L'abbaye a toujours été dédiée à saint Jacques le Mineur, bien qu'on lui associe très souvent l’apôtre de Compostelle. Dès le début, l'école monastique devint célèbre et l'abbaye florissante ; les moines fondèrent le monastère de Lubin en Pologne, ainsi que le prieuré de Saint-Léonard dans le quartier nord de Liège.
L'abbatiale abritait le tombeau d'un évêque étranger du nom de Jean : sarcophage avec le gisant en tuffeau, vêtu des ornements pontificaux, la tête sous un dais et les pieds sous une console. Remplacé dans Saint-Jacques en 1906, par une copie du sculpteur louvanistePaul Roemaet, l'original a été transféré dans la cathédrale Saint-Paul et remonté dans la salle des archidiacres du trésor de la cathédrale Saint-Paul. On ne sait pas grand chose de Jean, évêque italien en exil, artiste peintre appelé par Otton III pour décorer l'église d'Aix-la-Chapelle. Son épitaphe en latin a été retranscrite par le chroniqueur Gilles d'Orval vers 1250 :
« Arrête, lis ce que tu vois, et que ton tendre cœur ait pitié de moi le tombeau annonce ce que je suis, l'inscription ce que je fus. Né en Italie, revètu du pontificat, moi, Jean, J'ai du m'enfuir chassé de mon siège épiscopal Exilé sans honneur, je fus envoyé en ces régions La ville compatissante de Liège me prêta un asile Saint-Jacques, souvenez-vous de votre fidèle élève, c'est sur mes conseil que cette demeure fut édifiée en votre honneur. »
Jean aurait en effet conseillé à l'évêque Baldéric, successeur de Notger, de bâtir le monastère bénédictin de Saint-Jacques ; c'est l'abbé Jean de Coromeuse (1507-1525) constructeur de l'église gothique qui remit à l'honneur le tombeau de l'évêque Jean et le doyen Émile Scoolmeester qui sauva le monument en 1906. Le nouveau mausolée conserve les ossements du prélat et la tradition rapporte que des miracles se sont produits auprès de ceux-ci[1].
De la collégiale à l'église paroissiale
L'abbaye de Saint-Jacques fut sécularisée par le pape Pie VI le et transformée en collégiale pour vingt-cinq chanoines. L'empereur Joseph II approuva ce changement le suivant. Le même pape supprima l'abbaye de Saint Gilles le et réunit ses revenus à ceux de Saint-Jacques où sept nouveaux canonicats réductibles à cinq furent établis pour les moines de Saint-Gilles. Le nouveau chapitre se composa alors de trente chanoines comme ceux des autres collégiales liégeoises.
Après le concordat de 1801, l'église fut rendue au culte en 1803 en tant qu'église paroissiale. Elle fut restaurée une première fois au XIXe siècle, de 1832 à 1869[2], par les architectes Jean-Charles Delsaux et Auguste Van Assche. La seconde restauration importante a eu lieu entre 1972 et 1975 ; des fouilles archéologiques ont alors permis de retrouver les vestiges de la crypte romane et les fondations de l’église primitive.
Description
L'église gothique actuelle, dont la construction fut achevée en 1538, remplaça l'église romane primitive. La voûte et ses peintures sont de la même époque, ainsi que les vitraux du chœur datés de 1525 à 1531. Le portail Renaissance ajouté en 1558 est attribué à Lambert Lombard. L'église primitive comportait un avant-corps roman et un clocher octogonal daté des environs de 1170[2]. Seul l'avant-corps avec une de ses trois tours a été conservé.
Parmi les éléments les plus remarquables, la nef, véritable dentelle de pierre ; la voûte comptant plus de 150 clés de voûte dans la nef centrale ; les stalles du XIVe siècle ; le buffet d'orguesRenaissance et son instrument en style Renaissance reconstruit par la Manufacture d'orgues Schumacher d'Eupen[3] ; le vitrail avec les armoiries des 32 vieux métiers (XVIe siècle) ; les statues baroques de Del Cour et de son école (fin XVIIe siècle) ; et le couronnement de la Vierge (groupe sculpté du XIVe siècle).
