1869 : les Missions Rhénanes du Sud-Ouest africain créent une société commerciale chargée théoriquement d’assurer l’approvisionnement régulier des Namas et des Hereros[1], peuples nomades, souvent en guerre et menacés en permanence par la sécheresse et la famine. Des ressources nombreuses (ivoire, guano, cuivre, plumes d’autruche, bétail) attirent les marchands de Brême et de Hambourg. Vers 1875, les centres commerciaux de Windhoek et Grootfontein, se présentent comme de petites villes allemandes prospères.
1873-1896 : « La grande dépression » qui affecte les pays industrialisés fait brutalement chuter les prix des produits africains.
1875 :
le chef swahiliTippou Tib, marchand d’esclave, après avoir accumulé les victoires militaires depuis 1867, établit sa capitale à Kasongo en 1875 et se proclame souverain de la région ouest du lac Tanganyika. En l’espace de vingt ans, ils se taille un empire d’environ 500 000 km2. Il l’organise dans le domaine politique, en nommant ou en confirmant dans leurs fonctions les chefs ; économique, en développant de grandes cités marchandes (Nyangwe, Kasongo, Kisangani), en construisant des routes et en encourageant des plantations esclavagistes ; religieux, en répandant l’islam. Vers l’ouest, ses caravanes vont au-delà du Lualaba, frontière théorique de ses États. Tippou Tib et les autres marchands arabes utilisent pour servir leurs intérêts économiques et politiques le groupe des wangwana (« personnes libres », appelés « arabisés » par les Européens), engagés volontaires ou esclaves, qui pratiquent la langue swahili et l’islam. On leur confie la collecte de l’ivoire, l’achat et la capture d’esclaves, la gestion des domaines ruraux et le transport des marchandises vers Ujiji, Tabora ou Zanzibar. D’autres groupes sociaux liés au commerce se développent : les porteurs (pagazi), recrutés principalement parmi les Nyamwezi ; les chasseurs d’ivoire ; enfin les esclaves (washenzi, « barbares »), qui pourvoient à la subsistance des chasseurs, des trafiquants ou des porteurs.
le code portugais du travail indigène, promulgué en 1875, remplace l’esclavage par le recrutement de travailleurs pour les plantations de Sao Tomé.
1875-1915 : Henriette Benaben anime une école de broderies indigènes à Alger[4].
1879 : 500 des 633 vaisseaux entrés dans le port de La Goulette sont italiens[5].
Mouvement d’immigration vers les villes en Libye. Les communautés étrangères grossissent. Tripoli, qui compte de nombreux Maltais, accueille des réfugiés des régences d’Afrique du Nord.
146 factoreries européennes sont installées entre Loango et Luanda, de part et d’autre de l’embouchure du Congo. Le principal entrepôt de ce commerce se trouve à 400 km des côtes, au Pool Malebo. Après l’arrêt de la traite négrière vers 1860, le bassin du Congo exporte surtout de l’ivoire, du caoutchouc, du copal, de l’huile de palme et des noix de palmiste. Il importe des produits européens et surtout du sel marin qui fait pratiquement office de monnaie à l’intérieur. Les cauris, les tissus et le cuivre sous forme de barrettes (mitako) sont également utilisés pour les échanges.
Des stations de charbonnages sont installées à Freetown, en Sierra Leone. La production est envoyée en Grande-Bretagne sur des bateaux à vapeur qui réduisent considérablement le temps de transport entre l’Afrique et l’Europe.
La ville de Khums, en Libye, devient le principal centre de production d’alfa (plante textile, spontanée dans la région méditerranéenne, utilisée pour fabriquer des cordes).
Amérique
1869-1885 : crise dans le secteur du café dans la vallée du Paraiba au Brésil (épuisement des terres, pénurie d’esclaves, concurrence internationale). Les mauvaises récoltes font chuter la production après 1868 et monter les prix qui atteignent leur maximum en 1874 ; des planteurs développent la culture du café dans l'État de São Paulo, à la faveur de la construction de chemins de fer[6],[7]La production annuelle de café au Brésil passe de 200 000 tonnes en 1870 à 300 000 en 1880 et 700 000 en 1900[8].
