Ayant succédé en 1973 au championnat international des marques (en vigueur de 1970 à 1972), le championnat du monde des rallyes se dispute sur une douzaine de manches, dont les plus célèbres épreuves routières internationales, telles le Rallye Monte-Carlo, le Safari ou le RAC Rally. Parallèlement au championnat des constructeurs, la Commission Sportive Internationale (CSI) a depuis 1979 créé un véritable championnat des pilotes qui fait suite à la controversée Coupe des conducteurs instaurée en 1977, dont le calendrier incluait des épreuves de second plan. Pour la saison 1980, la CSI a exclu les manches suédoise et finlandaise du championnat constructeurs, ces deux épreuves comptant uniquement pour le classement des pilotes. Huit des douze manches du calendrier se disputent en Europe, deux en Afrique, une en Amérique du Sud et une en Océanie. Elles sont réservées aux voitures des catégories suivantes :
Si Ford, champion du monde 1979, a mis son programme rallyes en sommeil cette saison, les épreuves mondiales 1980 présentent tout de même un plateau très fourni, avec l’implication de Fiat, Datsun et Mercedes-Benz dans les épreuves sur terre et la présence d’Opel, Talbot et Toyota dans les manches européennes du championnat. Avant la manche argentine, Fiat est en tête du classement provisoire, la 131 Abarth s’étant imposée au Rallye Monte-Carlo et au Portugal aux mains du pilote allemand Walter Röhrl, bien parti pour remporter le titre pilotes.
Le Rallye Codasur (pour Confederación Deportiva Automovilística Sudamericana) fut créé en 1979 dans le cadre du championnat d’Amérique du Sud. L’épreuve inaugurale, disputée presque exclusivement sur terre, fut remportée par Jean Guichet au volant d’une Peugeot 504, à l’issue d’une course très difficile (seulement sept équipages à l’arrivée, dont deux hors délais, sur soixante-et-onze engagés[2]). Pour sa deuxième édition, le rallye est intégré au championnat du monde, la remarquable organisation de l’épreuve et la qualité de son parcours ayant grandement contribué à cette promotion. Comme l’année précédente, l’épreuve se dispute dans le nord-ouest du pays, autour de la ville de San Miguel de Tucumán[3].
distance : de 3521 km à 3655 km (selon ville de départ), dont 1223,7 km sur 14 épreuves spéciales
surface : terre et rocaille, asphalte (minoritaire)
Parcours divisé en un parcours de concentration et quatre étapes[4]
Parcours de concentration
quatre parcours possibles, de 1019 à 1411 km, du 19 au [5]
Itinéraire uruguayen (1149 km) : Fray Bentos - San Miguel de Tucumán
Itinéraire paraguayen (1099 km) : Asunción - San Miguel de Tucumán
Itinéraire brésilien (1158 km) : Uruguaiana - San Miguel de Tucumán
Itinéraire argentin (1231 km) : Buenos Aires - San Miguel de Tucumán
Première étape
San Miguel de Tucumán - San Pablo - San Miguel de Tucumán, le
2 épreuves spéciales, 66,6 km
Deuxième étape
San Miguel de Tucumán - Salta - San Miguel de Tucumán, du 21 au
4 épreuves spéciales, 408,5 km
Troisième étape
San Miguel de Tucumán - Andalgalá - San Miguel de Tucumán, le
4 épreuves spéciales, 397,8 km
Quatrième étape
San Miguel de Tucumán - Frías - San Miguel de Tucumán, le
4 épreuves spéciales, 350,8 km
Les forces en présence
Fiat
Le constructeur turinois a soigneusement préparé sa venue en Argentine, engageant quatre 131 Abarth groupe 4 en configuration terre, avec carénage inférieur type 'Safari'. Ainsi équipées, ces voitures accusent 1070 kg sur la balance. Leur moteur deux litres seize soupapes à injection Kugelfischer développe 230 chevaux à 8000 tr/min. Les suspensions permettent le montage de ressorts courts (pour les sections asphaltées, en début d'épreuve) ou longs (pour la piste). Les Fiat utilisent des pneus Pirelli, le manufacturier italien proposant quatre types de gommes, de tendres à très dures[4]. Très populaire dans son pays, le pilote de F1 Carlos Reutemann s'est vu proposer la somme de trois cent mille dollars pour participer à l'épreuve au côté de Walter Röhrl, Markku Alén et Attilio Bettega, son engagement assurant de belles retombées commerciales pour la marque[6]. Une cinquième 131 Abarth est au départ, louée au pilote local Francisco Mayorga : il s'agit du mulet utilisé les semaines précédentes lors des reconnaissances.
