Le véhicule blindé à roues de la Gendarmerie (VBRG) est le nom le plus courant du Berliet VXB 170 en France. C'est un véhicule blindé de maintien de l'ordre à quatre roues motrices.
Le remplacement du VBRG, évoqué à de nombreuses reprises et plusieurs fois reporté, a fait l'objet de nombreux projets allant de l'achat de machines neuves à la rénovation totale ou partielle de la flotte. En 2019, des expérimentations de rénovations lourdes ont été menées avec les entreprises Turgis et Gaillard Groupe qui a modernisé un VBRG, tandis que l'entreprise OMAT a retrofité un autre VBRG et un VAB[3],[4],[5]. Un marché pour la fourniture de 90 véhicules blindés de maintien de l'ordre a finalement été attribué le 27 octobre 2021 à la société Soframe (filiale du groupe Lohr) pour la fourniture de véhicules dérivés de leur modèle ARIVE (ARmored Infantry VEhicle ou véhicule blindé d'infanterie) [6],[7]. Le véhicule est finalement nommé « véhicule d'intervention polyvalent de la gendarmerie » (VIPG), ou Centaure.
Le VXB 170
Historique
Sa conception date de 1969 dans le cadre du projet BL-12, qui maximise l'utilisation de composants de véhicules poids lourds de la marque[8]. Il sera mis en production sous la référence VXB 170 dans l'usine de Bourg-en-Bresse. 170 indique la puissance de sa motorisation (170 ch).
Différentes versions sont proposées pour la Gendarmerie, qui le sélectionne en 1972, ainsi que pour l'Armée de terre et pour l'export. Berliet présentera notamment des prototypes équipés de différents armements[9] : canon de 20 mm, canon de 20 mm bitube pour la défense anti-aérienne, canon de 90 mm, etc.
En 1974, Berliet, qui appartenait à Citroën depuis 1967, est cédé à Renault. La même année, l'Armée française choisit le Saviem VAB pour son futur véhicule blindé de transport de troupes et le VXB, quoique moins cher, devient redondant dans l'offre de Renault, ce qui entraînera l’arrêt de sa production.
Caractéristiques
Le VXB 170 est un véhicule blindé de transport de troupes assez classique construit autour d'une caisse rectangulaire en acier soudée de 8 mm d'épaisseur sur les côtés et le toit et 6 mm pour le plancher[10].
Ce blindé repose sur une suspension par pont rigide, choisie pour sa robustesse et sa simplicité[11]. Deux essieux moteurs sont présents, supportant chacun deux roues[10].
Le VXB 170 est équipé du moteur Berliet V800, déjà éprouvé à bord des autobus de la marque. Ce V8, placé à l'arrière gauche du véhicule, développe une puissance maximale de 170 ch.
Le conducteur est situé à l'avant gauche du véhicule. Une deuxième place est installée à sa droite. Le conducteur peut voir la route depuis un grand pare-brise central ainsi que par deux vitres situées de part et d'autre de ce dernier. Des grilles de protection sont installés pour les opérations de maintien de l'ordre. En cas de combat, des volets blindés peuvent être positionnés devant les vitrages. Dans ce cas, la vision se fait par trois épiscopes situés sur le toit[10].
Derrière eux se situe le poste de l'opérateur de la tourelle. Enfin, un groupe de 6 à 8 hommes peut s'installer sur une banquette double et quatre sièges. L'accès à l'intérieur du véhicule se fait par deux portes latérales et une plus petite à l'arrière, à côté de la trappe du compartiment moteur.
Le VXB peut aborder des pentes de 60 %. Il est amphibie et peut recevoir - en option - des hydrojets (mais ces équipements n'ont été retenus par aucun client).
Utilisateurs
France - 155 exemplaires. 86 restaient en service en 2013[12], 71 en 2017[13], 84 en parc en 2020[14].
