À la fin de la Seconde Guerre mondiale certains sous-marins allemands utilisent un récepteur radar portatif baptisé ATHOS pour détecter les émissions radar des avions alliés ce qui leur permet de plonger avant d'être aperçu. Après la guerre, la marine américaine installe un dispositif analogue sur ses navires et ses sous-marins car il présente l'avantage d'être simple et léger. À la fin des années 1950 le Laboratoire de la marine de guerre (NRL) est chargé de développer le premier satellite artificiel dans le cadre du programme Vanguard. Le programme connait de nombreux échecs mais il permet à la marine américaine d'acquérir la maitrise de la conception des satellites. Dans le contexte de la Guerre froide les militaires américains cherchent comment utiliser les vols spatiaux à des fins militaires. Le NRL propose de placer en orbite basse (900 km) un satellite équipé du système de détection radar : celui-ci en survolant le territoire soviétique détectera les radars et renverra les informations collectées à des stations au sol. Le projet après étude reçoit l'accord du président des États-Unis en aout 1959. Ce programme, baptisé TATTLETALE, prend une importance particulière lorsqu'un Lockheed U-2 chargé d'effectuer des missions de reconnaissance aérienne à très haute altitude au-dessus de l'Union soviétique est abattu par un missile antiaérien soviétique, donnant un coup d'arrêt à ce type de reconnaissance. Le premier satellite de ce programme Galactic Radiation and Background (GRAB) 1 ou Dyno 1 est lancé le et fournit les résultats attendus au cours des trois mois qui suivent[1].
En 1962 tous les programmes de satellite de reconnaissance américains sont réorganisés et incorporés dans un programme commun de la NRO : le National Reconnaissance Program (NRP). Sur le plan organisationnel les satellites chargés de détecter les radars font désormais partie du program C de la NRO. Les satellites de ce type prennent désormais le nom de code de Poppy[2]. Sept lancements de satellites Poppy ont lieu entre 1962 et 1971. Le lancement se fera successivement par grappe de 2 puis 3 et enfin 4 satellites par des versions de puissance croissante de la fusée Thor Agena-D. L'existence du programme Poppy est déclassifiée par la NRO en septembre 2005 mais la plupart des caractéristiques et des opérations menés à l'aide de ces satellites relèvent toujours du secret défense. Les satellites Poppy ont été remplacés par la série des Naval Ocean Surveillance System.
Caractéristiques techniques
La taille et les caractéristiques des satellites Poppy ont évolué au cours du programme. Tous les satellites Poppy sont de formes sphériques. Le corps du satellite est recouvert en partie de cellules solaires et comporte plusieurs antennes. Les satellites circulent par groupe de 4 à faible distance les uns des autres pour permettre les relevés des positions des radars par triangulation. On distingue trois générations :
La première génération, dite 20 pouces, est d'un diamètre identique aux satellites GRAB. Elle est constituée de deux hémisphères de 51 cm de diamètre reliées par une bande équatoriale de 10 cm de haut qui lui donne hauteur de 61 cm. La masse est comprise entre 25 et 30kg. Les cellules solaires sont implantées sur des parties planes et circulaires qui recouvrent partiellement la surface du satellite et fournissent en moyenne W[3].
Pour la deuxième génération, dite 24 pouces, le diamètre des deux hémisphères passe à 61 cm tandis que la bande centrale équatoriale porte sa longueur à 81 cm. La masse est comprise entre 39 et 59kg. Le nombre de cellules solaires est accru et certains satellites utilisent un système de stabilisation à gradient de gravité à deux ou trois degrés. Certains comportent des micro-propulseurs fonctionnant de l'ammoniac pour maintenir les distances au sein de leur constellation. La plupart des satellites de cette génération emportent un instrument scientifique (Soldrad, RADOSE, GGSE) qui constitue officiellement la seule charge utile du satellite[4].
Le satellite de troisième génération, dit multi-facettes, est composé de deux hémisphères de 68 cm et sa hauteur est comprise entre 81 et 86cm. Sa masse va de 73 à 128kg. Tous les satellites utilisent les micro-propulseurs et les systèmes de stabilisation à gradient de gravité testés par la génération précédente[5].
POPPY 1
POPPY 1 a été lancé, pour la première fois, le 13 décembre 1962 au sommet d'une fusée Thor-Agena. Malheureusement, lorsque le satellite fut délivré dans l'espace, les moteurs de la fusée ne se sont pas arrêtés au bon moment. La conséquence qui en a résulté est que l'orbite du satellite était plus elliptique que circulaire. Malgré ce désarroi, le satellite a quand même réussi à récolter plusieurs informations utiles. Il a finalement été mis à l'arrêt 28 mois plus tard.
POPPY 2
Six mois plus tard, les Navy SEAL ont voulu réessayer. POPPY 2 a alors été lancé le 15 juin 1963. Une fois de plus, l'orbite était elliptique. Également, son périgée (point de son orbite qui est le plus proche de la Terre) était si bas que l'atmosphère a rapidement entraîné le satellite vers le bas. Il est rentré après seulement six semaines de fonctionnement.
POPPY 3
Le 11 janvier 1964, ce fut le tour à POPPY 3 d'être lancé. Celui-ci fut un succès avec une orbite bien circulaire[6]
POPPY 4
Le 9 mars 1965, POPPY 4 a été lancé. Les satellites suivants ont commencé à durer beaucoup plus longtemps en orbite que leurs prédécesseurs (POPPY 3, 2 et 1).
POPPY 5
POPPY 5 a été lancé le 31 mai 1967 et est resté opérationnel pendant une longue période. À cette époque, POPPY 5 était presque terminé. Il était prévu pour un lancement en février 1967, mais un responsable de la LNR a demandé l'autorisation de retarder le lancement et de modifier le satellite pour améliorer la collecte des signaux radar ABM. Cela nécessitait un équipement mieux capable de détecter les signaux, un plus grand chevauchement dans les gammes de fréquences ABM suspectées et des mises à niveau du système au sol et des enregistreurs pour améliorer la qualité. Le chef de la NRO a accordé l'extension et NRL a repensé le satellite[6].
POPPY 6
POPPY 6 a été lancé le 30 septembre 1969 et a remplacé POPPY 5 comme collecteur primaire en orbite. POPPY 6 avait plusieurs améliorations, y compris une gamme de fréquences plus large.
POPPY 7
POPPY 7 a été lancé le 14 décembre 1971 et a fonctionné jusqu'en août 1977. Mais à cette époque, c'était un système mature qui était dépassé par de nouveaux satellites.
↑(en) History of the Poppy satellite system, National Reconnaissance Office, (lire en ligne), A1-8 à A1-19
Bibliographie
(en) MacDonald, Robert A. et Moreno, Sharon K., Raising the Periscope... Grab and Poppy, America's early ELINT Satellites, National Reconnaissance Office, (lire en ligne)
(en) History of the Poppy satellite system, National Reconnaissance Office, (lire en ligne)
La première date est celle du lancement du lancement (du premier lancement s'il y a plusieurs exemplaires). Lorsqu'elle existe la deuxième date indique la date de lancement du dernier exemplaire. Si d'autres exemplaires doivent lancés la deuxième date est remplacée par un -. Pour les engins spatiaux autres que les lanceurs les dates de fin de mission ne sont jamais fournies.