Pendant plus de cinq siècles (de av. 907 à 1421), le comté de Namur était une possession territoriale héréditaire quasi autonome, mais relevant en droit du Saint-Empire romain germanique. Au cours de l'histoire, quatre maisons[1],[2] l'ont gouverné. Chronologiquement, la maison de Namur (946-1196), la maison de Hainaut (1196-1212), la maison de Courtenay (1212-1263) et la maison de Flandre (1263-1429). Après la vente en viager du comté à Philippe le Bon par Jean III en 1421, le titre de « comte de Namur » se maintiendra jusqu'à la Révolution française mais il ne sera plus porté, en plus de très nombreux autres titres, que par les descendants des ducs de Bourgogne.
Durant la seconde moitié du IXe siècle, soit à la fin de l'ère carolingienne et au début de la féodalité, le pagus lomacensis (l'ancêtre du comté de Namur) était une des quatre grandes subdivisions administratives du diocèse de Liège[3] avec les pagus qui correspondraient actuellement à la Hesbaye, au Condroz et à l'Ardenne. Il s'étendait sur toute la vallée de la Meuse de Revin à l'aval de Namur et comprenait ce qui pourrait s'apparenter de nos jours à l'entre Sambre et Meuse, la Thudinie, la Botte du Hainaut, la Thiérache et la région de Gembloux - Nivelles. Des pans entiers du pagus lomacensis étant la propriété de grandes institutions (Église de Liège, abbayes, etc.) ou de puissantes familles extérieures au pagus, les comtes de Namur ont été totalement dépossédés de ces biens, progressivement au cours des IXe et Xe siècles (ex. : abbaye de Nivelle, abbaye de Lobbe, ville de Dinant, etc.)[4]. Leur territoire ne se réduit plus, grosso modo, qu'à l'actuelle Province de Namur.
Comtes carolingiens du comté de Lomme
Gislebert de Maasgau, né vers 825 dans le Hainaut (Hennegau), comte de Maasgau en 841, comte du Lommegau en 866. En 846, il enlève et épouse Ermengarde, fille de l'empereur Lothaire Ier († 855), le mariage est reconnu en 849. Il meurt en 892.
Son existence est incontestable et son lien avec le pagus lomacensis semble avéré dans la littérature depuis au moins Jean-Baptiste de Marne (1699/1756), cité lui-même par Adolphe Borgnet (1804/1875) dans son Histoire du Comté de Namur[5]. S'appuyant sur les travaux de Léon Vanderkindere et de Robert Parisot, Félix Rousseau affirme que : « En 863, sous le règne de Lothaire II, le comté est administré par un très haut personnage, Giselbert, qui en 846 avait enlevé une des filles de Lothaire Ier ... »[6]. Sa descendance aura une influence notable dans quasi toutes les dynasties territoriales de l'actuelle Belgique, qu'il s'agisse des comtés de Flandre, de Hainaut ou encore de Louvain et ducs de Brabant.
Selon la quasi-totalité des auteurs modernes, Bérenger est le premier comte de Namur au sens « politique et administratif » du terme, ses prédécesseurs étant soit non identifiés, soit encore itinérants, soit géraient un territoire beaucoup plus vaste dans lequel le pagus lomacensis n'était qu'une simple subdivision. Bérenger est identifié, entre autres, dans une charte de 907 citée et reproduite par Bénédicte Thiry : « In pago Lominse in comitatu Berrengarii »[7]. Ces mêmes auteurs modernes sont par contre beaucoup plus hésitant à voir en lui le réel fondateur de la Maison de Namur. Pour des historiens plus anciens, tel que par exemple Félix Rousseau, les liens de parenté entre Bérenger et Robert 1er existent mais ils ne sont pas identifiés : « Le comte Bérenger peut donc être considéré comme l'ancêtre des comtes de Namur mais il ne s'ensuit pas nécessairement que ceux-ci descendaient de lui en ligne masculine »[8]. Bérenger épouse une fille de Régnier Ier au long col († 915), comte de Hainaut, et meurt entre 937 (date du dernier document le mentionnant) et 946 (date de la première mention de Robert 1er).
