En 1905, le Cherbourg-Éclair succède au Réveil. Le quotidien est condamné à la Libération[1].
Premier quotidien à paraître en France libérée, sous-titre qu'il portera en bandeau, La Presse cherbourgeoise. prend la suite du quotidien Cherbourg-Éclair. Fondé à la Libération, le , sa direction est alors confiée à Daniel Yon, agréé par la Résistance. Celui-ci est secondé par Maurice Hamel[1],[2].
Alors que les combats continuent dans le département, la première une du journal annonce « Le Cotentin libéré » et le premier éditorial, signé par Daniel Yon, remercie « ceux qui, depuis quatre années, poursuivent l'inlassable effort de la libération du territoire ». Le titre se positionne comme « républicain et laïc »[1],[3].
Le journal est redonné ultérieurement à Jeanne Biard (la fille d'André Biard) qui confie en 1947 la direction du quotidien à son mari, Marc Giustiniani, prisonnier de guerre de 1940 à 1945[1].
1953 - 1990 : un quotidien appartenant à la famille Giustiniani
La Presse de la Manche paraît pour la première fois sous ce titre le . Elle s'enrichit d'une édition dominicale en octobre 1987[3].
Le journal est longtemps dirigé par Marc Giustiniani qui le modernise. « Citée en exemple en raison de la progression régulière de sa diffusion, La Presse de la Manche l'est également pour ses effets de scoop, la pertinence de ses enquêtes, la fidélité de ses correspondants et l'autorité de ses éditoriaux ». À sa mort, c'est sa femme, Jeanne Biard, qui prend sa suite[1],[3].
Entre 1960 et 1982, le tirage en constante progression du quotidien est le suivant[4],[5] :
Date
Septembre 1960
Septembre 1969
Septembre 1970
Septembre 1971
Septembre 1972
Septembre 1982
Tirage
20 784
21 621
22 280
23 365
23 859
26 395
Le quotidien départemental La Presse de la Manche constitue - à cette période - une « poche de résistance » face à Ouest-France et Paris-Normandie (appartenant à Philippe Hersant). Si Ouest-France est fortement diffusé en Bretagne ainsi qu'en Basse-Normandie, le quotidien régional se heurte à La Presse pour le Cotentin. La diffusion de Paris-Normandie se limite elle-aussi aux arrondissements de Caen et Lisieux (dans le Calvados). Cette situation s'explique, selon l'universitaire Michel Mathien, par l'isolement géographique du Cotentin qui permet à la ville de Cherbourg de disposer de son propre journal[4],[6].
Depuis 1990 : Rachat par Ouest-France
En février 1990, le Groupe Sipa - Ouest-France rachète - son concurrent - La Presse de la Manche pour 80 millions de francs (pour une évaluation à 35 millions de francs) selon Le Monde. Les groupes Havas et Hersant y étaient également intéressés. En 1998, 25 000 exemplaires sont vendus quotidiennement[3],[7].
Entre 2010 et 2012, le journal crée son site internet et investit les réseaux sociaux[8],[9].
En 2016, le quotidien de Cherbourg poursuit sa transformation numérique et est rattaché à Publihebdos, il intègre la plateforme nationale d'information Actu.fr[10],[11].
En 2018, le journal adopte le format tabloïd[12]. Cette même année, l'hebdomadaire gratuit d'informations C'est à Cherbourg remplace Publi7.
En 2019, le journal fête ses 130 ans, un hors-série est publié à cette occasion[13].
Révélations
Implanté à Cherbourg, ses révélations se concentrent, notamment, sur les chantiers navals.
Marc Giustiniani, PDG de La Presse de la Manche Marc, interdit à ses journalistes correspondants de révéler le départ, dans la nuit de Noël, de cinq vedettes achetées par Israël, en violation d'un embargo. Il insiste, contre l'avis de sa rédaction composée notamment de Paul Ingouf, René Moirand et Guy Mabire, prétextant ses liens avec le constructeur, les chantiers Félix Amiot, et le tort que cette révélation est supposée faire à l'économie locale. Il propose, en revanche, une interview à Félix Amiot pour qu'il s'explique sur cette affaire dans le journal du samedi. René Moirand, chargé de l'interview, n'a pas pu le joindre, l'industriel étant parti en week-end à la montagne[14],[15].
