Il est motivé dans cette dernière option en ce que la ville de Nice, rappelle Jean-Marc Réol, apparaît alors comme « le lieu d'une effervescence de l'art contemporain où, depuis le début des années 60, les protagonistes du Nouveau Réalisme, puis de Fluxus et de Supports/Surfaces, ont donné à la ville l'allure d'un laboratoire d'envergure internationale, ouvert sur les pratiques les plus expérimentales dans les domaines de l'objet, de la performance, de la peinture »[3]. Jean-Claude Silbermann se souviendra de Patrick Lanneau, « alors tout jeune peintre, habitant une chambre perchée au-dessus d'un sombre jardin, tentant de rivaliser en extase avec le ciel de Nice, apportant aux relations humaines une sorte de simplicité bienveillante dénuée de bruit comme d'ostentation »[4].
Patrick Lanneau fait partie en février 1980, avec Denis Castellas, Gérald Thupinier, Claude Goiran, Frédéric Fenollabbate, Jean Borsotto, Jacques Chaumard, Sylvette Maurin et Gérard Serée(en), du collectif d'artistes qui fonde au n°8 de la rue Saint-Vincent à Nice - « Une sorte de hangar et en dessous deux grandes caves voûtées d'environ cent mètres carrés… Le lieu était très sombre et sans fenêtre, aussi travaillait-on à la lumière des néons. On perdait complètement la notion du temps, en ayant le même éclairage du matin au soir… »[4] - le groupe dit « L'Atelier »[5] auquel vont s'intéresser les galeristes Anne et Jean-Pierre Roger, puis Hélène Jourdan-Gassin à Nice, Catherine Macé à Cannes. Patrick Lanneau se souviendra : « là, j'ai fait des travaux en volume - bois et serpentins bombés de peinture fluo, avec aussi de la lumière noire, celle de la couleur en suspension -… C'étaient des expériences pour imaginer et visualiser ce que pourrait être une couleur en dehors du fait qu'elle est posée sur la toile. À partir de ces expériences j'ai réalisé des peintures et cette question me tracassera toujours »[4].
Dans son interview par Andy Warhol en février 1982, Ben rapporte avoir découvert à l'Atelier les premières peintures sur le thème des Portiques de Patrick Lanneau - Geneviève Breerette les appelle alors « mirages de temples ioniens »[6] - dont il affirme qu'« elles prennent le contrepied de l'épidémie Support/Surfaces », ajoutant : « c'est d'après moi Lanneau qui marque le pas sur les autres à Nice… Je défends toujours le nouveau dans une situation donnée et, en 1979, le travail de Lanneau apportait quelque chose »[7].
De cette même première période à l'Atelier, Mireille Kreitmann retient quant à elle en priorité la série des Ampoules d'où ressort une « préoccupation déjà évidente touchant à la lumière : les ampoules, génératrices d'énergie, nous indiquent de façon brutale le débordement des sens et la détermination du peintre à déborder les limites du tableau par une utilisation des couleurs et un geste impulsif qui se mêlent dans un chaos non encore maîtrisé à l'équilibre instable »[8].
huiles sur toiles (collections particulières), période de « l'Atelier » (1979-1984)
Sans titre (série des Portiques), 200x220cm, 1979
Sans titre (série des Portiques), 150x170cm, 1980
Sans titre (série des Ampoules), 200x250cm, 1980
Sans titre, 200x250cm, 1981
Sans titre, 200x300cm, 1982
Sans titre, 170x220cm, 1983
Sans titre, 200x250cm, 1984
Les Frigos de Paris
Incité à vivre à Paris par son exposition de 1984 à la Galerie Lucien Durand, au 19 rue Mazarine[9], dont il devient artiste permanent[10], Patrick Lanneau s'installe en 1985 aux Frigos, 91 quai de la Gare dans le 13e arrondissement pour y demeurer durant quinze années[11] : « des étages d'entrepôts frigorifiques désaffectés par la S.N.C.F. et investis par les artistes des années 80 : une ruche fin de siècle… » évoque Françoise Monnin à la suite d'une visite de l'atelier du peintre dont elle restitue ses sensations immédiates : « place au visible, et tout de suite une grande claque de couleurs intenses. Sur le mur du fond, une toile immense, dévorée par un rouge de camion de pompiers. Il y a aussi de l'orange et du rose, emmêlés à foison, incarnés… Ici une pyramide, là une étoile, un quartier d'orange aux allures de grande roue de fête foraine, un arête de poisson en hommage à Soutine peut-être, un sapin, une route en lacets géométriques, à moins qu'il ne s'agisse d'un éclair… De la lumière, le toupet méditerranéen des contrastes, celui de Matisse, la tranquillité en moins »[12].
