Et s'il reste alors très influencé par la peinture maniériste tardive des Marches ainsi que par la manière caravagesque d’Orazio Gentileschi, le placement dans la cathédrale de Pesaro du grand retable de la Vierge à l'Enfant avec saint Thomas et saint Jérôme (aujourd'hui au Vatican) de Guido Reni sera pour le jeune pésarais un événement décisif dans son développement artistique.
Son éducation se complètera par des éléments naturalistes qui, à partir de 1640, s’ajoutant aux connaissances classiques, celle-ci transforme alors Cantarini en un "petit-maître » d’une très haute sensibilité culturelle et stylistique.
Carlo Cesare Malvasia rapporte encore (II, p. 374) qu'initialement Cantarini prétendant "... faible et scolaire ... trop humble, et docile, et des pâtes les mieux composées et les plus maniables du monde", eut caché sa capacité et à son professeur et à ses camarades, mais qui, avec le temps et se sentant plus sûr de lui, changea d'attitude. Il devint extrêmement critique de son maître, et en même temps, exprima des jugements démolissants le travail du Dominiquin et Albani. Telle était sa présomption qu'en l'absence du maître Reni, il osa même corriger le travail de ce dernier devant les autres élèves. De plus, des difficultés surgirent concernant la réalisation de gravures de Cantarini d'après les dessins de Reni.
Ses œuvres les plus significatives furent celles liées à la période de quatre années qu’il passa à Bologne, citons à ce titre : l’Immaculée avec Saints, La sainte Famille, Le repos en Égypte, La Transfiguration et Loth avec ses filles ;
Finalement, après une série d'épisodes désagréables où l’orgueil infâme de Cantarini et sa langue débridée ont aliéné le maître et tout l’atelier, Cantarini abandonna l'étude du Guide (vers 1635-1637, selon Emiliani[2]).
D'un document toujours rapporté par Emiliani, il ressort que Cantarini est retourné à Pesaro, au moins pour une courte période, à l'occasion du mariage de sa sœur, en 1639.
Dans les premières années de la cinquième décennie, Cantarini a très probablement vécu à Rome où il semble s’être intéressé avec beaucoup d'application à la sculpture antique et aux décorations murales de Raphaël.
Il est alors en contact avec la variante néo-vénitienne du classicisme, présente dans l'entourage des Barberini[3].
Suivirent une série de peintures parmi lesquelles : le Miracle de l’infirme et la Salomè qui reçoit la tête du Baptiste exposée à Cesena en 2010.
Juste après de la mort de Guido Reni en 1642, Simone Cantarini retourne à Bologne où son langage devient de plus en plus naturaliste.
Après 1642, la situation devient plus favorable pour l'activité d'autres maîtres. Cantarini ouvre son propre atelier dans une maison appartenant à la famille patricienne Zambeccari où il poursuivra son activité avec profit jusqu’à sa fin prématurée.
En effet, il meurt à Vérone à l’âge de seulement 36 ans.
Le Malvasia raconte les événements des derniers mois de la vie de Cantarini : appelé à Mantoue pour faire le portrait du duc, il se conduisit manifestement mal, critiqua les tableaux de la collection ducale et surtout les œuvres de Giulio Romano; De plus, l’exécution du portrait s’éternisait au point que le duc lui-même "le moquant se mit à le conseiller de quitter l’entreprise", qui fut finalement effectivement confiée à un autre peintre. L’humiliation affligea tellement Cantarini qu’il en tomba malade; son médecin lui conseilla de changer d’air en se rendant à Vérone, et il y mourut peu après, le 15 oct. 1648, mais les soupçons selon lesquels il aurait été empoisonné par un autre peintre de la cour de Mantoue, toujours selon Malvasia ne manquent pas non plus.
Simone Cantarini fut sans discussion le meilleur élève de Guido Reni et le seul peintre de son entourage capable de formuler un style très personnel : son riche « pictorialisme", ses couleurs légèrement dégradées et les nouvelles inflexions dans les poses des personnages contribuèrent à introduire une des plus délicates et intimes manières de peindre au cours de ces dernières décennies du XVIIe siècle.
Son influence est perceptible notamment dans l'œuvre de son élève doué Lorenzo Pasinelli, et chez le jeune Donato Creti.
La Vierge de la Ceinture, c. 1640.
Madone à l’Enfant avec saint Thomas de Villeneuve, entre 1635 et 1648.
Le Couronnement de la Vierge avec saints, entre 1642 et 1647.
Œuvres et Catalogues
C’est certainement la fulgurance qui caractérise Simone Cantarini qui eut, dans sa courte vie, et contrairement à ce que laisse sous-entendre Malvasia, une production exceptionnellement abondante.
Son aisance et sa richesse inventives sont particulièrement évidentes dans le vaste corpus de dessins[4].
La Naissance de la Vierge, sanguine. H. 0,268 ; L. 0,199 m. Verso : Études de jambes, de femmes et d'un enfant à la sanguine. Cette composition est typique des dessins de premières pensées de Simone Cantarini aux lignes puissantes et aux formes adroitement modulées par le jeu différencié des hachures. La beauté gracieuse et l'agencement général de la composition permettent de penser que le dessin fut exécuté après le séjour à Rome de l'artiste, soit au début des années 1640, époque pendant laquelle il réalise des dessins aux caractéristiques semblables[10].
Six études de femmes, deux enfants, sanguine. H. 0,184 ; L. 0,222 m. Cette feuille date probablement également des années 1640, années pendant lesquelles l'artiste peint de nombreuses Saintes Familles. Il met l'accent sur le caractère intimiste du sujet; suggéré par l'expression de la tendresse maternelle, qui atteste sa dette envers les œuvres de Raphaël découvertes au cours de son séjour à Rome[11].
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↑Mina Gregori (trad. de l'italien), Le Musée des Offices et le Palais Pitti : La Peinture à Florence, Paris, Editions Place des Victoires, , 685 p. (ISBN2-84459-006-3), p. 359
↑Brugerolles, Emmanuelle, van Tuyll, Carel, Le Dessin à Bologne, Carrache, Guerchin, Dominiquin …, Chefs-d’œuvre des Beaux-Arts de Paris, Paris, Beaux-Arts édition, 2019, p. 91-93, Cat. 21.
↑Brugerolles, Emmanuelle, van Tuyll, Carel, Le Dessin à Bologne, Carrache, Guerchin, Dominiquin …, Chefs-d’œuvre des Beaux-Arts de Paris, Paris, Beaux-Arts édition, 2019, p. 91-95, Cat. 22.
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