La « Mission rock » du département de Seine-Saint-Denis
L'association est issue de la « Mission rock » du département. Celle-ci a été créée en 1988-89 dans le contexte de la décentralisation et du développement de politiques publiques[1] consacrées aux musiques à l'époque toutes regroupées sous le parapluie du « rock »[2] (en réalité, toutes les musiques populaires amplifiées : soul, funk, reggae, etc.), de l'essor de collectifs et de fédérations défendant et promouvant les pratiques musicales locales. Elle a bénéficié de l'aide d'un département communiste très investi dans ces questions.
La mission développe d'emblée plusieurs projets autour des musiques jeunes : production de concerts, organisation d'un forum rock[3] ("Le Grand Zebrock"), ateliers de travail avec des groupes locaux, publication d'un fanzine (Zebrock) et d'un annuaire, ateliers pédagogiques dans les collèges et lycées[4].
L'association CHROMA/Zebrock
La structure s'autonomise juridiquement du Conseil général séquano-dionysien en 1990 sous le nom CHROMA (acronyme d'"association pour le développement de la Chanson, du ROck et des Musiques Actuelles en Seine-Saint-Denis"). Ses financements se diversifieront progressivement, avec des soutiens de structures publiques (ministères de la Culture, de l'enseignement et de la recherche, région Île-de-France, Direction régionale des Affaires culturelles, départements et municipalités de Seine-et-Marne, du Val-de-Marne, RATP…) et privées (SACEM…).
La mission puis l'association sont tôt associées au mot-valise "Zebrock" qui désigne plusieurs de ses activités. Le choix de cette image tient aux activités du département autour du bicentenaire de la Révolution française en 1989. Le Conseil général finance à cette occasion un grand concert avec la Mano Negra, et le promeut à l'aide d'affiches où figure notamment un zèbre - l'association décide de s'emparer de l'animal, pour sa forte teneur métaphorique (l'ambivalence, la fougue)[5].
Éducation
Dès sa naissance, l'association développe un projet de transmission du patrimoine des musiques actuelles dans les collèges et lycées de Seine-Saint-Denis, le dispositif "Rock au bahut", plus tard rebaptisé "Zebrock au bahut". Les activités pédagogiques de l'association se sont déclinées sous plusieurs formes au fil des années : elle s'est adaptée au programme "La culture et l'art au collège" en Seine-Saint-Denis, a proposé le parcours "Remix" associant un artiste, une classe et un répertoire musical, ou encore le dispositif "Bienvenue au bahut" destiné aux élèves étrangers arrivés en France, parrainé par Charles Aznavour[6]…)…
Création
Concerts
L'association organise depuis sa naissance des concerts en région parisienne, contribuant à la valorisation de nombreuses esthétiques musicales populaires - rock, rap[7], chanson, musiques du monde. Elle a notamment orchestré un grand concert en 1990 à Saint-Denis où figurèrent pour la première fois sur la même scène les groupes de rap NTM et IAM[8]. Elle programme depuis des années des concerts de groupes émergents dans différentes salles de musiques actuelles en région parisienne, dont Canal 93 à Bobigny, le Deux-pièces cuisine au Blanc-Mesnil, Le Plan à Ris-Orangis, la Bellevilloise, la Maroquinerie, le Cabaret sauvage ou L'International à Paris, plus récemment le café La Pêche de Montreuil…
Le tremplin "Grand Zebrock"
Le « Grand Zebrock » est à l'origine un forum consacré aux musiques actuelles en Seine-Saint-Denis, avec présence de labels, de groupes, de disquaires, d'associations, pour soutenir la scène locale. En 1999, l'association pilote le festival Rhythm'n'villes, et y adjoint un dispositif de repérage et de promotion de jeunes talents du département. L'année suivante, le festival est rebaptisé « Tremplins Zebrock », et reprend quelques années plus tard le nom de « Grand Zebrock », le forum n'étant plus organisé.
