Son père Charles Raymond Joseph Aristide Vergès, né le à Saint-Denis, est propriétaire d'une officine de pharmacie[1],[2], et est également secrétaire du Conseil de Santé à l'hôpital militaire de Saint-Denis à partir de 1876. Il se marie le à Saint-Denis avec Marie Louise Noémie Langoit[3], née le à Saint-Denis, décédée le à Tamatave (Madagascar). Il a un frère, Charles, né le à Saint-Denis et décédé le à Saint-Denis[4].
Son grand-père, Adolphe François Joseph Vergès, est originaire de Morlaix, dans le Finistère. Fils de Raymond Vergès, chef de bataillon, et de Reine Marie Scoarnec, il devient, une fois arrivé à La Réunion, lieutenant puis capitaine d'infanterie de Marine. Il se marie le avec Marie Florentine Hermelinde Millon-Desmarquets, née en 1832, fille d'un aristocrate terrien de Saint-Louis, Charles Pierre de Millon des Marquets, né en 1805 à La Réunion à Saint-André. Adolphe Vergès était le fils de Raymond (ou Raimond) Vergès, qui était de souche catalane, natif de Villefranche-de-Conflent, et nommé gouverneur de l'Île Sainte-Marie en 1840[5],[2].
Il commence sa scolarité au petit lycée de Saint-Denis et en 1895, puis entre au lycée Leconte-de-Lisle en qualité d’interne et de boursier de la colonie. Élève brillant, il obtient son baccalauréat en 1901[2].
Il poursuit des études supérieures en métropole grâce à l'obtention d'une bourse. Il entre au lycée Saint-Louis à Paris, et obtient au bout de cinq années d’études une licence en sciences ainsi que divers certificats[2].
En 1908, Raymond Vergès se marie avec Jeanne-Marie Daniel, qui lui donne deux enfants : Jean, né en 1913, et Simone, née en 1916[2].
Carrière de médecin et ingénieur
Il obtient un premier emploi de dessinateur auprès de « Société de construction et d’exploitation des chemins de fer en Chine » pour un contrat de trois ans. Il reste finalement en Chine durant cinq ans où la moitié de son temps est consacré à la formation d'ingénieurs locaux[2].
En 1912, il entre à la faculté de médecine de Paris ; ses études sont interrompues par le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Il est mobilisé en tant qu'infirmier militaire, puis en 1915 comme médecin auxiliaire auprès du 94e RI. Plusieurs fois blessé, notamment lors de la bataille de Verdun, il se replie à Paris puis Rennes pour se faire soigner ; il est déclaré inapte à regagner le front[2].
En 1923, sa première épouse Jeanne-Marie meurt. Il rencontre Pham Thi Khang, une institutricevietnamienne qui devient sa seconde femme. Celle-ci donne naissance à deux fils prénommés Jacques et Paul, à Ubon Ratchathani, ville thaïlandaise située à 150 km au sud de Savannakhet, et dans laquelle Raymond Vergès est également médecin et consul de France de 1925 à 1928[2]. En réalité, Jacques et Paul Vergès présentés comme jumeaux, ne seraient pas nés le même jour : si la date de naissance de Paul est bien le , celle de Jacques est fausse puisqu'il serait né un an plus tôt le au Laos, et non au Siam comme son frère. Raymond Vergès aurait profité de sa position de consul pour réaliser un « vrai-faux » état civil, afin de cacher sa relation adultère avec Pham Thi Khang, alors que Jeanne-Marie était encore vivante[pas clair] (elle meurt en 1923)[6].
Il profite d'un congé administratif de six mois entre mars et , pour se rendre à La Réunion avec ses deux fils de trois ans et son épouse Pham Thi Khang. C'est dans l'île que cette dernière meurt, le laissant seul avec ses enfants. À l'issue de son congé, il repart en Indochine[2] et confie ses fils à sa famille[7],[8].
À son retour en Indochine, il se heurte à l’hostilité de son remplaçant, Jules Rougni, et obtient sa mutation en 1929 au royaume d’Annam comme médecin-chef de la province de Quảng Trị. Atteint par le paludisme, il retourne en métropole en , et séjourne à Paris durant quelques mois[2].
