Pont du Carrousel ou pont des Saints-Pères de 1834
Généralement appelé « pont du Carrousel[1],[2],[3] », il était également nommé « pont des Saints-Pères » car son axe prolongeait presque celui de la rue des Saints-Pères. Il était aussi parfois nommé « pont du Louvre », puisqu'il débouchait face au palais du Louvre, rive droite.
Une ordonnance royale du autorisa la construction du pont en déclarant concessionnaire M. Rangot. Ce dernier passa ses droits à M. Borde. La concession était prévue pour trente-quatre années et dix mois à partir du . Elle devait donc durer jusqu'au .
Son concepteur, Antoine-Rémy Polonceau, fait preuve d'un grand sens de l'innovation puisqu'il réalise un pont en arc alors que la tendance était aux ponts suspendus. La structure complexe en fonte et en bois est aussi très audacieuse, ce qui lui vaut quelques critiques. Ainsi, les cercles de fer qui décorent la structure métallique sont appelés ironiquement les « ronds de serviette ». À chaque angle du pont s'élèvent des sculptures de Louis Petitot (toujours en place sur l'ouvrage actuel) représentant l'Abondance, l'Industrie, la Seine et la Ville de Paris. Elles datent de 1845.
Le pont est livré à la circulation le . Il a une longueur totale de 169,5 m et une largeur entre garde-corps de 11,85 m et comprend trois arches de 47,67 m d'ouverture.
Le , la ville de Paris passe un traité, approuvé par décret le , pour racheter le péage pour 1 766 656 francs payables par annuités partielles entre le et le .
En 1883, le pont est fermé à la circulation pendant six mois pour remplacer une partie des poutres et des traverses. Les techniciens qui font ce changement conseillent de changer le platelage en bois du tablier par du fer martelé. Cela sera fait en 1906, le bois du tablier est remplacé par du fer.
Malgré cette réparation, le pont est étroit et bouge dangereusement[4].
Entre et , une discussion a lieu par l'entremise de la revue Le Béton armé entre la firme de Hennebique, représentée par l'ingénieur L. Quesnel et Jean Résal, qui est l'ingénieur en chef du Service de la navigation de la Seine et des ponts de Paris. Hennebique voulait montrer la supériorité du béton armé et son intérêt économique.
Pont du Carrousel de 1935
En 1930, on le juge aussi d'une hauteur insuffisante pour la navigation fluviale, et il est décidé de le détruire totalement pour le remplacer par un nouvel ouvrage, un peu plus en aval, face aux guichets du Louvre. Il est démoli en 1937.
Le nouveau pont est conçu par le service des Ponts de Paris avec les ingénieurs Henri Lang et Jacques Morane, aidés des architectes Gustave Umbdenstock et Georges Tourry : il reprend la forme générale du pont initial avec ses trois arches, mais est maintenant en béton armé, confirmant ainsi la proposition faite par Hennebique en 1905. L'ingénieur des ponts et chaussées Jacques Morane écrivit dans la revue Travaux de que « seule la pierre de taille peut donner au pont du Carrousel le caractère monumental qu'exige ici le voisinage du Louvre, de l'Institut, du pont Neuf et du pont Royal » en reprenant « l'exemple récent du pont de la Tournelle ».
L'avant-projet est présenté en 1932. Les travaux sont autorisés par décret du conseil d'État du . Le projet définitif est adjugé le . Les travaux commencent par la partie aval qui est mise en service avant la destruction de l'ancien pont. La Seconde Guerre mondiale arrêta les travaux d'aménagement en rive gauche.
Raymond Subes a conçu, pour l'éclairage du pont, un ingénieux système de réverbères télescopiques mis en place en 1946 (les lampes s'élevant de 13 m le jour à 20 m la nuit), le mécanisme télescopique, tombé en panne peu de temps après sa mise en service, a été restauré en 1999.
Le pont des Saint-Pères.
Le pont des Saint-Pères.
Le pont du Carrousel vers 1900, sur les plans de Polonceau.
En 2003, le maire de Paris Bertrand Delanoë, au nom des citoyens parisiens, a honoré sa mémoire et celle de toutes les victimes du racisme par la pose d’une plaque contre l’oubli et pour le refus des discours de haine.
Le peintre néo-impressionniste Maximilien Luce a réalisé en 1890 une huile sur toile titrée Le Louvre et le pont du Carrousel. Effet de nuit.
Georges Stein a réalisé un tableau intitulé Paris. Le pont du Carrousel, représentant des personnages circulant sur le pont devant les guichets du Louvre.
L'Américain Edward Hopper représente le premier pont dans son tableau Pont du Carrousel and Gare d'Orléans (1907).
L'artiste moderne Makiko Nakamura a lui aussi intitulé une œuvre Pont du Carrousel, un tableau très sombre.
L'ItalienPaolo Frongia représente le pont dans son tableau La Senna, al mattino, da pont du Carrousel.
Pont du Carrousel est le titre d'un poème en allemand de Rainer Maria Rilke.
Le Pont du Carrousel est le titre d'une chanson du groupe Zebda, en référence à l'assassinat de Brahim Bouarram en 1995.
↑« […] Je me rappelais le temps où passant par le même chemin exactement, portant une théière et des tasses d'argile le Pont du Carrousel en oscillant me fit lâcher mes paquets et tout se cassa. Aujourd'hui je porte une théière de bronze de vingt francs. Le pont peut osciller, je passe triomphant, mais il ne bouge pas car on l'a consolidé et élargi. Mon défi s'adresse à un rocher […]. » Ch.-A. Cingria, lettre à C.-F. Ramuz, 26 avril 1908.
Denis Hannotin et Christine Moissinac, Antoine-Rémy Polonceau (1778-1847). Un homme libre, un ingénieur au parcours éclectique, Presses des ponts, 2011 (ISBN978-2-85978-459-1).
Félix Lazare et Louis Lazare, Dictionnaire historique des rues et monuments de Paris [en] 1855 : avec les plans des 48 quartiers, Paris, Maisonneuve & Larose, , 796 p. (ISBN978-2-86877-184-1 et 2-86877-184-X).
Jacques Morane, « La reconstruction du pont du Carrousel », revue Travaux, no 31, .
Antoine Picon (dir.), L'Art de l'ingénieur constructeur, entrepreneur, inventeur, Centre Georges Pompidou/éditions Le Moniteur, Paris, 1997 (ISBN978-2-85850-911-9), p. 109-110.