Marie Gabriel Florent Christophe de Choiseul, Comte de Choiseul-Beaupré (d)
Enfants
Aglaé Marie Louise de Choiseul d'Aillecourt (d) Antoine Louis Octave de Choiseul-Gouffier Antoinette Francoise Sidonie de Choiseul (d) Alexandrine Françoise Eugénie Zéphirine Olympe de Choiseul d'Aillecourt (d)
Marie Gabriel Florent Auguste de Choiseul est le fils de Marie Gabriel Florent, comte de Choiseul, seigneur d'Aillecourt, Meuvy (1728-1753), et de Marie Françoise Lallemant de Betz (1732-1793), le petit-fils de Michel Joseph Hyacinthe Lallemant de Betz, chevalier, seigneur de Nanteau sur Lunain, Treuzy, fermier-général, qui donna à la Bibliothèque royale en 1753 une collection de plus de treize mille estampes[2], et de Marie Marguerite Maillet de Batilly[3]. Il est aussi le frère de Michel Félix Victor de Choiseul Daillecourt, officier, député aux États généraux de 1789.
Ami de Talleyrand, avec qui il avait sympathisé dès le collège d'Harcourt, il partage avec lui les intrigues de la Cour et lui déconseille de s'engager dans la voie religieuse.
En 1776, il part pour la Grèce à bord de la frégate Atalante, commandée par le marquis de Chabert, féru d'astronomie. Accompagné notamment du peintre Jean-Baptiste Hilaire, de l'ingénieur Jacques Foucherot et de son secrétaire François Kauffer (qui est aussi ingénieur), Choiseul-Gouffier visite alors le sud du Péloponnèse, les Cyclades et d'autres îles de l'Égée puis l'Asie mineure. À son retour, il entreprend la publication du premier volume, comportant illustrations et relevés architectoniques, de son Voyage pittoresque de la Grèce qui remporte un grand succès. L'ouvrage a un but politique : expliquer les enjeux en mer Égée entre l'Empire ottoman et l'Empire russe. Cette publication facilite sa carrière intellectuelle et politique.
Membre de l'Académie française
Il devient membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres en 1779, puis est élu en 1783 au 25e fauteuil de l'Académie française, où il succède à d'Alembert. Il y est reçu par Condorcet le [4] et y siège jusqu'à la suppression de l'Académie, en 1793. À la réouverture de celle-ci, en 1803, il ne fait pas partie des nouveaux membres, mais y reprend place en 1816, jusqu'à sa mort[5].
À Constantinople puis en Russie
Ambassadeur à Constantinople de 1784 à 1791, il en profite, accompagné par l'aîné de ses fils, pour poursuivre sa découverte de la Grèce, avec la collaboration de l'archéologue et dessinateur Louis François Sébastien Fauvel, avec celles aussi de l'ingénieur et architecte Jacques Foucherot[6], du dessinateur Louis François Cassas[7], qu'il emploie à la fois à la réunion d'une documentation pour la suite de son Voyage pittoresque et à celle d'une collection d'antiques[8].
La Révolution française change le cours de son destin. Refusant d'obéir à la Convention, il s'oppose, de crainte d'être guillotiné, à son rappel en France. Alors que ses biens sont saisis en France, un autre ambassadeur est envoyé pour le remplacer mais le sultan ottoman Sélim III refuse de le recevoir[9]. Choiseul-Gouffier tient alors le siège durant un an dans son ambassade.
En 1792, il est rejoint à Constantinople par l'abbé Charles Dominique Nicolle, précepteur de son second fils[10]. Ensemble, ils émigrent en Russie, en décembre 1792[11].
L'impératrice Catherine II, puis le tsar Paul 1er, lui vouent une grande amitié et lui donnent des terres et un domaine, à Koliacheff, en Galicie[13].
Son frère l'ayant rejoint en Russie, se voit donner un domaine en Crimée, où il meurt prématurément[14].
Retour en France
Il rentre en France en 1802, après que Napoléon eut amnistié la noblesse exilée.
Retrouvant son ami Talleyrand, il refuse de participer au gouvernement de l'Empire, et reste fidèle à Louis XVIII.
En 1809, il publie la première partie du second tome de son Voyage pittoresque de la Grèce[15].
À partir de 1812, il se fait construire, à Paris, près des Champs-Élysées, au lieu-dit Folie Marbeuf, aujourd'hui rue Lincoln, une maison en forme de temple grec imitant l'Érechthéion, encore inachevée lorsqu'il meurt. Cet édifice sera ensuite acquis par Émile de Girardin[16].
