Le début de son mandat est notamment marqué par ses efforts en vue d'une réconciliation avec la Corée du Nord, qui aboutissent à la présence d'une délégation nord-coréenne aux Jeux olympiques de PyeongChang puis à un sommet historique avec Kim Jong-un en , au terme duquel les deux pays expriment leur volonté de mettre fin aux hostilités.
Il se retrouve par la suite confronté à la pandémie de Covid-19. Sa gestion de la crise est saluée aussi bien à l'extérieur de son pays qu'à l'intérieur, où son parti remporte un large succès aux élections législatives de 2020.
Biographie
Jeunesse et formation
Moon Jae-in est né sur l'île de Geoje où son père, un réfugié originaire de Hamhung en Corée du Nord ayant fui le régime communiste, travaille au camp de prisonniers de guerre. Issu d'une famille modeste[1], il est élève au lycée Kyungnam à partir de 1971, l'une des écoles les plus prestigieuses, puis étudie le droit à l'université Kyung Hee. Il est alors emprisonné et exclu de l'université pour avoir organisé une manifestation contre la constitution Yusin. Il parvient toutefois à finir ses études, sortant deuxième de sa promotion en 1980. Ne pouvant pas devenir juge à cause de sa participation au mouvement étudiant, il choisit la carrière d'avocat.
Il a fait son service militaire dans les forces spéciales[2].
Carrière professionnelle
Il ouvre un cabinet à Busan avec Roh Moo-hyun et s'implique dans la défense des droits de l'homme et des droits civils, devenant l'une des figures du mouvement démocratique des années 1970-1980. Il est emprisonné deux fois sous le régime du dictateur Park Chung-hee[1]. En 1988, il est un des membres fondateurs du Hankyoreh, le premier grand journal de gauche. En 2002, il s'occupe de la campagne électorale de Roh Moo-hyun qui est président de 2003 à 2008. Il travaille alors au cabinet présidentiel d'abord en tant que conseiller aux affaires civiles, de 2003 à 2005, puis de la cohésion sociale, en 2004, et enfin en tant que secrétaire général de 2007 à 2008[3]. En 2007, il est l'une des chevilles ouvrières du deuxième et historique sommet intercoréen[1]. En 2009, après le suicide de Roh, il est responsable de ses funérailles et se retrouve sous les feux des projecteurs. C'est alors que sa popularité auprès du public grandit et qu'il commence à être considéré comme un candidat sérieux à la présidence.
Carrière politique avant la présidence
Élection présidentielle de 2012
En 2012, Moon est le membre du PDU le mieux placé dans les sondages. Élu député au printemps dans la circonscription de Busan, il remporte ensuite les primaires démocrates le et devient le candidat officiel de ce parti[4]. Pendant la campagne, les intentions de vote en sa faveur augmentent régulièrement et il semble en fin de campagne en passe de l'emporter. Finalement, lors du scrutin du 19 décembre, il recueille 48,02 % des voix et est battu par la candidate conservatrice, Park Geun-hye, fille de Park Chung-hee, qui bénéficie de la nostalgie du régime de son père et notamment de la croissance économique de l'époque[1], et obtient 51,55 % des voix.
Pendant la campagne, les services secrets sud-coréens organisent une campagne de diffamation contre lui afin d'influencer les électeurs en faveur des conservateurs. Le chef des services secrets sera condamné à quatre ans de prison en 2017[5].
Durant la campagne, il déclare « s'opposer » à l'homosexualité et partager la position du candidat conservateur Hong Joon-pyo selon lequel la présence de soldats homosexuels « affaiblit » les forces armées sud-coréennes[7]. La presse conservatrice l'accuse d'avoir favorisé en 2007 l’emploi de son fils[8].
Le , il remporte l'élection présidentielle, dont il était le grand favori, avec 41,4 % des voix[1].
Il prête serment et entre en fonction le lendemain [9],[10]. Le jour même, il nomme Lee Nak-yeon comme Premier ministre[11].
Président de la République
Dialogue inter-coréen
Partisan d'un rapprochement avec la Corée du Nord, il se dit prêt à se rendre à Pyongyang[12]. Il concède aux États-Unis le déploiement en Corée du Sud du système de missiles anti-balistiques THAAD à la condition que le président américain ne l'emploie pas sans le consulter[13]. En revanche, il fait annuler des exercices militaires prévus avec les États-Unis[14]. Lors des Jeux olympiques d'hiver de 2018 de PyeongChang, il invite Kim Yo-jong, la sœur de Kim Jong-un. Début , par l'intermédiaire de son conseiller à la sécurité nationale Chung Eui-yong, il transmet au président américain Donald Trump la demande du dirigeant nord-coréen de le rencontrer[2]. Une rencontre entre Moon Jae-in et Kim Jong-un est prévue pour la première fois en Corée du Sud. Le président sud-coréen entend profiter du sommet pour tenter de signer officiellement la paix, la Corée du Sud ayant refusé de signer l’armistice de 1953.
