Le judéo-araméen de Babylone est une forme de moyen-araméen employée par les auteurs juifs en Babylonie entre le IVe siècle et le XIe siècle, où il disparut au profit de l'arabe. Il est le plus souvent identifié comme le langage du Talmud de Babylone, rédigé au VIIe siècle, et de la littérature gaonique, qui sont les produits culturels les plus importants du judaïsme babylonien. Les sources épigraphiques les plus importantes pour ce dialecte sont les centaines d'amulettes araméennes écrites en caractères hébraïques.
Cette langue est étroitement apparentée à d'autres dialectes d'araméen oriental, comme le mandéen ou le syriaque oriental de l'Église assyrienne. C'est à l'aide de ces dialectes qu'on a reconstruit sa prononciation originelle, ainsi qu'à l'aide de la tradition de lecture des Juifs du Yémen (les textes araméens vocalisés contenus dans le Tanakh et dans les livres de prière sont d'une utilité limitée, car ils proviennent d'un dialecte différent, de la branche occidentale de l'araméen).
L'araméen du Talmud se révèle par ses caractéristiques être une langue de spécialistes, conçue pour l'étude et l'argumentation légale, comme le français de Jersey, plutôt qu'une langue maternelle utilisée au quotidien. Il continua à être utilisé dans ce but, alors que l'arabe s'était déjà depuis longtemps imposé comme une langue quotidienne. Il comporte une série de termes techniques de logique, comme tiyouvta (réfutation conclusive) ou teykou (point de controverse ne pouvant être décidé) ; ces termes sont encore en usage dans des écrits légaux juifs, même lorsque ceux-ci sont rédigés dans d'autres idiomes, et ont influencé l'hébreu moderne.
Étant la langue du Talmud, le judéo-araméen babylonien est encore pratiqué par ceux qui l'étudient, au même titre que le latin lors des humanités. L'instruction est cependant rarement systématique, et les étudiants sont supposés l'apprendre par eux-mêmes, avec l'aide de quelques repères indiquant des similarités et différences avec l'hébreu. Les romans de Chaïm Potok (L'Élu et La Promesse) relatent d'ailleurs le mauvais accueil fait à des interprétations fondées sur la grammaire ou la philologie.
Grammaire
Catégories verbales
La grammaire en judéo-araméen babylonien conçoit la conjugaison du verbe selon diverses modalités telles l'indicatif, l'intensif, le causatif, le réflexif, exprimées par la forme du thème (linguistique). Elle classe les thèmes en six catégories verbales caractérisées par la présence ou l'absence d'un préfixe "modal" mais surtout par la forme de la structure vocalique du thème nommée binəyān בִּנְיָן. Chaque verbe peut théoriquement se conjuguer selon le modèle des six binəyānîm בִּנְיָנִים.
Les catégories "modales" sont en judéo-araméen babylonien dans des catégories morphologiques désignées par les termes pe‘al (פְּעַל) , Aph'el (אַפְעֵל), Pa'el (פַּעֵל), Itpe'el (אִתְפְּעֵל), Itaph'al (אִתַפְעַל) et Itpa'al (אִתְפַּעַל)[1],[2].
Le binəyān pa‘el (בִּנְיָן פַּעֵל ) est active et fréquentatif. Le fréquentatif est un aspect lexical ou aktionsart des verbes. C'est un phénomène qui consiste en la dérivation d'un verbe « simple » : le nouveau verbe prend dès lors le sens du verbe simple ajouté d'une notion de fréquence, de répétition.
Le binəyān Itpa'al (בִּנְיָן אִתְפַּעַל) est passive et fréquentatif. Le fréquentatif est un aspect lexical ou aktionsart des verbes. C'est un phénomène qui consiste en la dérivation d'un verbe « simple » : le nouveau verbe prend dès lors le sens du verbe simple ajouté d'une notion de fréquence, de répétition.
Le binəyān aph‘el ( בִּנְיָן אַפְעֵל) est causatif et active .Le causatif décrit le fait de faire en sorte qu'une action ait lieu : par ex. dans les langues sémitiques par des formes conjuguées.
Le binəyān itaphal (בִּנְיָן אִתַפְעַל) est passive et causatif. Le causatif décrit le fait de faire en sorte qu'une action ait lieu : par ex. dans les langues sémitiques par des formes conjuguées.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 18:A survey of the aramaic binyanim.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic: , Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 23:Talmud Bavli Aramaic.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 22:Past tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 123:Past tense: came.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 36:Future tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 25:Past tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 39:Future tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 23:Past tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1),p. 37:Future tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 26:Past tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 40:Future tense: banyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 24:Past tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p.123 f.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 124:active participle with suffix.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 38:Future tense: binyan.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 125:Future tense: will bring.
↑Yitzhak Frank: Grammar for Gemara and targum onkelos: An Introduction to Aramaic, Ariel Institute, Jerusalem 2011 (ISBN978-1-59826-466-1), p. 94:Past tense:was refuted/were refuted.
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