Le Japon continuant à combattre, cette conférence s'est déroulée avant même la fin de la guerre. Son but était de fixer le sort des puissances qui avaient été ou restaient ennemies des forces alliées. L'Allemagneavait capitulé depuis plus de deux mois, et la victoire était presque imminente sur le Japon qui venait de subir de lourdes pertes territoriales et militaires (le , un ultimatum est signifié à l'empire du Japon, au nom des États-Unis, du Royaume-Uni et de la république de Chine) et qui allait subir deux largages successifs d'une bombe nucléaire américaine (le sur Hiroshima et le sur Nagasaki) et aussi devoir faire face à l’entrée en guerre de l'URSS le . Le , l'empereur du Japon, Hirohito, annonce à la population japonaise qu'il accepte les accords de Potsdam. Le , le Japon signe sa capitulation, et les États-Unis peuvent négocier en position de force[1].
Il s'agit de la seule rencontre entre le président américain Harry S. Truman et Joseph Staline, dirigeant soviétique. L'accord de Potsdam a formellement été signé le .
L'Allemagne voit un déplacement vers l'ouest de sa frontière orientale, perdant environ 25 % de son territoire. La Prusse-Orientale est attribuée à la Pologne et à l'URSS. L'Allemagne perd également la Haute-Silésie, deuxième centre industriel du pays. Les Occidentaux acceptent la nouvelle frontière germano-polonaise, mais seulement de manière provisoire.
L'expulsion d'Europe de l'Est des populations ethniquement allemandes s'effectue dans le vide juridique de l'immédiat après-guerre dans les territoires de la diaspora allemande. Elle est largement entamée de manière spontanée, les Allemands eux-mêmes fuyant devant l'Armée rouge, et elle est habituellement initiée par la nouvelle administration polonaise dans les anciens territoires allemands occupés à l'est de l'Oder et de la Neisse ou initiée par les populations locales. La Tchécoslovaquie entérine légalement cette expulsion ethnique. Dès le , jour de clôture de la conférence, les décrets Beneš retirent la citoyenneté tchécoslovaque aux ressortissants des minorités allemande et hongroise, entamant leur expulsion. Au total, plus de 11 millions d'Allemands ont été expulsés, 2 millions sont morts et 2,6 millions restaient dans les anciens territoires de peuplement allemand.
Les « cinq D » sont mis en place par les pouvoirs d'occupation en coopération avec les nouvelles autorités allemandes : le désarmement ou la démilitarisation (mesures sur lesquelles on reviendra après l'échec de la Communauté européenne de défense lors des accords de Paris de 1954-55) ; la dénazification ou la destruction de tout ce qui se rapporte au nazisme (programme, propagande, lois nazies), mise en place d'opposants au pouvoir nazi ou de représentants de la république de Weimar aux postes importants ; la décartellisation des grands cartels fusionnés sous la tutelle nazie ; et la démocratisation et la décentralisation pour affaiblir le pouvoir allemand, très centralisé pendant le nazisme, en favorisant une régionalisation qui serait moins encline à permettre un État autoritaire.
La question des réparations se heurte aux exigences de Staline, jugées excessives par les Occidentaux. Pour sortir de l'impasse, le secrétaire d'État américain James Byrnes propose un compromis : la fixation du montant total serait confiée à la Conférence des ministres des Affaires étrangères (CMAE), et dans l'intervalle, il était admis que les Soviétiques pouvaient prélever ce qu'ils voulaient dans leur propre zone[2].
