Le , il envoie à Henri Lefebvre[6], dont il a apprécié son récent ouvrage La Somme et le reste et le plus ancien Critique de la vie quotidienne, l'essai Fragments pour une poétique (suivis de quatre poèmes à parfaire) qui le met en rapport, via Guy Debord, en 1961, avec l'Internationale situationniste qu'il connaît par Attila Kotányi à Bruxelles[7]. De 1961 à sa démission de son poste de professeur en 1970, il invite la jeunesse à abandonner les valeurs héroïques pour l'hédonismeépicurien radical résumé dans le mot d'ordre : « Vivre sans temps mort, jouir sans entraves. ». Il contribue à la revue éponyme du groupe dont douze numéros ont été publiés, de 1958 à 1969[8].
Le Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations, paru en 1967, s'inscrit dans le projet des situationnistes. Il est l'auteur de la chanson La vie s'écoule, la vie s'enfuit, en mai 68, de Francis Lemonnier, lors de l'occupation par le Comité pour le Maintien des Occupations (CMDO) de l'Institut Pédagogique National[9].
En 1970, il présente sa démission à l'Internationale situationniste en répondant, par une lettre[10] datée du , à la Déclaration du [11] signée par René Riesel, Guy Debord et René Viénet. Ces deux derniers signent le de la même année un communiqué de l'Internationale situationniste à propos de Vaneigem[12].
Vaneigem est également l'auteur en 1974 d'un mode d'emploi de la révolution, publié sous le pseudonyme de Ratgeb, De la grève sauvage à l'autogestion généralisée[13].
Dans Le Livre des plaisirs, paru en 1979, il présente une critique de la société marchande.
Carrière
Médiéviste[14], il a travaillé sur les hérésies[15] et la résistance au christianisme, dans lesquelles il voit « les signes d'une civilisation à venir, fondée non plus sur l'aliénation du travail, le pouvoir et le profit, mais sur la créativité, la jouissance et la gratuité. »
L'œuvre de Vaneigem se divise en deux tendances. L'une, théorique, trouve sa justification dans l'idée que « la révolution n'est plus dans le refus de la survie, mais dans une jouissance de soi que tout conjure à interdire[16] ». L'autre, faisant appel à une érudition de chercheur, tente de démontrer que l'esprit de la liberté et de la jouissance se rencontre dès le Moyen Âge central dans le mouvement du Libre-Esprit, qu'il distingue, dans un premier temps, des hérésies, dans lesquelles il voit « des filiales de l'orthodoxie » (Le Mouvement du Libre-Esprit, 1986), avant de revenir sur cette opposition dans son livre sur « les hérésies, des origines au XVIIIe siècle », au titre évocateur de La Résistance au christianisme, publié en 1993.
Positions
En 2003, il critique la loi Gayssot et la « censure » de thèses négationnistes, dans son livre, préfacé par Robert Ménard, Rien n’est sacré, tout peut se dire. Réflexions sur la liberté d'expression, auquel Bruno Gaccio fait référence dans son livre d'entretien avec Dieudonné, Peut-on tout dire (2010). En 2005, Michel Onfray lui dédie son Traité d'athéologie.
De 2008 à 2010, il collabore au journal Siné Hebdo[17], devenu Siné Mensuel[18], de son ami Siné après son licenciement de Charlie Hebdo. En 2014, il publie un livre d'entretiens avec Gérard Berréby, Rien n'est fini, tout commence, dans lequel il revient sur son parcours[19]. En 2019 et 2020, il publie quelques articles sur Le Média[20] puis sur le site Blast fondé par Denis Robert. En 2022, il publie Rien ne résiste à la joie de vivre. Durant la pandémie de Covid-19, en 2021, il qualifie le « crime contre l’humanité d’acte fondateur d'un système économique qui exploite l’homme et la nature » et appelle à « laisser pourrir ce qui pourrit et préparer les vendanges », faisant référence à un principe alchimique[21].
Vie privée
Il partage son existence entre sa maison de Flobecq en Belgique, non loin de sa ville natale de Lessines, et Tonnerre dans l'Yonne[22]. Un entretien par correspondance publié fin 2020 mentionne qu'il passe sa retraite sous le soleil catalan près de Barcelone[23].
Raoul Vaneigem a eu quatre enfants: Ariane, née en 1961 de son union avec sa compagne et épouse Thérèse Dubrule, Ariel et Tristan, nés en 1977 et 1979[24]et enfin, Chiara, née en 1996[réf. souhaitée].
Œuvre
Œuvre personnelle
Isidore Ducasse et le comte de Lautréamont dans les Poésies, 1958, réédité par Belladona, Barcelone, 1978, plaquette brochée de 16 pp[25]
Traité de savoir-vivre à l’usage des jeunes générations[1], 1967 ; rééd. Folio, 1992
De la grève sauvage à l'autogestion généralisée, sous le pseudonyme de Ratgeb[26], Union générale d'éditions 10/18, Paris, 1974
Le Livre des plaisirs, éd. Encre, 1979 ; rééd. Labor, Bruxelles 1993 avec nouvelle préface de l'auteur, lecture de Pol Charles et 8 photographies
L'Île aux délices, sous le pseudonyme d’Anne de Launay, éditions du Bébé noir, collection «Plaisir», 1979, 192 p.
