L’État islamique au Khorassan (EI-K) — selon son titre complet l’État islamique - Province de Khorassan (ISIL-KP ou ISKP en anglais ; arabe : الدولة الإسلامية في العراق والشام – ولاية خراسان, ad-dawla al-islāmiyya fi-l-ʿirāq wa-š-šām – wilāya ḫorāsān)[3] — est une branche de l'État islamique, active en Asie centrale et en Asie du Sud. Pour se référer à ce groupe, certains médias utilisent également les termes ISK, ISISK, ISKP, ISIS-K, ou Daech-Khorassan.
Histoire
Le Mouvement pour le Califat et le Jihad, au Pakistan, se rallie à l'EI le , puis le bataillon al-Tawheed, en Afghanistan, en et la Brigade de l'Islam dans le Khorassan, en Afghanistan[4],[5].
Le , le Tehrik-e-Taliban Pakistan annonce apporter son soutien à l'État islamique, indiquant qu'ils allaient leur « fournir des moudjahidines ». Le TTP appelle également les autres groupes djihadistes à mettre de côtés leurs rivalités et à s'unir[6]. Des dissidences du TTP comme le Jamaat-ul-Ahrar et le Tehreek-e-Khilafat apportent également leur soutien à l'EI. Ces groupes appellent aussi à la réconciliation entre l'État islamique et Al-Qaïda[7],[8],[5].
En , six chefs talibans font allégeance à l'État islamique, dont Abou Omar Maqbool, dit Shahidullah Shahid, porte-parole du TTP, qui est aussitôt destitué[5],[8]. Le , dix commandants talibans pakistanais et afghans annoncent ou renouvellent leur allégeance à l'EI[9]. Fin , l'État islamique annonce officiellement la création de la province Khorasan[10].
L'État islamique parvient à s'implanter dans la province de Kounar, et surtout dans la province de Nangarhar qui devient son principal bastion[10]. En revanche, les combattants de l'EI en Afghanistan sont rapidement écrasés par les talibans dans les provinces de Farah, Logar et Zabol[10]. Beaucoup d'entre eux sont faits prisonniers et exécutés en novembre 2015[10]. À l'été 2018, les talibans détruisent les forces de l'État islamique dans la province de Djozdjan, au nord du pays, lors de la bataille de Darzab[14],[15]. Enfin, après plusieurs mois de rudes combats marqués par des offensives talibanes et gouvernementales, des frappes américaines et des soulèvements populaires, l'État islamique perd la majorité de son territoire dans la province de Nangarhar en , puis dans la province de Kounar en , qui passent sous le contrôle des talibans[10]. Désormais dépourvu de bases territoriales, l'État islamique intensifie son terrorisme urbain, en ciblant principalement les forces gouvernementales et les Hazaras[10],[16].
Ses principales cellules se situent alors à Jalalabad, Kaboul, Hérat, Kondoz, Parwan et Aibak[10]. Entre le et le , l'État islamique en Afghanistan commet plus de 216 attaques, contre 34 en 2020 sur la même période[17]. Selon un rapport de l'ONU de 2021, l'État islamique est responsable de la mort de 2 500 membres de l'armée afghane, et de la mort de 600 civils, en majorité issus de minorité religieuse, le tout en 12 mois[18].et plusieurs attentats[19],[20],[21],[22],[23].
Selon un rapport annuel de l'ONU publié en , l'État islamique a pu se reconstituer une force de frappe grâce au retrait américain d'Afghanistan et la prise du pouvoir par les talibans. Les djihadistes de l'État islamique ont pu reprendre un territoire limité dans l'est de l'Afghanistan, en particulier dans la province de Kunar et Nangarhar. À Kaboul, les cellules de l'État islamique attaquent régulièrement les minorités religieuses et les forces talibanes. Les djihadistes de l'État islamique ont pu s'implanter dans le nord de l'Afghanistan[24]. Depuis la chute du régime afghan fin , et la prise de contrôle du pays par les talibans, l'État islamique commet entre et au moins 119 attaques en Afghanistan, dont 96 qui ciblent des responsables et des combattants talibans. Les attaques comprennent principalement des raids contre des positions talibanes, des embuscades, et des assassinats[25].
