Le Lockheed L-1011 TriStar est un avion long-courrier triréacteur à usage civil et militaire, construit par la société Lockheed dans les années 1970 et 1980.
Le numéro associé à l'appareil étant toujours basé sur 1000, les numéros de série commençaient à partir de MSN1001 (prototype).
Historique
Le programme TriStar
Dans les années 1960, American Airlines lance un appel d'offres à Lockheed et à son concurrent Douglas pour la conception d'un avion long-courrier plus petit que le Boeing 747, mais capable de couvrir les liaisons avec Londres, les Caraïbes et l'Amérique latine depuis les hubs de la compagnie à Dallas et New York[1]. Lockheed lance alors le programme TriStar en 1966, mais par la suite American Airlines choisit le McDonnell Douglas DC-10 et ne commande jamais le Ten eleven.
Effectuant son tout premier vol le , le TriStar est considéré pour l'époque comme un bijou technologique, alors que le DC-10 était conçu à la base du technologie du DC-8[2]. Équipé d'un triple pilotage automatique, l'appareil est capable d'atterrir par mauvais temps, même par visibilité nulle. Son système de freinage lui permet de s'arrêter sans danger, quand la direction de vent n'est pas favorable à l'atterrissage[2]. C'est la raison pour laquelle Air Canada l'exploitait, malgré la concurrence du DC-10 dont les ailes étaient pourtant fabriquées à Toronto[3]. D'une capacité maximale de 400 places, il est relativement peu bruyant, et se montre assez sobre en carburant, gage d'une bonne rentabilité économique pour ses futurs acquéreurs. La principale différence que l'on peut relever entre le TriStar et son concurrent le DC-10 est que le troisième moteur du Lockheed est intégré dans la queue de l'appareil (comme sur le Boeing 727) pour plus de stabilité alors que celui du McDonnell Douglas est placé au même endroit mais de manière externe pour un gain de puissance. Malheureusement, la technique choisie pour le TriStar entraîne des délais de conception supplémentaires d'environ un an, alors que le McDonnell Douglas DC-10 fait son entrée sur le marché. De plus, Rolls-Royce, concepteur des trois moteurs équipant le L-1011 TriStar (le RB211) fait faillite en 1971 entraînant d'autant plus de délais. La compagnie britannique est tout de même sauvée par une nationalisation qui vise à défendre les capacités technologiques militaires du Royaume-Uni. L'avion est assemblé à la Air Force Plant 42 de Palmdale en Californie.
Les différentes versions
L1011-1, L1011-100 et L1011-200
Le TriStar original, avec un fuselage de 54,17 m et une capacité de 400 passagers, est le L1011-1 et a une capacité d'envol de 195 000 kg. En 1974 sort la version L1011-200 doté d'une version améliorée du réacteur Rolls-Royce RB211, le RB211-524 et d'une capacité en carburant étendue. Une autre version du RB211 fait aussi son apparition, et les avions qui en sont dotés sont désignés L1011-100.
L1011-500
En 1976, Lockheed lance le L1011-500 qui combine une plus grosse capacité en carburant et un fuselage raccourci afin d'augmenter son rayon d'action. Des éléments aérodynamiques sont aussi intégrés et amènent à une réduction de la surface alaire de l'appareil. Le premier vol de cette version a lieu en . Le L1011-500 s'équipe du moteur RB211-524B.
L1011-50, L1011-150 et L1011-250
Ces trois versions de TriStar sont toutes des conversions du L1011-1. Les L1011-50 sont des L1011-1 dont la masse maximale d'envol est augmentée à 204 000 kg tandis que les L1011-150 voient leur rayon d'action augmenté de 10 %. La désignation de L1011-250 est appliquée aux L1011-1 qui se font installer le RB211-524B. Delta Air Lines convertit ses L1011-1 en L1011-250 en 1986.
En attendant cette certification, le premier TriStar MSN1007 (N306EA) avait été livré à Eastern Airlines le [5]. D'où, il fallut que le vol commercial soit inauguré après la certification.