La vie secrète d’Eugénie Grandet, sous le pseudonyme de Julienne de Cherisy, Éditions de la Brigandine, 1981
Le Mouvement du libre-esprit. Généralités et témoignages sur les affleurements de la vie à la surface du Moyen Âge, de la Renaissance et, incidemment, de notre époque, Ramsay, 1986 ; rééd. L'Or des fous, 2005 avec préface de l'auteur et notice et bibliographie de Shigenobu Gonzalvez
Banalités de base, réédition de l'article publié en deux parties dans les numéros 7 et 8 de la revue Internationale situationniste, réédition Ludd éditions, Paris 1995 puis Verticales, collection Minimales, 2004 (ISBN2-84335-192-8)
Modestes propositions aux grévistes, Verticales, Minimales, 2004
Voyage à Oarystis, roman, dessins de Giampiero Caiti, Estuaire, coll. Carnets littéraires, Tournai, 2005 (ISBN2-87443-007-2)
Éloge de la paresse affinée, publié dans le recueil de textes La Volonté de paresse, L'or des fous, éditeur 2006
Pour une internationale du genre humain, publié simultanément en français et en persan, L'or des fous, éditeur, 2006
Entre le deuil du monde et la joie de vivre (les situationnistes et la mutation des comportements), Verticales | phase deux, 2008, 230 p. (ISBN978-2-07-0774760)
Ni pardon ni talion. La question de l'impunité dans les crimes contre l'humanité[29], La Découverte, coll. Sur le vif, 2009
Lettre à mes enfants et aux enfants du monde à venir, Le Cherche Midi, 2011
Les Cueilleurs de mots, album jeunesse illustré par Gabriel Lefebvre, Le Renard découvert, 2012, rééd. L'Atlante, Neuilly, 2014 72 p. (ISBN978-2-350-30303-1)
Histoire désinvolte du surréalisme, initialement publiée sous le pseudonyme de Jules-François Dupuis aux éditions Paul Vermont, Collection rappel au désordre en 1977, puis réédité aux éditions L'Instant en 1988; édition revue et corrigée, Libertalia,
Pourquoi je ne vote pas et autres inédits, Cactus inébranlable éditions/P'tits Cactus, Amougies, 2017, 84 p. (ISBN978-2-930659-65-7)
Propos de table, Dialogue entre la vie et le corps, Le Cherche Midi, 2018[33]
Contribution à l'émergence de territoires libérés de l'emprise étatique et marchande. Réflexion sur l’autogestion de la vie quotidienne, éditions Payot Rivages, 2018[34]
Appel à la vie contre la tyrannie étatique et marchande, Libertalia, mai 2019[35]
L'insurrection de la vie quotidienne, textes et entretiens, Éditions Grévis, Caen, juin 2020, 192 p. (ISBN978-2-9568078-2-7)
Retour à la base, Cactus inébranlable éditions, Amougies, février 2021
Rien ne résiste à la joie de vivre, Libres propos sur la liberté souveraine, éditions Grévis, 2022, 64 p.
Adages, accompagnés de collages de André Stas, collection La Petite Pierre, La Pierre d'Alun, Bruxelles, 2022, 64 p. (ISBN978-2-87429-123-4)
Retour à la vie, L'Insomniaque, oct. 2022, 64 p.
Du Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations à la nouvelle insurrection mondiale, Le Cherche-midi, Paris, oct. 2023
Acratie et autogestion, vers une société en rupture avec tous les modes de gouvernements oppressifs, éditions Acratie, La Bussière (Vienne), 2024, 70 p. (ISBN978-2-909899-76-3)
Abolir la prédation, redevenir humain. Appel à la création mondiale de collectivités en lutte pour une vie humaine libre et authentique, Éditions Grévis, Caen, 2024, 24 p. (ISBN978-2-492-66516-5)
En collaboration
Raoul Vaneigem et Jacques Serena, Les péchés capitaux Tome 1 - La Paresse, Editions du Centre Georges Pompidou-Ircam, 1999
Le retour à Nobodyland (1973) in Anthologie du cinéma invisible de Christian Janicot, Éditions Jean-Michel Place, 1995
Raoul Vaneigem, Morgan Sportès, Keith Sanborn, Yann Beauvais, Patrick Marcolini, Pierre-Ulysse Barranque, Laurent Jarfer, IN SITUS. Théorie, Spectacle et Cinéma, chez Guy Debord et Raoul Vaneigem, Gruppen Éditions[38], 2013 (ISBN978-2-919103-08-9)
Préfaces, postfaces, articles
Terrorisme ou révolution, en préambule à Pour la révolution, choix de textes d'Ernest Cœurderoy, Éditions Champ Libre, Classiques de la subversion 2/3, Paris, 1972
En deçà du langage, préface à la réédition de Sur J.-K. Huysmans de Léon Bloy, Éditions Complexe, collection Le regard littéraire, Bruxelles, 1986
