Le cimetière de La Madeleine, le plus célèbre des cimetières d'Amiens, est situé rue Saint-Maurice, au nord-ouest de la ville, à l'extrémité ouest du quartier Saint-Maurice.
D'une superficie de 18 hectares, le cimetière de La Madeleine est à découvrir aussi en tant que parc arboré et vallonné. De nombreuses tombes de familles de notables témoignent de la prospérité de la ville au XIXe siècle.
Historique
À la fin du XVIIe siècle, il est décidé de créer un cimetière en dehors de la ville à l'emplacement d'une ancienne maladrerie: le cimetière de La Madeleine. La suppression du cimetière Saint-Denis situé en centre-ville (actuelle place René-Goblet) et sa transformation en square fut effective sous la Seconde Restauration.
Le cimetière de La Madeleine est mis en service en 1817. Les vallons et coteaux du site permettent à l'architecte de la ville d'Amiens, François-Auguste Cheussey, de réaliser un parc à l'anglaise où alternent plaines, espaces arborés, allées et tombes dont certaines sont de véritables mausolées.
Le cimetière conserve des arbres plantés au XIXe siècle : frênes, érables, tilleuls, pins sylvestres et s'est enrichi en 2000, à la suite d'une étude paysagère, d'arbres d'alignement, de bosquets en tête d’ilot et d'un arboretum dans le jardin du souvenir que fréquentent les passereaux : mésanges, pouillots, fauvettes, et merles à plastron...
Un alignement d'ifs plantés pour certains en 1811 a été labellisé « Arbres remarquables de France » par l'association ARBRES, en 2018.
Sous la forme d'un obélisque surmonté d'une croix, le monument est dédié « Aux soldats français morts pour la défense de la Patrie 1870-1871 ». Sur chaque côté, sont gravés les noms de 199 soldats morts au combat, il est fait mention de 10 soldats inconnus.
Tombe du commandant Vogel
Le commandant Jean-François Vogel (1821-1870) qui commandait la citadelle et qui fut tué le a été inhumé à côté du monument aux morts. Le monument qui recouvre son tombeau est composé d'une colonne quadrangulaire surmontée d'un buste du défunt, œuvre d'Albert Roze. Il a été érigé le , à l'initiative de la société de gymnastique La Picarde.
Tombe du capitaine Charles Zacharie Petit
Elle est située à l'entrée du carré militaire.
Tombes militaires
Les 209 tombes sont marquées d'un numéro. L'identité des soldats inhumés est gravée sur le monument aux morts.
Carré militaire 1870
Monument aux morts
Tombe du commandant Vogel
Tombe du capitaine Petit
Carré dit des « Croix noires »
Dans ce carré sont inhumés les corps de victimes de bombardements aériens de la Seconde Guerre mondiale.
Le se déroule l'Opération Jéricho, bombardement de la prison d'Amiens par la Royal Air Force qui fait plus d'une centaine de victimes dont certaines sont inhumées dans ce carré.
Les et , jour de la Pentecôte, Amiens subit un bombardement aérien de près de 6 heures. Il cause 209 victimes[1]. Des victimes civiles sont ensevelies dans un carré.
Les tombes sont matérialisées par 250 croix noires, en chêne, de 1,50 m de haut et 5 cm de large à la manière des cimetières militaires[2].
Le carré comprend également les tombes des victimes des bombardements allemands des et et allié du .
Une stèle commémorative est dédiée « à la mémoire des victimes civiles de la guerre 1939-1945 ».
Tombes remarquables
Plusieurs tombeaux ont fait l'objet d'un classement au titre des « monuments historiques ».
Tombe de Jules Verne
La plus renommée de toutes est certainement celle de Jules Verne (1828-1905), sur laquelle les visiteurs et touristes viennent se recueillir.
Située assez profondément à l'intérieur du cimetière, vers le Nord. La table d'orientation installée à droite en entrant en donne l'itinéraire.
Œuvre du sculpteur amiénois Albert Roze, la tombe de l'illustre écrivain, intitulée Vers l'Immortalité et l'Éternelle Jeunesse, évoque le thème de la résurrection, en le représentant sortant de son tombeau en rampant. Le torse déjà dégagé de son linceul, il soulève de son dos la pierre dont l'angle est brisé, tend le bras et lève la tête vers la lumière. Elle s'inspire du monument funéraire fait par Carlotte Besnard pour le poète belge Georges Rodenbach au cimetière du Père-Lachaise, à Paris, fait en 1898 et inauguré en 1902.
