Achille Devéria est le fils d'un fonctionnaire de la Marine, et l'aîné d'une fratrie de cinq enfants. Il suit tout d'abord les cours de peinture d'Anne-Louis Girodet[1] puis ceux de Louis Lafitte, dessinateur du roi.
En 1822, alors qu'il commence à exposer au Salon, lui et son frère Eugène (également peintre) ouvrent un cours de dessin.
Achille Devéria fait la connaissance de Victor Hugo et de son épouse un soir de décembre 1824 en attendant l'ouverture des guichets sous les galeries du théâtre de l'Odéon où se donne, depuis le 7 du mois, l'opéra Robin des Bois ou les Trois balles, adaptation française très libre du Freischütz de Weber[2]. Un dessin promis lors de cette rencontre et apporté à Madame Hugo marque le début de leurs échanges réguliers et des visites qu'ils se rendent désormais mutuellement à leurs domiciles respectifs[N 1].
Achille Devéria épouse, en 1829, Céleste Motte, fille de l'imprimeur lithographe Charles Motte (1785-1836). D'après leur fils Gabriel « la maison que [son] père possédait rue Notre-Dame-des-Champs no 45[3] était enfouie dans des jardins : elle avait la tranquillité d'une retraite et la gaieté d'un nid[4]. » Cette maison avait deux entrées. La seconde, plus volontiers indiquée comme adresse officielle dans les catalogues du salon se trouvait au no 38 de l'anciennerue de l'Ouest[5] (quartier du Luxembourg, ancien 11e arrondissement) qui longeait, à cette époque, la pépinière plantée à l'emplacement de l'ancien enclos des Chartreux.
La maison est à la fois le foyer familial où logent également Eugène et Laure Devéria et le lieu de travail d'Achille qui y installe son atelier. Elle est « gaie et animée par le mouvement [des] six enfants » du couple qui reçoit dans son salon « toute la pléiade romantique[6]. »
Achille exerça son art dans des genres divers. On lui doit des tableaux religieux et des aquarelles fort recherchées. Il est le premier qui ait su appliquer la couleur à la lithographie, avec l'aide de Motte qui effectuait les tirages.
« Voilà un beau nom, voilà un noble et vrai artiste à notre sens[7]. »
En 1849, Devéria est nommé directeur du département des Estampes de la Bibliothèque nationale[1] et conservateur adjoint du département égyptien du Louvre. Il passe ses dernières années à voyager en Égypte, dessinant et transcrivant des inscriptions.
Illustrateur érotique
À l’époque romantique, en écho à ce qui advenait au milieu du XVIIIe siècle, on constate une abondance et une qualité d'illustrateurs qui se compromettent en détournant leurs outils au service de ce qui était considéré à l'époque et pendant longtemps, de la pornographie. Les libraires du XIXe siècle dénomment ces anonymes « Devéria et son école ». Alfred de Lostalot (1837-1909), rédacteur de la Gazette des beaux-arts dénonce, après sa mort, l'artiste : « Devéria, lui, s’est prodigué dans tous les [mauvais] genres ce qui n’est pas sans avoir fait du tort à son talent et à sa réputation ». La chose était donc su mais personne n'en parlait. Parmi les images érotiques composées par Devéria et ses complices, et la multitude des supports licencieux, la lithographie romantique pornographique reste l’image obscène la plus raffinée d’autant que – fait unique dans toute l’histoire de l’art érotique – elle n’est pas la conception d’un artiste isolé aux fantasmes inspirés mais d’un véritable mouvement, uni et concerté. L’a priori qui nous fait appréhender les romantiques français comme des jeunes gens vaporeux, désuets et obsolètes se retrouve mal en point, lorsque nous les découvrons plutôt provocateurs, ardents, lubriques et égrillards, vigoureux héritiers des valeurs émancipatrices du siècle des Lumières[8].
Famille
Achille Devéria est le frère d'Eugène Devéria (1805-1865), peintre lui-aussi, et de Laure Devéria (1813-1838), peintre de fleurs morte prématurément.