Dès les années 1930, la Gendarmerie s'équipe de véhicules blindés[16]. Elle déploie dès 1931 deux chars et onze automitrailleuses en Corse lors d'une opération d'envergure contre le grand banditisme[17]. La Gendarmerie a par ailleurs suivi avec attention l'emploi de blindés au maintien de l'ordre en Allemagne, d'abord par l'Armée française lors de l'occupation de la Ruhr et de la Rhénanie (et notamment lors des grèves de 1923), puis par la police allemande (notamment lors des émeutes de Berlin en 1929)[18].
En 1933 est créée une première unité blindée : le Groupe spécial de garde républicaine mobile, puis en 1940, la Gendarmerie forme le 45e bataillon de chars de combat qui participe à la campagne de France. Après la guerre, elle dispose de blindés : chars, automitrailleuses et half-tracks qui sont destinés aux missions de combat (Défense opérationnelle du territoire ou DOT) ou aux situations extrêmes de rétablissement de l'ordre comme en Algérie.
Le programme VBRG
Au début des années 1970, se pose le problème du remplacement des half-tracks. Mais l'expérience des événements de mai 68, au cours desquels l'utilisation de bulldozers pour détruire les barricades a été concluante[19],[20], conduit la Gendarmerie à lancer un appel d'offres pour un engin équipé d'une lame et/ou d'un treuil et dont la mission principale n'est plus le combat mais le maintien de l'ordre. Elle choisira le Berliet VXB au terme d'une compétition qui l'oppose au Panhard M3 de juillet 1971 à janvier 1972[20].
À partir de 1974, le VXB 170 entre en service dans la gendarmerie mobile sous l'appellation de véhicule blindé à roues de la Gendarmerie (VBRG). 155 exemplaires sont commandés[21].
Il est mis en service au sein des unités suivantes[20] :
Le Groupement blindé de gendarmerie mobile (GBGM) de Satory où il équipe initialement trois escadrons à hauteur de treize engins par escadron (quatre par peloton et un pour le chef d'escadron). À l'occasion du retrait de matériels plus anciens, le nombre d'escadrons VBRG sera porté à six puis à huit soit la totalité des escadrons du groupement (ce nombre a été ramené à sept en 2010 lors de la dissolution de l'escadron 19/1).
Certains escadrons dits « mixtes », basés en province et qui ont été dotés d'un peloton VBRG[N 2] jusqu'au début des années 2000 (ces engins ont été depuis restitués au GBGM).
Les formations de Gendarmerie en Corse (3 engins en 2020 [22] et dans les départements et territoires d'Outre-mer, dotés de pelotons comptant habituellement entre trois et cinq engins. En mai 2017, 38 sont déployés Outre-mer[23], 37 en 2020[22].
Le camp militaire de Frileuse à Beynes (Yvelines) utilisé par le GIGN avec un engin en 2020[22].
Dans la configuration VBRG, l'équipage (un conducteur, un opérateur dans la tourelle et un chef de bord)[24] est complété par un groupe tactique porté composé de 6 à 8 gendarmes.
La dotation d'un peloton était initialement de quatre engins. Elle a été successivement réduite à trois puis à deux blindés[25] - soit neuf pour un escadron du GBGM au complet (tous les escadrons de gendarmerie mobile sont passés à un format « quaternaire » - soit quatre pelotons par escadron - au début des années 2000).
Armement
Initialement armé d'une mitrailleuse sur rail circulaire, il sera ensuite doté d'une tourelle monoplace équipée d'une mitrailleuse AN-F1 en calibre 7,62 mm et d'un lance-grenades Cougar 56 mm (après que différentes versions de tourelles et de capots aient été expérimentées). Il peut être également doté d'un disperseur lacrymogène[20].
La version destinée à l'exportation peut être équipée d'un mortier Brandt Mle CM60A1.
version « lame » avec un boutoir à commande hydraulique à l'avant ;
version « treuil » dotée d'un treuil à l'avant ;
version « PC » dotée de moyens radios renforcés, d'une tablette et d'un haut-parleur[N 3].
