Godefroy III (1728-1792), duc de Bouillon et prince de Turenne, favorable à la Révolution française, engage son État dans les voies de la réforme par un édit du et soutient l'Assemblée générale (Parlement) quand celle-ci abolit les droits seigneuriaux et féodaux en mai 1790[1].
Par la constitution du , le duché de Bouillon (230 km2) affirme son statut de monarchie constitutionnelle[2]. Mais le territoire est occupé par les troupes françaises de la garnison de Sedan le suivant[1]. Le duc Jacques-Léopold de La Tour d'Auvergne, qui succède à son père en [1], vit au château de Navarre, près d'Évreux ; les derniers ducs de Bouillon n'ont jamais résidé dans leur duché[2]. Il est arrêté et emprisonné en France sous la Terreur le ; il sera libéré ultérieurement. Comme son père, il est citoyen français bien que monarque d'un État souverain. À Bouillon, quelques révolutionnaires français venus de Sedan tentent de proclamer la déchéance du duc[1].
Proclamation de la République
Constatant qu'il n'y a temporairement plus de contact possible avec son souverain, l'Assemblée générale convoque une Assemblée extraordinaire des représentants du peuple bouillonnais. Celle-ci aurait proclamé par un décret la République bouillonnaise le . Plusieurs sources[réf. nécessaire] estiment toutefois que l'Assemblée générale n’a jamais proclamé la fin de la monarchie ducale, mais seulement réaffirmé l'« essence démocratique et populaire » de l'État et le transfert de l'autorité exécutive à un conseil ad hoc. La monarchie ducale n’aurait pas réellement pris fin. Les documents officiels ultérieurs ne font plus mention du duc, en raison de son emprisonnement.
Le territoire est occupé par un bataillon de la 32e demi-brigade d’infanterie de ligne, renforcé de hussards et d’artillerie, le , qui s’établit dans un camp dirigé par le général Marchand. Le , au combat des longs champs, le général autrichien Beaulieu à la tête d’un corps de 4 000 hommes attaque par surprise et chasse les 2 000 hommes du général Marchand (dont 1 200 gardes nationaux). Le général Marchand a juste le temps de sauter dans une berline pour gagner Sedan[3].
Le château n’est pas occupé, et les délégués de la ville demandent protection à la France.
Le territoire est annexé le (4brumairean IV) et intégré dans les départements des Forêts, des Ardennes et de l'Ourthe[4], non sans que l'Assemblée générale émette publiquement son désaccord envers cette décision.
L’ancien duc meurt en 1802 en tant que « citoyen Léopold La Tour d'Auvergne ».
Suites
Après la fin de l'occupation française, en avril 1814, le territoire de l’ancien duché de Bouillon est occupé par les puissances alliées, le duché est brièvement restauré avec à sa tête un amiral britannique (de Jersey), Philippe d'Auvergne, cousin des La Tour d'Auvergne, que le duc Godefroy avait adopté et dont il avait été convenu avec l'Assemblée générale qu'il succèderait à Jacques-Léopold s'il n'avait pas d'héritier. Toutefois, au Congrès de Vienne, un cousin de Godefroy, Charles-Alain-Gabriel de Rohan-Guéméné, général-major de l'armée autrichienne et ressortissant autrichien depuis 1808, conteste la validité de cette succession et revendique le trône de Bouillon.
Après quelques mois d'incertitude, l'article 69 de l'Acte final du Congrès de Vienne consacre le l'intégration du duché de Bouillon au Grand-Duché de Luxembourg, et donc aux Pays-Bas, dont le roi est grand-duc du Luxembourg.
La question de l'indemnisation des ayants droit et autres prétendants à la succession ducale ne fut pas toutefois réglée avec ce rattachement au Luxembourg, et devint un sujet de contentieux juridique pendant plus d'une décennie.
Bouillon se soulève dès le , et la garnison du château donne sa reddition. Bouillon, comme le Grand-duché de Luxembourg (qui correspondait environ aux actuels deux Luxembourg) fait alors partie de la Belgique qui s'est, de facto et à l'exception de quelques place-fortes, détachée du Royaume des Pays-Bas.
Le Traité des XXIV articles, signé le , mais ratifié seulement en 1839 par toutes les parties, reconnait, de jure, l'indépendance de la Belgique y compris la partie occidentale de l'ancien Grand-duché de Luxembourg, l'actuelle Province de Luxembourg, dont fait partie Bouillon[5].
↑Décret du 4 brumaire An IV qui réunit à la France le ci-devant duché de Bouillon et ses dépendances. La commune de Bouillon et son territoire, ainsi que les communes qui en dépendent, et qui formaient ci-devant le duché du même nom, sont réunis au territoire de la République française, et seront répartis entre les départemens de l'Ourte, des Forêts et des Ardennes. Les représentans du peuple envoyés dans les départemens réunis par la loi du 9 vendémiaire dernier, sont chargés de l'exécution du présent décret. Jean Baptiste Duvergier, 1835. Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlemens, avis du Conseil d'État. Tome 8. Guyot et Scribe, Paris. p 443 (orthographe d'époque).
↑Traité pour la séparation définitive de la Belgique d'avec la Hollande signé à Londres, le 15 novembre 1831. Article premier. Le territoire belge se composera des provinces de Brabant méridional, Liège, Namur, Hainaut, Flandre occidentale, Flandre orientale, Anvers et Limbourg, telles qu'elles ont fait partie du royaume uni des Pays-Bas constitué en 1815, à l'exception des districts de la province de Limbourg désignés dans l'article 4. Le territoire belge comprendra en outre la partie du grand-duché de Luxembourg indiquée dans l'article 2. http://mjp.univ-perp.fr/constit/be1831londres.htm
Voir aussi
Bibliographie
Pierre Congar, Jean Lecaillon et Jacques Rousseau, Sedan et le pays sedanais, vingt siècles d’histoire, Éditions F.E.R.N., , 577 p., p. 448-450.
Adelin Vermer, La révolution Bouillonnaise et ses lendemains : contribution à l'histoire des révolutions de la fin du XVIIIe siècle, Uga, , 354 p..