Née dans une famille originaire d'Alsace[1], elle est la fille d'une mère institutrice[2] et d'un père ingénieur des mines (d'ascendance juive). Elle a un frère jumeau, Lionel Isaac (1913-1990). Évelyne Isaac suit ses études au lycée de jeunes filles de Constantine et à la faculté d'Alger, où elle côtoie et s'oppose à Albert Camus[3] et dont elle sort licenciée en lettres. Elle est professeur de français, latin et grec dans un collège de jeunes filles de Bône en Algérie de 1937 à 1940[4].
En 1939, la guerre éclate. La jeune Évelyne Baylet sera vite impliquée dans les activités clandestines[7] de son mari. Liés au banquier toulousain Courtois de Viçose, consul de Belgique, qui répartissait les réfugiés dans des abris sûrs, leur maison familiale sert de cachette. Évelyne et Jean Baylet font partie de la « filière du Tarn-et-Garonne ». Depuis Toulouse, Évelyne Baylet était envoyée régulièrement à Montauban pour rencontrer le père Peyralade, jésuite très actif dans l'organisation. Elle s'y rendait à bicyclette pour y transmettre les directives.
En 1943, le nom de Baylet devient trop dangereux à porter. Le directeur régional du Service des questions juives, Joseph Lécussan, mène une enquête[8] sur les possibles origines juives d'Évelyne Isaac, devenue Baylet. Cette dernière doit dès lors se cacher, et changer d'identité, le temps que le dossier prouvant qu'elle est de confession catholique soit constitué et vérifié. Sur ses faux papiers, le couple s'appelle désormais Éliane Bories et Jacques Babe.
Directrice en son temps du plus puissant journal du Sud-Ouest et accaparée par de nombreuses tâches à accomplir, Évelyne Baylet n'en reste pas moins une femme proche de sa famille : de ses enfants d'abord, dont elle s'occupe tous les matins avant de partir travailler et dont elle s'inquiète des menus du jour, puis par la suite de ses petits-enfants et arrière-petits-enfants. Femme élégante, elle s'accommode de plaisirs simples, s'acheter des robes à Paris lorsqu'elle a du temps libre[9]. Sa plus grande distraction est de passer ses vacances en Grèce, aimant flâner dans le port et acheter elle-même le poisson et les légumes[10].
Carrière professionnelle et parcours politique
Le journal est interdit à la Libération pour avoir publié sous l'Occupation, et ses bureaux mis sous séquestre. En fournissant des preuves de résistance, le couple obtient une ordonnance de non-lieu en 1946[6]. Le , elle se rend à Paris pour récupérer de force les locaux de La Dépêche de Toulouse[11]. La parution du journal reprend le sous le nouveau titre La Dépêche du Midi[6].
Quand Jean Baylet meurt dans un accident de voiture en 1959, Évelyne Baylet reprend la direction de l'entreprise[11]. Le 3 juin 1959[12], elle est nommée présidente-directrice générale de La Dépêche par le conseil d’administration de la société, à la suite d’Albert Sarraut. Dirigeant l'entreprise d'une main de fer, présidant les conférences de rédaction, elle s'entoure de fidèles dès son arrivée, tels Alyette Lasserre, qui devient son incontournable secrétaire de direction, René Mauriès, qu'elle nomme au poste de rédacteur en chef mais aussi Fernand Cousteaux, l’un des responsables éditoriaux du journal ou encore Jacques Delmas, l'assistant de Cousteaux.
En 1960, René Bousquet, apprenant le décès de Jean Baylet, contacte Évelyne Baylet pour lui proposer son aide. Celle-ci accepte, se sentant menacée entre autres par les manœuvres de déstabilisation de Maurice Bourgès-Maunoury, administrateur du journal depuis 1954. René Bousquet siège au conseil d'administration de 1960 à 1971, date à laquelle il demande à ne pas renouveler son mandat. Au sein de La Dépêche du Midi, il « n’occupait aucune fonction directoriale, ni éditoriale, son nom n’apparaissait pas dans l’ours »[13].
Évelyne Baylet modernise le groupe de presse, qui conserve une ligne éditoriale radicale et antigaulliste[6]. Elle siège au Syndicat de la presse quotidienne régionale, dont elle est vice-présidente jusqu'en 1997.
Au fil des ans, elle prépare l'implantation de son fils à la tête de l'entreprise familiale et au sein du paysage politique local. Il sera élu à son tour à la mairie de Valence d'Agen en 1977 et à la présidence du conseil général de Tarn-et-Garonne en 1985. Enfin, il devient président-directeur général de La Dépêche en 1995. Par ailleurs, sa fille Danielle Malet-Baylet sera élue sur la liste de Dominique Baudis lors des municipales de 1983 à Toulouse[15]. Les observateurs reprochent à Évelyne Baylet l'utilisation de La Dépêche du Midi pour soutenir la carrière politique des Baylet.
En 2012, à 99 ans, elle abandonne sa dernière fonction, celle de directrice de la publication de La Dépêche du Midi, au profit de son petit-fils[16]. Elle meurt en 2014, à 101 ans[17].
1974-1985 : présidente de l'Office départemental du tourisme de Tarn-et-Garonne
1983-2004 : présidente du Syndicat mixte d’étude et d’aménagement de la Garonne[19]
Honneurs
Les Mainteneurs et Maîtres de l'Académie des Jeux Floraux ont nommé Évelyne Baylet « Maîtres ès Jeux Floraux », pour services rendus aux lettres et témoignage de son attachement aux traditions des Pays d'Oc.
En avril 2024, l’Agence de communication du Groupe Dépêche change de nom. Désormais baptisée « evelyne », ce changement rend hommage à la dirigeante qu’elle fut.