1870 : les États-Unis comptent 85 000 km de chemins de fer[9].
1870-1876 : effort des gouverneurs radicaux du Sud pour scolariser la population noire. De 1870à 1876, le nombre d’écoliers passe de 30 000 à 123 000 en Caroline du Sud, dont 70 000 enfant noirs[10].
1870-1884 : extermination des bisons aux États-Unis ; 2,5 millions de bisons environ sont tués chaque année de 1870 à 1875[11]. En 1884, le nombre de survivants est estimé à 200 têtes[12].
Après 1870 :
en Bolivie, un tiers des terres publiques passent dans des mains privées[13].
1872 : début des plantations de bananiers au Costa Rica, plantées le long de la voie ferrée en construction entre Limón et Cartago[15]. Minor Keith en commence l’exportation en 1878[16]. La banane deviend dans la plupart des petites républiques d’Amérique centrale l’unique produit d’importation, en général à destination des seuls États-Unis. L’installation de grandes compagnies américaines, comme l’United Fruit Company (1899), transforme la vie économique et politique des petits pays de la région.
1873 - 1896 : « Grande Dépression » en Europe et aux États-Unis[18]. Récession et début d’une phase de baisse des prix aux États-Unis (1873-1877)[19]. Le revenu des agriculteurs, fortement endettés, s’érode. De nombreuses compagnies de chemin de fer, fragilisées par la guerre des tarifs, sont acculées à la faillite. Le chômage touche la moitié des ouvriers d’usine entre 1873 et 1880. Les grèves et les conflits sociaux contre les réductions de salaire culminent en 1877[20].
1873-1878 : l’adoption de l’étalon or par la plupart des pays européens stimule la demande et profite au Mexique[21].
1875 : Andrew Carnegie adopte le procédé Bessemer qui donne une impulsion décisive à la production d’acier aux États-Unis[19].
1877-1880 : une grande sécheresse dans le Nordeste, particulièrement dans le Ceará, provoque un mouvement de population vers l’Acre et le Pará au Brésil ; de nombreux seringueiros sont recrutées et participent au boom du caoutchouc[22].
Prospérité de la ville de Guayaquil en Équateur grâce au cacao. Les exportations sont passées de 5 000 tonnes en 1840 à 12 000 en 1870 et représentent les trois quarts des recettes du pays[23].
85 % de la population du Brésil est analphabète (même sans tenir compte des esclaves). Les écoles n’existent pratiquement que dans les villes. Rio de Janeiro tient une place à part (académies, librairies, Bibliothèque nationale)[24].
De 1811 à 1870, le Brésil a importé 1,145 million d’esclaves Africains (60,3 % des esclaves débarqués aux Amériques), les Antilles espagnoles ont importé 606 000 (32 %), dont 550 000 à Cuba, les Antilles françaises 96 000 (3 %), les États-Unis 51 000 (3 %). Au total 1 898 400 de personnes, soit 31 600 par an en moyenne[25].
modernisation de l’État japonais sur le modèle européen. Réforme fiscale[30]. Institution d'une armée permanente avec un service obligatoire. Suppression des pensions à la noblesse (1873-1876)[31]. Début de l’industrialisation du Japon.
Inde : développement d’une importante industrie textile autour de Bombay, destinée au marché intérieur et à l’exportation vers la Chine. Elle occupe le cinquième rang mondial en 1914 et produit 23 % des cotonnades consommées en Inde (44 % si l’on prend en compte la production artisanale)[38].
Europe
1870 :
21 558 km de chemin de fer en Grande-Bretagne, 15 544 km en France, 18 876 km en Allemagne[39], 5 295 km en Espagne[40].
226 000 habitants à Rome. La ville devenue capitale en 1872 est le théâtre d’une vaste opération immobilière. De nombreux monuments sont détruits pour construire des logements pour l’administration[42].
1870-1880 : 1 175 000 Italiens émigrent[43]. Ils se dirigent vers les nations européennes, surtout vers la France. Après 1880, ils commencent à traverser l’Atlantique : Argentine, Brésil et États-Unis.
