Aconit napel

Aconitum napellus subsp. napellus

L'aconit napel Écouter, ou casque-de-Jupiter, Aconitum napellus subsp. napellus, est une sous-espèce de plantes à fleurs de la famille des Ranunculaceae. Il s'agit de la sous-espèce type de l'espèce Aconitum napellus.

Ce sont des plantes extrêmement toxiques pour l'être humain, pouvant facilement entraîner la mort.

Autre dénominations

L'aconit napel est aussi désigné sous les noms de capuche de moine, capuchon, coqueluchon, napel, pistolet, sabot du pape, aconit tue-loup bleu, aconit bicolore, tore bleue, casque-de-Jupiter

Histoire et légendes

L'aconit est connu depuis l'Antiquité pour l'activité toxique de ses alcaloïdes puisqu'on l'utilisait pour la chasse ou pour empoisonner l'eau potable[réf. nécessaire].

Dans la mythologie grecque, l'aconit est issu de la bave des crocs de Cerbère, chien féroce à trois têtes gardant l'entrée des Enfers et ramené sur Terre par Héraclès[1].

Dans le mythe de Jason et des Argonautes, Médée utilise de l'aconit pour essayer de tuer Jason, lorsque ce dernier manifeste sa volonté de ne plus être son amant[2],[3].

Durant l'hiver av. J.-C., Hannibal se serait suicidé avec un mélange d'aconit et de ciguë qu'il détenait dans une de ses bagues pour éviter d'être livré aux Romains[3].

Les Gaulois l'ont utilisé pour chasser les loups et les ours qui occupaient les forêts en en enduisant leurs flèches[4].

Au Moyen Âge, Aconitum napellus était considérée comme une plante magique associée à la magie noire, crainte par les loups-garous, les vampires et les démons. Elle était prescrite par certains rebouteux et guérisseurs à ceux qui se pensaient transformés en loup[1],[5].

À la Renaissance, l'aconit était utilisé par la famille Borgia, notamment à cause de l'atroce agonie que son ingestion provoque[4].

Description

Appareil végétatif

L'aconit napel est une plante herbacée pérenne atteignant 0,5 à 1,5 m de hauteur[6], très feuillée, munie d'une racine noirâtre tubérisée et épaisse (en forme de petit navet pointu long de 5 à 10 cm garni de radicelles)[6]. La tige, dressée, glabre, cylindrique et robuste, porte en son sommet un épi de fleurs caractéristique. Les feuilles, à 7 ou 8 lobes découpés en fines lanières, sont alternes vert foncé, cunéiformes, profondément incisées, à nervures en éventail, devenant plus petites vers le haut de la plante[7].

Appareil reproducteur

De juin à septembre, les fleurs, de couleur bleu-violet (rarement blanches), sont formées par le calice volumineux composé de cinq sépales, dont le sépale supérieur est galéiforme (en casque). La corolle, cachée à l'intérieur des sépales, abrite deux pétales tubulaires recourbés en forme de « char de Vénus » ou de « pistolets » et trois pétales très petits, réduits à l'état de simples écailles voire non formés[7].

Habitat

Aconit napel poussant dans un milieu ouvert.

L'aconit napel pousse dans les zones humides des montagnes (surtout au bord des torrents), à une altitude variant entre 500 m et 2 500 m[8].

Répartition

On trouve l'aconit napel en Europe centrale et orientale, surtout en montagne, ainsi qu'en Asie[Où ?] [9].

Statuts de protection, menaces

L'espèce n'est pas encore évaluée à l'échelle mondiale et européenne par l'UICN. En France elle est classée quasi menacée (NT), proche du seuil des espèces menacées ou qui pourraient être menacées si des mesures de conservation spécifiques n'étaient pas prises.

En France, elle figure sur la liste des plantes protégées des régions Centre-Val-de-Loire, Champagne-Ardenne, Haute-Normandie, Poitou-Charentes et Isère.

En Belgique, elle est légalement protégée.

Culture

L'aconit napel préfère les sols frais et la mi-ombre[10].

Pharmacopée

Composition et toxicité

L'aconit napel est l'une des plantes les plus toxiques du monde. L'empoisonnement par cette plante a été décrit dès 1845[11]. Toute la plante est vénéneuse. Les molécules toxiques sont des alcaloïdes diterpéniques. L'alcaloïde principal est l'aconitine : les feuilles contiennent de 0,2 à 1,2 % d'aconitine, les racines de 0,3 à 2 %[12]. L'aconitine entraîne la mort par paralysie des différents systèmes vitaux (respiratoire et circulatoire)[1], elle engendre également entre autres symptômes des sueurs, une mydriase, une hypersalivation jusqu'à la mort. Il n'existe aucun antidote à cette toxine (au Moyen Âge, on croyait que l'anthorine extraite de l'aconit anthore était un antidote à l'aconitine[13]). C'est la racine qui contient le plus d'aconitine : une ingestion de 2 à 3 g de racine est suffisante pour entraîner la mort[1].

