René Cruse s'engage en faveur des objecteurs de conscience, il est inculpé en 1972 pour avoir fait connaître l'existence du statut d'objecteur en France[6],[7] alors que la loi l'interdit[8]. Il est inculpé pour incitation à l'insoumission et à la désertion, ce que dénonce Yves Le Foll à l'Assemblée nationale[9]. Le procès a lieu en 1973 à Corbeil-Essonnes et provoque des manifestations de soutien[10],[11],[12]. René Cruse s'affirme antimilitariste « dans une perspective de lutte des classes[13]. »
René Cruse a été membre du Comité de parrainage du Centre de documentation et de recherche sur la paix et les conflits rebaptisé Observatoire des armements.
Avec le temps, René Cruse s'inscrit également comme critique radical de l'institution religieuse. Il écrit en 1992 : « L'Église-institution a-t-elle jamais eu un autre langage qu'obscurantiste ? »[14]. Il défend ce qu'il nomme une « spiritualitéathée » ou un « athéisme pacifique »[15].
« Bien sûr, il ne faut pas être naïfs, on a de la peine à imaginer un monde sans religion, pas plus qu’un monde sans guerre et sans prostitution. Tout au plus pouvons-nous tenter, grâce à un athéisme pacifique, de tempérer ces « errances » antiques que sont précisément les religions, les guerres et le sexisme, tous trois toujours portés par des discours amphigouriques. »
René Cruse vit à Genève à partir de 1977, aux côtés de Marielle Budry (féministe engagée et psychologue)[17]. Il s'engage dans le mouvement alternatif local et devient président des Jardins de Cocagne, participe au Groupe pour une Suisse sans armée, est cofondateur du « Comité Paix Genève », premier président de l'Association des lecteurs du Courrier, devient accompagnant au Groupe sida Genève. Il fait la connaissance de Jean Ziegler, puis de Daniel de Roulet.
René Cruse est candidat du Mouvement contre l'armement atomique (MCAA) aux élections législatives à Nevers en 1967, sous l'égide du Parti socialiste unifié (PSU). Cette candidature « anti-bombe nucléaire » est parrainée par Alfred Kastler, Théodore Monod et Jean Rostand[18],[19],[20]. Il est à nouveau candidat du PSU aux législatives de 1973 dans le département de l'Essonne[21]. Il est membre du PSU depuis . Il en démissionne en car il juge que « les tendances actuelles du parti s'alignent de plus en plus sur un programme commun qui ne remet pas en cause radicalement et fondamentalement les structures, les lois et les règles de l'économie du régime actuel »[22].
Œuvres
Dialogue politique avec la mort, préface de Gilles Perrault, éditions Pour de Vrai, Cormagens, Suisse, 1990, 104 pages
L'ancêtre de notre avenir, préface de Francis Jeanson, éditions Golias, Lyon, 1994, 127 pages
Un pasteur en politique, 2003, 23 pages, « en vente à la Librairie du Boulevard »
Au train où vont les choses, testament intellectuel, 2012, à compte d'auteur
Autobiographies
La faute du pasteur Cruse, préface de Jean Ziegler, éditions les Lettres Libres, Paris, 1986, 202 pages (ISBN2867510864)
Entretiens avec un rebelle, avec Raymond Zoller et Daniel de Roulet, préface de Daniel de Roulet, éditions L'Harmattan, collection Cheminements spirituels, Paris, 2005, 157 pages (ISBN274758139X)
Tranche de vie, vie tranchée (« Web-documentaire », témoignage filmé), textes René Cruse, introduction Jacques Geoffroy, images et montage Luca Lennartz, Atelier Luca, 2011, 30 minutes. Récit de guerre basé sur des notes manuscrites portant sur la période d' à ; récit oral accompagné de textes et complété par des images d'archives[23]
Bibliographie
Patrick Cabanel, « René Cruse », in Patrick Cabanel et André Encrevé (dir.), Dictionnaire biographique des protestants français de 1787 à nos jours, tome 1 : A-C, Les Éditions de Paris Max Chaleil, Paris, 2015, p. 787 (ISBN978-2846211901)
Béatrice Guelpa, « René Cruse », dans D'une foi à l'autre : portraits de convertis, Labor et Fides, coll. « Interreligieux », (ISBN9782830914139). René Cruse fait l'objet de l'un des 20 portraits, en tant que « converti à l'athéisme ».
