C'est un terme générique qui s'applique aux espèces appartenant au sous-ordre des Mysticètes (les cétacés à fanons) ainsi, improprement, qu'à certaines espèces d'Odontocètes (les cétacés à dents). Le petit de la baleine s'appelle le baleineau.
Les caractéristiques générales des baleines sont celles des Cétacés, avec des différences pour chaque espèce : voir les articles détaillés pour plus d'informations, notamment sur leur constitution physique ou leur mode de vie respectif.
Dénomination
Terminologie
Les vraies baleines
Dans le langage courant, c'est un terme générique qui ne fait en général pas référence à une catégorie scientifique particulière autre que celle des cétacés[1].
Pour être plus précis[2], on ne devrait l'utiliser que pour parler des mysticètes, les cétacés à fanons. Mais on l'utilise aussi pour le Grand cachalot ainsi que pour d'autres odontocètes.
Les fausses baleines
Dans le même ordre d'idées, les baleines à bec sont des odontocètes de la famille des Ziphiidae qui ne mesurent que quelques mètres, et la baleine de Cuvier (Ziphius cavirostris), qui n'a d'ailleurs pas de bec, n'est donc pas non plus vraiment une baleine. Dans cette même famille, on notera que l'emploi du terme « baleine » pour désigner par exemple un mesoplodon ou un hyperoodon n'est pas usité en français (on utilise celui de « cétacé » à défaut d'être plus précis).
L'expression « baleine blanche » peut quant à elle faire référence[3] au monodontidéDelphinapterus leucas (le béluga). Mais elle est ambiguë parce qu'elle évoque également un animal quasiment mythique incarné notamment par le cachalot albinos du roman Moby Dick.
En revanche, celle de « baleine pilote » appliquée aux globicéphales et celle de « baleine tueuse » aux orques et fausses orques, sont douteuses : ces trois espèces sont des delphinidés, leur emploi ne correspond à aucun usage établi[4],[5] et n'est apparu que récemment dans certaines traductions erronées de sources documentaires ou scientifiques anglo-saxonnes : en anglais, le terme « whale » (baleine) peut en effet désigner toutes sortes de cétacés, mais pas en français.
En outre, il arrive aussi qu'on parle de baleines pour désigner indistinctement les cétacés qui peuvent faire, ou qui ont fait, l'objet d'une chasse baleinière. Enfin, on utilise souvent le terme « baleine » pour parler d'un cétacé que l'on n'a pas identifié précisément mais qui, au jugé, a l'air plus gros qu'un dauphin (ce qui est assez vague compte tenu qu'un grand dauphin comme l'orque par exemple, est plus gros qu'une petite baleine comme la baleine de Minke).
Étymologie
Le terme « baleine »[6] vient du latinballaena, (ou ballena, ou encore balaena[7]). Ce mot latin est à rapprocher du grec ancienφάλαινα / phálaina[8] et partage sans doute avec lui une origine indo-européenne commune signifiant, comme pour « phallus », quelque chose qui « se gonfle ». Il apparaît en ancien français au cours du XIe siècle.
Les anciens Grecs[9] et Romains[10] avaient clairement identifié les baleines comme étant des mammifères marins dotés — à la différence des poissons — de poumons et d'un évent.
Noms français et noms scientifiques correspondants
Liste alphabétique de noms vulgaires ou de noms vernaculaires attestés[11] en français. Note : certaines espèces ont plusieurs noms et, les classifications évoluant encore, certains noms scientifiques ont peut-être un autre synonyme valide.
Les baleines sont recherchées pour leur chair, leurs fanons et leur graisse qui fut largement utilisée par l'homme.
Au XIXe siècle, certaines villes de la Nouvelle-Angleterre, sur la côte est des États-Unis, dépendaient entièrement de la chasse à la baleine. Aujourd'hui, la baleine joue un rôle culturel important chez de nombreux peuples qui pratiquaient ou pratiquent encore la chasse traditionnelle, tels les Amérindiens de la côte ouest du Canada, ceux du nord des États-Unis et les peuples Inuits de l'Arctique. C'est pourquoi certains peuples aborigènes vivant aux États-Unis, au Canada et dans les îles du Pacifique bénéficient de clauses qui leur permettent de chasser des espèces menacées, mais à très petite échelle.
