John Buford, Jr. ( - ) est un officier de cavalerie de l'armée des États-Unis qui joue un rôle important durant la guerre de Sécession, en particulier au tout début de la bataille de Gettysburg : il détermine le choix du terrain, qui sera favorable aux Unionistes.
Buford sort de West Point (16e sur 38)[note 1] et obtient un brevet de 2d lieutenant au 1er régiment de dragons. Il passe l'année suivante au 2° Dragons[2], sert au Texas et contre les Sioux.
Il participe au maintien de la paix au moment des événements du Bleeding Kansas et sert dans la guerre de l'Utah en 1858[note 2]. Il est en garnison à « Fort Crittenden » (originellement nommé « Camp Floyd ») dans l'Utah de 1859 à 1861[3].
Buford étudie les livres du général John Watts de Peyster, qui écrit que la ligne d'escarmouche doit devenir la nouvelle ligne de bataille[4].
Pendant la guerre de Sécession
Pendant toute l'année 1860 les rumeurs de sécession et de guerre courent, et elles se concrétisent quand finalement le Pony Express apporte dans l'Utah la nouvelle du bombardement du fort Sumter (). Comme beaucoup d'anciens élèves de West Point, Buford doit choisir entre le Nord et le Sud. Vu son contexte familial, Buford est tenté d'opter pour le Sud : il est du Kentucky, son père possède des esclaves, la famille de sa femme milite pour le sud. Mais par ailleurs Buford a été éduqué dans le nord, y a mûri après son entrée dans l'armée. De plus deux de ses maîtres, les colonels Harney et Cooke, sont originaires du Sud, mais ils optent pour le Nord. Enfin Buford aime son métier, et son séjour dans les confins du Far West a coupé ses liens avec le Sud.
John Gibbon, un capitaine d'artillerie originaire de Caroline du Nord, est en garnison avec Buford et doit faire face au même dilemme que son ami. Il décrit dans ses souvenirs écrits après-guerre comment Buford a décidé d'opter pour le Nord. Buford dit à Gibbon qu'il vient de recevoir une lettre du Kentucky : le gouverneur de l'État lui demande de rallier le Kentucky, et l'assure qu'il lui donnera tout ce qu'il demandera... « Et qu'as-tu répondu, John ? » demande Gibbon. Buford répond, avec son débit assez lent : « Que je suis capitaine de l'armée des États-Unis, et que je le reste ! »
En , Buford est nommé major, et en , après avoir participé pendant plusieurs mois à la défense de Washington, il est nommé brigadier général d'un corps de volontaires. Puis il est nommé commandant de la cavalerie du IIe corps de l'Armée de Virginie, aux ordres du général John Pope. Sa cavalerie se distingue lors de la seconde bataille de Bull Run : Buford conduit une charge à la fin de la bataille, et est blessé au genou par une balle.
Guéri, il est nommé chef de la cavalerie de la nouvelle Armée du Potomac, sous George B. McClellan et Ambrose Burnside. Mais il se lasse vite de ce poste de bureaucrate, et il demande à reprendre du service sur le terrain.
Lors du raid de Stoneman (1863), Hooker prend soin de donner à Stoneman un adjoint de valeur : Buford, qu'il met à la tête de la « Brigade de Réserve » (1re division, cavalerie de l'armée du Potomac) ; l'énergie de Buford, contrastant avec le manque de pugnacité de Stoneman, évitera que l'expédition ne tourne au désastre : il assure en particulier la couverture de la retraite vers les lignes unionistes.
Après la bataille de Chancellorsville, Stoneman est limogé, et c'est le major général Alfred Pleasonton qui est nommé à la tête de la cavalerie US ; Hooker, alors tombé en disgrâce, dira par la suite que Buford aurait été un meilleur choix.
Buford dirige sa nouvelle unité lors de la bataille de Brandy Station (la plus grande bataille de cavalerie de la guerre, au cours de laquelle la cavalerie US se hisse au niveau de la cavalerie confédérée), puis lors de la bataille d'Upperville.
