Porfirio Diaz est né le [3] dans la ville d'Oaxaca, fils de José Faustino Díaz, un tanneur espagnol né au Mexique, décédé alors que Porfirio n'avait que trois ans, et de María Petrona Mori, d'ascendance espagnole et mixtèque[4].
En 1843 à l'âge de treize ans Porfirio Díaz entre au séminaire d'Oaxaca, pour y étudier les arts, la physique, les mathématiques, la rhétorique et le latin. Il donna des classes de latin pour pouvoir aider sa famille. Il étudia également le droit romain dont il fut le meilleur élève de sa génération, en 1850 il en devint professeur. De 1852 à 1853 il eut pour professeur de droit civil Benito Juárez[5]
Carrière militaire
Porfirio Díaz a eu dans sa jeunesse pour mentor Marcos Pérez[6],[7] il fit également la connaissance de Benito Juárez (Pérez était l'un des proches) et dont il instaura le culte officiel qui perdure jusqu'à aujourd'hui[8].
En 1854 il prend part à l'élaboration du plan d'Ayutla, puis dès mars 1855 à la révolution d'Ayutla menés par les libéraux de Juan Álvarez contre le gouvernement conservateur d'Antonio López de Santa Anna qui, vaincu part en exil en 1855.
Il se soulève contre lui en 1871 (plan de la Noria(es)) un an avant la disparition de Juárez, mais échoue. Le nouveau président Sebastián Lerdo de Tejada lui offre alors l'amnistie. Mais Porfirio Díaz organise une rébellion qu'il déclenche contre Lerdo quand celui-ci cherche sa réélection en 1876.
Il accède à la présidence le à la suite de la révolution de Tuxtepec(es) et devient ainsi le vingt-neuvième président du Mexique, mais cède le pouvoir dès le à son compagnon d'armes, Juan N. Méndez, qui assure la présidence par intérim jusqu'au , date à partir de laquelle il reprend la direction du pays. Les élections du mois d'avril suivant le confirment dans ses fonctions présidentielles jusqu'en 1880.
Autres mandats présidentiels
Ne pouvant se représenter en vertu d'un amendement à la Constitution de 1857, il laisse son ami le général Manuel González être élu président et lui transmet le pouvoir le [11]. Quatre ans plus tard, Díaz obtient facilement d'être élu de nouveau et en 1887, un deuxième amendement constitutionnel autorise Díaz à briguer un second mandat consécutif, puis en 1890, un troisième supprime la limite du nombre de mandats.
Díaz arrive à la tête d'un pays exsangue à la suite de la Guerre d'Indépendance et à l'instabilité politique qui la suivit, puis de la perte du Texas en 1836, à la perte de la moitié de son territoire (guerre américano-mexicaine 1847-1848), à la guerre de Réforme, puis à l'intervention française, mais durant sa présidence, la situation économique du Mexique(es) s'améliore (augmentation des investissements étrangers, réduction de la dette).
L'absence de politique de redistribution des richesses, notion pratiquement inexistante au XIXe siècle[12] ne permet pas de juguler la pauvreté héritée des périodes préhispaniques et coloniales d'une part importante de la population[13],[14],[15]. Le problème de la pauvreté persiste jusqu'en 2023, selon les chiffres publiés par la CEPAL 88 % des habitants des zones rurales vivent dans la pauvreté (62 % dans la pauvreté extrême) .Pour ce qui est de villes 68 % des habitants vit dans la pauvreté (37 % dans la pauvreté extrême)[16].
Il serait l'auteur de la phrase « Pauvre Mexique, si loin de Dieu et si près des États-Unis ».
Le Porfiriat
Son régime est connu au Mexique sous le nom de Porfiriato. Pendant cette période l'application des lois de Réforme et en particulier la Ley Lerdo(es) ont favorisé la concentration de la propriété foncière au profit d'une minorité d'investisseurs et de propriétaires terriens, les seuls qui avaient les moyens financiers d'acquérir les terres nationalisées en vertu de ces lois par l'État mexicain et qui appartenaient précédemment à l'Église et aux collectivités villageoises depuis la période coloniale.