Datsun
La marque japonaise aligne deux berlines 160J groupe 2, semblables à celles utilisées lors du dernier Safari (1150 kg, moteur quatre cylindres de deux litres de cylindrée à simple arbre à cames, 190 chevaux). Elles sont confiées à Shekhar Mehta et Harry Källström et utilisent des pneumatiques du manufacturier Dunlop qui, s'il fournit une gamme étendue de pneus M+S (prévus pour la terre), n'a pas mis à disposition de gommes 'Racing' pour l'équipe, ce qui risque de constituer un sévère handicap lors de la première étape[4].
Mercedes-Benz
La firme de Stuttgart aligne trois coupés 500 SLC, récemment homologués en groupe 2, pour Björn Waldegård, Hannu Mikkola et Jorge Recalde, ainsi qu'un coupé 280 CE, également en catégorie tourisme spécial, pour Andrew Cowan. Avec leur moteur V8 de cinq litres de cylindrée développant 330 chevaux, les 500 SLC, équipées d'une boîte de vitesses automatique, sont de loin les voitures les plus puissantes du plateau et peuvent atteindre 230 km/h, mais leur poids élevé (1350 kg) et leur manque d'agilité les pénalise sur les portions sinueuses. Le coupé 280 CE, à boîte mécanique, est un peu moins lourd (environ 1300 kg), mais son moteur six cylindres de 2 800 cm3 ne développe que 220 chevaux. Les Mercedes disposent de toute la gamme de pneus Dunlop, Mikkola ayant en outre la possibilité d'opter pour des gommes Pirelli[4].
Peugeot
Le constructeur sochalien a engagé trois coupés 504 V6 groupe 4 (1350 kg, 2 700 cm3, 230 chevaux à 8000 tr/min) pour Timo Mäkinen, Jean-Claude Lefebvre et le pilote local Carlos Garro. Bien moins rapides que les Fiat et Mercedes, elles ne peuvent viser la victoire sur les pistes argentines. Elles disposent de pneus Michelin. La marque est également représentée par l’importateur local, avec deux berlines 504 groupe 2 confiées à Nestor García Veiga et Francisco Alcuaz, de nombreux pilotes privés utilisant également des voitures de ce type[4].
Déroulement de la course
Parcours de concentration
Les 89 concurrents s'élancent d'une des quatre villes de départ (suivant l'itinéraire choisi) le samedi . Les différents parcours ne présentent pas de difficulté majeure et seul un équipage ne parviendra pas à rallier le parc fermé de San Miguel de Tucumán le lendemain[3].
Première étape
La première étape a lieu la journée du lundi. Elle se déroule intégralement sur asphalte, dans le secteur de San Pablo, parcouru à deux reprises. Très sinueux, ce circuit routier favorise les Fiat, plus agiles que les lourds coupés Mercedes, et Walter Röhrl se montre le plus rapide lors de chacun des passages, à près de 85 km/h de moyenne sur l'ensemble du parcours. Au terme de cette courte première étape, il devance d'environ une minute ses coéquipiers Markku Alén, Carlos Reutemann et Attilio Bettega ; le classement déterminant l'ordre de départ le lendemain, le pilote allemand aura donc l'avantage de s'élancer le premier sur les pistes, évitant ainsi la poussière soulevée par les autres concurrents. Derrière les quatre Fiat officielles viennent les Mercedes, Jorge Recalde précédant Hannu Mikkola et Andrew Cowan, alors que leur coéquipier Björn Waldegård a déjà perdu toute chance de bien figurer après avoir concédé énormément de temps à cause de la perte d'une roue et plongé à la vingt-sixième place du classement. Les Peugeot officielles, emmenées par Jean-Claude Lefebvre comptent déjà six à huit minutes de retard sur les Fiat, mais la situation est plus critique pour les deux Datsun d'usine de Shekhar Mehta et Harry Källström, handicapées par leurs pneus 'terre', et qui lors de la deuxième étape seront probablement gênées dans la poussière par des concurrents plus lents placés devant elles. Déjà seize équipages ont renoncé au terme de cette courte première étape.