D'autres analystes interprètent cette allégorie différemment[3]. Ils veulent y voir le symbole de l'esprit créateur, tendant le bras dans une dernière énergie vers la lumière comme un appel à l'aide, alors que le corps glisse inexorablement vers les ténèbres avant que la pierre ne se referme[4]. Inscrit MH (1986), Classé MH (1995)
Tombe de Victor et Victorine Autier
Victorine Autier (1840-1874), fut infirmière de la Croix rouge pendant la Guerre de 1870. Son père Victor Autier (1805-1876), médecin des pauvres et médecin militaire en 1870-1871, a été inhumé à ses côtés. Le buste de Victorine Autier, qui ornait le sommet du tombeau, a disparu en 2011.
Tombe de Jules Barni
Jules Barni (1818-1878) était philosophe et homme politique, traducteur de Kant et ardent républicain. Il est décédé à Mers-les-Bains, le . Une souscription à l'initiative de Frédéric Petit permit l'érection de son monument funéraire. La réalisation du buste de Jules Barni et des sculptures du tombeau fut confiée au sculpteur Athanase Fossé.
Tombe de François Auguste Cheussey
François Auguste Cheussey fut architecte de la ville d'Amiens et du département de la Somme. À ce titre, il participa à la restauration de la cathédrale d'Amiens, à la construction de la bibliothèque municipale et de l'église Saint-Jacques. Il fut chargé de l'aménagement du nouveau cimetière de La Madeleine en 1817. À sa mort en 1857, il fut inhumé dans le cimetière dont il avait dirigé l'aménagement dans un tombeau composé d'un monument octogonal.
Tombe de la famille Corroyer
La concession fut acquise en mars 1844, par Marie-Jeanne Delacourt, veuve de Louis Auguste Corroyer (1782-1827), entrepreneur en bâtiment, à Amiens[5], et son fils Florent Corroyer, négociant. Inscrit MH (1986).
Tombe d'Albert Dauphin
Albert Dauphin (1827-1898) fut maire d'Amiens (1873-1871), président du Conseil général de la Somme (1873-1889 et 1892-1898), sénateur de la Somme (1876-1898) et ministre des finances dans le gouvernement de René Goblet (1886-1887). Albert Roze sculpta son tombeau en forme de sarcophage surmonté d'une urne drapée.
Jean-Baptiste Dijon était recteur de l'Académie royale d'Amiens, il décéda le 15 mars 1823. Une souscription publique permit la réalisation d'un tombeau en forme de borne majestueuse de style ionique dont la réalisation fut confiée à François-Auguste Cheussey, architecte en chef du département de la Somme. Le monument a été entièrement remonté et restauré par Les Amis de La Madeleine, en 1989. Inscrit MH (1986)
Adrien, Edmond, Louis et Louis Joseph Leopold Duthoit
Tombe d'Abraham Fatton
Abraham Fatton (1768-1845) était originaire du canton de Neuchâtel en Suisse. Il fut négociant à Amiens, membre du Tribunal de commerce, conseiller général de la Somme et secrétaire du Consistoire des Églises protestantes de la Somme. Il fut inhumé à La Madeleine ainsi que son fils dans un tombeau conçu par François-Auguste Cheussey restauré en 2011 par Les Amis de La Madeleine.
Tombe de Lucien Fournier et François Victor Leroy-Digeon
(Bruno) Lucien Fournier (1838-1923) était président de la chambre honoraire de la cour d'appel d'Amiens, un temps adjoint au maire d'Amiens, et chevalier de la Légion d'honneur. François Victor Leroy-Digeon (1814-1876) était entrepreneur en bâtiments. Le bas-relief en pierre, en haut de sa stèle, évoque les outils de son métier (équerre, fil à plomb ...).
Tombe d’Édouard Gand
Édouard Gand (1815-1891) fut professeur de tissage à Amiens. Il développa la production de tissus Jacquard dans la ville et fut, en 1861, l'un des fondateurs de la Société industrielle qui dispensait un enseignement technique pour former une main d’œuvre qualifiée. Sa tombe est ornée d'un buste dû à Albert Roze.