Le groupe islamiste se sert également de l'Afghanistan comme tremplin pour attaquer les pays voisins. Le , le groupe tire 7 roquettes contre une position de l'armée tadjike à partir de la province de Takhar en Afghanistan. Le , le groupe tire également 10 roquettes contre une position de l'armée ouzbèke à partir du sol afghan[26]. Le groupe menaçait déjà depuis plusieurs semaines les régimes de la région. Le , la branche médiatique de l'ISKP menace d'attaquer la Russie ainsi que ses mandataires en Asie centrale, à savoir l'Ouzbékistan, le Kazakhstan, le Turkménistan, le Kirghizistan et le Tadjikistan. Dans une autre publication, le groupe rappelle aussi que l'État islamique usera de son influence dans la région afin de frapper l'Iran, la Chine et l'Ouzbékistan[27]. Il menace également l'Ukraine[28].
Le , deux kamikazes se font exploser sur la route commémorative de l'assassinat de Qassem Soleimani dans la ville de Kerman, en Iran, tuant 84 personnes et en blessant 284 autres. L’attentat de Kerman est l'attaque terroriste la plus meurtrière en Iran depuis la Révolution iranienne[29].
Le , juste avant un concert prévu au Crocus City Hall de Krasnogorsk dans la banlieue nord-ouest de Moscou, et alors que les spectateurs prennent place dans la salle peu avant 20 heures, heure locale, un attentat terroriste rapidement revendiqué par l'État islamique au Khorassan[30] fait 143 morts et plus de 130 blessés, dont cent en réanimation[31].
Organisation
Commandement
Hafez Saïd Khan, premier chef de l'État islamique en Afghanistan et au Pakistan, est tué par un tir de drone américain le , dans le district d'Achin, dans la province de Nangarhar[32],[33]. La mort d'Hafez Saïd Khan avait été annoncée par erreur par les autorités afghanes en [33],[34],[35]. Son successeur, Abdul Hasib, est tué vers fin lors d'un raid mené par les forces américaines et afghanes dans la province de Nangarhar[36]. Deux rangers américains et 35 djihadistes trouvent la mort lors de cette opération[36]. Le , le troisième chef de l'EI en Afghanistan, Abou Sayed, est tué par une frappe américaine contre son QG dans la province de Kounar[37]. Zia ul-Haq, dit Abou Omar Khorasani, devient le nouveau chef régional de l'EI, mais il est remplacé en par Abdullah Orakzai, dit Aslam Farooqi, à cause de ses échecs opérationnels fin 2018 dans l'est de la province de Nangarhar[38]. Aslam Farooqi est cependant arrêté en , puis libéré lors de la prise de l'Afghanistan par les talibans[38] et Abou Omar Khorasani reprend la tête de la branche afghane de l'EI[39], avant d'être arrêté à son tour à Kaboul, un mois plus tard[40]. En , Abou Omar Khorasani est exécuté par les talibans quand ces derniers s'emparent de la prison de Pul-e-Charkhi[10],[39]. Shahab al-Muhajir devient le nouveau chef de l'EI à partir de [10],[39].
Les États-Unis accusent entre autres, Sanaullah Ghafari, Alias Shabab Al-Muhajir, d'avoir réorganisé la province afghane de l'État islamique au moment où cette province était en grande difficulté, et d'avoir orchestré de nombreuses attaques, dont l'attentat de l'aéroport de Kaboul, causant la mort de 13 soldats américains.
Le gouvernement taliban revendique la mort de Qari Fateh, « chef du renseignement et des opérations » de l'État islamique au Khorassan, lors d'une opération à Kaboul, le 26 février 2023[42].
Effectifs
En , un rapport de l'ONU estime qu'environ 10 % des insurgés afghans ont prêté allégeance à l'EI. Des groupes ayant fait allégeance à l’EI ou qui s’en déclarent proches ont été signalés dans 25 des 34 provinces du pays[43]. Début 2016, l'armée américaine estime que l'EI compte entre 1 000 et 3 000 combattants en Afghanistan[1]. En , un rapport de l'ONU fait état de 2 200 hommes[44]. En , The Washington Post évalue les effectifs de l'EI de 4 000 à 5 000[2].
Selon un rapport de l'ONU publié en , l'État islamique a pu grâce au retour des talibans au pouvoir, se renforcer considérablement en Afghanistan. Les forces de l'État islamique sont estimées à au moins 4 000 membres. En , l'ONU avait estimé les forces de l'État islamique en Afghanistan à 2 200 hommes[24].
Nom et action des pays voisins
Le nom de cette branche de l’organisation État islamique vient d’une région historique iranienne s’étendant de la mer Caspienne à l’Indus[45]. Avec le retrait des forces américaines en Afghanistan, l’Iran redoutant un accroissement de l’instabilité dans sa zone orientale propose, à travers son ministre des affaires étrangères Javad Zarif, le déploiement de la division des Fatimides composée principalement d’Hazaras[46] pour lutter contre l’EI-K[45],[47].