La production de l'appareil cessa en 1984. Le dernier appareil construit était un L-1011-385-3 TriStar 500 destiné au gouvernement algérien (7T-VRA, MSN1250) et fut livré le . Lockheed ne construisit donc que 250 exemplaires, alors qu'il lui fallait en vendre 500 pour recouvrir ses coûts. Après cet échec commercial, Lockheed se retire définitivement du marché aérien civil.
Retraite successive
Delta Air Lines, le plus grand client ayant acquis 70 appareils dont la flotte comptait 56 exemplaires au maximum, retira les derniers TriStar de sa flotte en 2001, en les remplaçant par des Boeing 767-400ER. Les derniers vols étaient un aller-retour entre Atlanta et Orlando, et effectués le [6].
Cathay Pacific qui est le plus gros opérateur non américain du TriStar avec 21 exemplaires récupérés lors de la faillite d'Eastern Airlines les a retirés de sa flotte dès pour les remplacer par des Airbus A330-300. Quelques compagnies « start-up » d'Afrique et d'Asie affrètent encore le ten eleven, comme Thai Sky Airlines qui en exploite trois durant 15 mois entre le début de ses services en mai 2005 et . Le gouvernement saoudien utilise encore régulièrement un Tristar.
En , on dénombrait environ 50 TriStar encore en service ; en , il n'en restait plus que 33. Lockheed Martin promet d'assurer le support technique tant que l'appareil est encore utilisé.
Six exemplaires ayant quitté la flotte de la Royal Air Force en 2014 devaient être acquis par AGD Systems en 2015 mais cela ne s'est pas concrétisé. Fin 2017, Tempus Applied Solutions négocie pour les acheter. Sous de nouvelles immatriculations civiles, trois sont destinés à réaliser le même type de missions de ravitaillement et de transport de passagers et de fret[7] et trois éventuellement cannibalisés[8].
Avec son modeste nombre de production, de nos jours ce type est devenu hors d'usage tant pour le vol commercial que pour la mission militaire. Toutefois, un Lockheed L-1011-385-1-15 est encore en service. Il s'agit de N140SC, possédé par Northrop Grumman pour la société Orbital Sciences[9],[10]. Dans l'optique de lancer les satellites, cet appareil, le Stargazer, est chargé d'effectuer ses missions particulières, ce qui permet d'être en usage. Après une récente certification obtenue en 2021, ce L-1011 était encore capable de voler jusqu'au 30 avril 2024[11].
Après cette date, l'appareil reste encore opérationnel. Celui-ci a participé, les 19 et 20 octobre 2024, au Festival de vol tenu à l'aéroport de Long Beach. D'après l'autorité de cet aéroport, il s'agit d'un seul L-1011 opérationnel dans le monde entier en 2024[12],[13].
Le , le vol Eastern Air Lines 401 s'écrase dans les Everglades en Floride, tuant 101 personnes parmi les 176 passagers et membres d'équipage présents à bord. L'accident est attribué à une erreur du commandant (coupure involontaire du pilotage automatique causant une perte d'altitude non ressentie).
Le , le vol Delta Air Lines 1080 connaît une perte de contrôle en vol, peu après le décollage de l'aéroport international de San Diego, à la suite d'un blocage de la gouverne de profondeur en position complètement cabré, l'amenant presque au point de décrochage. Les pilotes parviennent à reprendre le controle de l'appareil, qui atterrit en toute sécurité à l'aéroport international de Los Angeles, sauvant la vie des 52 personnes à bord.
Le , le vol Saudia 163 en direction de Jeddah en Arabie saoudite prend feu en plein vol et fait demi-tour à l'aéroport international de Riyad. L'avion réussit quand même à atterrir, et continue de rouler sur la piste ; et lorsqu'il s'arrête, il est trop tard, les 301 passagers et membres d'équipage périssent dans l'incendie.
Le , le vol Saudia 162, reliant Dhahran, en Arabie saoudite, à Karachi, au Pakistan, avec 292 personnes à bord, subit une décompression explosive en haute altitude, au dessus du Qatar, à la suite de l'explosion d'une roue du train d'atterrissage principal à l'intérieur du logement du train, provoquant la mort de deux passagers éjectés hors de la cabine.