En 1931, il revient à La Réunion, où il est muté comme médecin de la station thermale d’Hell-Bourg, puis il est nommé en 1934 directeur du service de santé de la colonie[2].
À cette époque, il se met à admirer Abd el-Krim, anticolonialiste marocain exilé dans l'île. Il fréquente par ailleurs la famille impériale d'Annam, également exilée sur place.
En 1940-1942, le gouverneur de l'île, Pierre Aubert, impose la fidélité au maréchal Pétain. Le , Raymond Vergès écrit au gouverneur Aubert :
« J’ai l’honneur de vous rendre compte que si je voulais mener une action contre le Gouvernement qui m’emploie, je commencerais par démissionner. Je m’engage donc personnellement à suivre, avec un entier loyalisme, le gouvernement français, ainsi que son chef le maréchal Pétain[9],[10]. »
Aubert le jugeant loyal, Raymond Vergès conserve l'ensemble de ses fonctions et mandats électoraux. Le , Raymond Vergès prononce un discours portant sur le progrès de la médecine dans l'empire colonial, un des nombreux événements promouvant la France d'outre-mer supervisés par Pierre Aubert[11]. Le , les troupes gaullistes prennent le contrôle de La Réunion et nomment André Capagorry comme nouveau gouverneur. Les relations entre les deux hommes sont excellentes. Raymond Vergès adhère à l'Association bourbonnaise de la France combattante, fonde le , le quotidien engagé Témoignages et affirme son attachement au général de Gaulle. Il s’impose alors comme un leader politique dans l’île[2].
En 1946, Vergès et de Lepervanche proposent une loi pour faire de La Réunion un département français. Deux autres propositions de loi, l'une pour la Guyane (proposée par Gaston Monnerville), l'autre pour les Antilles (proposée par Léopold Bissol), sont présentées dans le même temps. Les trois propositions sont fondues en une seule, présentée par Aimé Césaire, alors le plus jeune député d'outre-mer, et est adoptée officiellement le 19 mars 1946 pour les quatre anciennes colonies devenant départements d'outre-mer (la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion)[2].
En pleine campagne législative devant renouveler l'assemblée constituante, Raymond Vergès est mêlé à la mort d'Alexis de Villeneuve, un de ses adversaires politiques : son fils Paul Vergès, désigné par des témoins comme étant l'auteur des coups de feu, est arrêté, et l'arme du crime retrouvée est au nom de Raymond. Le conseil municipal de Saint-Denis a été dissous par le gouverneur de La Réunion André Capagorry, et Raymond perd son siège de maire, puis celui de député dans l'élection qui suit. Il fait jouer ses appuis au Parti communiste français pour aider son fils, en dépaysant le procès en métropole[12]. Aux assises de Lyon, en , Paul est jugé coupable (il ne sera toutefois condamné que pour « coups et violences sans intention de donner la mort », lui infligeant cinq ans de prison avec sursis)[13],[14]. Raymond récupère lors des élections législatives de novembre son fauteuil de député[7].
↑Jacques Tillier, Une plume libre : De Mesrine à Sarkozy, souvenirs d’un journaliste pas comme les autres, Pygmalion, coll. « Documents et témoignages », , 422 p. (ISBN978-2-7564-0975-7, lire en ligne)
↑Hervé Schulz, « Le sénateur Paul Vergès, figure politique de La Réunion, meurt à 91 ans », Le Monde, (lire en ligne).
↑Mathias Bernard, « Inéligibilité et incidents au lendemain de la Seconde Guerre mondiale », dans Philippe Bourdin, Jean-Claude Caron & Mathias Bernard, L'incident électoral : de la Révolution française à la Ve République, Presses Universitaires Blaise Pascal, coll. « Histoires croisées », , 330 p. (ISBN9782845162082, lire en ligne), p. 268 :
« Au cours d'une réunion électorale, le candidat MRP Alexis de Villeneuve est assassiné par des hommes présentés comme des proches du député-maire de Saint-Denis, candidat communiste, Paul [sic] Vergès : son Conseil municipal est dissous et son fils est arrêté »