Aux États-Unis, une municipalité (ou une corporation municipale) est une subdivision administrative locale en principe inférieure au comté et administrée par un gouvernement propre (en anglais : municipal government). Les règles relatives aux corporations municipales étant une compétence dévolue aux États fédérés, il existe une grande diversité quant aux types de municipalité, à leurs modalités de création ou à leur mode de gouvernance.
La notion de constitution en municipalité, c’est-à-dire en localité dotée de son propre gouvernement, diffère de la notion de fondation qui correspond à l'arrivée des premiers habitants. Les modalités de création d'une municipalité — on parle en anglais d'incorporation — diffèrent selon les États.
De manière générale, les États imposent quatre seuils minimaux pour la création d'une municipalité : la population, la densité de population, la distance avec une autre municipalité et le taux d'imposition. Ces seuils varient selon les États et ne sont pas utilisés dans tous[1].
Lorsque les conditions de création d'une municipalité sont réunies, la procédure peut être lancée. Elle inclut, selon les États, les étapes suivantes[1] :
pétition d'une partie de la population de la municipalité projetée auprès de l'État ;
réalisation d'une étude de faisabilité (concernant notamment la viabilité financière de la municipalité) ;
vote des électeurs concernés à la majorité des voix ;
Dans plusieurs États du Nord-Est (comme le Massachusetts ou le New Jersey), il n'existe aucune règle concernant la création de nouvelles municipalités, le territoire étant déjà entièrement divisé en municipalités[1].
Il arrive — rarement de nos jours, mais cela arrivait encore fréquemment au XIXe siècle et au début du XXe siècle — qu'une municipalité se dissolve (en général pour des raisons fiscales), pour se reconstituer des années plus tard.
Lorsqu'une localité n'est pas constituée en municipalité, elle est gérée directement par le comté (ou la paroisse en Louisiane, le borough en Alaska).
Compétences
Les compétences des municipalités varient également selon les États. Cependant, deux systèmes prévalent aux États-Unis :
la règle Dillon (en anglais : Dillon's Rule), dégagée par le président de la Cour suprême de l'Iowa John Forrest Dillon, selon laquelle les municipalités ne peuvent intervenir que dans les domaines qui lui sont expressément attribués par l'État fédéré (par sa charte municipale ou par la loi de l'État)[1] ;
la règle d'autogouvernance (en anglais : Home Rule), selon laquelle une municipalité peut exercer toutes les compétences qui ne lui sont pas interdites par la loi de l'État[1].
En 2018, 39 États appliquent la règle Dillon pour toutes leurs municipalités et dix États appliquent le système Home Rule (dont huit appliquent la règle Dillon pour certaines municipalités). Seul l'État de Floride ne choisit pas entre ces deux modalités d'attribution des compétences[1].
La municipalité est le plus souvent compétente dans les domaines du développement économique, de la culture, de la sécurité publique, des travaux publics et de la santé publique[1]. Elle peut également contrôler le système éducatif ou les services sociaux locaux.
Gouvernement
Les modalités de gouvernance des municipalités américaines varient grandement. Au sein des États, les municipalités peuvent avoir un gouvernement qui fonctionne selon les dispositions législatives prévues par l'État ou un gouvernement dit Home Rule dont le fonctionnement est régi par la charte municipale[2].
Les principaux systèmes de gouvernement sont les suivants[2] :
la forme « maire-conseil municipal » (mayor-council), la plus ancienne forme de gouvernement. Le plus souvent, le maire (pouvoir exécutif) est élu à l'échelle de la municipalité (at-large) tandis que les conseillers municipaux (pouvoir législatif) sont élus dans des circonscriptions (wards ou districts) ;
la forme « commission », où une commission municipale composée de trois à sept membres cumule les pouvoirs exécutif et législatif. Dans ce modèle dit Galveston Plan, chaque élu a un domaine de compétence propre ;
la forme « assemblée municipale » (town meeting), où l'ensemble des électeurs se réunissent au moins une fois par an pour régler les affaires de la municipalité et élire des conseillers pour exécuter les décisions prises en assemblée. Cette forme est plus courante dans les towns de Nouvelle-Angleterre.
La variété des types de municipalités
Chaque État gère sa législation concernant l'incorporation en municipalité ; même si certains types de municipalité existent dans plusieurs États, ils sont loin de forcément s'équivaloir. En outre, certains types de municipalité (par exemple le township) ne sont pas à confondre avec les entités homonymes présentes dans les autres États, mais ne faisant pas partie des types de municipalité.
Si certains États ne proposent l'incorporation que dans un seul type de municipalité (souvent alors appelé « city », sans considération de taille ou de population), une grande partie distinguent différents types. Dans certains, comme en Californie, la distinction est seulement nominale (que la localité s'incorpore en tant que town ou city, il n'y aura pas de différence) ; dans d'autres, des spécificités de fonctionnement existent ; enfin, dans les États de l'Est, les plus anciennement constitués, peuvent coexister de nombreux types de municipalité (auxquels s'ajoutent, dans le New Jersey par exemple, la possibilité de choisir tel ou tel mode de gouvernement). En outre, l'administration des États établit parfois un classement interne à chacun de ces types, souvent déterminé par le nombre d'habitants de la municipalité, qui peut avoir une influence sur le mode de gouvernement ou sur certaines attributions spéciales.
Si ces types de municipalité reprennent des noms usuels en anglais, tels que « city », « town » et « village », leur sens administratif ne correspond pas au sens usuel. La town d'Hempstead, dans l'État de New York, compte 759 757 habitants (soit davantage que la plupart des cities de cet État ; la city de Maza, dans le Dakota du Nord, comptait seulement cinq habitants en 2000, avant sa dissolution). De même, des villages peuvent regrouper plus de 10 000 habitants (par exemple, Hempstead, situé dans la town citée plus haut).
Types de municipalités par État
Tableau synthétique des différents types de municipalités par État[3]
↑ abcdefg et h(en) R. M. Smith, « The Process of Municipal Incorporation in the USA », dans Municipal Incorporation Activity in the United States, Springer International Publishing, (ISBN978-3-319-72187-3), p. 17-35.
↑Honolulu, qui est également un comté, est la seule municipalité de l'État.
↑De nouveaux villages ne peuvent plus être créés, mais les anciens perdurent.
↑La Pennsylvanie ne compte qu'une seule town, Bloomsburg.
↑Les towns du Wisconsin sont similaires aux townships des autres États. Cependant, une town peut exercer les mêmes pouvoirs qu'un village par délibération de l'assemblée municipale.
Cynthia Ghorra-Gobin, « Planification urbaine et incorporation aux Etats-Unis. Les fondements de la politique d'exclusion », Les Annales de la Recherche Urbaine, vol. 51, no 1, , p. 41–48 (DOI10.3406/aru.1991.1597, lire en ligne, consulté le )