Après son baccalauréat obtenu en 1952, Walter Kasper commence des études de philosophie et de théologie à Tübingen et Munich. Il est ordonné prêtre pour le diocèse de Rottenburg-Stuttgart le et obtient son doctorat en théologie à l'université de Tübingen en 1961, avec une thèse sur « la doctrine de la Tradition sous l'École romaine ».
Prêtre et théologien
Il consacre l'essentiel de son ministère sacerdotal à l'enseignement. D'abord assistant des professeurs Leo Scheffczyk et Hans Küng (entre 1961 et 1964), il soutient sa thèse d'habilitation en 1964 sur la philosophie et la théologie de l'histoire dans la philosophie du dernier Schelling (« Philosophie und Theologie der Geschichte in der Spätphilosophie Schellings »). Il devient professeur de théologie dogmatique à la faculté théologique de Münster (de 1964 à 1970), dont il sera doyen, puis professeur de dogmatique à l'université de Tübingen (de 1970 à 1989). Il est reconnu comme un théologien marquant dès son ouvrage intitulé « Jésus, le Christ » (1974, tr. fr. 1976).
Il est secrétaire du synode extraordinaire des évêques à Rome en 1985.
Il est généralement considéré comme un théologien catholique à la fois ouvert, solide et sûr, tout étant parfois attaqué pour son modernisme[1]. D'après le professeur Gilles Routhier (qui partage ses idées), de l'Université Laval (Québec) : « Amorcée dans le sillage du concile Vatican II, l’œuvre théologique du professeur Kasper reflète bien les débats qui ont cours dans l’Église catholique depuis le concile. Tour à tour au comité de rédaction des deux grandes revues qui ont alimenté ce débat — Concilium (1970-1977) et Communio (à partir de 1983) —, le professeur Kasper a tenté de concilier la liberté du théologien et la référence au magistère, les questions et les requêtes de nos contemporains et la fidélité à la tradition. »[2]
En 1994, Walter Kasper copréside la Commission internationale du dialogue catholiques-luthériens. Il fait beaucoup pour parvenir à la signature de l'accord entre luthériens et catholiques sur la justification par la foi qui sera signé à Augsbourg le . Cette déclaration commune sur la justification est le résultat de plus de trente ans de dialogue luthériens-catholiques[4].
Frappé par la limite d'âge, il est remplacé le à la présidence du conseil pontifical par Kurt Koch, jusqu'alors évêque de Bâle. Le , comme le lui permet le code de droit canonique après 10 ans dans l'ordre des cardinaux-diacre, il opte pour l'ordre des cardinaux-prêtres, conservant pro hac vice le titre de l’Ognissanti in Via Appia Nuova.
Sa mission internationale « conduit ce baroudeur de l'œcuménisme à aller à la rencontre des responsables des Églises et des Communautés ecclésiales du monde protestant, orthodoxe et anglican »[6].
Positions
En 2000-2001, il eut un débat avec Joseph Ratzinger sur la relation entre les Églises locales et l'Église universelle[7]. À cette occasion, W. Kasper insiste sur l'existence simultanée de l'unité de l'Église et de sa diversité manifestée dans les différentes Églises locales.
Il est généralement apprécié par les milieux œcuméniques[8].
Il provoque la polémique et son exclusion de l'escorte papale prévue le lors de la visite de Benoît XVI au Royaume-Uni en déclarant dans un hebdomadaire allemand : « Lorsque vous atterrissez à l'aéroport d'Heathrow, parfois vous avez l'impression d'avoir atterri dans un pays du Tiers-Monde », en ajoutant qu'« en Angleterre, un néo-athéisme agressif s'est répandu » et dénonçant les discriminations à l'encontre des catholiques[9].
« La lettre aux Éphésiens (cf. Ep 2, 13-22) nous dit les fondements de l'œcuménisme. Le fondement est Jésus Christ, concrètement, la mort et la résurrection de Jésus Christ. Affirmant cela, la lettre nous préserve d'entrée de jeu du risque de voir l'œcuménisme glisser vers un humanisme universel qui, à son point extrême, débouche dans l'idéologie franc-maçonne : « Millions, soyez embrassée. » Le fondement d'un œcuménisme humaniste universel de ce type n'est pas Jésus Christ, mais une religion passe-partout et fade : nous avons tous un même Dieu, nous n'avons pas besoin d'Église, et on peut se passer entièrement d'énoncés de la foi.
