Investissant les variétés, Raymond Legrand réalise des arrangements pour Ray Ventura et son ensemble fondé en 1928 sous le nom Les Collégiens, l'élite des jazzmen parisiens. En 1933, il fonde sa propre formation, L'Orchestre de Raymond Legrand. L'aventure tourne court[2].
En , durant l'Occupation, Ray Ventura, dont la sœur sera arrêtée le , tombe sous le coup du statut des Juifs. Comme beaucoup de personnes qui se voient ainsi interdire d'exercer un mandat social, il confie, depuis la zone sud où il s'est réfugié, les droits d'auteur dont il est détenteur à un prête-nom. C'est Marcelle Legrand. Raymond Legrand, qui est séparé de celle-ci, n'a pas attendu que les difficultés de Ray Ventura se précisent et a reconstitué dès les lendemains de la défaite, en 1940[2], une formation qu'il baptise Le Jazz Dixit.
En , il y regroupe ceux des Collégiens qui ne suivent pas leur ex-patron en exil. Le , son orchestre anime le gala organisé au théâtre de l'Empire par l'exposition « Le bolchevisme contre l'Europe » au profit de la Légion des volontaires français. Dînant dans un cercle collaborationniste, il s'exclame publiquement et avec enthousiasme : « Demain, la Russie sera à l'armée allemande ! »
Le succès ne vient qu'en avec la sortie d'un disque reprenant la musique du film Mademoiselle Swing[2]. Le jazz plaît aux zazous. Aux sollicitations plus ou moins menaçantes de l'ambassadeurOtto Abetz, maître d'œuvre d'une politique de Collaboration intellectuelle, Raymond Legrand répond en participant à la fin de l'été 1942 en tant que chef d'orchestre au côté de Lys Gauty, Jane Sourza, Fréhel, Raymond Souplex au mois de tournée intitulé Paris-Vedettes et organisé à travers l'Allemagne pour les ouvriers du STO[4]. Il évite par là-même à ses musiciens d'y être envoyés à leur tour.
À la Libération, Raymond Legrand est inscrit sur l'officieuse liste noire de la provisoire Radio nationale, mais, ayant opportunément et tardivement rejoint un réseau de résistantsnivernais, il n'est pas poursuivi par le Comité national d'épuration mis en place pour les artistes de la scène le [7].
Variété et cinéma (1946-1974)
En 1946, il divorce enfin, et se remarie avec Paulette Bonimond. Il en a deux enfants, l'écrivain Benjamin Legrand en 1950 et le peintre Olivier Legrand en 1954[8].
À partir de 1951, son fils Michel Legrand commence à écrire des arrangements pour l'orchestre de son père et, en 1966, Michel dirige l'orchestre pour l'enregistrement de la chanson de Barbra Streisand portant le titre de son album, Color me Barbra.
Membres de l'orchestre de Raymond Legrand de 1953 à 1955
↑Il a débuté comme violoniste dans l'orchestre de Ray Ventura en 1928.
↑R. Paxton, O. Corpet & C. Paulhan, Archives de la vie littéraire sous l'Occupation, p. 100-101, Tallandier, Paris, avril 2009 (ISBN978-2-84734-585-8).
↑D. Nevers, Intégrale Irène de Trébert 1938-1946 avec l'orchestre de Raymond Legrand et Michel Warlop, Frémeaux & Associés, Vincennes, 2 CD.