Les VBRG, exclusivement destinés aux opérations de maintien de l'ordre, reçoivent tous la livrée bleue de la Gendarmerie afin de les distinguer des véhicules de combat[1].
Le programme de remplacement du VBRG, plusieurs fois annoncé, a été lancé une première fois puis annulé en 2007[N 5]. Relancé une deuxième fois puis attribué en 2008[N 6] ce marché n'a cependant jamais été exécuté faute de financement. Son coût, selon une réponse au projet de loi de finances 2019, aurait été de 45 millions d'euros[43].
Pour compléter son parc, la Gendarmerie obtient de l'Armée de terre des véhicules de l'avant blindés (VAB), qu'elle déploie en Afghanistan puis rapatrie en métropole. Elle en redéploie par la suite un certain nombre en Nouvelle-Calédonie[44].
En 2019, avec la modification par l'entreprise Turgis et Gaillard Groupe d'un exemplaire fourni par la Gendarmerie, c'est la rénovation d'une partie du parc qui est envisagée, avec notamment une remotorisation par un moteur Iveco de 240 CV, une climatisation et des éléments de blindage additionnels[45]. Un VAB a été également rénové et équipé pour servir aux côtés des VBRG[46].
Finalement, le 7 décembre 2020, un avis de marché annonce un appel à candidatures pour la fourniture et la maintenance de 90 véhicules blindés de maintien de l’ordre neufs, livrables d'ici 2026[47].
Le 27 octobre 2021, ce marché est attribué à la société Soframe (filiale du groupe Lohr) pour la fourniture de véhicules dérivés de leur modèle ARIVE (ARmored Infantry VEhicle ou véhicule blindé d'infanterie) [48],[6],[7] Il s'agit d'un véhicule blindé 4×4 de 14,5 tonnes. Les modèles concurrents non retenus (sous réserve d'appel) sont les versions « MO » (maintien de l'ordre) du VBMR-L Serval et du Sherpa Light de la société Arquus. Le véhicule retenu est baptisé « véhicule d'intervention polyvalent de la gendarmerie » (VIPG) ou « Centaure »[49],[50].
De nombreux reportages ou documentaires illustrent l'engagement des VBRG lors d'entraînements ou opérations de maintien de l'ordre ou d'événements climatiques[51],[52].
Reproduction en miniature
Plusieurs versions du VBRG ont été reproduites en modèle réduit en résine à l'échelle 1/43e par différentes sociétés (CPC productions, Miniatures du Mont-Blanc, Momaco sous la marque Perfex).
Notes et références
Notes
↑Avec une incertitude sur l'origine de ces engins (véhicules neufs ou d'occasion).
↑À cette époque, les escadrons bénéficient d'une double dotation en véhicules : fourgons-cars pour le maintien de l'ordre et véhicules de combat pour les missions de Défense Opérationnelle du territoire (DOT). Chaque escadron compte trois pelotons de marche. Dans un escadron mixte, un des pelotons dispose de VBRG et les deux autres sont dotés de camionnettes tactiques.
↑Les différences entre la version PC — produite selon plusieurs variantes — et la version de base disparaissent au fur et à mesure des modifications.
↑Leur utilisation au maintien de l’ordre est soumise à l’autorisation du préfet de zone de Défense pour un peloton de deux engins et à celle du Premier ministre au-delà.
↑Un premier appel d'offres, remporté par Panhard avec un véhicule AVXL semi-chenillé original (doté d'une chenille « ventrale » située entre les roues) a été annulé en référé sur plainte de Renault Trucks Defense (RTD) dont l'offre basée sur un VBMO (véhicule blindé de maintien de l'ordre) 6 x 6 dérivé du VAB n'avait pas été retenue, au motif que le véhicule de Panhard n'était pas produit en série, comme exigé au cahier des charges.