Tombe Grenier et Bernard
Dans la nuit du 18 au 19 juin 1893, un incendie détruisit une huilerie dans le quartier Saint-Leu d'Amiens. Deux pompiers périrent : le caporal Grenier et le sapeur Émile Bernard. La ville d'Amiens fit don de deux concessions au cimetière de La Madeleine sur lesquelles on édifia un monument en forme de borne, orné d'un drapeau sculpté par Albert Roze.
Tombe Grimaux
Ce grand tombeau de style classique est surmonté d'une colonnade octogonale sur laquelle repose une coupole. De chaque côté du monument se trouve une sculpture de pleureuse. Sous le fronton triangulaire se trouve une chouette aux ailes déployées. Sous l'inscription, un bas-relief en pierre évoque le silence de la mort, d'après l'oeuvre célèbre d'Auguste Préault (1842). Enfin, de superbes grilles en fer forgées complètent ce bel ensemble. Le monument est signé par l'entrepreneur Leroy-Digeon. Classé MH (1995)
Tombe d'Augustin Guidon
Augustin Guidon (1847-1908) a combattu pendant la guerre de 1870-1871. Aisé, il fut ensuite membre du bureau de bienfaisance du quartier de Saint -Germain. Son buste en marbre n'est pas signé.
Tombe Lambert Lucas
Charles Lambert domicilié à Epernay, acquit cette concession en 1899. La stèle architecturée fut réalisée par l'entrepreneur Gadré[6]Inscrit MH (1986).
Tombe d'Alexandre Ferdinand Lapostolle
Alexandre Ferdinand Lapostolle (1749-1831) était un physicien et un chimiste qui fut professeur à l'école de médecine d'Amiens. Il inventa un parafoudre et un paragrêle en corde de paille. Son tombeau fut restauré en 1995 par Les Amis de La Madeleine. Inscrit MH (1986)
Chapelle Lecocq
Cette belle chapelle en brique et pierre rappelle certaines maisons picardes. Devant trônent les bustes en marbre de Mr et Mme, tous deux signés par Albert Roze et datés de 1936.
Edouard Gand
Augustin Guidon
Lecocq
Jean Marest
Charles Emile Riquier
Louis Thuillier
Tombe d'Amédée Maintenay
Amédée Maintenay (1853-1881) était architecte et inspecteur des monuments historiques d'Algérie. Le tombeau a été réalisé d'après les plans d'Edmond Duthoit.
Monument funéraire à Jean Marest
Cette chapelle est surmontée d'un obélisque qui dépasse en hauteur tous les autres monuments du cimetière. Il est l’œuvre de Jean-Baptiste Marest, architecte de l'église de Thézy-Glimont qui conçut ce monument à la mémoire de ses parents.
(François) Frédéric Petit (1836-1895) fut maire d'Amiens et sénateur de la Somme. Ardent républicain et ami de Jules Barni, il fut l'un des fondateurs du quotidien radical Le Progrès de la Somme. À sa mort, en 1895, il fut inhumé dans un imposant tombeau situé à côté de celui de Jules Barni. Il repose avec son père Louis François Frédéric Petit (1808-1881), industriel, et son petit-fils, Robert Gaston Frédéric Petit (1885-1914), lauréat de l'Ecole des Sciences Politiques, puis lui aussi industriel, tombé pour la France en 1914.
Tombe d'Émile Ricquier
(Charles) Émile Ricquier (1846-1906) fut architecte en chef du département de la Somme. On lui doit la construction de plusieurs bâtiments à Amiens: École normale d'instituteurs, Lycée Madeleine Michelis, le cirque municipal et l'horloge Dewailly. Il réalisa lui-même son tombeau de style néo-romano-mauresque avec colonnes et chapiteaux, surmonté d'un sarcophage.
Tombe de la famille Tattegrain-Thuillier
Louis Thuillier (1856-1883) est un physicien et un biologiste qui a travaillé avec Pasteur. La tombe de cette famille d'entrepreneurs amiénois est dues à Pierre Ansart et à son fils Gérard Ansart, elle a été réalisée dans les années 1920 par l'entrepreneur Philippe Lamolet. Le sol est constitué de dalles en pierre de Tournai. La stèle est en calcaire avec un décor en mosaïque. Le fronton de la stèle est soutenu par deux colonnes, en granit rose.