C'est à Buford que les fédéraux doivent le choix du terrain favorable dès le début de la décisive bataille de Gettysburg : le , Buford entre dans la petite ville, comprend que les confédérés sont rassemblés en masse à proximité de ce point hautement stratégique (une redoute naturelle) et s'y maintient. Le lendemain , Buford et ses hommes résistent habilement aux attaques de Henry Heth et de A.P. Hill, et la bravoure et la ténacité de ses cavaliers à pied donnent au major général John F. Reynolds et à son 1er corps de l'armée du Potomac le temps d'arriver à Gettysburg. Dans la nuit, l'infanterie et l'artillerie fédérales se mettent en place et se retranchent sur les crêtes entourant le village, si bien que les et , les assauts des confédérés déferlent en vain sur la position puissamment défendue. Buford, par son anticipation, son sens tactique et ses qualités de chef, a donc contribué d'une façon décisive à la victoire de Gettysburg.
Après Gettysburg, Pleasonton envoie Buford se réapprovisionner et se renforcer à Emmitsburg, dans le Maryland : une décision inopportune qui dégarnit le flanc gauche de l'armée fédérale. Cependant, alors que les confédérés font retraite vers le Potomac sans que Meade ne cherche à parachever leur défaite, Buford poursuit les sudistes et les attaque[note 3], en particulier à Warrenton en Virginie et lors de la seconde bataille de Funkstown ().
Ultérieurement, en Virginie centrale, Buford se rend particulièrement utile en protégeant le mouvement de recul du major général George G. Meade (campagne de Bristoe, ).
Comme l'a écrit le major généralJohn Watts de Peyster[5] : « Le héros de Oak Ridge fut John Buford… Non seulement il s'est montré extrêmement tenace, mais son exemple personnel a incité ses cavaliers à tenir sous le feu aussi bien que des fantassins. »
Et le brigadier général Theo. F. Rodenbough a écrit[6] : « Buford méprisait l'ostentation et la bravacherie de certains traineurs de sabre de la cavalerie[note 4]. Modeste, il ne recherchait pas les louanges qu'aurait pu pourtant lui valoir à juste titre son courage calme, son élan lors des attaques, et surtout son souci constant des hommes dont il était responsable. »
Mort
À la mi-, John Buford, très gravement malade (probablement une typhoïde), est alité à Washington chez son ami George Stoneman. Le Stoneman demande qu'il soit promu « major general », et Abraham Lincoln accepte : « On m'informe que le général Buford va vraisemblablement mourir avant la fin de la journée. Il me semble évident qu'il doit être nommé « major general » pour conduite distinguée et méritante à la bataille de Gettysburg. » On annonce sa promotion à Buford, qui murmure « C'est bien vrai ? » puis « C'est trop tard, j'aimerais tant vivre… »[7].
Buford est assisté dans ses derniers moments par son aide-de-camp, le capitaine Myles Keogh, et par son serviteur Edward. Son épouse Pattie accourt de Rock Island (Illinois), mais elle arrive trop tard. Le général Stoneman et le lieutenant-colonelA.J. Alexander sont là. Alors qu'il agonise, Buford est saisi de délire, et il admoneste son serviteur ; mais il redevient lucide et lui dit : « Edward, excusez-moi, je ne savais pas ce que je faisais. Vous avez été un fidèle serviteur, Edward[7]. »
Le à 14 heures, Buford rend l'âme dans les bras de Myles Keogh ; ses dernières paroles auraient été : « Placez des gardes sur toutes les routes, et ne laissez pas les hommes courir vers l'arrière[8]. »
Le journal Philadelphia Inquirer du publie un poème :
On ne suivra plus sa silhouette audacieuse,
On ne le verra plus se jeter dans la tourmente de la bataille,
On ne poursuivra plus avec lui l'ennemi en déroute,
On n'admirera plus son écrasant coup d'alfange,
On n'entendra plus sa voix, trompette assourdissante,
Quand, dressé sur son étalon, il charge… Buford est mort[9] !