1871-1873 : boom économique déclenché par la victoire en Allemagne (Gründerzeit). Afflux de capitaux (dont 7 milliards versés par la France). Création de grandes banques d’affaires (Deutsche Bank, Dresdner Bank, etc.), de sociétés par actions (chemin de fer, banques, mines, métallurgie, etc.)[44].
1870-1880 : crise agricole aux Pays-Bas[45]. Essor industriel. Le développement du réseau ferré, la crise des prix agricoles et l’expansion démographique (26 % entre 1875 et 1885) entraînent un exode rural massif qui crée un prolétariat urbain[46].
1873 - 1896 : « Grande Dépression » , période de crise économique et sociale en Europe et aux États-Unis[18]. La Russie est touché par la crise économique européenne[47]. Elle frappe durement l’industrie textile portugaise (60 % de la population ouvrière, 40 % de la production industrielle) et le commerce du vin.
1875 : les puits de pétrole de Bakou produisent 82 000 tonnes par an (1 902 400 en 1885)[47].
1873 : le recensement cadastral (New Domesday Book) indique une concentration persistante de la propriété foncière : 7000 personnes en possèdent les quatre cinquièmes, et les plus grands domaines restent dans les mains des aristocrates (400 familles au plus) et de la gentry (1000 à 2000 familles)[50].
1873-1896 : crise de l’agriculture pendant la Grande Dépression, marquée par la baisse d’un tiers du prix des céréales face à la concurrence étrangère. Les élites foncières compensent la baisse des revenus du fermage en diversifiant leurs activités, en particulier dans le domaine financier. Les prix de gros s’orientent à la baisse (-32 % sur la période), diminuant les profits des industriels et les obligeant à réduire leurs effectifs ouvriers. La production industrielle ralentit dans plusieurs secteurs (sidérurgie, textile, charbon), comme la croissance de la productivité de la main-d’œuvre[50].
1873 - 1876 : Joseph Chamberlain, maire radical de Birmingham, organise entre un vaste projet urbanistique, alliant municipalisation de la distribution d’eau et de gaz, drainage, démolition de taudis, percement de grandes avenues et aménagement d’espaces verts (gas-and-water socialism). Ce socialisme municipal fait école et en 1914 la distribution du gaz est municipalisée dans plus de 200 villes et celle de l’eau dans 500[50].
la consommation d’alcool culmine avec 160 litres par an et par personne[50].
1876 : le déficit commercial Britannique atteint 100 millions de livres. Il oscillera en 120 et 180 millions entre 1890 et 1913. Il est largement compensé par la fourniture de capitaux et la prestation de services (fret, assurances, banques)[50].
La production de textile représente 33 % de la production moniale. Depuis 1800, elle a été multipliée par 14[56] et celle de charbon par 10 (elle double encore jusqu’en 1910).
Les exportations annuelles sont de 218 millions de £ entre 1870 et 1879. Le Royaume-Uni fournit le tiers de la production mondiale de produits manufacturés et le revenu national par habitant est le plus élevé au monde. Il produit 60 % du charbon mondial, 50 % des tissus de coton, 40 % de l’acier. Un quart du revenu national est assuré par les exportations[57].
L’industrie emploie 5,5 millions de personnes, le commerce et les transports 2,3 millions, l’agriculture et les services domestiques 1,8 million, la fonction publique et les professions libérales 700 000.
France
1868 : la découverte de l'alizarine, le colorant rouge de la garance, provoque la fin de la culture de la garance, notamment dans le Vaucluse[58].
1877 : crise de la soierie lyonnaise ; l'industrie textile se lance dans la fabrication de tissus mélangés de coton et de laine et des tissus dits « fantaisie », comme les crêpes, la gaze et les mousselines[61].
Le Phylloxéra, maladie de la vigne identifiée dans le Gard en 1863, détruit la quasi-totalité du vignoble français[58].
1875 : deux millions d’habitants au Chili, regroupés principalement dans la vallée centrale[67].