Le rapprochement inter-coréen suscite un large enthousiasme au sein de la population sud-coréenne : la popularité de Moon Jae-in atteint 68 % en [15]. Cette ouverture est en revanche combattue par certaines organisations évangéliques, qui tiennent un discours xénophobe et anticommuniste[16]. Le Parti démocratique de Moon Jae-in obtient une large victoire à l'issue des élections législatives d'avril 2020, avec 163 sièges sur 300, et 17 sièges pour un parti allié, dans un contexte de forte participation électorale (66,2 %, soit le taux le plus élevé dans le pays depuis 1992)[17].
Politique environnementale
En , Moon Jae-in annonce la sortie du nucléaire en Corée du Sud pour 2060. Dans l'immédiat, les projets de construction de six nouveaux réacteurs sont annulés et 24 autres actuellement en service ne sont pas prolongés[18]. Le gouvernement publie en outre un calendrier projetant l’accroissement de la part des énergies renouvelables à 20 % d'ici 2030 en augmentant les investissements dans la recherche et développement et en soutenant les secteurs liés[19]. Ces décisions provoquent l'hostilité des milieux d’affaires et des médias mais l'approbation d'une grande partie de l'opinion publique, inquiète depuis la catastrophe japonaise de Fukushima en 2011 et alertée par plusieurs scandales de contrefaçons et de trafics de certifications de pièces détachées de réacteurs[18].
Le gouvernement décide en 2019 de faire équiper de panneaux solaires tous les bâtiments publics de Séoul mais également d'un million de logements d'ici 2022. L’objectif est de réduire les émissions de CO2 de plusieurs centaines de milliers de tonnes par an[20].
Politique économique et sociale
Le salaire minimum est relevé de 16,4 % en 2017. Dans un rapport publié en 2018, l'ONG Oxfam cite la Corée du Sud parmi les rares pays d'Asie à avoir fait des efforts pour réduire les inégalités[21]. La durée hebdomadaire légale du travail est ramenée de 68 heures à 52 heures en 2018[22].
La crise du logement se poursuit durant sa présidence, bien qu'elle ne soit pas directement liée à sa politique. Les prix ont presque doublé en quelques années : alors qu'un ouvrier devait, en 2017, consacrer vingt ans de salaire pour s'acheter une maison, il lui en faut près de quarante en 2021. Cette crise contribue à la dette des ménages ; en hausse constante depuis les années 1960, elle s’élève en 2020 à plus de 200 % du revenu disponible. Pour y faire face, Moon Jae-in prévoit de livrer deux millions d'habitations d'ici 2025 et d’augmenter les impôts sur la propriété afin de dissuader les habitants fortunés d'accumuler trop de logements[23].
Il gracie en août 2021 l'ancien PDG du Groupe Samsung, Lee Jae-yong, condamné pour corruption et détournement de fonds. Si cette mesure était réclamée par la droite, elle suscite une polémique au sein du parti présidentiel. Park Yong-jin, candidat démocrate à l’élection présidentielle de 2022, y voit un « affront à l’État de droit », montrant que « les riches et les puissants ont toujours une issue favorable »[24],[25]. En décembre 2021, il gracie également l'ancienne présidente conservatrice Park Geun-hye, condamnée pour corruption et abus de pouvoir. Cette décision est accueillie avec froideur tant par la droite, qui soupçonne une « manœuvre » pour l’affaiblir à quelques mois de la présidentielle, que par une partie du camp démocrate[26].
Son gouvernement a rédigé un projet de loi prévoyant l’autorisation de l’avortement jusqu’à quatorze semaines de grossesse. Mais le texte, très controversé dans un pays traditionnellement conservateur, n’a jamais été adopté par l’Assemblée nationale[27].
↑ a et b« Moon Jae-in confirme la sortie du nucléaire en Corée du Sud pour 2060 », lemonde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
↑« Une feuille de route pour la sortie du nucléaire civil sera présentée avant la fin de l'année », Agence de presse Yonhap, (lire en ligne, consulté le ).