De nombreux habitants des campagnes continuent d'être contraints à un travail pénible et mal rémunéré dans les haciendas, et quelques groupes indigènes se montrent particulièrement rebelles et imperméables aux changements économiques et à la spoliation de leurs terres par l'État et sa revente aux grands propriétaires, particulièrement les Yaquis(es), qui étaient pour la plupart peu intégrés à la nation mexicaine ou ignorant même la notion d'un Mexique indépendant[17]. Leurs meneurs les plus actifs sont contraints aux travaux forcés dans des lieux comme Valle Nacional, la vallée du río Yaqui ou le Yucatán.
En 1891 et 1892 a lieu la rébellion de Tomóchic(es) révolte de villageois principalement métis.
Huit cents soldats de l'armée fédérale y affrontent une centaine de révoltés. Les causes exactes de ces événements restent floues, elles seraient dues à des discordes entre la population et des caciques locaux. À la fin de la rébellion il ne reste plus que 290 habitants dans le village.
Son gouvernement combat les rebelles mayas, qui d'une manière sporadique continuent la guerre des castes et maintiennent une agitation sécessionniste en faveur d'une république du Yucatán ; les meneurs sont déportés dans l'île de Cuba où ils sont obligés de travailler dans des conditions difficiles proches de l'esclavage (l'esclavage a été officiellement aboli à Cuba le alors que l'île était encore une colonie espagnole)[18]
en 1901 des troupes y sont envoyées rétablir l'ordre sous le commandement de Victoriano Huerta qui est lui-même un indigène huichol.
Porfirio Diaz est franc-maçon. Entre 1890 et 1901, il réussit à unifier différentes obédiences, dans certains cas par la force.[réf. nécessaire]. Il est le grand maître de la loge La Gran Dieta Simbólica jusqu'en 1901, date de sa dissolution[19].
Sous son régime, la presse dite « jaune », sensationnaliste et complaisante, tire ses origines. Les journaux loyalistes reçoivent des financements de l’État, et des journalistes d'opposition sont incarcérés[20]. Son impact reste limité : en 1895, le pays comptait 82,5 % d'analphabètes[21].
Il use de l'article 28 de la loi publiée le par le gouvernement de Benito Juárez et cosignée par Manuel Doblado(es) qui permet d'abattre un détenu en fuite[22],[23].
Cette loi sera rétablie le pour réprimer les instigateurs de la grève générale qui eut lieu du au à Mexico[24] par le gouvernement constitutionnaliste de Venustiano Carranza[25]
Durant le porfiriat l'usage de la loi du fait plus de 10 000 victimes, dont la majorité sont des délinquants de droit commun issus du monde rural[26].
À la fin du XIXe siècle, Díaz s’entoure d’une véritable bureaucratie, les Científicos. Ce groupe est formé par les hommes d'affaires et les intellectuels de l'époque, inspiré par le positivisme d'Auguste Comte. L'un des chefs de ce groupe, José Yves Limantour, devient ministre des Finances. Les Científicos contrôlent la quasi-totalité de l'économie, des finances et de l'enseignement tandis que Díaz s’occupe des affaires politiques et militaires[27]. Des divisions surviennent entre Científicos : Justo Sierra et Julio Guerrero critiquent notamment l'emprise grandissante du général Bernardo Reyes et de José Yves Limantour, et seront tous deux exilés en 1909[28].
Au cours du Porfiriat, pour pallier le manque de capitaux mexicains (nombre de capitalistes mexicains qui ne sont pas propriétaires terriens et qui vivent à l'étranger sans participer à la vie politique préfèrent investir leur argent en Europe ou aux États-Unis), l'investissement étranger est favorisé. La plus grande partie des investissements sont d'origine américaine, suivi par les Anglais (29 %) les Français (27 %) les Allemands et les Espagnols, le montant total de ces investissements selon les chercheurs de l'UNAM est de deux milliards de dollars[29]. Les investisseurs étrangers, en l'absence de capitaux nationaux, ont la prépondérance totale dans les infrastructures (chemins de fer, ports, télégraphes et téléphones), les mines, le pétrole, le textile, les plantations, l'industrie[30]. Les grèves apparaissent à partir de 1906.