Notes et références
↑George Steinmetz, The Devil's Handwriting : Precoloniality and the German Colonial State in Qingdao, Samoa, and Southwest Africa, University of Chicago Press, , 608 p. (ISBN978-0-226-77244-8, présentation en ligne)
↑Charles-François Mathis, Jean-François Mouhot, Une protection de l'environnement à la française ? (XIXe – XXe siècles), Champ Vallon (ISBN9782876736078, présentation en ligne)
↑Michelle Zancarini-Fournel, Les luttes et les rêves : Une histoire populaire de la France de 1685 à nos jours, La Découverte, , 1286 p. (ISBN978-2-35522-114-9, présentation en ligne)
↑Maria Isaura Pereira de Queiroz, Seigneurs ruraux et pouvoir local dans la vie politique brésilienne, Les Editions de la MSH, (ISBN9782735110346, présentation en ligne)
↑Lee Schweninger, Listening to the Land: Native American Literary Responses to the Landscape, University of Georgia Press, (ISBN9780820336374, présentation en ligne)
↑Ana Patricia Rodríguez, Dividing the Isthmus : Central American Transnational Histories, Literatures, and Cultures, University of Texas Press, , 309 p. (ISBN978-0-292-77458-2, présentation en ligne)
↑ ab et cJérôme Buridant, Arcangelo Figliuzzi, Marc Montoussé, Isabelle Waquet, Histoire des faits économiques, Éditions Bréal, (ISBN9782749507378, présentation en ligne)
↑Pierre Judet, Une histoire sociale de l'industrie en France - Du choléra à la grande crise (années 1830- années 1930), PUG - Presses universitaires de Grenoble (ISBN9782706149078, présentation en ligne)
↑António Henrique R. de Oliveira Marques, Jean-Michel Massa, Histoire du Portugal et de son empire colonial, Karthala, (ISBN9782865378449, présentation en ligne)
↑Le Cosmos - revue des sciences et de leurs applications, vol. 14, Paris, Cosmos, (présentation en ligne)
↑Institut national de la statistique et des études économiques, Le Bénélux - mémento économique, Presses universitaires de France, (présentation en ligne)
↑Serge d'Agostino, Marc Montoussé, Alain Chaffel, Jean-Marc Huart, 100 fiches pour comprendre la mondialisation, Éditions Bréal, (ISBN9782749506265, présentation en ligne)
↑Xavier Daumalin, Sylvie Daviet, Philippe Mioche, dir., Territoires européens du charbon : Des origines aux reconversions, Presses universitaires de Provence, (présentation en ligne), « Le roi Charbon et ses sujets turbulents - les industries et sociétés charbonnières en Grande-Bretagne aux XVIIIe et XIXe siècles. Quentin Outram et Nina Fishman »
↑Francis Ronsin, La Grève des ventres - Propagande néo-malthusienne et baisse de la natalité en France (XIXe – XXe siècles), Aubier, (ISBN9782403000603, présentation en ligne)
↑ a et bDominique Barjot, Les sociétés rurales face à la modernisation : Évolutions sociales et politiques en Europe des années 1830 à la fin des années 1920, Éditions Sedes, , 304 p. (ISBN978-2-301-00317-1, présentation en ligne)
↑François Vallat, Les bœufs malades de la peste - La peste bovine en France et en Europe (XVIIIe – XIXe siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes, (ISBN9782753566811, présentation en ligne)
↑Léon Bonneff, Maurice Bonneff et Michelle Perrot, La vie tragique des travailleurs, Éditions de l'Atelier, (présentation en ligne)
↑Yves Lequin, Les ouvriers de la région lyonnaise (1848-1914), Presses universitaires de Lyon, (présentation en ligne)
↑"Statistiques de prix – La baisse des prix du blé, fait capital de l’histoire économique" par Jacqueline Fourastié, 2013 [1]
↑Bulletin de L'Institut International de Statistique, vol. 2, Imp. Héritiers Botta, (présentation en ligne)
↑Report of Proceedings of the Annual Meeting, National Association of Stove Manufacturers of the United States, (présentation en ligne)
↑Yearbook of Immigration Statistics, U.S. Department of Homeland Security, Office of Immigration Statistics, (présentation en ligne)