huiles sur toiles (collections particulières), période des « Frigos » (1985-2000)
Sans titre, 250x190cm, 1985
Sans titre, 200x200cm, 1987
Sans titre, 195x114cm, 1989
Sans titre, 180x200cm, 1993
Sans titre, 200x200cm, 1993
L'Afrique
Les séjours de Patrick Lanneau en Afrique (L'Égypte fait suite à deux séjours à Dakar, le premier avec Sylvette Maurin dans un itinéraire passant par Bobo-Dioulasso où ils exposent ensemble, Ouagadougou et Bamako, le second dans le cadre d'une résidence soutenue par l'Association française d'action artistique) - « là bas, restitue Murielle Cachin, il dessine beaucoup et découvre un autre monde où se mêlent bonheur et misère, peau noire et abondance de couleurs : le jeune Lanneau est fasciné »[1] - initient ou confortent la présence récurrente dans ses œuvres des portiques, palmiers, sapins, pyramides, nuages, rochers et barrières. Sylvette Maurin confirmera : « à peine avions nous posé le pied à Bobo-Dioulasso, Patrick se mit à dessiner. Tout. Absolument tout. Et il captait avec une infinie justesse la majesté des hommes en grand boubou, la beauté et le port altier des femmes, leur canari sur la tête, la tendresse et l'émotion qui se dégageaient des enfants endormis. Les jaunes, les rouges, les bleus, le sollicitaient sans cesse »[4].
Approches de l'œuvre
Si Jean-Marc Réol voit en Patrick Lanneau le représentant du « retour à une figuration néo-expressionniste dans la mouvance de la Figuration libre du début des années 1980 »[3], Nadine Labédade observe que « ses premières peintures (1979-1985) mettent en scène des corps isolés ou en couples dans des paysages allusifs. La stridence des couleurs, la schématisation des formes et le travail de la matière picturale évoquent un univers onirique en apesanteur. Plus tard, Lanneau se consacre exclusivement au paysage qui devient de plus en plus évasif. La pratique du dessin, sur papier ou numérique, celle de la vidéo (Départ[13], La racine des branches), complètent cette recherche sur le paysage avec ses atmosphères et ses subtiles variations »[14].
Dans son approche de la Figuration libre, en 1982, Pierre Cabanne souligne « les perceptions plus sensibles de Lanneau » qu'il oppose ainsi, en même temps que Denis Castellas, à « la violence d'expression, insolente et braillarde, de Robert Combas, de Rémi Blanchard, d'Hervé di Rosa ou du groupe "En Avant comme Avant" »[15].
C'est pour sa part dès 1983 - année où Patrick Lanneau se trouve parmi les membres de « L'Atelier » niçois qui, au Grand Palais à Paris, marquent le Salon de la Jeune Peinture de leur participation « jeune et humaniste »[16] - que Gérard Xuriguera situe l'artiste, avec notamment Pierre Buraglio, Dominique Thiolat, Lionel Godart, Tony Soulié, Marcel Alocco, Christian Sorg, Christian Bonnefoi, Pierrette Bloch, Denis Castellas, Jean Mazeaufroid, Jean-Paul Huftier et Laura Lamiel, parmi les figures émergentes qui s'inscrivent dans le renouveau de l'art abstrait en obéissant « à des pulsions et à des savoirs qui ne sont plus symboliques, puisqu'ils entendent démonter les mécanismes de la peinture, où l'idéologie n'interfère peut-être plus, où les sentiers tortueux de la théorie ne sont peut-être plus aussi contraignants, mais tous ont conscience d'appartenir à une génération qui a eu le mérite de poser des questions nécessaires et essentielles à l'objet de leur représentation »[17].