À la suite d'une chasse intensive pendant le XIXe siècle et XXe siècle, de nombreuses espèces sont maintenant en voie de disparition. Des traités internationaux limitent aujourd'hui de façon très stricte la chasse à la baleine. Cependant, certains pays, comme le Japon et la Norvège, invoquant l'impact négatif des cétacés sur les stocks de poissons, dont leurs économies dépendent, continuent à ne pas respecter les moratoires successifs votés lors des réunions de la Commission baleinière internationale.
Baleine franche australe, baleine franche de l'Atlantique du Nord
1937
Baleine grise
1964
Baleine à bosse dans l'hémisphère sud
1967
Baleine bleue dans l'hémisphère sud
1979
Rorqual boréal (quelques exceptions)
1981
Grand Cachalot (quelques exceptions)
Les baleines dans la culture
Origine du nom
La première étude systématique connue des cétacés, la cétologie, date de l’Historia animalium, une œuvre d'Aristote qui observe bien que les cétacés sont vivipares, allaitent leurs petits et sont donc pourvus de mamelles[16], alors que Pline les classe dans les poissons, cette seconde conception prédominant au Moyen Âge.
Le terme latin ballaena est probablement un emprunt du terme grec d'Aristote, dans son traité de zoologie, de φάλλαινα / phállaina qui peut se traduire par « chose gonflée ». Le philosophe mentionne la baleine le plus souvent aux côtés du dauphin et des « autres cétacés » (en grec kêtos, latin cetus)[17]. Le terme greckêtos comme le latincetus désignent en réalité autant les cétacés que les grands requins et toutes sortes de gros animaux et « monstres marins »[18].
Une étymologie populaire voudrait que la ville française de Sète tienne son nom des cétacés : l'emblème de la ville est d'ailleurs une baleine. Cependant, Sète est connue depuis l'Antiquité sous le nom Σίτιον όροϛ / sítion óros[19],[20],[21], puis sous la forme latine Setius mons au IVe siècle[22],[20], puis plus tard en occitan seto[20], d'étymologie bien distincte de κῆτος / kētos en grec et cetus en latin.
Les îles-baleines
Différents bestiaires, contes et autres livres présentent une créature marine que, lorsqu'elle ne laisse émerger qu'une partie de son dos, les marins prennent pour une île. Ceux-ci accostent donc sans méfiance, mais risquent d'être immergés lorsque l'animal replonge. Le Physiologus, bestiaire chrétien du IIe ou IVe siècle, l'appelle Aspidochélon (littéralement « aspic tortue »). Mais au XIIIes, Brunetto Latini attribue cette caractéristique à la baleine dans son encyclopédie Li livres dou Tresor(de)[23].
Au début du premier voyage de Sindbad le marin, celui-ci et ses compagnons d'aventure accostent sur une de ces créatures (que certaines traductions désignent comme étant une baleine)[24], qu'ils prennent pour une île.
Le Voyage du saint abbé Brendan narre le voyage marin qu'aurait effectué le moine irlandais Saint Brendan au VIe siècle, à la recherche du jardin d'Éden. Un chapitre raconte la fameuse mésaventure des marins qui confondent un poisson géant avec une île[25].
La baleine dans les arts et la littérature
Dans la Bible, Jonas est avalé par un « grand poisson » dont l'espèce n'est pas précisée. À la suite des Septante, qui emploient le grec κῆτος / kētos[26] pour désigner le poisson avalant Jonas, certaines traditions le présentent à tort comme une baleine.
Dans Pinocchio produit par Disney, de la célèbre histoire de Carlo Collodi, Pinocchio est avalé par une baleine (alors que dans l'histoire originale de Pinocchio, ce dernier est avalé par un requin).
En 1885, les membres du Sport Nautique d'Ostende organisent au Carnaval d'Ostende une Cavalcade de la Baleine, fanfare et tambour-major en tête comme au Carnaval de Dunkerque. Un dessin a été conservé qui immortalise l'événement[27].
Le roman Moby Dick de Herman Melville, qui décrit le milieu des baleiniers américains de l'époque, est aujourd'hui considéré comme un grand classique de la littérature américaine. La baleine du roman est inspirée d'un cachalot réel, Mocha Dick.
La chanson La Baleine Bleue, tirée de l'album L'Opéra du pauvre (1983) de Léo Ferré, est un monologue ironique (et libertaire) adressé aux hommes par une baleine. La chanson pour enfants La Baleine bleue de Steve Waring décrit la pollution dans laquelle vivent les animaux marins.