Contre l'avis de Marc Giustiniani, Guy Mabire et André Lemesle en informent leurs collaborations (Daily Telegraph et Ouest-France) et notamment l'Agence centrale de presse. Celle-ci publie une dépêche dans l'après-midi du , avant d'être reprise par les radios, les télévisions puis les journaux du monde entier. La Presse de la Manche cède alors. Mais, ne paraissant pas alors le dimanche, elle ne peut donner l'information que dans son édition du lundi [16],[17]
Le journal manchot révèle en 1986 un trafic d'armes dans le port de commerce, ce qui est à l'origine de « l'affaire Luchaire », une affaire d'État d'ampleur nationale. Le 28 février, le quotidien fait en effet sa une sur un « trafic d'obus pour Khomeiny ». Trois cargos avaient livré des obus de la Luchaire SA en Iran, en dépit de l'embargo décrété contre l'Iran. Reprise par l'AFP, la dépêche fait les titres des quotidiens nationaux, compromettant le Gouvernement Fabius, et notamment le ministre de la Défense Charles Hernu[18],[19],[3].
Cette enquête est le fruit du travail de deux journalistes : Daniel Jubert et Jean-Pierre Beuve. Daniel Jubert a détaillé les itinéraires de deux navires, le Nicole et le Trautenbels. Jean-Pierre Beuve a, quant à lui, procédé aux vérifications des routes maritimes depuis son poste de correspondant à Coutances. Les deux journalistes ont été récompensés pour leur travail, l'année suivante, en 1987 par la Fondation Mumm[18],[19],[3].
Modèle économique
Son modèle économique repose sur les abonnements, la vente au numéro, les annonces légales ou encore la publicité[20]. De surcroît, ces recettes sont complétés par l'organisation d'évènements : depuis 1982, se tiennent chaque année les Foulées de la Presse de la Manche[21],[22] et depuis 1983, un salon de l'Habitat à Cherbourg[13]. Par ailleurs, est organisée chaque année une soirée des personnalités de La Presse de la Manche[13].
En 2018, l'entreprise affiche un chiffre d'affaires à 12,6 millions d'euros composé pour la moitié de la vente au numéro et d'abonnements[13].
La Presse de la Manche possède sa propre rotative à Cherbourg où sont également imprimés de nombreux hebdomadaires du groupe Publihebdos[11].
La rédaction est implantée au cœur de la ville de Cherbourg. Elle dispose également de deux agences dans le département, l’une à Valognes et l’autre, créée dans les années 1970, à Saint-Lô. En 2019, le journal emploie une centaine de personnes, la rédaction est composée quant à elle de 33 journalistes, dont quatre journalistes sportifs[13].
Les chiffres de la diffusion totale du quotidien sont les suivants, d'après l'ACPM (ex-OJD)[24] :
Date
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
Diffusion totale
26 995
26 599
26 359
26 387
26 014
25 873
25 903
25 862
25 574
25 299
25 103
24 552
23 884
23 719
Date
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
2024
Diffusion totale
23 088
22 153
21 298
20 709
20 183
19 812
19 405
18 684
17 794
NC
La baisse de la diffusion papier du quotidien est compensée par une hausse de la vente d'abonnements numériques et de la consultation du site internet. Le site totalise 41,2 millions de visiteurs en 2023 (contre 30 millions en 2021).
Anne Muratori-Philip, La presse quotidienne régionale française, I.P.E.C, 1974
Raymond Silar, Histoires vraies de la presse régionale. La somme de toutes les vies, L'Harmattan, 2010.
Dans les coulisses d'un journal : 1889-2019, 130 ans d'info locale, La Presse de la Manche, 2019.
Notes et références
↑ abcdef et gRaymond Silar, Histoires vraies de la presse régionale, Paris, éditions L'Harmattan, , 170 p., p. 15 et suivants
↑Françoise Poggioli, Bibliographie de la presse française politique et d'information générale : 1865-1944, vol. 50, Paris, Bibliothèque nationale de France, , 58 p.
↑ abcdefghij et kFlorence Amalou, « « La Presse de la Manche » et la nostalgie du « scoop » », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
↑ a et bAnne Muratori-Philip, La presse quotidienne régionale française, Paris, I.P.E.C, , p. 94
↑La Presse française d'hier et d'aujourd'hui, Paris, L'Écho de la presse et de la publicité,
↑Michel Mathien, La presse quotidienne régionale, Paris, Presses universitaires de France, , p. 27
↑ a et b« Mort de François Régis Hutin, ex-patron du groupe Ouest-France », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
↑Pierre-Jean Benghozi et Inna Lyubareva, « La presse française en ligne en 2012 : Modèles d’affaires et pratiques de financement », dans La presse française en ligne en 2012 : Modèles d’affaires et pratiques de financement, Département des études, de la prospective et des statistiques, coll. « Culture études », , 1–12 p. (ISBN978-2-11-139910-5, lire en ligne)
↑Nathalie Pignard-Cheynel et Brigitte Sebbah, « La presse quotidienne régionale sur les réseaux sociaux », Sciences de la société, nos 84-85, , p. 171–191 (ISSN1168-1446, DOI10.4000/sds.1919, lire en ligne, consulté le )