant d'êtres pleins de santé et de vie ont agonisé ; où devait naître cinquante ans plus tard cette fièvre de Saint-Vallier, cette maladie de la terreur de l'échafaud, la plus monstrueuse de toutes les maladies, parce qu'elle ne vient pas de Dieu, mais de l'homme. »
↑Béatrice Philippe, Être juif dans la société française, chapitre « De l'an 1000 à l'expulsion de 1394 ».
↑Yves-Marie Bercé, Fête et révolte. Des mentalités populaires du XVIe au XVIIIe siècle, Paris, Hachette, coll. « Le Temps et les Hommes », 1976, p. 62.
↑Eugène Andriveau-Goujon, Plan d'ensemble des travaux de Paris à l'échelle de 0,001 pour 10 mètres (1/10000) indiquant les voies exécutées et projetées de 1851 à 1868, Paris, E. Andriveau-Goujon, 1868 [lire en ligne].
↑Émile de Labédollière, Le nouveau Paris : histoire de ses 20 arrondissements, Paris, Gustave Barba, p. 58
↑En particulier le 28 juillet où l'hôtel de ville de Paris fut plusieurs fois perdu et repris au cours de la journée pour finir par rester aux mains des insurgés.
↑Florimond du Puy seigneur Vastan était le neveu de Philippe du Puy de Vatan. Il fut condamné à avoir la tête tranchée en place de Grève, comme calviniste et sujet rebelle. Il s'était opposé aux impôts royaux, en particulier contre la gabelle, taxe sur le sel, n'hésitant à prendre la défense des mauvais payeurs et des contrebandiers.
↑Anne de Carada où Anne de Caradas elle était âgée de 55 ans. Arrêtée le dans le cadre de l'affaire des Poisons, pour avoir empoisonné la seconde épouse du colonel Donneau de Vizé et tenté d'empoisonner sa troisième épouse.
↑Pierre Clément, La Chambre de l'arsenal d’après des documents inédits 1679-1682, [lire en ligne]
↑Né à Kervignac (Morbihan) en 1732, taille de 1,77 m, ou cinq pieds cinq pouces, cheveux châtain clair, sourcils de même, yeux bleus, nez aquilin , visage plein et un peu coloré, bouche moyenne, menton rond avec son creux. Cultivateur, domicilié à Roche-Marin