Il y rassemble les sculptures, telles que l'Apollon de Choiseul-Gouffier, et les moulages, subsistant de ses explorations en Grèce, que Talleyrand et d'autres amis l'aident à se faire restituer[17],[18].
Les efforts menés à titre privé par Choiseul Gouffier pour constituer cette collection, la plus importante collection française d'antiques à l'époque, juste avant la Révolution, apparaissent comme précurseurs de la politique publique menée, avec des moyens autrement importants, par Napoléon lors de la campagne d'Égypte[19].
À la fin du premier Empire, il est fréquemment en contact avec son ami Talleyrand, pour qui il sert d'émissaire officieux avec Louis XVIII[20], qu'il représentait déjà à la cour de Russie, pendant son émigration.
A la première Restauration, il est promu au grade de lieutenant-général par ordonnance du 17 août 1814, et nommé membre du conseil privé.
Lors de la négociation du Traité de Vienne, son ami Talleyrand y fait insérer une clause concernant le remboursement par l'Autriche d'une somme importante avancée par Choiseul Gouffier aux officiers autrichiens prisonniers des Turcs[21], pendant son ambassade à Constantinople[22].
Le seconde partie du tome 2 de son Voyage pittoresque de la Grèce ne paraît qu'après sa mort, en 1822.
Collection de sculptures
Initialement recruté en 1780 par Choiseul Gouffier pour contribuer à documenter le Voyage pittoresque, Louis-François Fauvel, voit sa mission évoluer en 1786, après la nomination de Choiseul Gouffier comme ambassadeur, où il est chargé, dans la Grèce occupée, de procéder à des moulages et de collecter des sculptures antiques, en vue de la réunion d'une collection en France. Les envois de caisses de moulages et sculptures se font à partir de 1787, par bateau jusqu'à Marseille. En 1792, la déposition de Louis XVI et la fin des fonctions d'ambassadeur de Choiseul Gouffier mettent fin aux envois. Les caisses entreposées à Marseille depuis 1787 sont saisies, inventoriées en 1793. Quelques sculptures sont appropriées pour la constitution d'un musée d'antiques à Marseille[23]. La plupart sont transportées à Paris en 1798, à la faveur du débarquement à Marseille des objets issus de la Campagne d'Egypte, pour être déposées en même temps au Musée du Louvre.
Dès son retour en France, en 1802, Choiseul Gouffier, appuyé par Talleyrand, demande la restitution des moulages et sculptures, demande à laquelle Napoléon fait droit .
La maison en forme de temple grec imitant l'Erechthéion, qu'il se fait construire près des Champs-Elysées, sert de cadre à cette collection, dont il peut enfin profiter.
Après la mort de Choiseul Gouffier, sa collection de moulages et sculptures passe en vente publique en 1818 [24],[25]. Le catalogue de la vente recense 496 lots, 237 d'entre eux sont des antiquités, dont 107 sont acquises par le Musée du Louvre[26],[27].
Louis Félix Raoul de Choiseul Gouffier, émigré avec son père, sans alliance, mort le , inhumé au cimetière du Père Lachaise[32] ;
Clémentine Léonie Henriette de Choiseul Gouffier (Paris, paroisse Saint Roch, - Macon, Saône & Loire, ) mariée à Amiens en 1801 avec César de Vachon de Briançon de Belmont, officier, émigré puis rallié à Napoléon, chambellan et colonel-major de Napoléon en 1813 (1770-1814). Elle se remarie à Paris en 1819 avec Marie Jean Pierre Pie Frédéric Dombidau de Crouseilhes, baron de Crouseilhes, magistrat, maître des requêtes au Conseil d'État (1820), secrétaire général du ministère de la Justice (1824), conseiller à la Cour de Cassation (1828), pair de France (1845), député (1849), ministre de l'instruction publique et des cultes (1851), sénateur du second empire (1852) (1792-1861) dont postérité ;
Antoinette Françoise Sidonie de Choiseul Gouffier (Paris, paroisse Saint Roch, - Château de La Rivière-Bourdet, Quevillon, Seine-Maritime, ), mariée à Amiens en 1798 avec Alexandre du Moucel, marquis de Torcy (1778-1818), puis à Paris en 1819 avec Edouard de Fitz-James, 6educ de Fitz-James, colonel, pair de France, député (1776-1838), sans postérité des deux mariages ;
Choiseul-Gouffier y présente, en plus de monuments peu connus, une Grèce idéalisée, écrasée par la domination ottomane et désirant retrouver sa liberté pour ressusciter. Cette vision romantique de la Grèce moderne est partagée par de nombreux voyageurs du début du XIXe siècle.
