Sylviane Agacinski est la fille d’Henri Agacinski, ingénieur des Travaux publics de l'État (au Service des Mines)[2], lui-même fils d'un immigré polonais, mineur de fond, ayant quitté Potsdam en 1918[3], et de Raymonde Lejeune ; elle est la sœur de la comédienne et documentariste Sophie Agacinski.
Elle est la compagne de l'écrivain Jean-Noël Vuarnet (1945-1993) et devient journaliste à Paris Match qu'elle quitte après le limogeage d'André Théron à la tête du magazine. Elle participe à Mai 68[5].
Elle enseigne en 1972 au lycée de Soissons et au lycée Carnot de Paris[4], entre 1978 et 1990, en classes préparatoires aux écoles de commerce[2].
En 1984, elle a un fils, Daniel[6], né de sa relation avec Jacques Derrida. Cette naissance lui fait réviser sa lecture de Simone de Beauvoir et bouleverse ses conceptions théoriques[7].
En 1991, elle est affectée comme professeur agrégée à l’EHESS[4], qu'elle quitte en 2010 lors de sa retraite.
Le , elle épouse Lionel Jospin avec lequel elle vit depuis 1990[8]. Elle concède qu’elle a tout « fait dans le désordre » : « Le célibat, puis un enfant, puis un mariage avec un autre [Lionel Jospin]. »
Autres activités
Elle est membre du comité de lecture de la Comédie-française (2011-2015) et du conseil scientifique pour le projet de rénovation du Musée de l’Homme (2013-2014).
Après quatre ans consacrés à son travail de recherche principal (Métaphysique des sexes, Masculin/Féminin aux sources du christianisme), elle entame en 2005 une réflexion sur la pratique des « mères porteuses » (« Mère porteuse ? Le risque d'une nouvelle aliénation », Le Figaro du 7 mars 2005) et s'engage dans une lutte contre diverses formes de marchandisation du corps humain, dont les femmes lui semblent les premières victimes. En 2009, elle pointe dans Corps en miettes l'usage des biotechnologies dans le développement d'un « baby business » américain, peu à peu mondialisé. En 2012, dans la réédition de ce livre, elle dénonce cette partie de la gauche qui se montre prête à accepter la « société de marché » dès qu'il s'agit de la « gestation pour autrui », mais elle est en accord avec une autre partie de la gauche et plus généralement avec un féminisme social[14]. Elle milite au sein du Collectif pour le respect de la personne (CoRp)[4], « collectif pour l'abolition universelle de la maternité de substitution »[15]. Elle voit dans la gestation pour autrui « une forme inédite d'esclavage » qui « s'approprie l'usage des organes d'une femme et le fruit de cet usage »[16].
Sylviane Agacinski considère que « les femmes ne sont ni une minorité ni un groupe particulier »[4] et que la différence sexuelle divise universellement l'espèce humaine en tant qu'elle est vivante. Dans Femmes entre sexe et genre, elle critique l'idée de Judith Butler selon laquelle la distinction homme/femme est une « binarité artificielle » qui devrait laisser place à une multiplicité de genres.
Dans un essai, publié en juin 2019 et intitulé L'Homme désincarné, à propos de la procréation médicalement assistée ouverte aux couples de femmes et aux femmes seules, elle s'inquiète de l'institutionnalisation d'une filiation fondée uniquement sur la volonté et effaçant l'asymétrie des deux sexes dans la procréation, comme s'ils étaient interchangeables. Elle se demande si l'on doit tout justifier au nom « des intérêts individuels et des demandes sociétales »[17].
Dans le contexte de ces débats, en octobre 2019, une conférence sur « l'être humain à l'époque de sa reproductibilité technique » prévue à l'université Bordeaux-Montaigne est annulée à la dernière minute, à la suite de menaces émanant d'un petit groupe d'activistes « trans », qui dénoncent en Sylviane Agacinski une militante « réactionnaire, transphobe et homophobe »[18],[19], accusation qu'elle conteste[20].
Dans Face à une guerre sainte, en 2022, la réflexion sur les relations entre le politique et le religieux conduit Sylviane Agacinski à s'insurger contre « l'intolérable promotion du voilement des femmes » par le prosélytisme islamiste, pratique discriminatoire toujours associée à la « mise sous tutelle des femmes » et incompatible, selon elle, avec le principe d'égalité devant la loi.
↑Serge Raffy, Jospin : Secrets de famille, Fayard, 2001, p. 303 :
« Ses grands-parents polonais ont quitté Potsdam en 1918 pour l'Ouest. Au cours du voyage, sa grand-mère a mis au monde un petit Henri Agacinski, le père de Sylviane. Les exilés débarquent dans le nord de la France, à Douai, où le grand-père est engagé comme mineur de fond. »
↑Serge Raffy, Jospin : Secrets de famille, Fayard, 2001, pp. 304-305 :
« Sa licence en poche, elle quitte Lyon en 1967 et monte à Paris.[...]. Son compagnon, Jean-Noël Vuarnet, romancier, vient de publier au Seuil La Fiancée posthume... [...] Sylviane devient journaliste à Match. [...] Roger Thérond, jugé trop indépendant par ses employeurs de la famille Boussac, est limogé. Par solidarité avec son "parrain", Sylviane s'en va et file sur les barricades. [...] Pendant dix jours et dix nuits, Sylviane la rebelle occupe les lieux [le siège de la Société des gens de lettre], dort sur place. »
↑Laure Bereni, De la cause à la loi : Les mobilisations pour la parité politique en France (1992-2000) (thèse de doctorat), université Paris 1 Panthéon – Sorbonne, (lire en ligne).