Le psaume 55 (54 selon la numérotation grecque) est une complainte dans laquelle l'auteur se désole, car il est entouré d'ennemis, et l'un de ses plus proches amis l'a trahi.
Contexte
Le psaume 55 est similaire au Psaume 41[1], en particulier le verset 41:9: "Celui-là même avec qui j’étais en paix, qui avait ma confiance et qui mangeait mon pain, lève le talon contre moi." (traduction de Louis Segond).
L'introduction identifie le psaume comme un maskil (une instruction) et l'associe à David[2]. L'auteur, anonyme, est peut-être un Israélite résidant dans une ville étrangère, et le faux ami pourrait être un autre Israélite qui y vit également. Cette interprétation est particulièrement plausible si la deuxième partie du verset 24 est traduit par "les hommes des idoles et figurines", comme suggéré par Hermann Gunkel, plutôt que "les hommes de sang et de fraude."[3].
Saint Jérôme, dans la Vulgate, intitule le psaume "Vox Christi adversus magnatos Judaeorum et Judam traditorem", qui peut être traduit "La voix du Christ contre les chefs des Juifs et le traître Judas"[4].
Texte
Le psaume se divise en trois sections. Dans un commentaire qu'il écrit en 1901, Alexander Kirkpatrick nomme les thèmes des sections: du désespoir, de l'indignation et de la confiance, respectivement[4]. La première section (versets 1-8) commence par un appel désespéré à Dieu pour la délivrance (versets 1-3), puis le psalmiste décrit son angoisse et son désir de paix[5]. Les versets 9 à 15 sont une véhémente dénonciation des ennemis de l'auteur, en particulier un individu, décrit comme "mon égal" et "mon ami", qui s'est retourné contre le psalmiste (versets 12-14)[6]. Cette deuxième section se termine par le souhait du narrateur que ses ennemis soient engloutis vivants dans le Shéol, une possible allusion au sort de Coré[7]. La dernière section (versets 16-23) est une méditation confiante sur la justice de Dieu. Le psalmiste est sûr que Dieu va le sauver et détruire les méchants[8].
Ce n’est pas un ennemi qui m’outrage, je le supporterais ; ce n’est pas mon adversaire qui s’élève contre moi, je me cacherais devant lui.
Quoniam si inimicus meus maledixisset mihi, sustinuissem utique. Et si is qui oderat me super me magna locutus fuisset, abscondissem me forsitan ab eo.
Dieu entendra, et il les humiliera, lui qui de toute éternité est assis sur son trône ; car il n’y a point en eux de changement, et ils ne craignent point Dieu.
Exaudiet Deus, et humiliabit illos, qui est ante saecula. Non enim est illis commutatio, et non timuerunt Deum.
21
שָׁלַח יָדָיו, בִּשְׁלֹמָיו; חִלֵּל בְּרִיתוֹ.
Il porte la main sur ceux qui étaient en paix avec lui, il viole son alliance ;
Extendit manum suam in retribuendo; contaminaverunt testamentum ejus:
Et toi, ô Dieu ! tu les feras descendre au fond de la fosse ; les hommes de sang et de fraude n’atteindront pas la moitié de leurs jours. C’est en toi que je me confie.
Tu vero, Deus, deduces eos in puteum interitus. Viri sanguinum et dolosi non dimidiabunt dies suos; ego autem sperabo in te, Domine.
Analyse
Il est difficile de savoir si le psaume a été écrit par un ou plusieurs auteurs[12]. Certains chercheurs suggèrent que les versets 12 à 14, 20-21 et 22 sont des fragments qui ont été insérées dans le texte original du psaume par un autre auteur[13].
Dans un article publié en 1999, Ulrike Bail utilise des méthodes d'interprétation intertextuelle et voit dans le psaume une référence au viol de Tamar[14].
Usages liturgiques
Dans le judaïsme
Le verset 14 se trouve dans Pirkei Avot, au chapitre 6, n°3[15].
Le verset 19 fait partie des prières récitées à l'office de Maariv après Motzei Shabbat[16].
Le verset 24 se trouve dans le traité Pirkei Avot, au chapitre 5, n°22[17].
Le compositeur tchèque Antonín Dvořák mis en musique les versets 1 à 8 dans ses Chants Bibliques (1894).
Le compositeur hongrois Zoltán Kodály écrivit son Psaume Hongrois, Op. 13 en 1923, à partir du texte du psaume 55. Il adjoignit au texte des mentions de chagrin et de lamentation en écho à l'histoire du peuple hongrois, en paraphrasant le poète du XVIe siècleMihály Vég(hu).
↑Ulrike Bail, « The Breath After the Comma, Psalm 55 and Violence Against Women », Journal of Religion and Abuse, vol. 1, no 3, (DOI10.1300/J154v01n03_02, lire en ligne)
↑D’après le Complete ArtScroll Siddur, compilation des prières juives, page 583
↑D’après le Complete ArtScroll Siddur, compilation des prières juives, page 605
↑D’après le Complete ArtScroll Siddur, compilation des prières juives, page 579