Sa portée politique est importante, elle contribue au Philhellénisme, amour de la Grèce, idée qui aboutira à l'indépendance du pays, en 1830, après la guerre d'indépendance grecque, une révolte des autochtones contre l'occupation ottomane. En 1828, l'engagement de la France aux côtés de la Grèce naissante, se concrétisera par une expédition militaire et scientifique, l'Expédition de Morée, dont le volet scientifique apparaît comme le prolongement posthume des explorations menées par Choiseul Gouffier.
Comme les autres voyageurs en Grèce, Choiseul-Gouffier se propose d'aller voir sur place le texte à la main, pour mieux comprendre les auteurs antiques « pour sentir plus vivement les beautés différentes des tableaux tracés par Homère en voyant les images qu'il avait eues sous les yeux. ». Le récit de Choiseul-Gouffier permet de faire connaître des régions jusque-là encore inconnues de la Grèce, comme les Cyclades. Il avait demandé au peintre qu'il protégeait, Turpin de Crissé, d'illustrer le deuxième volume par la gravure de ses dessins. Il recruta aussi dans ce but Louis-François-Sébastien Fauvel et l'envoya en Grèce pour des dessins complémentaires.
L'ouvrage comporte une abondante iconographie, représentant des monuments, des paysages, des cartes, autour de laquelle le texte est rédigé.
Le tome 1 paraît en livraisons et par souscription, à partir de 1778, la page de titre portant la date de 1782[33]. Le tome 2 paraît avec une iconographie moins développée et plus de texte, en deux volumes, le premier en 1809[34], le second après la mort de l'auteur, en 1822, avec son portrait en frontispice et l'histoire de sa vie[35],[36].
On trouve parmi ses Mémoires une Dissertation sur Homère, un mémoire sur l'hippodrome d'Olympie, et des Recherches sur l'origine du Bosphore de Thrace.
Entre autres œuvres d'art, il posséda des Ruines d'architecture par Hubert Robert, tableau gravé par Demoulin dans une estampe portant ces mots : « Dédiées à l'ami des arts » (coll. pers.).
Portrait
Son portrait, peint par Boilly, est vendu par Artcurial le 21 septembre 2022 pour 22 300 euros[37]. Il en existe une variante avec le col uni, non fleurdelysé[38].
Annexes
Bibliographie
Léonce Pingaud : Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, 1887, Paris, Alphonse Picard, 1 vol. in 8°, IX+297 pp., lire en ligne ;
Sur les routes de l'émigration - Mémoires de la Duchesse de Saulx-Tavannes (1791-1806), publiés avec une introduction et des notes par le marquis de Valous, 1934, Paris, Calmann-Levy, 1 vol. in 8°, 179 p. ;
Le Voyage en Grèce du comte de Choiseul Gouffier (catalogue de l'exposition présentée du 30 juin 2007 au 5 novembre 2007 au Musée Calvet d'Avignon), 2007, Avignon, Fondation Calvet, Editions A. Barthelemy, 1 volume in 4°, 159 pages, (ISBN978-2-87923-246-1) ;
↑Auguste Flandrin, Bibliothèque nationale - Département des Estampes : Inventaire de la collection Lallemant de Betz, Paris, J. Dumoulin, , VII+788 (lire en ligne), p. V-VII.
↑Discours prononcés dans l'Académie française le jeudi XXVI février MDCC. LXXXIV à la réception de M. le comte de Choiseul Gouffier, Paris, Demonville, mdcc. lxxxiv, 30 p. (lire en ligne)
↑Pierre Pinon, Jacques Foucherot, un architecte et ingénieur en Orient, in Le Voyage en Grèce du comte de Choiseul Gouffier, Le Pontet, A. Barthélemy, , 159 p. (ISBN978-2-87923-246-1), p. 40-45
↑Annie Gilet, Louis François Cassa 1756-1827, dessinateur et agent du comte de Choiseul Gouffier, in Le voyage en Grèce du comte de Choiseul Gouffier, Le Pontet, A. Barthélemy, , 159 p. (ISBN978-2-87923-246-1), p. 46-61
↑Chantal Grell, « Les Ambigüités du Philhellénisme - L'ambassade du comte de Choiseul Gouffier auprès de la Sublime Porte (1784-1792) », Dix-huitième siècle, , p. 223-235 (lire en ligne)
↑Baptistin Poujoulat, Histoire de Constantinople comprenant le Bas-Empire et l'Empire Ottoman, t. II, Paris, Librairie d'Amyot, (lire en ligne), chap. XLIX, p. 423
↑Abbé Frappaz, Vie de l'abbé Nicolle: vicaire général et chanoine honoraire de Paris, Paris, Jacques Lecoffre & Cie, 1857, p. 17. Ouvrage numérisé.