La population mexicaine passa de 9 141 661 habitants en 1872 à 15 160 372 (recensement de 1910), soit une augmentation annuelle de 1,3 %. En 1910, 12 % des Mexicains vivaient dans des villes de plus de 15 000 habitants. À la fin du régime de Díaz, le pays comptait 19 280 km de voies ferrées, alors qu'il n'en comptait que 638 en 1876 ; quant aux lignes télégraphiques, elles sont au nombre de 70 000 (9 000 en 1877)[31]. Durant cette période le pays fait aussi des progrès en matière d'électrification(es).
Le système porfirien, s'il a modernisé le pays, n'a pas résolu le problème des inégalités de développement, ce qui provoque des tensions : inégalités de secteur (les exportations de produits miniers et de matières premières se développent considérablement. À la suite de sécheresses persistantes la production de maïs passe de 2,5 millions en 1877 à 2 millions en 1910 alors que la population a augmenté, pour pallier cela le pays doit importer du maïs au prix mondiaux, ce qui provoque une augmentation du prix de la tortilla, aliment de base de la plus grande partie de la population.
Chute
Peu avant la révolution, des compagnies américaines contrôlent les trois quarts des mines et plus de la moitié des gisements pétroliers[32], le manque de capitaux mexicains en est la principale cause.
L'application des lois de nationalisation des terres inexploitées et de celles de l'Église, promulguées par le gouvernement de libéral de Benito Juárez et leur mise en vente par le gouvernement a accentué les inégalités et favorisé la concentration de la propriété[33] : près de 11 000 haciendas contrôlent 57 % du territoire national, alors que 95 % des habitants des campagnes ne possèdent aucune terre[34].
En 1910, 62 % du territoire de l'État de Morelos, avant la réforme agraire(es) qui suivit la révolution est en possession de 30 grands propriétaires.
La rémunération des journaliers ruraux peut descendre à 20 ou 25 centavos par jour dans les cas extrêmes, et 10 ou 15 centavos pour les femmes et les enfants, dans les haciendas le salaire est payé en "fichas" qui ne peuvent être utilisées que dans les magasins appartenant au patron, c'est la tienda de raya(es), les prix y sont relativement élevés et les gens s'y endettent parfois pour plusieurs générations.[réf. nécessaire]
Une étude médicale menée par un psychiatre , Julio Guerrero, dans son livre "La Génesis del Crimen en México" publié en 1901 explique le faible usage des "jaboneras" (bains publics) par les classes pauvres par le fait que cela absorberait 25 % de leurs revenus » pour pallier cela le gouvernement a mis en place des bains publics gratuits[35]. En outre, un grand nombre d'ouvriers ne possède pas de logement. Le taux d'analphabétisme est de 74 % en 1910[36]. À ces difficultés s'ajoutent la crise de Wall Street de 1907 dont les répercussions sur l'économie mexicaine provoque une vague de licenciements dans le secteur minier et des hausses des prix[28].
Les notables du régime et les représentants des pays avec lesquels le Mexique entretient des relations diplomatiques y assistent, notamment ceux des États-Unis : le vice-président, le secrétaire d’État et le secrétaire au Trésor, 14 députés, 20 sénateurs, 14 hauts fonctionnaires du Département d’État, des gouverneurs, des présidents d'université, des généraux et amiraux. Durant les festivités qui ont eu lieu le 11 et , les 10 000 invités y boivent, entre autres, 50 caisses de Champagne[37].
Lors d'un entretien avec le journaliste canadien James Creelman(en), le président estime que le Mexique est prêt pour la démocratie. Ses opposants feignent de le croire. En 1910, Porfirio Díaz, au pouvoir depuis une trentaine d'années, veut à nouveau se représenter à l’élection présidentielle, mais Francisco I. Madero annonce aussi sa candidature.
Díaz le fait emprisonner puis relâcher ; Madero s'enfuit aux États-Unis. Les autorités déclarent que Díaz a gagné les élections et que Madero n'a recueilli que quelques centaines de voix à travers tout le pays.
Ainsi commence en 1910 la révolution mexicaine. Après la prise de Ciudad Juárez(es) défendue par une garnison peu aguerrie composée de 650 hommes, le par les troupes révolutionnaires commandées par le général Peppino Garibaldi (Francisco Villa était alors colonel). La prise de Ciudad Juárez, bourgade sans importance militaire était vitale pour Madero car elle permettait l'acheminement depuis les États-Unis, d'armes, de munitions, de matériel nécessaire à ses troupes.
