La princesse n'a quasiment pas connu son père, assassiné au mois de mai suivant sa naissance et est élevée avec son frère Gaston, duc d'Orléans, d'un an son aîné, par leur mère. Cela ne l'empêche pas pour autant d'hériter du caractère entreprenant, courageux de son père. Elle possède également des traits de caractère de sa mère : pieuse, généreuse, intellectuelle[1], avec un goût prononcé pour l'art.
Henriette-Marie est séparée de sa mère entre 1617 et 1620 (période où la reine mère est exilée loin de Paris). Son frère, le roi Louis XIII, donne sa main au prince Charles Stuart, futur roi Charles Ier d'Angleterre et d'Écosse, le (soit à quinze ans)[3]. Grâce à son parrain, la fiancée peut épouser l'héritier du trône d'Angleterre, bien que Charles soit protestant et non catholique. Ainsi, elle part pour se marier avec un cortège de douze prêtres de l'Oratoire. C'est George Villiers de Buckingham, favori de son époux, qui vient en France négocier son mariage, c'est à cette occasion qu'il courtise la reine Anne d'Autriche, ce qui provoque l'ire de son époux le roi Louis XIII (frère d'Henriette).
Bustes de Charles Ier et d'Henriette-Marie de France, XVIIe siècle.
Jusqu'en 1628, George Villiers de Buckingham fait barrage entre la reine et le roi, mais après l'assassinat de Buckingham, Henriette-Marie peut se rapprocher de Charles Ier. La naissance de leurs enfants, à partir de 1629, rapproche les deux époux, et Henriette-Marie acquiert beaucoup d'influence sur son mari.
Française, elle le pousse dans le sens d'une politique autoritaire et centralisatrice, ainsi que vers une plus grande tolérance envers les catholiques. En effet, Henriette, fort pieuse et opiniâtre comme sa mère, pratique ostensiblement le catholicisme, ce qui irrite les puritains anglais. Suivant les clauses de son contrat de mariage négocié entre les cours de France et d'Angleterre elle est venue de France avec un certain nombre de prêtres, dont son aumônier, Jean Paumart. En outre, la Reine exerce une influence sur les spectacles à la Cour.
Elle devient de plus en plus impopulaire car les puritains la soupçonnent de vouloir éradiquer le protestantisme au profit du catholicisme. La famille royale est même obligée de se réfugier un temps à Oxford, car Cromwell menace d'arrêter la souveraine, ayant déjà fait arrêter certains de ses fidèles. Simultanément, les Écossais se rassemblent pour marcher droit sur la capitale pour prendre la défense de la reine.
Lors de la guerre civile, elle profite de son voyage en 1642 dans les Provinces-Unies où elle accompagne sa fille Marie qui épouse Guillaume II d'Orange-Nassau pour réunir des fonds et une petite armée gagnée à la cause royale. Elle revient à Newcastle en , après avoir survécu à une tempête au cours de laquelle la reine a un mot qui manifeste son courage et rappelle les manières de son père : « Les reines ne se noient pas. » Arrivée à bon port, elle est accueillie à coups de canons par cinq vaisseaux rebelles. Afin de se protéger, elle est contrainte de passer la nuit dans un fossé sale qui la couvre de sable. Grâce à l'armée qu'elle a réunie, elle parvient à rejoindre le roi à Oxford. Cependant, celui-ci décide de diviser les troupes en deux dans le but de réprimer les rébellions, ce qui se révèle une erreur, diminuant ainsi les forces de son armée.
Une nouvelle grossesse éloigne la reine des conflits en . Elle se retire à Exeter pour donner le jour, dans une chaumière, à une fille : Henriette Anne.
Portrait d'Henriette-Marie, reine d'Angleterre, de profil, 1638 Royal Collection.
Exil en France
Malgré la fatigue de l'accouchement, elle est déterminée à rejoindre Paris car le Parlement de Londres offre cinquante mille écus à quiconque rapporte la tête de la souveraine. Elle finit par s'embarquer à Plymouth et réussit à s'enfuir, même avec les voiles de son navire déchirées par les boulets de canons. Devant la fureur de ses assaillants et ne voulant pas tomber en leurs mains vivante, elle ordonne au capitaine : « Quand vous ne pourrez plus me défendre, tuez-moi. »
Le , Henriette de France, reine d'Angleterre en fuite, débarque « en un petit havre nommé Mellon [Melon, en Porspoder] ». Son navire croise toute la journée devant la grève, ce qui inquiète les habitants, craignant une attaque, ce qui la force à parlementer. « Toute la coste estant en armes l'obligea de faire mettre un mouchoir au bout d'un baston ». La reine débarque en piteux équipage ; elle loge dans une petite maison couverte de toit de chaume. Elle est cependant solennellement accueillie à Brest, puis dans d'autres villes bretonnes (dont Vannes, rue des Chanoines, dans l'Hôtel de l'Archidiaconat), le long de son trajet vers la capitale[4].
Elle ne revoit plus jamais le roi son mari, qui est emprisonné puis condamné à mort. Charles Ier est décapité le . Henriette-Marie, apprenant la nouvelle en France, est effondrée et décide de créer un couvent de la Visitation, à Chaillot, dans lequel elle se retire tout en parachevant l'éducation de ses enfants dans la foi catholique. Quelques années plus tard, elle marie la fille qu'elle mit au monde dans la détresse, Henriette Anne, à son neveu Philippe de France, duc d'Orléans et frère de son autre neveu Louis XIV.
Elle a la joie de revoir ses fils Charles et Jacques, qui parviennent à s'enfuir d'Angleterre, mais elle perd sa fille Élisabeth, prisonnière des puritains (). La reine veuve reste en France avec sa fille Henriette Anne, tandis que le cardinal Mazarin, principal ministre du jeune Louis XIV, neveu d'Henriette, oblige Charles et Jacques à quitter le Royaume, voulant l'alliance de la république anglaise contre l'Espagne. Henriette-Marie vit près de Paris, à Colombes, dans une certaine gêne matérielle, restant des journées entières au lit faute de pouvoir acheter du bois pour chauffer sa demeure.
En 1660, elle accompagne son fils Charles II à Londres lors de la restauration anglaise et assiste à son mariage avec l'infante Catherine de Portugal, richissime et catholique. Cependant, elle ne supporte plus le climat humide d'Angleterre et souffre de bronchite. Elle décide de rentrer en France en 1665 pour se préparer à la mort dans son monastère de Chaillot. Résidant d'abord à Paris dans l'hôtel de la Bazinière, malade et insomniaque, elle est soignée par les médecins que son neveu Louis XIV lui envoie. Le , elle meurt au château de Colombes.