Une série de timbres danois de 2001 a pour thème la baleine :
Au début du chapitre 16 du premier tome, « Le réarmement du parti » de l'Histoire de la révolution russe, Léon Trotski écrit que « le but de la lutte révolutionnaire était tout à fait nettement déterminé par trois mots d'ordre de combat - république démocratique, confiscation des terres des propriétaires nobles, journée de huit heures[28] », rappelant que ces trois mots d'ordre étaient familièrement appelés les « trois baleines » du bolchévisme, par allusion aux baleines sur lesquelles, d'après une vieille croyance populaire, repose le globe terrestre[29],[30] : selon la Conversation des Trois Hiérarques, « la Terre flotte au-dessus de la grande mer et repose sur trois grandes baleines et trente petites ; ces dernières ouvrent trente fenêtres marines ; les baleines mangent un dixième du parfum céleste et à partir de cela elles sont rassasiées[31] ».
Le film Paï de Niki Caro (2002), dont l'action se situe en Nouvelle-Zélande, est une fable sur le rapport sacré qu'entretiennent les Maori avec les baleines.
En 2005, le groupe de métal français Gojira sort l'album From Mars to Sirius, qui contient la chanson "Flying Whales", parlant de baleines volantes.
En 2015, un groupe de musique coréen, BTS, sortit son nouvel album avec un titre intitulé Whalien 52 faisant référence à la baleine aux 52 hertz.
Baleines clémentes est le titre d'une chanson figurant sur l'album Elixir d'Emmanuel Berland, paru en 2017.
Les baleines sont reconnues comme jouant un rôle écologique important dans les océans (espèce clé de voûte)[32], mais on a aussi montré que ce rôle se poursuit après leur mort. Depuis des millions d'années[33], les cadavres des baleines jouent un grand rôle pour les réseaux trophiques[34] et les écosystèmes des grands fonds marins. Bien plus riche en lipides et protéines que tous les autres cadavres de vertébrés marins[35], ils forment des oasis de biodiversité[36] pour de nombreuses espèces nécrophages (et de prédateurs de ces dernières)[37].
C'est une source de nourriture considérable, en place pour plusieurs décennies[38],[39], et plusieurs siècles pour les organismes qui consomment leurs os[40],[41],[42],[43] ; il y aurait les restes d'une baleine environ tous les 16 km en moyenne dans le Pacifique nord-est.
C'est une des raisons qui font que — après une phase de forte régression des baleines due à la chasse à la baleine[44] — le début de restauration d'une dynamique de population positive chez les cétacés (depuis les moratoires sur leur chasse, mis en œuvre par la plupart des pays) est considéré comme une bonne nouvelle pour les écosystèmes.
Néanmoins, les cadavres de baleines piscivores ou carnivores qui, en surface, se sont parfois nourries de grands poissons chargés de métaux lourds, métalloïdes toxiques, radionucléides, pesticides, PCB, dioxines, furanes, etc.) peuvent contaminer une partie du réseau trophique océanique, mais aussi la chaine alimentaire qui nourrit l'Homme.
Rôle des baleines dans la capture du dioxyde de carbone
Les baleines agissent comme une pompe biologique[45], elles se nourrissent de zooplancton, remontent à la surface pour respirer et libèrent dans l'eau de gigantesques vagues de nutriments riches en azote, en phosphore et en fer[46]. Autrement dit, elles remettent en circulation des nutriments grâce à leurs fèces, qui vont par la suite nourrir et stimuler la croissance du phytoplancton et des algues marines qui absorbent le carbone de l'atmosphère par photosynthèse[46]. Ainsi, elles contribuent à la séquestration du carbone en ingérant ces organismes qui concentrent une grande partie du carbone atmosphérique[47].
Les baleines sont considérées comme des puits de carbone naturels, elles stockent le carbone dans leur corps riche en graisse et en protéine[46]. De plus, après leur mort, les baleines emmènent avec elles le stock de carbone qu’elles ont séquestré. Le carbone libéré par la décomposition des squelettes en fait un environnement propice au développement d'une biodiversité spécifique[47] (point chaud de biodiversité).
En 2010, une étude a montré que la diminution des populations de cachalots de l'océan Austral, à cause de la chasse, a provoqué une augmentation de 2 millions de tonnes de CO2 par an dans l'atmosphère, au début du siècle[48]. Une baleine en moins dans l'océan est une baleine en moins pour séquestrer le CO2.
