L'embarras ecclésiastique est l'un des cinq principaux critères d'historicité utilisés par les historiens et les spécialistes de l'exégèse historico-critique de la Bible. Il sert à évaluer l'historicité d'un événement ou d'un détail mentionné dans les Écritures. Le principe en est que, si cet élément se révèle embarrassant dans le cadre d'une lecture traditionnelle, voire dogmatique, ou encore s'il a posé une difficulté aux rédacteurs des Évangiles ou à l'Église primitive, il a toutes chances d'être véridique.
Les historiens et exégètes ont d'abord élaboré près d'une quinzaine de critères[2] pour l'analyse des sources historiques, puis leur nombre s'est restreint à quatre critères principaux[3]. Ils doivent être utilisés conjointement[4] et n'ont pas une valeur absolue, l'histoire du christianisme primitif n'étant certainement pas une science exacte. En revanche, « plus le nombre de critères qu'il est possible de conjuguer est élevé, plus la présomption d'authenticité est grande[3] ».
John Paul Meier ajoute la trahison de Judas et le reniement de Pierre, traditions ou logia susceptibles d'embarrasser l'Église et, selon ce critère, peu suspects d'avoir été inventés. Pour l'historien Donald Akenson(en), parmi ces exemples, seul le baptême de Jésus paraît un embarras véritable et donc indicateur d'un authentique événement historique. « (1) La crucifixion n'est guère un embarras pour les auteurs du Nouveau Testament : ils l'intègrent brillamment dans un système religieux où le sacrifice de Jésus-le-Christ remplace le système sacrificiel du Second Temple. (2) Le reniement de Pierre, quoique embarrassant pour une des factions politiques du christianisme d'après 70, n'est pas quelque chose de gênant dans le récit ; il peut être considéré tout au plus comme propagande dans la bataille partisane postérieure pour le contrôle de l'Église. (3) Quant à la trahison de Judas, elle s'insère splendidement dans le récit de la Passion[8]. »
Notes et références
↑Stanley E. Porter(en), Criteria for Authenticity in Historical-Jesus Research, Continuum, 2004, p. 106-107.
↑Jacques Schlosser, « La somme de John P. Meier sur Jésus », Esprit et vie, hors série n° 1 (2006), p. 35.
↑Selon Gerd Theissen, « il n'y a pas de critères fiables pour séparer les traditions authentiques et inauthentiques sur Jésus ». Source : (en) Stanley E. Porter, Criteria for Authenticity in Historical-Jesus Research, A&C Black, , p. 115.
↑Charles Guignebert écrit : « Je fais toutes réserves sur les détails du récit évangélique, je ne crois pas possible de douter de l'historicité de la crucifixion » (Jésus, 1933).
↑John Paul Meier, Un certain Juif Jésus. Les données de l’histoire, t. 1 : Les sources, les origines, les dates, Cerf, Paris, 2005, ch. 6 : « Comment déterminer ce qui vient de Jésus ? », p. 101-118.
↑Donald Harman Akenson, Saint Saul. Clé pour le Jésus de l'histoire, Fides, (lire en ligne), p. 282.
Bibliographie
John Paul Meier, Un certain Juif Jésus. Les données de l’histoire, t. 1 : Les sources, les origines, les dates, éditions du Cerf, Paris, 2005