Une telle conception, libérale et rationaliste, est le plus grand ennemi du mouvement œcuménique. Il le prive du fondement et de la motivation dont il est issu. La formule de base du Conseil œcuménique des Églises (l'Église catholique n'en est pas membre) a formulé ces fondements ; le deuxième concile du Vatican l'a reprise de façon explicite. Il y est dit : « Au mouvement œcuménique prennent part ceux qui invoquent le Dieu Trinité et confessent Jésus Christ pour Seigneur et Sauveur » (Unitatis Redintegratio n° 1). On affirme par là sans équivoque que le mouvement œcuménique repose sur le socle commun de la foi de l'Église non encore divisée des premiers siècles, sur la foi en Jésus Christ Fils de Dieu et sur la foi en Dieu Trinité. Il n'y a pas d'œcuménisme sans ces fondements bibliques[11] et dogmatiques[12]. »
— Card. Walter Kasper. Sacrement de l'unité, Eucharistie et Église, Paris, Cerf, 2005, p. 58-59.
La prière est la nourriture essentielle de la foi[13]
« Il n'y a pas de foi vivante ni de possibilité de progresser dans la foi si on ne se tourne pas vers Dieu, si l'on ne fait monter vers lui sa prière, que ce soit dans le secret, ou en communion avec une assemblée. En effet, l'acte de foi n'étant adressé qu'à Dieu seul, la prière en est l'âme et la respiration. La prière est la nourriture essentielle de la foi. Sans prière la foi manque d'air, elle étouffe. C'est pourquoi nous ne devrions jamais oublier de solliciter le don et la lumière de l'Esprit Saint dans notre prière.
Car la foi, tout comme le progrès de la foi, est un don que l'on reçoit, une grâce qui nous est faite. Les saints sont nombreux à avoir décrit le chemin de la foi. Tous leurs récits sont unanimes sur ce point : ce chemin, loin d'être une chaussée large et lisse, est étroit et rocailleux. C'est la voie de la purification et de la conversion constante, du renoncement, souvent douloureux, et du perpétuel recommencement. Ce chemin passe aussi par le désert de l'aridité intérieure, tous les grands saints en ont fait l'expérience. Tant qu'il n'a pas atteint les sommets auxquels aspire, l'homme est incapable d'un détachement suffisant et du désintéressement de l'amour, enraciné dans la foi. »
— Card. Walter Kasper. La foi au défi, Paris, Nouvelle Cité, 1989, p. 62-63.
Œuvres
Dogme et Évangile (avec René Marlé), Paris, Cerf, 1967
Renouveau de la méthode théologique, Paris, Cerf, 1968
Jésus le Christ, Paris, Cerf, 1976
Walter Kasper et Arno Schilson, Théologiens du Christ aujourd'hui, Desclée, Cerf, 1978
Le Dieu des chrétiens, Paris, Cerf, 1985
La Foi au défi, Nouvelle Cité édition, , 126 p. (ISBN978-2-8531-3190-2) - réédition : 1995.
La Théologie et l'Église, Paris, Cerf, 1990
L'espérance est possible, Paris, Parole et silence, 2002
Sacrement de l'unité, eucharistie et Eglise, Les éditions du Cerf, coll. « Documents des Eglises », , 157 p. (ISBN978-2-204-07800-9)
Serviteur de la joie : La vie de prêtre et le service sacerdotal, Les éditions du Cerf, , 158 p. (ISBN978-2-2040-8401-7)
Manuel d'œcuménisme spirituel, Paris, Nouvelle Cité, 2007
Walter Kasper (trad. de l'allemand), La Miséricorde. Notion fondamentale de l’Évangile, clé de la vie chrétienne, Nouan-le-Fuzelier, Editions des Béatitudes, coll. « Theologia », , 214 p. (ISBN978-2-84024-818-7)
Luther (trad. de l'allemand), Paris, Les éditions du Cerf, coll. « Histoire », , 106 p. (ISBN978-2-204-11652-7)
Walter Kasper (trad. de l'allemand), La Joie des chrétiens, Paris, Salvator, coll. « Forum », , 255 p. (ISBN978-2-7067-1771-0)
Notes et références
↑cf Cardinal Müller Demeurer dans la vérité du Christ (Permanere nella verità di Cristo), août 2014, qui contredit les thèses de Kasper sur les divorcés remariés et sa mise en cause de la doctrine traditionnelle du mariage chrétien
↑Il indiquera de nouveau en 2005 : « Je ne peux pas imaginer que la discussion soit close »... « C'est une question qui existe et sur laquelle on doit réfléchir pour pouvoir y répondre » et c'est « un problème pastoral constant. J'ai été évêque pendant dix ans et chaque évêque dans chaque pays occidentaux sait ce qu'est ce grave problème ». Cf.
La question de l'accès à la communion des divorcés-remariés est encore ouverte du 24 octobre 2005.
Pour un historique sur les questions de pastorale des divorcés remariés, cf.
L’Église et le divorce.