Structure et dimensions
L'église mesure 90 m de long, du narthex à la chapelle rayonnante de l'abside. La nef, composée de six travées et flanquée de collatéraux, est longue de 38 m et large de 11,5 m. Les voûtes s'élèvent quant à elles à 22,5m au-dessus du sol. Le chœur, long de 23 m, se termine par une abside semi-circulaire à cinq pans, chacun flanqué à la base d'une chapelle rayonnante. Comme la plupart des églises, Saint-Jacques a un plan en forme de croix latine avec un transept long d'un peu plus de 26 m[4],[5].
Vitraux
Les vitraux de Saint-Jacques sont considérés par certains auteurs comme peut-être les plus beaux de la Belgique[6],[7], l'archéologue françaisAdolphe Napoléon Didron n'hésite même pas à les classer en tête de tous ceux qui subsistent du XVIe siècle[8],[9].
Abside
L'abside compte cinq vitraux réalisés et mis en place entre 1525 et 1531, ils furent restaurés entre 1838 et 1841 par Jean-Baptiste Capronnier. Ils furent en grande partie donnés par les familles de Hornes et de la Marck, après des années de haine et d'hostilités, lors de la réconciliation de ces lignages par l'union de Marguerite, fille de Jacques de Hornes, avec Évrard, fils d'Évrard III de La Marck.
Le grand vitrail à gauche est daté de 1531 et représente le donateur Jacques de Hornes, chevalier de la Toison d'or, agenouillé devant la Sainte Trinité, protégé par saint Jacques ; derrière lui se trouvent ses deux femmes, Marguerite de Croy et Claudine de Savoie à genoux devant Notre-Dame des Douleurs, leurs patronnes et la levrette symbole de la fidélité. Le tout est entouré de seize quartiers armoriés, paternels et maternels du donateur ; dans la partie supérieure et les entrelacs le Christ et des anges portant des attributs.
La fenêtre centrale a été donnée par Jean de Cromois, abbé de Saint-Jacques de 15061525 ; elle représente le sacrifice du Calvaire, celui d'Isaac et le Serpent d'airain, ces deux derniers prophétiques de celui de la Croix.
Le vitrail suivant, daté de 1525, représente saint André avec les seize quartiers armoriés du donateur Évrard III de La Marck, présenté par saint Christophe et agenouillé devant le Sauveur qui lève la main pour le bénir.
Enfin à la dernière verrière, Marguerite de Hornes, épouse d'Évrard IV de La Marck ; derrière elle sa patronne et la Vierge entourée d'une gloire complète. Dans le haut, saint Jean l'Évangéliste et les quartiers armoriés de la donatrice.
Index des artistes
Liste chronologique des artistes ayant travaillé à l'église Saint-Jacques, ou dont une œuvre se trouve dans l'église.
« La merveille de Liège, c'est l'église Saint-Jacques. Les voyageurs en citent de plus belles ; je doute qu'il y en ait de plus gracieuses. C'est l'architecture gothique, avec toute la richesse de l'art arabe, dont elle est née. »
↑Liège, La cité des princes évêques, Du musée Curtius au trésor de la Cathédrale, Feuillets de la Cathédrale de Liège, n° 53-59, 2001, Visite du Trésor III, - Complément aux feuillets n° 8, 1993 ; Visite I, et n° 39-41, 1998, Visite II.
↑ a et bÉmile Poumon, Abbayes de Belgique, Bruxelles, Office de Publicité, , 127 p., p. 95
↑Edmond Lévy, Histoire de la peinture sur verre en Europe et particulièrement en Belgique, Bruxelles, Tircher, (lire en ligne), partie 2, p. 60
↑Louis Abry, Recueil héraldique des bourguemestres de la noble cité de Liege : où l’on voit la genealogie des evêques et princes, de la noblesse, et des principales familles de ce païs, Jean-Philippe Gramme, (lire en ligne), p. 253
Cartulaire de l'abbaye de Saint-Jacques de Liège, bibliothèque du Chapitre de Trêves.