Il s'agit à l'heure actuelle d'un tremplin de musiques actuelles ouvert aux jeunes groupes d'Île-de-France. Après une première sélection, les candidats se présentent sur scène devant un jury de spécialistes et de personnalités du monde de la musique, avant une finale au printemps, qui a lieu depuis 2009 à la Maroquinerie. Les finalistes de chaque édition bénéficient d'un dispositif d'accompagnement et de formation (composition, prestation scénique, droit de la musique…).
Les finalistes se produisent par ailleurs tous les ans depuis 2004 sur la scène Zebrock (désormais également baptisée Nina Simone[9]) à la Fête de l'Humanité, qui accueille également de grandes vedettes des musiques actuelles.
Autres activités de soutien aux jeunes pratiquants
L'association a également mis en œuvre un dispositif de soutien aux pratiques musicales des adolescents : "L’atelier des groupes de musique de Seine–Saint-Denis", à partir de 2011, avec l'aide du Fonds d'expérimentation pour la jeunesse du ministère de la Culture[10]. Le dispositif s'appelle actuellement "La Belle Relève".
Elle a régulièrement organisé des colloques et rencontres mêlant universitaires et professionnels ("Journées Amplifiées"), et tissé des liens avec différentes universités (Paris III, Paris VIII, Paris XIII…), notamment à l'aide de conventions Cifre[14], pour mieux connaître et développer des connaissances à partir de ses dispositifs pédagogiques.
Annexes
Notes et références
↑Julien Naït-Bouda, "Zebrock. Pas n'importe quel zèbre", entretien avec Edgard Garcia, Longueur d'ondes, 27 février 2016, en ligne.
↑Gérôme Guibert, La production de la cultureLe cas des musiques amplifiées en France : genèse, structurations, industries, alternatives, Guichen, Éditions Mélanie Seteun, 2006, en ligne.
↑Entretien avec Edgard Garcia, Viméo, 2013 en ligne.
Stéphane Bonnéry et Manon Fénard, « La scolarisation de la musique dans l’enseignement secondaire au travers de projets partenariaux », Revue française de pédagogie, no 185, 2013, p. 35-47, en ligne.
Pauline Clech, Engagement et mobilité sociale par la culture : étude de trois configurations politiques et artistiques en banlieue rouge (1960-2014), thèse de doctorat en sociologie, sous la direction de Marco Oberti et Edmond Préteceille, Sciences Po Paris, 2015, en ligne.
Pauline Clech, « Une légitimation non-linéaire du rap en banlieue rouge depuis 1990. Analyse de la construction sociale d’une légitimité et d’une illégitimité artistique locale », Volume ! la revue des musiques populaires, no 17 (2), 2020, p. 129-146, en ligne.
Manon Fénard, Médiation culturelle et inégalités sociales de réception des oeuvres en contexte scolaire, thèse de doctorat en sciences de l'éducation, sous la direction de Stéphane Bonnéry et Patrick Rayou, Université de Paris 8, 2018, en ligne.
Karim Hammou, Marie Sonnette-Manouguian, « 40 ans de musiques hip-hop en France : (il)légitimation, institutionnalisation et patrimonialisation », in Karim Hammou, Marie Sonnette-Manouguian (dir.), 40 ans de musiques hip-hop en France, Paris, Ministère de la Culture/DEPS, 2022, p. 173-211, en ligne.`
Nathalie Montoya, Médiateurs et dispositifs de médiation culturelle. Contribution à l'établissement d'une grammaire d'action et de démocratisation de la culture, thèse de doctorat en sociologie sous la direction de Bruno Péquignot, Université Sorbonne-Nouvelle, 2009, en ligne.
Marie Richard, « “Zebrock au bahut”. Un dispositif original de découverte des musiques actuelles pour les collégiens », Diversité, no 173, 2013, p. 122-127, en ligne.