Observant en 1990 que l'histoire de la peinture est bien connue de l'artiste, Mireille Kreitmann suggère que « l'idée avouée de Lanneau est de retrouver le mystère de la peinture et de renouer avec le spirituel… Il se réfère au Quattrocento, il comprend la lumière chez Rembrandt et le lien des espaces chez Picasso. Il a le sens aigu du baroque dans sa façon de pénétrer l'espace en profondeur, de suggérer le mouvement »[8].
Retour à Nice
L'exposition de Patrick Lanneau à la Galerie Françoise Vigna en mai 2000 marque son retour dans la région niçoise. « Des couleurs, des rythmes, et une matière en pleine expression "peinte" » y observe Michel Gaudet qui perçoit chez l'artiste une « science des tonalités chaudes ou froides, une sensualité et une sensibilité dont Henri Matisse assortissait la texture », pour conclure que « la vue absorbe une incandescence telle que le bleu, le jaune ou toute autre couleur chante en majeur »[18].
Installé successivement à Berre-les-Alpes et à Peillon, Patrick Lanneau enseigne à l'école municipale d'arts plastiques (Villa Thiole) de Nice jusqu'en 2016, effectuant également des interventions en arts plastiques à l'École supérieure d'arts plastiques de Monaco (pavillon Bosio) en 2000-2001, au Centre international de Valbonne de Sophia Antipolis de 2001 à 2003 et à la Fondation Lenval de Nice en 2004.
Dans cette période plus récente, constate France Delville, il met à profit le « travail solitaire pour apprivoiser les toiles achevées avec le temps, et, de cette vue d'ensemble, se dégagent de nouveaux mouvements dans les nombreux espaces d'un même tableau, plus fluides, plus immatériels comme la transparence de l'air et de l'eau »[19]. Lors de l'exposition Sur la piste des éléments en 2012 au château de Carros (les toiles de Patrick Lanneau s'y confrontent aux sculptures et installations de Frédérique Nalbandian, amie enseignante elle aussi à la villa Thiole), l'artiste confie : « je ne sais toujours pas comment la couleur existe vraiment, la matière encore moins. L'acte de peindre est une tentative pour comprendre comment la lumière, la couleur pénètrent en nous, pour nous renseigner sur le monde »[20]. Placé au seuil de cette même exposition, un texte de Sophie Braganti, commissaire, avertit : « pas de mysticisme manifeste mais une présence implicite du sacré, de l'esprit, d'un ailleurs ici bas. Quelque chose de fort qui nous guide, indépendant de notre volonté. Dans une sorte de silence en mouvement. Une douce brutalité. une éloquente absence tellement humaine »[21].
huiles sur toiles (collections particulières), 2012-2020
Sans titre, 200x250cm, 2012
Sans titre, 200x250cm, 2012
Sans titre, 200x250cm, 2012
Sans titre, 150x150cm, 2016
Sans titre, 150x150cm, 2016
Sans titre, 200x200cm, 2017
Sans titre, 170x220cm, 2017
Sans titre, 162x89cm, 2017
Sans titre, 162x130cm, 2018
Sans titre, 81x114cm, 2019
Sans titre, 200x200cm, 2020
Œuvres
Estampes
Pour Télérama, lithographie originale 70x50cm, 200 exemplaires numérotés, presses de l'atelier Jacques de Champfleury, 1991.
Sans titre, sérigraphie, 100 exemplaires numérotés, atelier Bourquin, Besançon, 1991.
Contributions bibliophiliques
Thérèse Plantier, Provence, ma haine, illustrations de Marc Pessin et Vivien Isnard, couverture de Patrick Lanneau, éditions Christian Pirot, Saint-Cyr-sur-Loire, 1983.
