Les premières traces d’un embryon de parlement datent du protectorat, plus précisément de l’ordonnance du signé par le roi Sisowath et créant une assemblée consultative de 39 membres chargés de représenter les provinces et les municipalités. Le statut changera après la seconde Guerre mondiale avec la volonté d’octroyer une constitution au Cambodge et de créer une assemblée constituante élue au suffrage universel et qui, une fois la constitution adoptée, se transforme en Assemblée nationale[1]. Dans le même temps un conseil du royaume est créé. Ses membres ont l’initiative des lois, examinent également les textes adoptés en première lecture par les députés et peuvent proposer des amendements qui doivent toutefois être finalement approuvés par l’Assemblée[2].
Concernant les formations représentées, la plupart se contentent de soutenir les réseaux de clientélisme mis en place par leurs dirigeants respectifs. Seul le parti démocrate se démarque par un réel programme politique incluant la mise en place d’un État indépendant claqué sur la quatrième République française. De telles vues ne peuvent qu’irriter le pouvoir colonial peu enclin à se retirer[3]. Ces derniers bénéficient d’un allié de poids en la personne du jeune roi Norodom Sihanouk, peu enthousiasmé par le rôle de pure figuration qu’on veut lui faire jouer. Si finalement la formation démocrate obtient la majorité absolue dans toutes les assemblées élues pendant près de dix ans, son action est contrariée par des dissolutions à répétition du parlement et la mise en place à plusieurs reprises de l’état d'urgence qui permet au roi de gouverner sans en référer aux députés[4]. Finalement le monarque coupera l'herbe sous le pied des démocrates en faisant sienne leurs idées autonomistes mais sans les associer à son action. Ce sera en définitive lui qui obtiendra seul l’indépendance de son pays en 1953[5].
Mais dès 1955, Norodom Sihanouk abandonne son trône pour mieux se consacrer à la politique et créer sa propre formation, le Sangkum Reastr Niyum, qui monopolisera les sièges à l’assemblée et le pouvoir pendant une quinzaine d’années. Même si dans les textes l’opposition reste tolérée, dans les faits ses militants sont soit fortement incités à rejoindre le parti majoritaire soit condamnés au silence ou à la clandestinité[6]. Ce régime prend fin le , quand Norodom Sihanouk est déposé par les députés élus en 1966 et essentiellement issus de l’aile droite de son mouvement[7]. Ces derniers proclament, le 9octobrede la même année, la république khmère[8]. L'Assemblée reste en place jusqu'aux élections législatives du . Alors qu’il parait clair que le scrutin a toutes les chances d’être émaillé d’irrégularités visant, avec le soutien de l’armée, à assurer la victoire du parti du président Lon Nol, les deux principales formations d'opposition décident de se retirer de la course et seules 10 des 126 circonscriptions présentent plusieurs candidats. Il s'ensuit une victoire écrasante du parti au pouvoir[9].
À la suite de la chute de la république khmère le , les chambres du parlement sont suspendues par les dirigeants khmers rouges jusqu'à l'élection, le d'une Assemblée des Représentants du peuple où seuls peuvent se présenter des candidats justifiant de « bons états de service dans la lutte révolutionnaire pour la libération du peuple et de la nation ». Elle ne sera convoquée qu'une seule fois, du 11 au [10].
Le , une seconde chambre - l'actuel sénat - est créée. Toutefois, il semble communément admis que cette mise en place répond moins à un manque législatif qu'au besoin de créer des postes à responsabilité pour régler les troubles consécutifs aux élections de 1998[13].
L’assemblée nationale vote l’impôt[14] et les lois[15].
Elle peut révoquer le gouvernement par une motion de censure adoptée par au moins la moitié de ses membres[16]. En contrepartie, elle peut être dissoute par le roi sur proposition du premier ministre et après accord de son président, si le gouvernement a été renversé au moins deux fois dans les dix-huit derniers mois[17].
Le Sénat a été créé par la révision constitutionnelle de [18].
Son rôle est d’examiner les lois adoptées en première lecture par l’Assemblée nationale et d’émettre au besoin des propositions d’amendement qui devront être à nouveau approuvés par la chambre basse avant que le texte ne soit définitivement promulgué[19].
Son président est le deuxième personnage de l’État et remplace le roi dans ses fonctions officielles quand il en est empêché[20].
Rôles et responsabilités
Mise à part la prépondérance de l’Assemblée dans le domaine législatif et le contrôle du gouvernement que la constitution réserve aux seuls députés, les rôles des membres des deux chambres restent globalement similaires[21].
Sauf précision contraire, cette section de l'article a pour source : la constitution du royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 amendée en février 2008[22].
Avoir le droit de vote Être âgé d'au moins 25 ans Avoir la nationalité khmère de naissance
76
Avoir le droit de vote Être âgé d'au moins 40 ans Avoir la nationalité khmère de naissance
99
Durée normale du mandat
5 ans
78
6 ans
102
Possibilité de renouvellement du mandat
Illimitée
76
Illimitée
99
Dissolution
Par le roi, sur proposition du premier ministre et avec l'accord du président de l'Assemblée nationale Uniquement si le gouvernement a été renversé deux fois dans les douze derniers mois.
