Mountazer al-Zaïdi (en arabe : منتظر الزيدي, Muntaẓar az-Zaydī), né le 15 janvier ou le 12 décembre 1979, est un journalisteirakien, correspondant depuis 2005 d'Al-Baghdadia TV(en), une chaine de télévision satellitaire irakienne indépendante, basée au Caire en Égypte.
Il s'est rendu mondialement célèbre en lançant ses deux chaussures en direction du président George W. Bush lors d'une conférence de presse à Bagdad en décembre 2008, action pour laquelle il a été condamné à trois ans de prison en , peine réduite à un an en appel. Il a été remis en liberté le [1].
Le , Mountazer al-Zaïdi est enlevé par des inconnus à Bagdad. Il est relâché trois jours plus tard sans qu'aucune rançon ne soit demandée par les ravisseurs. Reporters sans frontières avait suivi cette affaire et annoncé sa libération[2].
Lancer de chaussures contre George W. Bush en 2008
Au cours d'une conférence de presse du président américain George W. Bush et du premier ministre irakien, au palais du premier ministre irakien à Bagdad le , Mountazer al-Zaïdi jette ses deux chaussures sur le président américain situé à quelques mètres, sans l'atteindre, et l'insulte en criant « C'est le baiser de l'adieu au nom du peuple irakien, espèce de chien ! »[3] puis « C'est pour les veuves et les orphelins et tous ceux tués en Irak ! »[3] George Bush esquive la première chaussure et le premier ministre irakien Nouri al-Maliki esquisse un geste de protection du président américain qui n'est pas touché sur le second lancer. Le journaliste est ensuite évacué de force par les services de sécurité irakiens et américains, en criant à l'adresse de George W. Bush : « Vous êtes responsable de la mort de milliers d'Irakiens ! »
Réaction de George W. Bush
Le président américain a d'abord souri, puis a repris un visage sérieux en voyant le nombre d'agents mobilisés. Des journalistes irakiens se sont levés pour s'excuser auprès du président américain. « Ne vous inquiétez pas. Merci de vous excuser au nom du peuple irakien. Cela ne m'a pas dérangé. Et si vous voulez tout savoir, c'était une chaussure de taille 10 (44 en taille française) »[3], a plaisanté Bush. Interrogé ensuite par un journaliste américain, George W. Bush assure qu'il n'avait « pas ressenti la moindre menace ». « Et alors, cet homme a jeté une chaussure sur moi ? C'est une manière d'attirer l'attention », ajoute-t-il.
Arrestation
Selon le frère de al-Zaidi, les services de sécurité américains lui ont cassé un bras et des côtes et lui ont laissé des blessures ouvertes au visage et à la jambe[4]. Après son arrestation, et toujours selon sa famille, il aurait été torturé durant trente-six heures à coups de barre de fer et de décharges électriques[5]. Après sa libération, al-Zaidi a affirmé qu'il avait bel et bien été torturé[6].
Médiatisation
L'incident filmé est diffusé sur les principaux médias du monde et plusieurs manifestations de soutien au journaliste ont eu lieu en Irak. Son sort est suivi avec intérêt dans toute la région du Proche-Orient et l'Assemblée nationale jordanienne observe une minute de silence en solidarité[7].
La chaîne irakienne pour laquelle travaille le journaliste réclame sa libération au nom de la démocratie et de la liberté d'expression promises par les Américains et le nouveau régime :
« N'importe quelle mesure prise contre lui rappellerait ce qui se passait sous la dictature de Saddam Hussein : la violence, les arrestations arbitraires et le temps des fosses communes. Nous demandons à nos confrères des autres médias de nous soutenir en réclamant sa libération[8]. »
Des jeux vidéo reproduisant l'incident et donnant au joueur le rôle du lanceur sont mis en ligne. Le jeu en Adobe Flash intitulé Sock and Awe![9] est mis en ligne le [10], puis est vendu sur eBay pour 5215 livres sterling le [11].
Procès
Le procès de al-Zaidi s'est ouvert le , devant le Tribunal pénal central de Bagdad mais été rapidement ajourné au suivant. Le journaliste encourait une peine de cinq à quinze ans de prison pour insulte à un chef d'État étranger[12]. Le , il était condamné à trois ans de prison[13],[14], une peine ramenée début par la haute cour irakienne à un an ferme, les juges justifiant leur clémence par le casier judiciaire vide de l'accusé[15]. Il est ensuite libéré de manière anticipée trois mois avant de purger totalement sa peine, pour « bonne conduite »[16].
Exil
Estimant ne plus pouvoir exercer son métier en Irak et risquer de graves représailles, al-Zaidi aurait eu l'intention de demander l'asile politique en Suisse[17], selon son avocat genevois, Mauro Poggia. Le frère du journaliste a ensuite nié tout mandat confié à l'avocat, ainsi que l'intention de Mountazer al-Zaïdi de demander l'asile, réaction que l'avocat place sur le compte de pressions subies par la famille[18].
Il s'exile finalement au Liban où il vit encore[16]. Il est actuellement marié et père d'une fille[19].
Il affirme par ailleurs refuser de rencontrer George Bush, déclarant ne pas souhaiter le revoir que dans le cadre d'un éventuel procès à la Cour pénale internationale[16].
Au sujet de son lancer de chaussures, il déclare qu'il « ne regrette pas [son] acte, au contraire ce que [qu'il] regrette c’est de n'avoir pas eu à ce moment-là une autre paire de chaussures »[16]. Il réclame par ailleurs le retrait des forces américaines, qu'il accuse d'avoir « favorisé » l'organisation terroriste Daech[16].
Anecdote
Plusieurs chanteurs amateurs arabes ou professionnels ont consacré des chants en l'honneur de Mountazer al-Zaïdi. En effet, le nom de Mountazer et qui signifie littéralement « le vainqueur », leur a donné une inspiration particulièrement remarquable.
↑Sock and Awe! (Chaussette et respect mêlé de crainte) est un jeu de mots sur la doctrine militaire Shock and awe (Choc et effroi) utilisée par les Américains pour envahir l'Irak.