Michel Butor, La Quinte Major, texte manuscrit enrichi de dessins originaux de Vincent Bioulès, Patrick Lanneau, Gérald Thupinier et Mark Willis, 15 exemplaires numérotés et signés par les artistes, éditions CMS, Montpellier, 1984.
Patrick Lanneau, Ohne Titel, 30 exemplaires numérotés, éditions Hirten-Presse, Bonn, 1992.
Jean Audureau, À Memphis il y a un homme d'une force prodigieuse, illustrations de Patrick Lanneau, collection « Villégiatures », éditions Médianes, 1993.
Patrick Lanneau, Quinze prières, cahier de dessin 20x20cm, gouache originale en couverture, 30 exemplaires numérotés, éditions Yéo, 1993.
Sophie Braganti, Les algues ont la peau dure, lavis de Patrick Lanneau, éditions Yéo, 1994.
Patrick Calamusa (présentation et notes), Le Cantique des cantiques, illustrations de Patrick Lanneau, lettrines de Lalou, Z'éditions, Nice, 1995.
Alain Lambert, Reclus, poèmes en prose, 40 exemplaires avec gouaches de Patrick Lanneau, éditions Yéo, 1996.
Les emplois-jeunes dans la culture, illustrations de Patrick Lanneau, La Documentation française / Ministère de la culture et de la communication, 2001.
Gilles Lades, Lente lumière, frontispice de Patrick Lanneau, collection « Grammages », L'Amourier éditeur, 2002.
Francis Chateauraynaud, Prospéro - Une technologie littéraire pour les sciences humaines, couverture de Patrick Lanneau, CNRS Editions, 2003.
Sophie Braganti, Una poesia, illustrations de Frédérique Nalbandian et Patrick Lanneau, 20 exemplaires numérotés, éditions Pulcinoelefante, Italie, 2005.
Katy Rémy, Paysage solitaire, peintures de Patrick Lanneau, 239 exemplaires numérotés, collection « Métranve », éditions Tipaza, Cannes, 2008.
Éric Sautou, La Véranda, interventions originales (aquarelles, crayons et cire) de Patrick Lanneau, 22 exemplaires numérotés et signés par l'artiste, Éditions Unes, 2018.
Huiles sur toiles (collections particulières), 2016-2021
Sans titre, diamètre 150cm, 2016
Sans titre, diamètre 110cm, 2021
Sans titre, diamètre 100cm, 2021
Sans titre, diamètre 80cm, 2021
Sans titre, diamètre 80cm, 2021
Sculptures
Les sculptures de Patrick Lanneau, bronzes de petits formats (années 1990), reprennent les signes récurrents de son œuvre peint : portiques, étoiles, rochers, formes pyramidales et courbes[21].
Couverture de presse
Dans son éditorial de Télérama n°2137 du 26 décembre 1990, sous le titre « L'espoir malgré tout », Marc Lecarpentier annonce l'exposition Pour Télérama de Patrick Lanneau au mois de janvier suivant chez Area à Paris et donne sens, dans la perspective d'une guerre imminente qui est alors installée dans les esprits, au choix par l'hebdomadaire d'une toile de Patrick Lanneau pour sa page de couverture Bonne année : « l'œuvre de Patrick Lanneau qui ouvre avec Télérama l'année nouvelle évoque sans emphase le monde tourmenté dans lequel il faut bien se mouvoir. Au bout du chemin accidenté, 1991 explose en volutes inquiétantes, mais lumineuses, comme s'il fallait toujours partager nos existences entre l'angoisse et la joie »[22].
Vidéos
Ni dehors ni dedans, images et réalisation de Patrick Lanneau, sons et musique de Serge Calien, 2005[23].
Départ, images et réalisation de Patrick Lanneau, sons et musique de Serge Calien, 2005[13].
