Le nom vient du genre typePolygonum, issu du grec poly, « plusieurs », et gonu, « genou » (d'où gônia, « angle », comme dans polygone) et fait référence aux nombreuses articulations qui figurent sur les plantes, notamment sur les tiges au niveau des nœuds renflés, et sur les akènestrigones[1].
Les racines sont fibreuses, rarement tubéreuses[2]. Elles forment chez les espèces vivaces des racines adventives secondaires latérales qui se ramifient et finissent par devenir à leur tour des racines principales : le pied originel a ainsi colonisé l'espace par reproduction asexuée ou clonale. Ce développement latéral (qui peut être lié à une stratégie de type phalange) permettant une certaine mobilité végétative. Il explique aussi, en combinaison avec l'allélopathie de ces espèces, que plusieurs d'entre elles soient devenues des mauvaises herbes qui interfèrent notamment avec les plantes cultivées[3].
Le feuillage et les parties souterraines sont riches en acide oxalique qui participe à la défense contre les herbivores et sont toxiques pour l'homme s'il les consomme en grande quantité. Des composés anthracéniques (rumicine dans Rumex) et des flavonoïdes (rutine) ont été trouvés chez plusieurs espèces, substances qui présentent des signes d'activité antifongique, antimicrobienne, antivirale, immunostimulante, anti-inflammatoire et antioxydante[8]. Les glucosides d'anthraquinone ont été utilisés pour leur effet laxatif, notamment ceux de la rhubarbe Rheum officinale(en) présents dans le pétiole et le limbe des feuilles, et surtout dans le rhizome. La richesse en tanins astringents de cette partie souterraine explique son utilisation à faible dose comme antidiarrhéique et pour soigner la dysenterie jusqu'au début du XXe siècle, tandis que sa consommation en grande quantité fait intervenir ces dérivés d'anthraquinone agissant comme un laxatif puissant[9].
Appareil reproducteur
Les fleurs actinomorphes souvent bisexuées sont soit solitaires, soit regroupées en faux verticilles (cymes condensées pauciflores de fleurs peu développées) disposés en grappes ou en panicules[4]. Le périanthe est pétaloïde ou sépaloïde, formant un périgonetrimère de 6 tépales sur deux cycles (type Rumex), ou pentamère de cinq tépales spiralés (par soudure d'un interne et d'un externe) (type Polygonum). Les pièces du périanthe, blanc verdâtre à rouge, sont libres ou légèrement soudées à la base, et dans ce cas souvent persistantes[10]. L'androcée est composé généralement de six étamines (de deux à neuf) à déhiscence longitudinale. Le gynécée est la seule partie homogène de la famille : l'ovairesupère, uniloculaire, contient un unique ovule basal (orthotrope, bitégumenté) et est surmonté de trois styles libres. La pollinisation est souvent entomophile (anémophilie chez les Rumex, autopollinisation chez Polygonum aviculare), favorisée par un disque nectarifère à la base de l'ovaire[11]. La polycarpie est de règle. Les fruits sont des akènes trigones, souvent protégés par une enveloppe membraneuse (« valves » soudées et accrescentes formées par les tépales) et constituant alors une samare[12].
Les principaux genres sont Eriogonum (240 espèces), Rumex (200 espèces divisées en deux sous-genres : les rumex vrais — Eurumex — ou patiences, et les oseilles), Polygonum (170 espèces de renouées), Coccoloba (120 espèces), Calligonum (80 espèces). En France, les deux genres principaux sont Rumex (25 espèces plus quelques naturalisées) et Polygonum (18 espèces plus des naturalisées), auxquels il faut rajouter les genres Fagopyrum (le sarrasin), Rheum (la rhubarbe)[4].
Diversité génétique
La polyploïdie et l'aneuploïdie ont joué un rôle important conduisant à une spéciation active au sein de cette famille. Ainsi, Rumex est parfois découpé en quatre genres distincts et de nombreuses sous-espèces selon le degré de polyploïdie[17]. Généralement, les polyploïdes ont une barrière post-zygotique empêchant l'hybridation avec leurs parents ou les hybrides sont incapables de se développer normalement. Cet isolement sexuel immédiat est à l'origine d'une spéciation sympatrique instantanée responsable de la genèse de près de la moitié des espèces actuelles de plantes à fleurs[18]. Plusieurs espèces de Polygonaceae présentent un dimorphisme sexuel et des chromosomes sexuels qui détermineraient le sexe[17].
Notes et références
↑François Couplan, Les Plantes et leurs noms. Histoires insolites, Quæ, , p. 105
↑(en) Tomáš Herben, František Krahulec, Věra Hadincová & Sylvie Pecháčková, « Is a grassland community composed of coexisting species with low and high spatial mobility ? », Folia Geobotanica & Phytotaxonomica, vol. 29, no 4, , p. 459-468.
↑ abc et dMichel Botineau, Botanique systématique et appliquée des plantes à fleurs, Lavoisier, , p. 385.
↑Quelques genres plus évolués comme dans la sous-famille Eriogonoïdeae sont dépourvus d'ochréas et caractérisés par un involucre de 2 à 10 bractées scarieuses ou membraneuses formant une collerette.
↑Guy Deysson, Éléments d'anatomie des plantes vasculaires, Société d'Édition d'Enseignement Supérieur, , p. 169.
↑(en) A.M. Salehab, Mohamed N.El-Hadidi, Raafat F.M.Arafa, « Flavonoids and anthraquinones of some Egyptian Rumex species (Polygonaceae) », Biochemical Systematics and Ecology Systematics, vol. 21, no 2, , p. 301-303.
↑Paul-Victor Fournier, Le Livre des plantes médicinales et vénéneuses de France, P. Lechevalier, , p. 324.
↑ a et b(en) J. Żuk, « An investigation on polyploidy and sex determination within the Genus Rumex », Acta Societatis Botanicorum Poloniae, vol. 32, no 1, , p. 5-57 (DOI10.5586/asbp.1963.001).