Par son mariage avec Céleste Motte, conclu en 1829, il est le gendre de l'imprimeur lithographe Charles Motte. Six enfants naissent de ce mariage, dont
Miguel de Cervantes, L'Ingénieux Chevalier Don Quixote de la Manche, Paris, T. Desoer, 1821
[lithogr.] Constantin Mazeret, Dénorama, ou spicilège historique et anecdotique sur chaque partie du corps humain, Paris, Peytieux, 1825
[dessin] Jean de La Fontaine, Œuvres complètes, 30 vignettes gravées par Thompson et notice biographique par Balzac, Paris, A. Sautelet, 1826 [plusieurs éditions]
Jean-Jacques Rousseau, Œuvres complètes, ornées de quarante-deux vignettes gravées d'après les dessins de Devéria[10], Paris, Dalibon, 1826
[frontispice] Daniel Defoe, Robinson Crusoë, trad. de Pétrus Borel, Paris, Francisque Borel et Alexandre Varenne, 2 vol., 1836
[collectif], Les Hommes célèbres de l'Italie, 28 portraits en pied dessinés et gravés par Riffaut, Paris, A. Ledoux, 1845.
[album], Photographie zoologique ou représentation des animaux rares des collections du Muséum d'Histoire Naturelle[11], dessins, avec des photographies du naturaliste Louis Rousseau, gravures de Riffaut, procédé héliographique de Bisson, Mante et Lemercier, Paris, Masson & Gambart, 1853-1855.
Orléans, musée des Beaux-Arts : La Princesse Marie d’Orléans devant la statue de Jeanne d’Arc, 1843-1844, lavis d’encre brune et de sépia, rehauts de gouache blanche, sur traits de crayon graphite sur papier vélin, 30 x 21 cm[14].
Notes et références
Source
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Notes
↑Victor Hugo et son épouse logent alors dans l'entresol d'une maison (disparue) de la rue de Vaugirard (ancien numéro 90, ultérieurement no 88), non loin du domicile d'Achille Devéria. D’avril 1827 à février 1830, les Hugo habitent encore plus près, dans une maison de la rue Notre-Dame-des-Champs (ancien no 11, devenue no 27 en 1904, au moment où sa démolition en vue du percement du boulevard Raspail est projetée). Cf. Lucien Lambeau, « La maison de Victor Hugo, rue Notre-Dame-des-Champs », Procès-verbal de la Commission municipale du Vieux Paris du 15 décembre 1904, p. 310-318.
↑Théophile Gautier, « Histoire de l'art dramatique en France depuis vingt-cinq ans », Paris, éd. Hetzel, librairie Magnin, 1859, p. 127 (en ligne).
↑M. Guyot de Fère, Annuaire des artistes Français, Paris, 1833, p. 89 (en ligne).
↑Gabriel Devéria, « Notice biographique sur Th. Devéria », pp. 1 et 2, citée par Edmond Pottier dans « Notice sur la vie et les travaux de M. Gabriel Devéria », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 44e année, No 2, 1900. pp. 127-143 (en ligne).
↑Edmond Pottier, Notice sur la vie et les travaux de M. Gabriel Devéria, In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 44e année, No 2, 1900. pp. 127-143 (en ligne).
↑Œuvres complètes de Charles Baudelaire, Paris, Michel Lévy frères, 1868 (II. Curiosités esthétiques, p. 77-198).
↑« Achille Devéria et ses amis », notice du lot 222, vente Curiosa - bibliothèque Tony Fekete, Paris, 6 octobre 2020, sur Marie Saint-Germain, commissaire priseur.
↑Archives nationales de France, base Léonore (en ligne).
↑Fonds Devéria, Department of Arts, université de Wake Forest.
↑Dominique Brême et Mehdi Korchane, Dessins français du musée des Beaux-Arts d’Orléans. Le Trait et l’Ombre, Orléans, musée des Beaux-Arts, (ISBN9 788836 651320), n°159