Articles
Sylvain Balau, « La bibliothèque de l’abbaye de Saint-Jacques à Liège », Bulletin de la Commission royale d'Histoire, t. 2, , p. 1-61 (lire en ligne, consulté le )
Antoine Baudry, « Les trous de pince : quelques observations sur le porche septentrional de l'ancienne abbatiale Saint-Jacques à Liège (ca. 1550) », Chronique d'Archaeologia Mediaevalis, t. 39, , p. 11-13
Ursmer Berliere, « La sécularisation de l’abbaye de Saint-Jacques à Liège », Revue Bénédictine, t. 33, , p. 173-189
André Boutemy, « Un grand abbé du XIe siècle : Olbert de Gembloux », Annales de la Société archéologique de Namur, t. 41, , p. 43-85 (lire en ligne, consulté le )
T.-J. Devroye, « Rapport relatif à la restauration de l’église Saint-Jacques à Liège », Bulletin des Commissions royales d'Art et d'Archéologie, t. 9, , p. 412-428 (lire en ligne, consulté le )
Eugène-M.-O. Dognee, « La restauration de l’église Saint-Jacques », Annales de la Société l’union des artistes, t. 4, , p. 182-227 (lire en ligne, consulté le )
Jean-Pierre Delville, Yves Jacques et Xavier Tonon, « La restauration du porche de l’église Saint-Jacques à Liège », Bulletin de la Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles, no 29, , p. 53-76 (ISBN978-2-9601866-1-1, résumé)
Hubert Colleye, Dans la paix des vieilles églises, Saint-Paul, les cloîtres de Saint-Paul, Saint-Jacques, Saint-Martin, Sainte-Croix, Liège, , 57 p., p. 37-46
Ch.-J. Comhaire et André Dubois, La chapelle des maîtres de la cité dans l’église Saint-Jacques à Liège, Liège,
Jean-Charles Delsaux, L’église Saint-Jacques à Liège, plans, coupes, ensembles, détails intérieurs et extérieurs, mesurés, dessinés et publiés, Liège, Avanzo, , 20 p. (lire en ligne)
Louis Gothier, L’église Saint-Jacques à Liège, Liège, Le Vieux-Liège, coll. « Fascicules archéologiques de la société royale Le Vieux-Liège », , 4e éd., 34 p.
Louis Hendrix, L’église Saint-Jacques à Liège, Liège, , 75 p. (lire en ligne)
Arthur Moreau, Chronique de la paroisse Saint-Jacques à Liège, 1900-1960, Liège, Buteneers, , 228 p.
Fabrice Muller et Richard Forgeur, Bibliographie de l'église Saint-Jacques à Liège, Liège, Buteneers, 1997-2005, 2e éd., 49 p.
Gustave Ruhl, L’église Saint-Jacques à Liège, Liège, , 28 p. (lire en ligne)
Émile Schoolmeesters, Description de l’église Saint-Jacques à Liège, Liège, , 13 p.
Émile Schoolmeesters, Les origines de l’église Saint-Jacques à Liège, Liège, Louis Cemarteau, , 24 p. (lire en ligne)
Émile Schoolmeesters, Bulletin de la paroisse Saint-Jacques, Liège, 1897-1901
Jacques Stiennon, Etude sur le chartrier et la domaine de l’abbaye de Saint-Jacques de Liège (1015-1209), Paris, Les Belles Lettres, coll. « Bibliothèque de la Faculté de Philosophie et Lettres de l’Université de Liège » (no 124), , 514 p. (ISBN2-251-66124-7, lire en ligne)
Eugène Thys, Guide historique et artistique dans les églises Saint-Paul, Saint-Jacques, Saint-Jean, Saint-Denis, et Saint-Antoine et suivi d’un catalogue du Musée Communal liégeois à Liège, Liège, , p. 14-18
(en) John Weale, Divers Works of early Masters in christian décoration, Londres, John Weale, , p. 41-52