78
Dissolution interdite pendant l'état d'urgence.
86
Prolongation
Prolongation d'un an renouvelable en cas de circonstances exceptionnelles empêchant le tenue d'élections Proposée par le roi et approuvée par deux tiers des députés.
78
Prolongation d'un an renouvelable en cas de circonstances exceptionnelles empêchant le tenue d'élections Proposée par le roi et approuvée par deux tiers des sénateurs.
Partagée avec l’Assemblée nationale et le premier ministre
91
Approbation du budget de l'État, de la création, modification ou suppression d'un impôt
Vote à la majorité absolue
90
Approbation d'une loi
Vote à la majorité absolue en première lecture avant examen par le Sénat
90
Examen des textes de lois adoptés en première lecture par l'Assemblée nationale S'il est accepté en l'état la loi est promulguée Sinon il repasse devant les députés pour un nouvel examen et promulgation.
113
Sauf si elle remet en cause l'indépendance, la souveraineté, l'intégrité territoriale, l'unité politique ou l'administration du pays
92
Proposition d'amendement d'une loi
Sauf si la loi tend à diminuer les recettes publiques ou à augmenter les charges des citoyens
91
L’amendement doit être approuvé par l’Assemblée nationale
113
Approbation d'un traité international
Vote à la majorité absolue
90
Sauf s'il remet en cause l'indépendance, la souveraineté, l'intégrité territoriale, l'unité politique ou l'administration du pays
↑Pierre-Lucien Lamant, « Les partis politiques et les mouvements de résistance khmers vus par les services de renseignement français (1945-1952) », Guerres mondiales et conflits contemporains, no 148, , p. 79-96.
↑Marie-Alexandrine Martin, Le mal cambodgien : histoire d'une société traditionnelle face à ses leaders politiques, 1946-1987, vol. 4, Hachette, coll. « Histoire des gens », , 304 p. (ISBN978-2-01-012251-4), p. 65-67.
↑David Porter Chandler (trad. de l'anglais par Christiane Lalonde), Une histoire du Cambodge, Paris, Les Indes savantes, coll. « Asie », , 240 p. (ISBN978-2-84654-287-6), chap. 11 (« De l'indépendance à la guerre civile »), p. 181-191.
↑William Shawcross (trad. Françoise Bonnet), Une Tragédie sans importance : Kissinger, Nixon et l'anéantissement du Cambodge [« Sideshow »], F. Adel, , 438 p. (ISBN9782715802186), chap. VIII (« Le coup d'État »), p. 120-125.
↑(en) Elizabeth Becker, When the War Was Over : Cambodia and the Khmer Rouge Revolution, PublicAffairs, coll. « History / Asian Studies », , 632 p. (ISBN978-1-891620-00-3), p. 145.
↑Solomon Kane (trad. de l'anglais par François Gerles, préf. David Chandler), Dictionnaire des Khmers rouges, IRASEC, , 460 p. (ISBN9782916063270), « Élections du 20 mars 1976 », p. 125-126.
↑(en) Wim Swann, 21st century Cambodia : view and vision, Global Vision Publishing House, , 372 p. (ISBN978-81-8220-278-8), p. 110-115.
↑Gregory Mikaelian et Alain Forest (dir.), Cambodge contemporain, Les Indes savantes, , 525 p. (ISBN9782846541930), partie II, chap. 2 (« Pour une relecture du jeu politique cambodgien : le cas du Cambodge de la reconstruction (1993-2005) »), p. 157.
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource), chap. VII (« De l'Assemblée nationale »), article 90
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource), chap. II (« Du roi »), article 28
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource), chap. VII (« De l'Assemblée nationale »), article 98
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource), chap. VII (« De l'Assemblée nationale »), article 78
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource), chap. VIII (« Du Sénat »), article 113
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource), chap. II (« Du Roi »), article 30
↑Jean-Marie Crouzatier, Transitions politiques en Asie du Sud-Est : les institutions politiques et juridictionnelles du Cambodge, Toulouse, Presses de l'Université Toulouse 1 Capitole, , 182 p. (ISBN9782361701048, présentation en ligne), partie II, chap. 3 (« Un régime politique ambigu - Un parlementarisme déséquilibré »), p. 116.
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource).
↑Jean-Marie Crouzatier, Transitions politiques en Asie du Sud-Est : les institutions politiques et juridictionnelles du Cambodge, Toulouse, Presses de l'Université Toulouse 1 Capitole, , 182 p. (ISBN9782361701048, présentation en ligne), partie II, chap. 3 (« Un régime politique ambigu - Un parlementarisme déséquilibré »), p. 106.
↑Jean-Marie Crouzatier, Transitions politiques en Asie du Sud-Est : les institutions politiques et juridictionnelles du Cambodge, Toulouse, Presses de l'Université Toulouse 1 Capitole, , 182 p. (ISBN9782361701048, présentation en ligne), partie II, chap. 3 (« Un régime politique ambigu - Un parlementarisme déséquilibré »), p. 107.
↑Constitution du Royaume du Cambodge du 24 septembre 1993 : Amendée en février 2008 (lire sur Wikisource), chap. X (« Du gouvernement royal »), article 120