↑ Ce deuxième appel d'offres avait cette fois été remporté par Renault Truck Defense (RTD) avec une solution basée sur son véhicule Sherpa 3A
↑Le film a été partiellement tourné en Guyane. On peut imaginer que les deux VXB sont des VBRG de la Gendarmerie repeints mais, en l'absence de confirmation, ceci reste une hypothèse.
↑Quinze exemplaires d'après certaines sources, après livraison ultérieure de trois engins par la France - cf-historique ci-dessus.
↑L'achat de ces matériels a été autorisé par la loi de finance du 31 mars 1921. Georges Carrot, Le Maintien de l'ordre en France au XXe siècle, Éditions Veyrier, 1990, p 39.
↑Simon Fieschi, Les Gendarmes en Corse, 1927-1934 De la création d'une compagnie autonome aux derniers « bandits d'honneur », in Jean-Noël Luc (dir.) Soldats de la Loi, Paris, Presses de l'université Paris-Sorbonne (PUPS), 2010, pp. 109-120.
↑Clément Têtevuide, Des Chars et des Gendarmes, p 47
↑Thierry Forest : La gendarmerie mobile à l'épreuve de mai 1968, Service historique de la Défense 2007.
↑Marc Clerc - Histoire et évolution des moyens blindés depuis la deuxième guerre mondiale. Revue de la Gendarmerie nationale N° 262 Consultable sur https://fr.calameo.com/read/00271929272828a943455?page=18. L'auteur, commandant du Groupement blindé de gendarmerie mobile, évoque une volonté initiale de commander jusqu'à 400 engins. Le chiffre peut paraître élevé mais il est à rapprocher de celui du parc de half-tracks à remplacer, qui, après avoir culminé à 707 véhicules en 1963 était encore de 575 engins en 1975. Référence : Pascal Meunier, Laurent Jacquot, Jean-Yves Hardouin. Un siècle de véhicules de la Gendarmerie nationale Éditions E-T-A-I, Boulogne-Billancourt, 2005 (ISBN2-7268-9415-1) p. 88
↑ a et bCollectif, Histoire de la Gendarmerie mobile d'Ile-de-France, 3 volumes, Éditions SPE-Barthelemy, Paris, 2007, (ISBN2-912838-31-2) Volume II
↑ abc et dAntoine Bréart de Boisanger, « Renouvellement de la composante blindée de la Gendarmerie : de quoi parle-t-on ? », Revue Défense Nationale, no 846, , p. 93 à 97 (lire en ligne)
↑Philippe Dettori-Campus, « Histoire et perspectives: L’emploi des formations blindées de Gendarmerie », DSI (Défense et Sécurité Internationale), no 107, , p. 76–81 (ISSN1772-788X, lire en ligne, consulté le )
Les Véhicules blindés français (1945-1977), par P. Touzin, éditions E.P.A., 1978.
Véhicules de Gendarmerie par Pascal Denis et Jean-Yves Hardouin, éditions E.T.A.I. 1997
Un siècle de véhicules de la Gendarmerie nationale par Jean-Yves Hardouin, Pascal Meunier, et Laurent Jacquot, éditions E.T.A.I., 2005.
Des Chars et des Gendarmes - Du Groupe Spécial Blindé au 45e BCG - Mai 1933-Mai 1940, Clément Têtevuide, Force Publique Revue de la société Nationale Histoire et Patrimoine de la Gendarmerie, (ISSN1950-3644)
G. Tavera et JP. Montbazet, Les blindés de la Gendarmerie, Paris, Éditions M.D.M., , 50 p. (ISBN2-909313-04-2).
L'Encyclopédie des Armes/Les forces armées du monde, Collectif, 1984-1986.
Collectif, Histoire de la gendarmerie mobile d'Île-de-France, vol. 2, Paris, Éditions SPE-Barthelemy, coll. « Gendarmerie », , 320 p. (ISBN2-912838-31-2).