« Le poste d'Elven, composé de cent cinquante grenadiers du second bataillon de l'Ain et des sapeurs du deuxième bataillon, a été attaqué, le 4 de ce mois, par un rassemblement des communes voisines, que l'on porte au nombre de sept à huit mille hommes.
La sentinelle du poste avancé, voyant des hommes armés s'avancer, crie : Qui vive ? On répond : Républicains français. Le caporal, qui se présente pour reconnaître, est tué. Au même instant, les Chouans pénètrent de toutes parts dans le village, en criant vive le roi, en avant les chasseurs du roi.
Toutes les rues étaient encombrées de cette foule avant que la troupe eût eu le temps de sortir de ses casernes pour se réunir. Alors un feu très-vif se fait entendre. Les grenadiers, bloqués dans leur caserne et décidés à s'y défendre vaillamment, occupent toutes les fenêtres. On les somme de se rendre et de livrer leur commandant, avec la promesse de ne leur faire aucun mal et même de les récompenser généreusement. Ils répondent à cette proposition, qui les indigne, par un feu très-vif qui met beaucoup de Chouans hors de combat. Le feu se soutient long-temps avec la même activité.
Les brigands font une seconde sommation, demandant toujours qu'on leur livre le commandant ; le feu redouble. Alors ils essaient de mettre le feu à la caserne. Un de leurs chefs s'avance avec une botte de paille enflammée, il est tué...
Cependant le capitaine était dans une maison à côté de la caserne, il ne pouvait en sortir sans courir le risque d'être égorgé. Il avait dans sa chambre quatre-vingt paquets de cartouches. Quinze grenadiers, voyant les brigands ébranlés, font une sortie, la baïonnette en avant, pour aller le délivrer. Sept sont tués ; le reste blessé est obligé de rentrer dans la caserne.
Dans ce moment, un chef de brigands s'approche de la caserne, un grenadier l'ajuste et le tue. La perte de ce chef, qui sans doute était un homme de marque, jette la consternation parmi les brigands qui s'empressent de l'enlever et de faire leur retraite.
Nous avons à regretter dans cette affaire treize hommes tués et vingt-huit blessés. On ne peut donner trop d'éloges à la brave compagnie des grenadiers et au capitaine Cerdon qui la commande. Le poste d'Elven est toujours resté en notre pouvoir[2]. »