Les soixante-treize équipages rescapés repartent de Tucumán dans la nuit du lundi au mardi, en direction du nord. Ouvrant la route, Röhrl bénéficie de conditions idéales et creuse l'écart sur ses coéquipiers. Reutemann va d'ailleurs perdre deux places à l'issue d'une légère sortie de route, sans conséquence pour sa voiture. Les Fiat sont nettement les plus rapides, seul Mikkola parvenant à ne pas trop se faire distancer. Cependant, peu avant Salta, Alén est fortement retardé par des problèmes d'arrivée d'essence. Plus d'un quart d'heure est perdu avant que le problème ne soit réglé, le pilote finlandais reculant de la seconde à la sixième place. La dernière partie du parcours comprend de nombreux passages de gués, un problème pour les Fiat 131 Abarth qui vont toutes avoir des problèmes d'allumage à cause d'incursions d'eau dans le compartiment moteur. Bien qu'effectuant les trente derniers kilomètres sur trois cylindres, Röhrl réalise une nouvelle fois le meilleur temps et termine l'étape avec près de neuf minutes d'avance sur son coéquipier Bettega. Mikkola a profité des ennuis d'Alén pour s'emparer de la troisième place, devant son compatriote. La difficile fin d'étape a été fatale à de nombreux concurrents, seuls quarante restant encore en course. Mercedes a perdu deux voitures, Waldegard ayant renoncé sur bris de transmission tandis que Recalde a terminé hors délai après deux crevaisons. Alors qu'il avait regagné plusieurs positions, Timo Mäkinen n'a pu rallier Tucumán, son coupé 504 ayant perdu une roue, tandis que Källström a été stoppé par le bris de la boîte de vitesses de sa Datsun.
L'étape du mercredi se déroule à l'ouest de Tucumán, dans une région montagneuse. Peu après le départ, Cowan est contraint à l'abandon pour un problème de joint de culasse. Si Röhrl s'est encore montré le plus rapide dans le premier secteur, malgré de nouveaux problèmes d'allumage, Mikkola le suit de près et reprend plus de huit minutes à Bettega (retardé tout comme son coéquipier Alén par des crevaisons), accédant ainsi à la seconde place du classement général. Röhrl domine encore la spéciale suivante, avalée à plus de 145 km/h de moyenne, mais l'alerte est sévère dans le clan Fiat, Bettega et Alén abandonnant tous deux, carter éclaté à la réception d'une bosse. Röhrl compte alors plus d'un quart d'heure d’avance sur Mikkola et plus d'une demi-heure sur Reutemann. Bien remontés après leurs ennuis de la veille, Mehta et Lefebvre occupent désormais les quatrième et cinquième places. Les écarts étant très importants, les concurrents vont dès lors nettement lever le pied, et les positions n'évolueront plus jusqu'au soir. Au terme de l'étape, seuls vingt-sept équipages restent en course.
Les rescapés repartent de San Miguel de Tucumán le jeudi matin, en direction du sud. Malgré son avance très confortable, Röhrl connaît quelques alertes sur le parcours, perdant tout d'abord du temps à cause d'un roulement défectueux, avant de devoir composer avec un moteur ayant perdu une partie de sa puissance. Mikkola ne relâche pas la pression et va se montrer le plus rapide sur trois des quatre secteurs chronométrés. Röhrl va toutefois parvenir à contenir la remontée de son adversaire, et conserve plus d’un quart d'heure de marge sur la Mercedes à l'arrivée. Sa victoire lui permet de conforter sa première place au championnat du monde des pilotes, Fiat prenant une très sérieuse option sur le titre constructeurs. Habitué des circuits de vitesse, Reutemann a fait preuve d'un bel éclectisme pour sa première participation à un rallye mondial, s'octroyant la troisième place devant Mehta et Lefebvre.
Classements intermédiaires
Classements intermédiaires des pilotes après chaque épreuve spéciale[4]
Classements des championnats à l'issue de la course
Constructeurs
attribution des points : 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1 respectivement aux dix premières marques de chaque épreuve, additionnés de 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1 respectivement aux huit premières de chaque groupe (seule la voiture la mieux classée de chaque constructeur marque des points). Les points de groupe ne sont attribués qu'aux concurrents ayant terminé dans les dix premiers au classement général.
seuls les sept meilleurs résultats (sur dix épreuves) sont retenus pour le décompte final des points.