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Philippe est sans doute le premier prince en Europe occidentale à recevoir ce prénom, d'origine grecque, ce qu'il doit probablement à « l'ascendance byzantine[2] » de sa mère Anne de Kiev. Son accession au trône fera de « Philippe » le premier prénom non germanique porté par un roi de France[3].
Ce choix de prénom évoque un « rêve impérial[4] » qui se poursuit à la génération suivante : Philippe donne à son héritier le nom de Louis, référence à Clovis et à Louis le Pieux[2].
Couronnement
Henri Ier, père de Philippe et roi des Francs, sentant ses forces s'affaiblir, décide de faire sacrer son fils de son vivant selon la coutume de l'époque, et donc d'en faire un roi associé comme l'avaient fait Hugues Capet et Robert II envers leur héritier présomptif. Les grands seigneurs du royaume, l'assemblée des grands ainsi que le prélat envoyé par le papeNicolas II, Hugues de Besançon, approuvent ce « passage de témoin » et Philippe est couronné à Reims le du vivant de son père[5].
Sous son règne se dessinent les grandes lignes de la politique des souverains capétiens du XIIe siècle : assurer une base réelle à la puissance royale en consolidant le domaine, et abaisser ou contenir les trop puissants vassaux, chose que son père avait échoué à appliquer, provoquant une forte diminution du prestige et du pouvoir royal.
Agrandissement du domaine royal
Pour agrandir le domaine royal, il s’empare d’une partie du Vermandois, du Gâtinais (1069), du Vexin français (1077). En 1101, il rachète pour une forte somme (60 000 sols d’or) la vicomté de Bourges et la seigneurie de Dun-le-Roi à Eudes Arpin[8], un chevalier qui part à la croisade. Il développe l’administration royale et, pour assurer des revenus à la couronne, dispose des biens de l’Église et vend les charges ecclésiastiques, ce qui lui attire les foudres des réformateurs grégoriens.
En 1076, Philippe inflige une grave défaite à Guillaume près de Dol-de-Bretagne. L’année suivante, fort de sa victoire, Philippe Ier s’empare du Vexin français, possession de Simon de Vexin (fils de Raoul de Crépy, beau-père de Philippe Ier[note 1]), qui se fait moine, avec les châtellenies de Mantes et de Pontoise. Guillaume le Conquérant renonce à la Bretagne et fait la paix avec Philippe Ier. Ce dernier reste toutefois inquiet de la menace anglo-normande. Selon une politique qui sera reprise par ses successeurs, il s’efforce de développer les dissensions à l’intérieur de la famille du Conquérant.
En 1078, il prend parti pour Robert Courteheuse ou Courtecuisse, le fils aîné de Guillaume, qui s'est révolté contre son père. Après avoir confié la garde du château de Gerberoy, à côté de Beauvais, à Robert, il semble que Philippe Ier se soit retourné contre ce dernier. On le retrouve en 1079, en train d'assiéger le château en compagnie de Guillaume, qui est blessé au cours du siège. Peu après, Robert Courteheuse obtient le gouvernement de la Normandie. Le roi capétien reçoit en récompense la ville de Gisors située sur la rive droite de l’Epte.
Échec contre les vassaux rebelles
En février 1079, alors que le roi hiverne à Étampes, éclate une rébellion de ses vassaux directs, menée par Hugues Blavons, seigneur du Puiset[9]. Au printemps, l’armée royale est écrasée près du Puiset[10]. Le prestige et l'autorité royale en sont durablement affaiblis.
Dans les années qui suivent la mort de Guillaume le Conquérant (1087), Philippe aide Robert Courteheuse qui essaie de récupérer le trône d’Angleterre dont son frère, Guillaume II le Roux, a hérité. Ce dernier tente, en représailles, de lui prendre le Vexin dans les années 1097–1099, mais échoue au cours de trois campagnes successives.