Le , un ultimatum, la déclaration de Potsdam, est signifié à l'empire du Japon par le président américain Harry Truman, le premier ministre britannique Winston Churchill et le président chinois Tchang Kaï-chek[3],[4] (l'URSS n'en fait pas partie car le pays n'est pas encore en guerre contre le Japon) : « Nous appelons le gouvernement du Japon à prononcer aujourd'hui la capitulation sans conditions de toutes les forces armées japonaises. […] Sinon, le Japon subira une destruction rapide et totale »[5]. Le territoire du Japon est limité aux quatre îles principales et aux quelques petites îles limitrophes ; les gains territoriaux antérieurs à 1937 (la Corée, Taïwan et le Mandchoukouo) sont libérés de la tutelle nippone. La reddition complète des forces armées est exigée ainsi que l'abdication de l'empereur Hirohito. Les Alliés prônent l'instauration de la liberté d'expression, de pensée et de religion.
Cet ultimatum ne mentionne pas l'arme nucléaire. Durant la conférence, Truman informe Staline de la nouvelle arme des États-Unis qui avait été testée à peine quelques heures avant le début de la conférence. Staline connait déjà l'existence de la bombe nucléaire par ses espions au sein du projet Manhattan. Ce message à Staline est souvent interprété par les historiens[Lesquels ?] de la Nouvelle gauche comme le début de la « diplomatie atomique » en faisant des Américains les initiateurs de la guerre froide avec Truman désormais en position de force dans les négociations face à Staline, qui possède la plus grande armée conventionnelle avec 6 millions de soldats, 300 divisions, 23 300 tanks et 23 400 avions[6],[7].
Le , le premier ministre japonais Kantaro Suzuki prononce une déclaration indiquant qu'il entendait ignorer (mokusatsu 黙殺[5]) cet avertissement au motif qu'il n'était qu'une redite de l'ultimatum du Caire. Cette déclaration ambiguë, reprise dans les médias nippons dont l'Asahi Shinbun, était peut-être émise pour apaiser la faction belliciste de l'armée et de la marine mais était comprise par les Alliés comme la volonté du gouvernement japonais de rejeter toute idée de reddition. La première bombe atomique militaire est alors larguée sur Hiroshima le , puis la seconde le 9 sur Nagasaki, après un second ultimatum de Truman, resté sans réponse[8]. Entre-temps, le , conformément à un engagement pris en février 1945 à la conférence de Yalta, l'URSS déclare la guerre au Japon, le troisième mois qui suit la capitulation allemande.
Le , la donne géopolitique avait changé avec les deux explosions atomiques, Douglas MacArthur refuse le principe d'une occupation conjointe du Japon avec les Soviétiques.
L'abdication de l'empereur n'est alors plus exigée par les Alliés. Certains historiens, comme Jacques R. Pauwels, prétendent que cette clause n'avait été introduite que pour rendre l'ultimatum de Potsdam inacceptable alors que le Japon exsangue et dont la population civile avait été martyrisée par les bombes incendiaires (notamment celles lâchées sur Tokyo en ) était prêt à se rendre, ce qui permettrait aux Américains d'utiliser l'arme atomique et montrer leur puissance face aux Soviétiques[9].
Indochine française
Concernant l'Indochine française, intégralement contrôlée par les Japonais depuis le coup de force du , les Alliés décident, sans consulter la France, de confier le rétablissement de l'ordre au Royaume-Uni et à la république de Chine, les Britanniques devant administrer le sud et les Chinois le nord, les zones d'influence étant délimitées par le 16e parallèle[10]. Cette division devait être toute provisoire et sans réelle signification internationale, mais elle n'allait pas moins contribuer à créer deux États de fait fort distincts[11]. Toutefois, après des négociations, la France réinvestit l'Indochine à la fin de l'année 1945. Le général de Gaulle nomme l'amiral Georges Thierry d'Argenlieu haut commissaire et commandant en chef en Indochine.
↑Et, selon certains historiens, les États-Unis ne manquèrent pas de le faire sentir à Staline. Voir Ian Grey, Stalin, Man of History, chap. La trahison de Potsdam et la fin de la Grande Alliance.
↑ a et bGeorges-Henri Soutou, La Guerre de cinquante ans. Les relations Est-Ouest 1943-1990, Fayard, 2001, p. 95-98.