L'Atelier, Nice, 1980 (Loterie : travaux récents), 1981 (Le retour d'Afrique - Patrick Lanneau, Sylvette Maurin), 1981 (On a du jaune et du bleu dans la peinture), 1982 (Figuration libre)[4].
La valise de Sambissa - Patrick Lanneau, Sylvette Maurin, Centre franco-voltaïque, Bobo-Dioulasso, 1981.
Foire internationale d'art contemporain, Grand Palais, puis espace Eiffel Branly, Paris, 1990 (stand Galerie Lucien Durand), 1993, 1994, 1995 (stand Galerie Gérald Piltzer).
Une robe, un artiste, Galerie Poirel, Nancy, 1991.
Des peintres et des sculpteurs, Galerie Nicole Buck, Strasbourg, 1991, 1992.
La couleur, Galerie Slotine-Perkowsky, Le Havre, 1991.
SAGA (Salon des Arts graphiques actuels, Paris, 1991, 1993[2].
Area, Paris, mars 1991 (Badoit - L'art au menu)[41], 1993 (Livres/objets et papiers d'artistes), 1998 (Voilà l'été - Arezki Aoun, Thomas Groslier, Patrick Lanneau, Benjamin Lévesque, Benoît Tranchant).
Autour de l'Afrique : Patrick Lanneau, Philippe Baldacchino, Jean-Claude Le Gouic, Franta - Peintures, aquarelles, sculptures, tissus, objets, Galerie Circa, Arles, - [53].
Le lieu de la peinture - Patrick Lanneau, Serge Plagnol, Agnès Mader, chapelle de l'Observance, Draguignan, 2018.
Ben et ses invités, Le 109 - Pôle de cultures contemporaines, Nice, juin-[54].
Sortie de sa réserve, Centre international d'art contemporain du château de Carros, février-[55].
Quatre peintures de grand format de la collection du Pin perdu - André-Pierre Arnal, Thierry-Loïc Boussard, Irène Laksine, Patrick Lanneau, maison Max-Ernst, Huismes, juillet 2021[56].
Les rencontres d'atelier - Édition 2 : Lydie Dassonville, Béatrice de Domenico, Christian Dermit, Patrick Lanneau, Jacqueline Matteoda, Amaury Peyraud, Marion Poix, Chris Beraet, Frédéric Fenoll, Jean-Marie Fondacaro, Sylvia Leone-Castaldi, Rob Rowlands, Héléna Krajewicz, Bornala Factory (atelier de Frédéric Fenoll), Nice, octobre 2021.
La rencontre des Rencontres d'ateliers, La Gaya Scienza, 9bis rue Dalpozzo, Nice, mars 2023[57].
Citations
Dits de Patrick Lanneau
« Je ne crois pas à la beauté en peinture. Il n'y a que des peintres, avec leur force, leur conscience. Ce qui est beau, c'est l'eau, le ciel, les yeux des gens. Lorsque je termine une toile, c'est que j'ai conscience des forces que je suis en train de manier. J'ai l'impression de libérer un tableau, de le laisser exister seul. » - Patrick Lanneau, 1993[4]
« Ce que je vois dans le paysage, c'est une alchimie entre formes, couleurs, densités et flottements, ombres et lumières. Les formes que je place ne sont que des signaux, dans le sens où ils indiquent un chemin, un point d'arrêt, un passage. Dans le paysage, il y a ce que l'on voit, avec nos yeux, nos sens, et ce qu'il provoque comme vision dans notre cerveau, comme appel à notre mémoire. C'est entre ces deux perceptions et dans leurs liens créatifs que se situe mon questionnement. » - Patrick Lanneau, 2012[20]
Réception critique
« Autrefois, en 1980, la lumière étincelait dans ses tableaux par le truchement de teintes joyeuses, jaunes, roses, blancs. Autrefois, la lumière était une évidence et l'œuvre finalement séduisante. Lanneau habitait Nice, et le public ravi se rassasiait de lueurs maritimes baignant des palmiers de circonstance et des portiques grecs échoués là comme des embarcations fragiles et disloquées après une tempête où le vent fait resurgir de l'onde déchaînée d'étranges souvenirs… Plus tard, après un séjour en Afrique, je crois, la peinture bascula… Il fallait sans doute repenser l'univers autrement, redéfinir le rapport de l'homme à la nature, rechercher la lumière ailleurs que dans ses reflets les plus séduisants, mais aussi les plus trompeurs. Alors les cieux s'assombrirent, mauves, bruns, noirs ; les palmiers disparurent et les étoiles brillèrent d'une sombre lueur. Lanneau habitait maintenant Paris, et le public étonné hésitait à accompagner le peintre dans une nuit qu'il jugeait prématurément éternelle. » - Olivier Céna[26]