Frappé d'anathème
Au printemps 1092, Philippe s’entiche de Bertrade de Montfort († ), l’épouse de Foulques IV le Réchin. Il répudie alors Berthe de Hollande et se remarie avec Bertrade de Montfort le . En 1093, il signe une charte prononçant la soumission de l'abbaye Saint-Magloire à celle de l'abbaye de Marmoutier[11]. Le , le concile d’Autun où sont réunis trente-deux évêques prononce l’excommunication du roi, le divorce étant prohibé et à plus forte raison le remariage du vivant de la première épouse, jugé comme un adultère[12]. Le couple royal vit ainsi pendant 10 ans sous le coup de l'anathème de l'Église. Philippe et Bertrade se soumettent lors du concile de Paris en 1104 mais malgré leur serment ils poursuivent leur vie commune[13]. Son excommunication s'accompagne, selon Guibert, d'une perte du don du toucher des écrouelles[14].
Philippe confie les opérations militaires dans le Vexin à son fils Louis VI[15], associé à la couronne en 1098.
Après une controverse au sujet du dépositaire de l’évêché de Beauvais, entre 1100 et 1104, Philippe se réconcilie avec la papauté et il est absous en 1104. En 1107, le pape Pascal II rencontre Philippe et le futur Louis VI à Saint-Denis : l’alliance entre le royaume de France et la papauté contre le Saint-Empire est alors scellée pour un siècle.
↑Tout cet épisode a récemment été mis en lumière par Bernard Gineste, « Eustache de Saint-Père : Appel en justice devant le roi à Étampes (8 février 1079) », dans Corpus Étampois (2007).
↑Le récit de cet épisode par Raoul Tortaire, vers 1114, a été édité et traduit par Bernard Gineste dans le Corpus Etampois (2008).
↑Louis Saurel, Ceux qui ont fait la France P.R.E.S., Paris, 1967, « Philippe Ier (1060-1108) », p. 33-34.
↑Bernard Gineste, citant Dom Basile Fleureau : Son mariage prétendu avec Jean d'Étampes repose sur une confusion avec Eustachie, fille de Ferry de Châtillon, fondatrice de l'abbaye d'YerresCorpus Etampois.
Maurice Prou (éditeur), Recueil des actes de Philippe Ier, roi de France (1059-1108), Paris, Imprimerie Nationale, Librairie C. Klincksieck, coll. « Chartes et diplômes relatifs à l'histoire de France publiés par les soins de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres », , CCL-566 p. (lire en ligne).
Bernard Gineste (éd.), « Eustache de Saint-Père : Appel en justice devant le roi à Étampes () », in Corpus Étampois, 2007, [lire en ligne].
Bibliographie
Études historiques.
Georges Duby, Histoire de France Hachette, t. 1 : Le Moyen Âge : de Hugues Capet à Jeanne d'Arc, 987-1460, Paris, Hachette, , 357 p. (ISBN2-01-008878-6)
Réédition : Georges Duby, Histoire de France Hachette, t. 1 : Le Moyen Âge : de Hugues Capet à Jeanne d'Arc, 987-1460, Paris, Pluriel, coll. « Pluriel », , 510 p. (ISBN978-2-8185-0156-6).
Augustin Fliche, Le règne de Philippe Ier, roi de France (1060-1108), Paris, Société française d'imprimerie et de librairie, , XXIII-600 p., in-8 (lire en ligne).
Rolf Grosse, « La royauté des premiers Capétiens : « un mélange de misère et de grandeur » ? », Le Moyen Âge, Louvain-la-Neuve / Paris, De Boeck Supérieur, t. CXIV, , p. 255-271 (lire en ligne).
François Menant, Hervé Martin, Bernard Merdrignac et Monique Chauvin, Les Capétiens : histoire et dictionnaire, 987-1328, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , LXXIX-1220 p. (ISBN2-221-05687-6, présentation en ligne).
Damien Varenne, Espace d'action et d'influence du pouvoir royal sous le règne de Philippe Ier, sous la direction d'Yves Sassier, mémoire déposé à l'université Paris IV-Sorbonne, 2007.