Après le service funéraire, 2 membres de la suite de Buford (les capitaines Keogh et Wadsworth) escortent son cercueil jusqu'au cimetière de West Point. Buford est enterré à côté d'un ami, le lieutenant Alonzo Cushing, un autre héros de Gettysburg, mort à Cemetery Ridge en défendant la forteresse naturelle que Buford avait choisie.
En 1865, les membres de sa division se cotisent pour ériger un monument funéraire (un obélisque de 7,5 m de haut) sur sa tombe. Et les officiers de sa suite rédigent un panégyrique solennel à sa mémoire : « Nous appréciions pleinement ses mérites en tant que gentleman, soldat, commandant et patriote, et nous réalisons combien cette perte est irréparable pour notre arme, la cavalerie. Nous avons perdu en John Buford un ami et un chef, dont la seule ambition était notre succès, et le plus grand plaisir la recherche du bien-être, de la sécurité et du bonheur des officiers et des hommes qu'il commandait. À son infatigable activité dans tous les postes qu'il occupa, le service est largement redevable pour son efficacité, et par sa mort la cavalerie a perdu à la fois ferme ami et très ardent défenseur. Nous sommes appelés à prendre le deuil de celui qui fut toujours le meilleur et le plus tendre des pères, et notre plus grand et plus cher désir sera toujours de perpétuer sa mémoire et d'être les émules de sa grandeur[10]. »
En 1866 le nom de Buford est donné à un fort établi au confluent des rivières Missouri et Yellowstone (dans ce qui est aujourd'hui le Dakota du Nord. Au Wyoming, entre Laramie et Cheyenne, une ville-chantier de la Transcontinental Railroad est nommée Buford en 1880 ; elle avait alors 2 000 habitants, elle n'en compte plus que 2.
En 1895 une statue en bronze (par James E. Kelly), est élevée en l'honneur de John Buford sur le champ de bataille de Gettysburg.
Un bateau lui doit son nom, le USAT Buford(en) (cargo-paquebot lancé en 1890, ferraillé en 1929, célèbre à la fois pour avoir servi à l'expulsion des États-Unis de 249 anarchistes et communistes en 1919, et pour être représenté comme le Navigator dans La Croisière du Navigator, de Buster Keaton, en 1924).
↑Arthur Fremantle, qui suit la retraite des Confédérés dans le chariot des médecins, sous une pluie battante, décrit bien l'action des cavaliers de Buford et la nocivité de leur harcèlement.
No more to follow his daring form
Or see him dash through the battle's storm
No more with him to ride down the foe
And behold his falchion's crushing blow
Nor hear his voice, like a rushing blast
As rider and steed went charging past… Buford is dead!
Bielakowski, Alexander M. "John Buford." In Encyclopedia of the American Civil War: A Political, Social, and Military History, edited by David S. Heidler and Jeanne T. Heidler. New York: W. W. Norton & Company, 2000. (ISBN0-393-04758-X).
Boatner III, Mark M., The Civil War Dictionary, Vintage Books, 1959, réédition 1987, (ISBN0-679-73392-2).
Hard, Abner N. History of the Eighth Cavalry Regiment, Illinois Volunteers. Dayton, OH: Press of Morningside Bookshop, 1984. (ISBN978-0-89029-078-1). First published 1868 by author.
Langellier, John P., Kurt Hamilton Cox, and Brian C. Pohanka. Myles Keogh: The Life and Legend of an "Irish Dragoon" in the Seventh Cavalry. El Segundo, CA: Upton and Sons, 1991. (ISBN0-912783-21-4).
Longacre, Edward G. General John Buford: A Military Biography. Conshohocken, PA: Combined Publishing, 1995. (ISBN0-938289-46-2).
Sandford, George B. Fighting Rebels and Redskins: Experiences in Army Life of Colonel George B. Sanford, 1861-1892. Norman: University of Oklahoma Press, 1969. (ISBN0-806-10853-3).
Proceedings of the Buford Memorial Association (New York, 1895)
History of the Civil War in America (volume iii, p. 545)