Dans une étude publiée en septembre 2019[49], le Fonds monétaire international (FMI) et le Great Whale Conservancy mettent en évidence le rôle des baleines dans la limitation des gaz à effet de serre responsables du dérèglement climatique. Selon cette étude, « quand une baleine meurt et coule au fond de l'océan, elle séquestre en moyenne 33 tonnes de CO2, ce qui retire ce carbone de l'atmosphère pendant des siècles. Un arbre, quant à lui, n'absorbe que jusqu'à 48 livres de CO2 par an »[49]. Ainsi, une baleine agit comme une grande forêt, les services écosystémiques qu'elles rendent à l'Humanité sont évaluées à 900 milliards d'euros[49]. Autrement dit, si les baleines disparaissent, l'Homme devra débourser ce montant pour compenser la perte des populations et maintenir les services écosystémiques fournis par les baleines.
Si l'Humanité permettait aux baleines de revenir à leur population avant la chasse à la baleine, cette population serait capable de séquestrer environ 1,7 milliard de tonnes de CO2 par an[49]. Si les forêts françaises séquestrent 70 millions de CO2 par an[50], alors la séquestration du carbone par cette population en 1 an équivaut à environ 25 ans de séquestration du carbone par les forêts françaises.
Selon Ralph Chami, directeur associé à l'institut du développement des capacités du FMI et Michael Fishbach, directeur exécutif au Grand conservatoire des baleines, les efforts visant à restaurer les populations de baleines dans le monde sont l'un des moyens les plus simples de combattre le changement climatique[51],[52].
Les cétacés sont des animaux particulièrement charismatiques et appréciés du grand public[53]. En conséquence, leur observation (en anglais « whale watching ») est un secteur économique en pleine expansion, et l'observation des cétacés se double parfois chez certains opérateurs de « whale jumping », c'est-à-dire de mise à l'eau des touristes à proximité des animaux, souvent de manière brutale, voire dangereuse[54]. Ainsi, l'observation paisible peut parfois dériver vers une véritable industrie du harcèlement, avec des animaux traqués par observation aérienne et poursuivis par des dizaines de navires[54]. Selon le Groupe de recherche sur les cétacés (GREC), ce harcèlement, illégal dans les eaux françaises, peut empêcher les animaux ciblés de continuer leurs activités de repos ou de recherche de nourriture[55].
L'observation des baleines (le « whale watching ») depuis la côte ou en mer à bord de bateaux spécialement affrétés est une activité touristique prisée notamment au Canada, aux États-Unis, aux Açores, mais également en France à La Réunion. Trois catégories de personnes s'y prêtent : le touriste consommateur, le passionné de baleines et le journaliste[56].
Notes et références
↑La nomenclature scientifique adoptée ici se réfère à la liste rouge de l'UICN.
↑cf. J.-P. Sylvestre, 2010. Les baleines et autres rorquals. Delachaux et Niestlé.
↑Ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec, Béluga.
↑Cette section se réfère en grande partie et y compris pour la contredire à A. Rey (dir.), 1992. Robert historique de la langue française. Dictionnaires Le Robert.
↑Le grand Gaffiot. Plin. 9,12 ; Ov. M. 2,9 ; Juv. 10,14. Hachette Livre.
↑Le Robert historique mentionne φάλλαινα / phállaina, mais le dictionnaire grec/français Bailly réserve à ce terme un usage figuré et traduit « baleine » par φάλαινα / phálaina.
↑"Le cète est un grand poisson que la plupart des gens appellent baleine : c'est un poisson aussi grand qu'une île, et qui très souvent s'échoue, car il ne peut nager que là où la mer profonde de plus de deux cents pieds. Ce poisson élève son dos au-dessus des flots en haute mer, et il demeure si longtemps au même endroit que le vent apporte du sable et l'accumule sur son dos, tant et si bien qu'il y pousse de petits arbustes. C'est là ce qui bien souvent trompe les marins : ils s'imaginent qu'il s'agit là d'une île, mettent pied à terre, enfoncent des pieux et font du feu ; mais quand le poisson sent la chaleur, il ne peut la supporter : il s'enfuit au fond de la mer, et tout ce qui se trouve sur son dos est englouti." Brunetto Latini, Le Livre du Trésor, livre I, CXXXIII, traduction par Gabriel Bianciotto, lire en ligne, en ancien français.
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