« Aller capter les couleurs vives de l'Afrique. Rapporter le souvenir des formes essentielles d'Égypte, une pyramide, un palmier, une porte monumentale. Ce qui a été vu, ce qui est vu, entre dans cette peinture, devient des signes, des symboles, l'Arbre, l'Arche, des archétypes de la Vie. Patrick Lanneau réfute l'abstraction : "quand la peinture est trop abstraite, on perd de l'humanité", mais les clés qu'il donne à notre regard suscitent l'interrogation, l'inquiétude. À lui la joie de peindre, l'huile avec volupté, à corps perdu, avec lyrisme, soit sur de petits formats, soit sur des formats allant jusqu'à se dédoubler en diptyques. Partout, l'intensité des couleurs s'oppose jusqu'au grincement, sur ces champs de vert, de rouge, ces champs d'ombre et de lumière… L'unité se construit dans cet embrasement destructeur, là où naît la richesse délirante des tons, là où jaillit cette matière vibrante, fournie de brûlants et d'ombres, là où, dans une évolution incessante, surgit la confrontation avec l'immatériel. » - Marielle Ernould-Gandouet[30]
« Des contrastes courageux, bataille de bleus dans le noir. Trois petites pyramides comme seule traces, balises ténues bousculées par la matière. Les toiles de Patrick Lanneau reposent sur les vibrations qu'il obtient en déposant à grands gestes la peinture à l'huile. Elles conservent les traces énergiques de la brosse, sensuelles et virevoltantes, en boucles, en spirales, en ratures, en escaliers, et parfois en soleils lorsque les doigts s'en mêlent. » - Françoise Monnin[12]
« À Tours, déjà, à l'École des beaux-arts, il a senti, il a compris, dans le calme sanctuaire de l'atelier sans voix, que la révélation viendrait de la peinture et que, guidé par elle, il saisirait ensemble la raison et le sens de son passage sur terre, qu'il rejoindrait - par elle - l'unité primordiale, là où lumière et ombre sont devenues complices, là où jours et nuits se succèdent sans heurts, là où la lumière est l'exacte réplique des ténèbres enfouies, là où, rayonnante, irradiante enfin, "cœur du monde", elle est fusion sereine de l'esprit et du corps. Depuis, Lanneau avance tout à tour angoissé, malhabile, maladroit, exténué et tranquille. Il va vers ce point lumineux, cette étoile du berger, cette Véga aux cinq branches, cette Altaïr mythique. Il l'imagine si proche, il en a la vision et il la peint, jaune, de ce jaune affolant et sublime. Lumière pure, éclair de vérité, présence, épiphanie, blés couchés aux vents du trop tragigue Van Gogh. Comme lui, il aime les tourbillons, les dépressions soudaines, les couleurs empâtées, malaxées; aspirées - opacités des mauves, flamboyance des rouges, phosphorescence des jaunes, intensité des bleus, sortilège des verts - qui sont tempête de l'âme et chant de l'intuition. » - Isabel Haddad[33]