Généalogie ascendante de Bérenger selon Félix Rousseau et Henri Pirenne
"... c'est le comte Robert Ier (946-974) qui est considéré comme le réel fondateur de la maison de Namur."[9] S’il est acquis que Robert Ier a eu au moins trois fils dont Albert Ier son successeur, il semble qu’il n’y ait par contre aucune information directe sur l’identité de son épouse. Par conjecture, Félix Rousseau pense qu'il pourrait s'agir d'Ermengarde, fille d'Otton, duc de Lotharingie († 944). Toujours selon Félix Rousseau, Robert Ier a eu une fille, Lutgarde, qui épousa Otton, comte de Looz, et qui serait la mère de Balderic II, évêque de Liège de 1008 à 1018.
marié en premières noces en 1157 à Laurette d'Alsace († 1175), fille de Thierry d'Alsace, comte de Flandre et de Marguerite de Clermont
marié en secondes noces en 1171 à Agnès de Gueldre, fille d'Henri, comte de Gueldre, et d'Agnès d'Arnstein
Sans enfant, il vendit imprudemment ses terres en viager à son beau-frère Baudouin IV de Hainaut, puis son neveu Baudouin V. Une fille lui naquit et il voulut revenir sur cette vente. Baudouin V l'attaqua et le vainquit en 1190.
1256-1264 : Henri III de Namur [Henri V de Luxembourg] (1216 † 1281), comte de Luxembourg et de Namur, petit-fils de Henri Ier l'Aveugle.
marié en 1240 à Marguerite de Bar (1220 † 1275).
En 1263, Baudouin II voulant financer la défense de Constantinople vend ses droits sur le comté à Gui de Dampierre, fils de Guillaume II de Dampierre. Gui de Dampierre attaque immédiatement Henri V de Luxembourg pour conquérir Namur. Finalement, un traité de paix réconcilie les deux ennemis en 1264, et Henri cède ses droits sur Namur à sa fille, Isabelle, qui épouse Gui de Dampierre.
marié en premières noces à Mathilde de Béthune († 1264) ; de ce mariage sont issus les comtes de Flandre, puis les ducs de Valois-Bourgogne, dont le premier fut Philippe le Hardi ;
marié en secondes noces à Isabelle de Luxembourg (1247 † 1298), fille d'Henri III de Luxembourg et de Marguerite de Bar. En 1298, Gui de Dampierre associe son fils Jean Ier au gouvernement du comté de Namur.
1298 - 1330 : Jean Ier (1267 † 1330), fils du précédent et d'Isabelle de Luxembourg
1330 - 1335 : Jean II (1311 † 1335), fils aîné de Jean Ier et de Marie d'Artois.
1335 - 1336 : Gui II (1312 † 1336), deuxième fils de Jean Ier et de Marie d'Artois.
1336 - 1337 : Philippe III (1319 † 1337), quatrième fils de Jean Ier et de Marie d'Artois.
1337 - 1391 : Guillaume Ier (1324 † 1391), cinquième fils de Jean Ier et de Marie d'Artois
marié en premières noces avec Jeanne de Hainaut (1323 † 1350), comtesse de Soissons, fille de Jean de Hainaut, seigneur de Beaumont, et de Marguerite, comtesse de Soissons ;
marié en secondes noces en 1352 à Catherine de Savoie († 1388), fille de Louis II de Savoie, baron de Vaud, et d'Isabelle de Châlon.
1391 - 1418 : Guillaume II (1345 † 1418), fils du précédent et de Catherine de Savoie
Il est le fils unique du duc de Bourgogne Jean sans Peur et de Marguerite, fille du duc Albert de Bavière. Il devient comte de Namur à la mort de Jean III.