Daniel de Roulet, Un glacier dans le cœur, vingt-six manières d’aimer un pays et d’en prendre congé, Les éditions Metropolis, 2009, 220 p. (ISBN978-2-88340-184-6). « René Cruse, pasteur défroqué » est l'un des chapitres.
Manon Widmer, René Cruse, homme de parole, Genève, Slatkine, coll. « Ils ont choisi Genève », , 120 p. (ISBN978-2-8321-0577-1)
Philippe Bach, « Décès du militant pacifiste René Cruse », Le Courrier, (lire en ligne, consulté le )
Maurice Balmet, Patrice Bouveret, Guy Dechesne, Jean-Michel Lacroûte, François Ménétrier et Mimmo Pucciarelli, Résister à la militarisation : Le Groupe d'action et de résistance à la militarisation, Lyon 1967-1984, Lyon, Atelier de création libertaire, , 324 p. (ISBN978-2-35104-121-5)
↑« Un pasteur de l'Église réformée de France inculpé d'infraction à la loi sur le recrutement », Le Monde, 4 février 1959 : « Le pasteur René Cruse, de Cannes-et-Clairan (Gard), qui avec cinq de ses collègues a renvoyé son livret militaire au ministère de la défense nationale (voir le Monde du 19 octobre 1957) et a été inculpé d'infraction à la loi sur le recrutement, va être jugé prochainement ».
↑« Un groupe de non-violents prendra le relais des deux grévistes de la faim d'Orléans », Le Monde, 26 juin 1970 : « René Cruse, responsable de mouvements pour la paix, et un prêtre, l'abbé Joseph Piegay, curé de Givors, se sont enchaînés mercredi après-midi aux grilles d'une banque, en plein centre de Lyon, pour protester contre la politique nucléaire française ».
↑« Des pacifistes manifestent au futur P.C. atomique du Mont-Verdun », Le Progrès,
↑Jean-Marc Théolleyre, « Fête de la paix face au Mont Verdun », Le Monde,
↑Loi du 21 décembre 1963 relative à certaines dispositions d'accomplissement des obligations imposées par la loi sur le recrutement, Art 11 : Est interdite toute propagande, sous quelques forme que ce soit, tendant à inciter autrui à bénéficier des dispositions de la présente loi dans le but exclusif de se soustraire aux obligations militaires.
↑Yves Le Foll, « Service national », Journal officiel de la République française, no 41 (suite) A.N., , p. 2055
↑« Le pasteur René Cruse est inculpé de "provocation à l'insoumission et à la désertion" », Le Monde, 9 mai 1973. Images dans le documentaire de Luca Lennartz.
↑D.P., « Le pasteur Cruse est condamné à deux mois de prison avec sursis », Le Monde,
↑Dominique Durand, « Un substitut mal embouché », Le Canard enchaîné,
↑René Cruse, « Antimilitariste aujourd'hui », Politique aujourd'hui, , p. 58
↑Jean Batou, « René Cruse s'en est allé, mais sa colère nous habite toujours », solidaritéS, no 320, (lire en ligne, consulté le ).
↑Guy Guyot, « Contre toutes les bombes », Alerte atomique, numéro spécial - bilan, no Supplément au 147 « 33 ans d'actions et de réflexions... du MCAA... au MDPL », 1er trimestre 1997, p. 14
↑Morvan Lebesque, « Nevers contre Hiroshima », Le Canard enchaîné,
↑« Un pasteur candidat à Nevers pour dénoncer l'armement atomique », Le Monde, 2 juillet 1966.
↑« Les candidatures dans l'Essonne, le Val-de-Marne, les Yvelines et la Seine-et-Marne », Le Monde, 14 février 1973.
↑« Le pasteur René Cruse quitte le P.S.U. », Le Monde, 11 décembre 1973.
« Tranche de vie - vie tranchée », Web-documentaire sur la guerre de René Cruse 1939-1945 d'après son journal de guerre, images et montage Luca Lennartz