« Elle vous réveillera, cette peinture. Ni hâtive, ni hurlante, elle sonne haut. Gare aux regard timorés. Ces signes simples, ces couleurs pures ne nous conduisent qu'à la mémoire d'eux-mêmes enfouie en nous. La gêne que produit l'œuvre de Patrick Lanneau tient à ce que sans détour, il va, sans souci du goût, au centre brûlant de la peinture. Un lieu où la couleur et le signe ne sont pas faits pour les délices de l'œil, mais simplement l'endroit où là-bas s'appréhende irrationnellement la part maudite qui nous fonde. Et cette part est donnée en partage à qui veut bien en accepter l'aveuglement. » - Alin Avila[4]
« Dans sa peinture polychrome qui s'inscrit dans le temps et la durée, le paysage n'est pas la nature, mais une nature. Toniques, les énergies se fondent dans une peinture sans matière, car la matière est cette alchimie des lumières qui dessinent des plans perturbants, des assises instables. La force de Lanneau, homme et peinture, sa grande force, sa marche sans emphase ni lyrisme, c'est la grâce. Il peint la grâce. Il peint le poids d'atteindre, au bout de cinquante années de recherches et de pratiques incessantes, cette petite lumière de l'œil et du regard qui rend légère la longue route et ses tourments. Rien ne l'aura détourné de son essence, sens propre et figuré, si solitaire, si personnelle, jusqu'à disparaître, faire disparaître, dans la peinture, la figure de l'humain. L'humain s'efface dans le geste, la trace qui proposent un nouvel espace mental. Faire ordre du désordre. » - Sophie Braganti[4]
« Des créatures irréelles, des paysages fantastiques dans une lumière style coucher-de-soleil-de-carte-postale agrémentés de figures antiques. Une insistante décoration qui frise parfois le kitsch chez ce jeune artiste qui est un des espoirs de la peinture française actuelle. » - Gérald Schurr[58]
« Des ténèbres jaillit la lumière : aux bleus nuit, aux noirs profonds répondent des jaunes éclatants, des rouges purs. De la couleur, de la matière, émergent des formes fugitives nées dans l'instant, des impressions fugaces, des signes mystérieux. Telle est l'œuvre tumultueuse et violente de Lanneau, qui nous fait plonger au cœur de la profondeur. » - Dictionnaire Bénézit[2]
« Enfin du paysage qui apporte du nouveau… Le génie de Lanneau, c'est que le temps, les modes changent ; Lanneau reste le même… » - Ben[59]
↑ abcdefghijkl et m Alin Avila (préface), Patrick Lanneau, Sophie Braganti, Olivier Céna, Gilles Gontier, Sylvette Maurin, Alain Pusel et Jean-Claude Silbermann, Patrick Lanneau - Peintures 1979-1993, éditions Ramsay, 1993.
↑ Xavier Girard, « L'Atelier », Art press, n°52, octobre 1981.
↑ a et b Geneviève Breerette, « Jeunes artistes français à l'ARC - Violence et pluie d'étoiles », Le Monde, 12 décembre 1981.
↑ a et b Mireille Kreitmann, Patrick Lanneau, éditions de la Maison des Arts de Créteil, 1990.
↑ a et b Pierre Cabanne, « L'un invente un théâtre, l'autre parodie le mythe », Le Matin, 28 mars 1984, et « Çà se passe rive gauche », France-Soir, 31 mars 1984.
↑ Nadine Labédade, Patrick Lanneau, FRAC Centre-Val de Loire.
↑ Pierre Cabanne, « Les années 80 », L'art du vingtième siècle, éditions Aimery Somogy, 1982, p. 287.
↑ a et b Francis Parent et Raymond Perrot, Le salon de la Jeune Peinture - Une histoire, 1850-1953, éditions Jeune Peinture / Imprimeurs libres, 1983, p. 231.
↑ Gérard Xuriguera, Regard sur la peinture contemporaine - La création picturale de 1945 à nos jours, Arted, 1983, p. 230.
↑ a et b Michel Gaudet, « Les jardins de Lanneau », Patriote Côte d'Azur, juin 2000.
↑ Sylvie Montoire, « Badoit : l'art au menu », Télérama, mars 1991.
↑ a et b Françoise Woimant, Marie-Cécile Miessner et Anne Mœglin-Delcroix, De Bonnard à Baselitz - Estampes et livres d'artistes, B.N.F., 1992, p. 246.