Le , le TriStar L-1011 immatriculé G-BBAI fait une sortie de piste à l'aéroport de Leeds/Bradford à l'atterrissage après une forte pluie. L'avion transportait 398 passagers et 14 membres d'équipage, seules quelques blessures légères sont à déplorer[17].
Le , le vol 191 de Delta Air Lines s'écrase avec 152 passagers et 11 membres d'équipage lors de son approche de l'aéroport de Dallas/Fort Worth, causant la mort de 136 passagers et membres d'équipage, ainsi qu'une victime au sol. L'accident sera imputé à un phénomène de cisaillement, mal connu à cette époque-là, ce qui fait que l'équipage n'était pas préparé à cette situation[18],[19].
Le , le vol TWA 843 s'écrase après une violente sortie de piste à l'aéroport international de New York - John-F.-Kennedy, à la suite de l'interruption du décollage en raison d'une fausse alarme de décrochage. Malgré l'incendie intense qui a suivi le crash, il n'y a eu aucune victime, et seulement une dizaine de passagers blessés parmi les 292 occupants de l'appareil, bien que l'avion ait été en grande partie détruit par le feu.
Le , le vol TS906 de Air Transat partant de l'aéroport Lyon-Saint-Exupéry subit des dégâts importants dus aux impacts de grêlons dix minutes après le décollage. Il rebrousse chemin et atterrit normalement. L'aéronef est par la suite déclaré comme perte totale et cédé aux aéroports de Lyon. Il est depuis entreposé dans la section cargo de l'aéroport Lyon-Saint-Exupéry où il sert de site d'entraînement aux équipes d'urgence[20].
Aux début des années 2010, la RAF utilisait encore plusieurs TriStar dérivés en quatre variantes, en attendant leur remplacement par des A330 MRTT. Ces avions à usage militaire étaient en fait des anciens L-1011-500 ayant appartenu à British Airways et à Pan Am. Le , le dernier L-1011 quitta définitivement la flotte de la RAF[21].
Cockpit très contemporaine de L-1011
Le cockpit de cet appareil, très innovationnel, est devenu une référence des avions modernes, tels ceux d'Airbus[2]. En considérant que de nombreux instruments dans le cockpit classique obligeaient trop de manœuvres aux pilotes, les ingénieurs de Lockheed avaient tenté de réduire les instruments. Ils supposaient en effet que cette amélioration contribuerait à réduire les accidents. Parmi leurs inventions importantes (voir aussi section Le programme TriStar), l'interrupteur allumé avait été développé dans cet objectif : lorsque l'on appuie cet interrupteur, ce dernier allume, puis quand on l'appuie de nouveau, l'interrupteur éteint ([vidéo] « Disponible », sur YouTube). Grâce à cette invention, les pilotes peuvent vérifier très rapidement l'état de fonctionnement, par cet allumé-éteint (on-off). Ce type d'interrupteur est en usage jusqu'ici, non seulement dans les avions mais aussi dans toutes les industries. Le L-1011 était le premier qui ait profité de cette invention.
L-1011-100 d'Air Transat, à l'aéroport de Londres-Gatwick en 1995.
L-1011-200 de Saudia, à l'aéroport d'Heathrow en 1985.
L-1011-500 de TAP Air Portugal, au décollage à l'aéroport de Lisbonne en 1988.
L-1011-385-1 TriStar 50 d'Hawaiian Airlines (N766BE) à Las Vegas. Dans les années 1970, le L-1011 était l'appareil préféré pour desservir Honolulu, aéroport le plus isolé au monde[6].
L-1011-385-3 TriStar 500 d'Air Canada, à l'aéroport de Düsseldorf en 1988.
↑ ab et c(en) Peter J. M. Harrington-Cressman, « Requiem For a Trijet Masterpiece - The Lockheed L-1011 », Airline Reporter, (lire en ligne, consulté le )
↑U. S. Environmental Protection Agency, Washington D. C., Information on FAA Certification of aircraft, EPA-550/9-75-022, janvier 1975, p. 12, tableau 1A, consulté le 24 avril 2015 sur Internet.