Préface, sous le pseudonyme de Michel Thorgal, à Récits de l’Ardenne de Marcellin Lagarde, Labor-Espace-Nord, Bruxelles, 1992
Déclaration des droits et devoirs de la personne, postface à André Bercoff, Lettre ouverte à ceux qui ne sont rien et qui veulent être tout, Albin Michel, collection «Lettre ouverte», 1992 (ISBN978-2226060754)
Posface à Alain Mamou-Mani, Au-delà du profit. Comment réconcilier Woodstock et Wall Street, Albin Michel, Paris, 1995
Postface-lecture à L'Ordre du jour de Jean-Luc Outers, Éditions Labor-Espace-Nord, Bruxelles, 1996
Vous qui entrez, laissez tout désespoir, postface à Isidore Ducasse - Lautréamont, Poésies, Éditions Mille et une nuits, novembre 1995 (ISBN2-84205-012-6)
Préface à Contre le travail des enfants, de Philippe Godard, Éditions Desmaret, collection «Comportement», Strasbourg, 2001
Une œuvre au futur, préface à Charles Fourier, Des harmonies polygames en amour, Rivages/poche, Paris, 2003
Les vérités qui se cherchent sont multiples, préface à Sergio Ghirardi, Nous n'avons pas peur des ruines. Les situationnistes et notre temps, L'insomniaque, Montreuil, 2003
De la souveraineté et du mépris de l'amour, préface à André Le Chapelain, Comment maintenir l'amour, Rivages/poche, Paris, 2004
Préface «Vive la Commune!» à La Commune d’Oaxaca - Chroniques et considérations de Georges Lapierre, éditions Rue des Cascades, 2008, réédition 2023 éditions Éclat, collection Poche, 320 p. (ISBN978-2-84162-667-0)
Postface à Cette soif inassouvie d’une vie à changer, De la «Grève du siècle» à l'Estro armonico de Frédéric Thomas & Clairette Schock, Éditions du Cerisier, Cuesmes (Mons), coll. "Place publique", 2023.
Chanson
La vie s'écoule, la vie s'enfuit, paroles de Raoul Vaneigem, musique de Francis Lemonnier, chantée et enregistrée par Jacques Marchais en 1968[50], René Binamé, Gilles Servat, Fanchon Daemers, Renaud en 2022, etc[51].
Entretiens
Raoul Vaneigem, refus et passions, entretien «écrit» avec François Bott, publié dans Le Monde du
Incliner l'univers en sa faveur, entretien «écrit» avec Nadine Sautel, publié dans le numéro 436 du Magazine littéraire de
↑Rien n'est fini, tout commence, livre d'entretiens avec Gérard Berréby, Allia, 2014, p. 93-96
↑La réédition de la collection complète des douze numéros d'Internationale situationniste a été publiée chez Van Gennep à Amsterdam en 1970, puis en 1975 chez Champ libre et reprise en 1997 par la librairie Arthème Fayard.
↑S'inspirant des grandes grèves de l'hiver 1961 en Belgique, ce titre compte au nombre de ses interprètes René Binamé et Fanchon Daemers, la version la plus connue étant interprétée par Jacques Marchais (cf. Rien n'est fini, tout commence, livre d'entretiens avec Gérard Berréby, Allia, 2014, p. 277-279).
↑Rien n'est fini, tout commence, Allia, 2014, pp. 9-10 et 382.
↑Désobéissance civile, entretien avec Béatrice Delvaux et Catherine Makereelet publié par Le Soir de Bruxelles le 14 novembre 2020.
↑Éléments biographiques in Le Livre des Plaisirs, réédition Éditions Labor, Espace-Nord, 1993, p. 199
↑article paru initialement en décembre 1958 dans le numéro 151 la revue internationale bruxelloise Synthèses, reproduit pp. 84-87 in Gérard Berréby et Raoul Vaneigem, Rien n’est fini, tout commence, Éditions Allia, Paris, 2014
↑Gérard Berréby & Raoul Vaneigem, Rien n'est fini, tout recommence, Éditions Allia, Paris, 2014, p. 362
↑accompagné d’un second texte Un changement radical est à notre portée, réponses, inédites en français, à un questionnaire rédigé l'été 2007 par Javier Urdanibia évoquant l'Internationale situationniste, la religion, la philosophie et les expériences en terre mexicaine
↑Diane Lisarelli, « Rien n'est fini, tout commence, passionnant dialogue au long cours entre Raoul Vaneigem et Gérard Berréby », Les Inrockuptibles, 24 octobre 2014, lire en ligne.
↑Sébastien Lapaque, « Ombres et lumières de Raoul Vaneigem », Le Figaro, 11 décembre 2014, lire en ligne.
↑Laurent Lemire, « Ce qui est utile et agréable est systématiquement mis à mal », L'Obs, 6 mai 2018, lire en ligne.
↑Mathieu Dejean, « La critique de Raoul Vaneigem au mouvement dit des “casseurs” », Les Inrockuptibles, 30 octobre 2018, lire en ligne.