Fils unique de Philippe le Bon, il est le dernier homme de la maison de Valois-Bourgogne. Malgré trois différentes épouses, il n'a eu qu'un seul enfant qui était une fille.
Après Philippe II le Hardi, Jean sans Peur, Philippe III le Bon et Charles le Téméraire, elle est la cinquième et dernière duchesse de Bourgogne de la branche des Valois-Bourgogne.
Fils de Maximilien Ier et de Marie de Bourgogne. De son propre chef, il fut « duc de Bourgogne » (souverain des Pays-Bas). Par mariage avec Jeanne Ire de Castille dite Jeanne la Folle : roi de León et de Castille (1504-1506).
Fils de Philippe le Beau. De son propre chef : « duc de Bourgogne » (souverain des Pays-Bas), roi des Espagnes et des Indes (Charles Ier), et autres titres. Par élection : empereur des Romains (Charles Quint).
Fils de Charles Quint. Roi d'Espagne (Philippe II). Il quitta définitivement les Pays-Bas pour l'Espagne en 1559. Ses successeurs n'y revinrent jamais.
Fils de Maximilien II, empereur élu des Romains, neveu de Charles II de Gand, il gouverna les Pays-Bas au nom de Philippe le Catholique à partir de 1595, puis à titre personnel de son mariage avec son arrière-cousine Isabelle jusqu'à sa mort.
Fils de Philippe, lui-même fils de Philippe VI le Catholique, il hérita des Pays-Bas quand Albert mourut sans qu'Isabelle ait de descendance mâle, deux mois et demi après qu'il fut devenu roi des Espagnes et roi de Portugal (il perdra ce dernier trône lors de la révolution de 1640).
Fils de Philippe VII le Grand, il régna jusqu'en 1677 sous la régence de sa mère, Marie-Anne d'Autriche, et mourut sans héritier du fait de sa dégénérescence congénitale, ce qui entraîna la guerre de Succession d'Espagne.
Arrière-arrière-petit-fils de Philippe III (roi d'Espagne) et arrière-petit-fils de Philippe VII le Grand, il se vit léguer les Espagnes par Charles III, mais dut affronter les revendications des Habsbourg d'Autriche, à qui il céda les Pays-Bas au traité d'Utrecht (1713).
Arrière-arrière-arrière-petit-fils de Ferdinand Ier, frère de Charles III de Gand, il est prétendant au trône d'Espagne de 1700 à 1713 et empereur élu des Romains à partir de 1711. Il reçoit les Pays-Bas par le traité d'Utrecht, en échange de sa renonciation à l'Espagne.
Fils aîné de Marie-Thérèse, il est élu empereur des Romains à la mort de son père, puis hérite des possessions de sa mère à la mort de celle-ci. Un mois avant sa mort, les Pays-Bas se révoltent contre lui et forment les États-Belgiques-Unis.
Fils de Léopold, élu empereur des Romains, il voit les Pays-Bas occupés (1792) puis annexés (1795) par la France, annexion qu'il reconnaît en 1797 par le traité de Campo-Formio.
Jules Borgnet, Histoire du comté de Namur, Bruxelles, A. Jamar, , 2e éd. (1re éd. 1846), 183 p.
V. Bruch, Ph. Bragard et J. Chainiaux, Namur, une histoire de la ville : Capitale d'un comté éponyme (Xe siècle - 1429), Namur, Les Amis de la Citadelle de Namur, , 142 p. (ISBN978-2-87551-009-9).
Henri Pirenne, Histoire de Belgique des origines à nos jours, t. 1, Bruxelles, La Renaissance du Livre, , 426 p.
Joseph Roland, Le Comté et la Province de Namur, Namur, Wesmael-Charlier, , 187 p..
Félix Rousseau, Actes des comtes de Namur de la première race 946 - 1196, Bruxelles, Académie royale de Belgique, , 144 p..
Bénédicte Thiry, La vie de château, Les comtes de Namur au Moyen Age, Namur, Ville de Namur, , 40 p..