L'aconit peut également provoquer la mort d'animaux herbivores. Dans le nord du Sikkim, Charles Bell observa qu'un âne souffrant d'empoisonnement par l'aconit était traité en découpant le bout de ses oreilles et piquant dans ses quartiers arrière. Il rapporte également que les Tibétains de la vallée de Chumbi au Tibet prévenaient l'empoisonnement de leurs poneys, mulets, ânes et yaks en frottant des feuilles d'aconit bouillies sur la bouche et les narines de l'animal. Parce que ce traitement irrite les membranes buccales et nasales, les animaux deviennent ainsi conditionnés contre la consommation de la plante à l'avenir[14].

Précautions

L'usage de gants est recommandé pour manipuler la plante ainsi que de se laver les mains en cas de contact avec la peau et ne pas se toucher les yeux et la bouche[1],[10],[15].

Ressemblance avec Molopospermum peloponnesiacum

Les feuilles de l'Aconit napel peuvent être confondues avec celles du Molopospermum peloponnesiacum (aussi appelé couscouil), une apiacée très recherchée pour la consommation en Roussillon. Ces deux plantes se distinguent par contre facilement lorsqu'elles sont en fleurs[16]. En , une telle confusion a causé la mort d'un habitant des Pyrénées-Orientales et l'intoxication grave de deux autres[17],[18].

Feuilles de couscouil, à gauche, et d'Aconit napel, à droite (Pyrénées-Orientales).

Notes et références

  1. a b c d et e « Aconit : savoir planter, tailler, entretenir ... », sur Ooreka (consulté le )
  2. « Des plantes-poisons : aconit, belladone, ciguë, digitale ... », sur Futura Santé, (consulté le )
  3. a et b « Ces personnes célèbres victimes d'un empoisonnement », sur Dijon Santé.fr, (consulté le )
  4. a et b Hyma La Hyène, « L'aconit », Survival n°5,‎ décembre 2016 / janvier 2017, p. 40
  5. Guide de visite, les plantes magiques, du jardin des neuf carrés de l'abbaye de Royaumont
  6. a et b Cécile Lemoine, Les fleurs des montagnes, Editions Jean-Paul Gisserot, , p. 9.
  7. a et b « Aconitum napellus L. », sur Toxiplante (consulté le )
  8. « Aconit napel - Nature Midi-Pyrénées », sur www.naturemp.org (consulté le )
  9. « Aconit napel - Aconitum napellus subsp. napellus Ranunculaceae », sur Tela Botanica
  10. a et b (en) Ber Dranreb, « ACONIT et BELLADONE - deux plantes séductrices aux sucs vénéneux », sur dranreb0434.overblog.com (consulté le )
  11. Fleming A, In: An inquiry into the physiological and medicinal properties of the Aconitum napellus; to which are added observations on several other species of aconitum, London: John Churchill, 1845: 43-44
  12. (de) H. Bentz, Nutztiervergiftungen, Erkennung und Verhutungen, G. Fischer Verlag, , p. 361.
  13. Aconit anthore
  14. Marina Martin, Evelyn Mathias, Constance M. McCorkle, Ethnoveterinary Medicine: An Annotated Bibliography of Community Animal Healthcare Indigenous knowledge and development series, ITDG Pub., 2001 (ISBN 1853395226 et 9781853395222), p. 87 : "Bell observed that a donkey in north Sikkim suffering from aconite poisoning was treated by slitting off the tips of its ears and pricking its hind-quarters. He also reports that people of the Chumbi Valley protected their ponies, mules, donkeys and yaks against aconite (a type of wolfsbane) poisoning by rubbing its boiled leaves over the animal's mouth and nostrils. Because this treatment irritates the sensitive buccal and nasal membranes, the animals become thus conditioned against eating the plant in the future." Voir aussi Charles Bell, The People of Tibet, Clarendon Press, 1928, p. 23-24
  15. « Aconit : plantation, culture, toxicité et entretien des fleurs », sur Jardiner Malin : jardinage et recettes de saison, (consulté le )
  16. « La coscollada », Société mycologique et botanique de Catalogne Nord
  17. Sébastien Berriot, « Dans les Pyrénées-orientales, un randonneur décède après avoir consommé une plante toxique », France Bleu Roussillon,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  18. (en) S. Combaluzier et al., « A bad salad seasoning: When aconite confused with Couscouil », Toxicologie Analytique et Clinique, vol. 31, no 2S,‎ , S35-S36 (DOI 10.1016/j.toxac.2019.03.045, lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Jules Bassot, Étude médico-légale sur l'empoisonnement par l'aconitine, Storck, (lire en ligne)
  • Paul Oulmont, De l'aconit de ses préparations et de l'aconitine considérés au point de vue thérapeutique, G. Masson, (lire en ligne)

Liens externes

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