La construction de l'institut est d'abord envisagée en dans le quartier des Épinettes, dans le 17e arrondissement[1]. Néanmoins, la destruction en de l'usine à gaz d'Ivry libère un terrain pour l'aménagement du parc de Choisy, demandé depuis par le conseiller municipal communiste Louis Gélis[1]. Le projet de l'institut vient donc se greffer sur celui du parc et sera bâti sur son emprise[1]. Le parc est dessiné par un autre architecte de la Ville de Paris, Roger Lardat[1].
Lors de la Libération de Paris en , ce bâtiment est tenu par des FTP, souvent des résistants de la dernière heure (baptisé ironiquement FFS pour « Forces françaises de septembre »[6]) avec à leur tête le capitaine Bernard (René Sentuc) nommé par le colonel Fabien. Le bâtiment sert officiellement, lors de l'Épuration, de centre de répression contre les collaborateurs, mais devient officieusement un centre clandestin de séquestration et d'exécution, où plus de deux cents personnes sont incarcérées et torturées, souvent sur simple dénonciation, entre le et le [6].
Le collaborateur Jean-Pierre Abel, arrêté le , y passe 76 jours et publie en L'Âge de Caïn[7] dans lequel il raconte sa détention.
Arrêtée par erreur, Madeleine Goa est fusillée dans l'enceinte de l'institut et son corps criblé de balles sera retrouvé abandonné dans la rue par la police ; son mari est jeté sous un char de la division Leclerc. Après enquête, il s'avère qu'ils avaient protégé des résistants et caché des Juifs et des parachutistes. Trente-huit personnes détenues dans l'institut sont exécutées sur les bords de la Seine et leurs cadavres sont par la suite repêchés[2],[8].
René Sentuc ne sera arrêté pour ces faits qu'en , mais bénéficiera de la loi d'amnistie de pour les infractions commises pendant la guerre[9].
En , le polar J'étais le collabo Sadorski[10] de Romain Slocombe prend pour scène l'Institut dentaire pendant l'épuration[11].
Après guerre
Après la guerre, le bâtiment retrouve sa vocation et abrite un centre bucco-dentaire de la mairie de Paris.
En , deux laboratoires de la mairie de Paris s'y installent, dans l'espace laissé vide par la baisse d'activité[12] : le laboratoire d'hygiène de la ville de Paris (LHVP) et le laboratoire d'étude des particules inhalées (LEPI).
Le bâtiment est inscrit dans sa totalité aux monuments historiques par arrêté du [13]. En , dans le cadre du projet « Réinventer Paris 2 », son réaménagement est confié à la Compagnie de Phalsbourg[14].
Description
Bâtiment
Le bâtiment est construit sur une ossature métallique supportant une double paroi de briques rouges[15], dont les joints horizontaux sont accentués et les joints verticaux diminués[16]. L'architecture de l'institut, « sobre et monumentale, peut être vue comme un savant compromis entre le style épuré des avant-gardes et un respect des modes de composition à la française »[17].
Sur l'aile est, George Eastman, fondateur de Kodak, offrant à la France l'institut de stomatologie qui porte son nom représente l'Amérique, accompagnée du dieu de la médecine Esculape avec son serpent, traversant l'Atlantique sur une barque ornée des étoiles du drapeau américain, pour offrir l'institut à la France et à un enfant qui lui tendent les bras[18],[19].
Sur l'aile ouest, La Santé publique triomphant de la maladie[20],[21],[22] représente la maladie vaincue par la médecine, personnifiées par l'hydre tuée par Hercule, dans le deuxième de ses douze travaux. L'hydre prend ici la forme d'une créature au corps humain avec deux queues de serpent à la place des jambes, dont l'une empoisonne un enfant ; elle est terrassée par un Hercule triomphant, armé de sa massue à la main droite et d'un pavot à la main gauche[18],[19].
↑Jean-Pierre Abel (pseudonyme de René Château), L'Âge de Caïn : Premiers témoignages sur les dessous de la libération de Paris, Paris, Les Éditions nouvelles, , 239 p.
↑Bernard Marrey, « La maçonnerie : À Paris au début du siècle », Monuments historiques, no 185 « Le patrimoine en brique », , p. 85–86.
↑Simon Texier, Action artistique de la ville de Paris, Le 13e arrondissement : Itinéraires d'histoire et d'architecture (publié à l'occasion de l'exposition Paris en 80 quartiers à la mairie du 13e arrondissement, – ), Paris, Mairie de Paris, Direction générale de l'information et de la communication, coll. « Paris en 80 quartiers » (no 13), , 143 p. (ISBN2-913246-13-3), p. 65.
↑ ab et cGeneviève Sarrabezolles-Appert et Marie-Odile Lefèvre, Carlo Sarrabezolles : Sculpteur et statuaire, –, Paris, Somogy, (réimpr. 2003), 191 p. (ISBN2-85056-572-5 et 2-85056-646-2), p. 152–153.