Bruno Vasseur (1755-1816) était un couvreur amiénois qui travailla à la cathédrale d'Amiens les vingt dernières années de sa vie. En 1816, il fit une chute fatale du haut de la cathédrale et s'écrasa sur le sol. Il fut inhumé à La Madeleine. Il avait acheté une pierre tombale provenant de l'ancien cimetière de Saint-Firmin-la-Pierre datant probablement du XIIIe siècle. En 1853, le conseil municipal d'Amiens fit installer à la tête de la pierre tombale, une stèle néogothique sur laquelle fut gravée une petite cathédrale. Il a inscrit par deux fois son nom et prénom sur les voutes de la croisée de la cathédrale d'Amiens Inscrit MH (1986), Classé MH (1995)
Tombe Polart
Polart est un entrepreneur amiénois. Sur sa tombe est érigé un monument en forme de pinacle néogothique.
Bruno Vasseur
Tombes de style « Art nouveau »
Tombe de Georges Guittet
Georges Henri Guittet (1871-1902) est un sculpteur amiénois. Son œuvre la plus célèbre est le Porteur d'eau africain exposé au Musée de Picardie. Le bas de la stèle est ornée de céramiques signées par Alexandre Bigot. Inscrit MH (1986)[7],[8],[9].
Tombe de Gustave Piat
Gustave Piat (1845-1910) est inhumé dans une chapelle massive.
Georges Guittet
Gustave Piat
Tombe style « Art déco »
Tombe de Pierre Cosserat
Pierre Cosserat était sergent lorsqu'il reçut, au cours de la Première Guerre mondiale, en 1915, une balle dans la poitrine qui le tua. Le monument a été réalisé sur les plans de Pierre Ansart.
Les vitraux du cimetière
Aucune grande signature n'est à signaler, pourtant les vitraux avec une imagerie religieuse ne manquent pas : le Sacré Cœur (Mahout), le Christ crucifié (vitrail quadrilobé pour Maire), le Bon pasteur bénissant (vitrail trilobé pour Demarquet, quadrilobé pour Briaux, Douchet, Mallet et Salle - ces quatre vitraux sont si semblables qu'on les croit faits en série ! -), Marie en Vierge de l'Immaculée Conception (Mahout), une Vierge à l'enfant (Béra), Saint Joseph et Jésus (Mahout), la tête du Christ et la tête de la Vierge (de Le Valle) ...
On trouve aussi un vitrail rond avec des fleurs (Lefevre), des vitraux rectangulaires Art Nouveau (Codevelle), un vitrail en éventail avec une alternance de panneaux rouges et blancs (Voclin) ...
Chapelle Mahout, Le Sacré-Cœur
Chapelle Mahout, Saint Joseph et Jésus
Chapelle Mahout, Immaculée Conception
Chapelle Demarquet, Le Bon Pasteur
Chapelle Briaux et Pruvost, Le Bon Pasteur
Chapelle Maire, Le Christ en croix
Le fer forgé et la fonte témoins du XIXe siècle
Si la pierre est le matériau dominant, les décors de fonte et de fer forgé sont largement représentés : croix, anges, balustres d'entourage de tombes. Quelques portes sont ornées de décor funéraire. Ces ornements sont souvent attaqués par la rouille, la végétation.
Préservation du patrimoine
L'association Les Amis de La Madeleine créée en 1985 a pour but de :
préserver le caractère « romantique » du cimetière ;
sauvegarder les tombes, éléments de l'histoire de la société amiénoise des XIXe et XXe siècles et en assurer la restauration. Une cinquantaine de monuments ont ainsi été restaurés en 23 ans, la plupart avec les propres moyens financiers de l'Association.
faire connaître le patrimoine historique que représente le cimetière de La Madeleine pour la ville d'Amiens par des publications d'ouvrages, de bulletins, d'articles de journaux, de participation à des émissions de radio et de télévision, la création d'un site internet, l'organisation de conférences, d'expositions, de visites guidées...
aider dans tous les domaines possibles à l’entretien du cimetière, pour préserver et protéger le caractère paysager, les monuments, conserver les sépultures...