↑ a et b Axel et Christa Murken, Romantik in der Kunst der Gegenwart - Sammlung Murken, Wienand Verlag, Cologne, 1993.
↑ Harry Bellet, « Découvertes - Quelques beaux restes », Le Monde, 24 mars 1994, p. 15.
Patrice Bloch et Laurent Pesenti, « Nice : Patrick Lanneau », Beaux Arts Magazine, n°21, février 1985.
Olivier Céna, « Mon voisin de palmier - Lanneau faillit brûler ses pinceaux », Télérama, n°1832, 20 février 1985, p. 34.
Jean-Luc Chalumeau, « Les peintres en France dans les années 80 - Patrick Lanneau, Jean Le Gac », Eighty, n°13, 1986.
Dominique Angel, Christian Bernard, Alain Boullet, Jean-Jacques Condom, Jean-Marc Réol, Jean-Philppe Vienne, 146 créateurs, éditions de la Villa Arson, Nice, 1986.
Véronique Buffard, Patrick Lanneau, éditions du Centre d'arts plastiques de Saint-Fons, 1987.
Alin Avila (préface de Jean-Roger Soubiran), Le musée a cent ans - Aspects de la peinture en France dans les années 1980-1988, tome II, éditions du Musée d'art de Toulon, 1988.
Lucien Durand, « Les figurations libres - Patrick Lanneau », Canal, Paris, n°54, novembre 1988.
Philippe Gadonex (interview) et Isabelle Manci (notes bibliographiques), 1789-1989 - Le témoignage de la peinture, coédition Halles d'Avranches / Basilique Saint-Aphrodise de Béziers, 1989.
Mireille Kreitmann, Patrick Lanneau, éditions Galerie Noëlla G., La Neuveville, 1990.
Mireille Kreitmann, Patrick Lanneau, éditions de la Maison des Arts de Créteil, 1990.
Olivier Céna, « Intérieur nuit - Patrick Lanneau à la Maison des Arts de Créteil », Télérama, n°2126, 10 octobre 1990, p. 19.
Olivier Céna, Patrick Lanneau, éditions Galerie Macé, Cannes, 1991.
Bernard Chavassu, « Patrick Lanneau : songe à la douceur d'aller là-bas », Artension, mars 1991.
Jean-Michel Charbonnier, « Lanneau, le voleur de feu », Beaux Arts Magazine, n°101, mai 1991.
Agnès de Maistre, « La création à Nice dans les années 1970-1980 », Cimaise, juin 1991.
Philippe Carteron, « Horizons plastiques - Figurations et émotions de Patrick Lanneau », Le Nouvel Observateur, n°1361, 6 décembre 1991.
Françoise Woimant, Marie-Cécile Miessner et Anne Mœglin-Delcroix, De Bonnard à Baselitz - Estampes et livres d'artistes, B.N.F., 1992.
Philippe Carteron, « Un maelström fait vibrer les toiles de Patrick Lanneau », Le Nouvel Observateur, n°1436, 20 mai 1992.
Méditerranée 1 - Marie-Lyne Constantini, Patrick Lanneau, Bernard Pagès, Serge Plagnol, Publications de l'Hôtel des arts, Conseil général du Var, 2002.
Christine Jean et Alain Pusel, « Entretien avec Patrick Lanneau », Art et Nature, n°1, 2002.
Sophie Braganti, « Entretien avec Patrick Lanneau », Méditerranées, n°5, 2003.
Claude Renaudo (préface), Daniel Biga, Sophie Braganti, Ondine Bréaud-Holland, Sur la piste des éléments - Patrick Lanneau, Frédérique Nalbandian, éditions du Centre d'art contemporain du château de Carros, 2012.
Radiophonie
Valérie Bertrand, interview de Pierre Lanneau à propos de son exposition à la Maison des Arts de Créteil, émission de Pierre DescarguesLes arts et les gens, France Culture, 3 décembre 1990.