↑Ludmila Wolfzun, « Le comte de Choiseul-Gouffier, premier directeur de la Bibliothèque impériale publique de Russie », Histoire et civilisation du livre, , p. 329-338 (lire en ligne)
↑Duchesse de Saulx Tavannes, Sur les routes de l'émigration - Mémoires de la duchesse de Saulx Tavannes (1791-1806), publiés par le marquis de Valous, Paris, Calmann-Lévy, , 179 p., p. 92 & 103-104
↑Duchesse de Saulx Tavannes, Sur les routes de l'émigration - Mémoires de la duchesse de Saulx-Tavannes (1791-1806), publiés par le marquis de Valous, Paris, Calmann-Lévy, , 179 p., p. 74 & 107-108.
↑Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , IX+297 (lire en ligne), p. 281.
↑Frédéric Barbier, Le Rêve grec de Monsieur de Choiseul : les voyages d'un Européen des Lumières, Paris, Armand Colin, , 302 p. (ISBN978-2-200-24863-5), p. 256-258.
↑Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , IX+297 (lire en ligne), p. 280.
↑Chantal Grell, « Les Ambigüités du Philhellénisme - L'Ambassade du comte de Choiseul Gouffier auprès de la Sublime Porte », Dix-huitième siècle, , p. 234-235 (lire en ligne).
↑Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , IX+297 (lire en ligne), p. 285
↑Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , 297 p. (lire en ligne), p. 194-216
↑Duchesse de Saulx Tavannes, Sur les routes de l'émigration - Mémoires de la duchesse de Saulx Tavannes (1791-1806), publiés par le marquis de Valous, Paris, Calmann-Lévy, , 179 p., p. 165.
↑Vassiliki Gaggadis-Robin, L'aventure de la collection Choiseul Gouffier à Marseille, in Le voyage en Grèce du comte de Choiseul Gouffier, Le Pontet, A. Barthélemy, , 159 p. (ISBN978-2-87923-246-1), p. 84-93
↑L. J. J. Dubois, Catalogue d'antiquités égyptiennes, grecques, romaines et celtiques, copies d'antiquités, modèles d'édifices anciens, sculptures modernes, tableaux, dessins, cartes, plans, colonnes, tables et meubles précieux formant la collection de feu M. le Cte de Choiseul Gouffier, Paris, Dubois & Petit-Cuenot, , XVI+156+7 (lire en ligne)
↑François Queyrel, « Un nouveau document sur la collection Choiseul Gouffier », Compte-rendu des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-lettres, , p. 1143-1159 (lire en ligne)
↑Émile Esperandieu, « Renseignements inédits sur la collection du comte de Choiseul Gouffier », Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de France - sixième série, tome huitième, , p. 161-211 (lire en ligne).
↑Marianne Hamiaux, Les Marbres de la collection Choiseul Gouffier au Musée du Louvre, in Le voyage en Grèce du comte de Choiseul Gouffier, Le Pontet, A. Barthélemy, , 159 p. (ISBN978-2-87923-246-1), p. 94-107
↑Antoine Héron de Villefosse, « Tête d'Apollon (Musée du Louvre) », dans Monuments et mémoires de la Fondation Eugène Piot, tome 1, fascicule 1, 1894, p. 61-76Lire en ligne.
↑Frédéric Barbier, Le Rêve grec de Monsieur de Choiseul : les voyages d'un Européen des Lumières, Paris, Armand Colin, , 302 p. (ISBN978-2-200-24863-5), p. 124-152 & 245-256
↑Etienne Bréton & Florent Zuber, Boilly - Le peintre de la société parisienne de Louis XVI à Louis-Philippe, tome 2, Paris, Arthena, , 1006 p. (ISBN978-2903239640), p. 769