Díaz, qui veut éviter à son pays une guerre civile et qui craint une intervention militaire des États-Unis favorables à Madero, après la signature des traités de Ciudad Juárez(es), abandonne le pouvoir le et part en exil en direction de Cuba puis de l'Espagne.
Exil et mort
Il séjourne à Interlaken en Suisse, où il suit une cure et y étudie le système de mobilisation des troupes helvétiques, ainsi qu'à Paris. Il se rend ensuite en Allemagne, où il est reçu avec de grands honneurs militaires par Guillaume II, visite aussi l'Égypte et séjourne à Rome et à Naples.
Il meurt le à Paris dans une de ses résidences en France.
En 2015, la question de rapatrier les restes de Porfirio Diaz au Mexique et plus particulièrement dans son État natal est étudiée par certains députés du Parti révolutionnaire institutionnel, alors au pouvoir[39].
Un projet de réinstallation de la statue de Porfirio Díaz sur le Malecón[42] de la ville portuaire de Veracruz est à l'étude, à l'occasion des festivités prévues pour le 500e anniversaire de la fondation de la ville et pour célébrer le 115e anniversaire du début des travaux de l'actuel port[43].
Il est aussi considéré par un sondage réalisé sur le site internet de l'université autonome de México (UNAM) comme étant le troisième meilleur président du pays, précédé en cela par Benito Juárez et Lázaro Cárdenas[44].
(es) Lucas Alamán, Historia de México desde los primeros movimientos que prepararon su independencia en 1808 hasta la época presente, México D.F., Fondo de Cultura Económica, .
(es) Carmen Blázquez Domínguez, Veracruz, una historia compartida, Mexico, Gobierno del Estado de Veracruz, Instituto Veracruzano de Cultura, , 369 p. (ISBN968-6173-60-9).
(es) Carlos María de Bustamante, Cuadro histórico de la Revolución mexicana, México D.F., INEHRM, (réimpr. 1985).
(es) Luis Garfias Magana, Guerrilleros de México : Personajes famosos y sus hazanas, desde la Independencia hasta le Revolución mexicana, México D.F., Panorama, , 138 p.
(es) Luis Pazos, Historia sinóptica de México : de los Olmecas a Salinas, México D.F., Diana, , 165 p. (ISBN968-13-2560-5).
Vicente Rivas Palacio (coord.), Julio Zárate, México a través de los siglos, vol. III : La guerra de independencia (1808 - 1821), México D.F., Cumbre, (réimpr. 1970).
Vicente Rivas Palacio (coord.), Juan de Dios Arias, Enrique de Olavarría y Ferrari, México a través de los siglos, vol. IV : México independiente (1821 - 1855), México D.F., Cumbre, (réimpr. 1970).
Voir aussi
La propriété agraire durant l'époque porfirienne (UNAM - Université Nationale Autonome du Mexique) : (es) María Carmen Macías Vázquez et María de Montserrat Pérez Contreras, « La propiedad agraria durante la época porfiriana », dans Porfirio Díaz y el derecho. Balance crítico, (lire en ligne).
↑Selon le livre numéro 77 de la paroisse de la ville d'Oaxaca. Selon certains historiens, Diaz serait né en 1828 et il aurait falsifié sa date de naissance pour la faire coïncider avec le début du mouvement indépendantiste. Porfirio Diaz y su tiempo - page 9 - Fernando Orozco Linares - Panorama Editorial - México juin 1986.
↑Memorias de Porfirio Diaz - page 14 - Madrid - mars 1980.
↑PLANA M., Pancho Villa et la révolution mexicaine, trad. de GAUDENZI B., Casterman, s.l., 1993, p. 22.
↑Jean Lamore, José Martí. La liberté de Cuba et de l'Amérique latine, Éditions Ellipses, , p. 34.
↑(es) Pablo Serrano Álvarez, Porfirio Díaz y el Porfiriato, Cronología (1830-1915), México, Instituto Nacional de Estudios
Históricos de las Revoluciones de México, (ISBN978-607-7916-66-6, lire en ligne)
↑ Walter Scheidel : Une histoire des inégalités de l'âge de la pierre au XXIe siècle - Actes Sud Editions, janvier 2021. (EAN9782330140779)