Des documents juridiques ont révélé[Quand ?] un lien économique indirect controversé[Lequel ?] à travers un réseau de sociétés immobilières dont Anna Paratore, mère de Giorgia Meloni, a été partenaire à plusieurs reprises[4],[5].
La grand-mère paternelle de Giorgia Meloni est l'actrice Zoe Incrocci[6].
Lorsqu’elle a un an, son père quitte le domicile familial pour ouvrir un commerce dans les îles Canaries, la laissant seule avec sa mère et sa sœur aînée, Arianna, alors âgée de trois ans. En 1995, il est condamné par la justice espagnole pour trafic de drogue. Elle lui en tient rigueur et refuse de le revoir jusqu'à son décès[7]. L'homme politique Maurizio Gasparri confie au sujet de la relation avec son père : « Elle n’en parle jamais. Je crois qu’elle a été profondément blessée et qu’elle s’est repliée sur elle-même avant de trouver une nouvelle dimension avec la politique[3] ».
Deux ans après son départ, les deux sœurs, âgées de trois et cinq ans, mettent le feu à l'appartement familial en jouant avec des bougies et des allumettes[3], et les Meloni déménagent dans le quartier populaire de la Garbatella, au sud de la capitale.
En parallèle de sa scolarité, Giorgia Meloni commence à administrer un site web où elle se présente comme « Khy-ri, le petit dragon de l'Undernet italien »[8],[9]. Il s'agirait par ailleurs de sa première apparition sur Internet[10].
Dans les années 1990, Giorgia Meloni a une relation avec l'homme politique Marcello De Angelis puis avec le frère de celui-ci, Renato[15].
Elle a une fille, Ginevra, née en 2016[16] de sa relation avec le journaliste Andrea Giambruno à partir de 2013. Le , elle annonce sur les réseaux sociaux sa rupture avec son compagnon, après dix ans de relation ; dans un enregistrement, celui-ci, dont des propos sur le viol avaient précédemment fait polémique[17], se vantait d’avoir des relations avec d’autres femmes[18]. Malgré son expérience hétéroparentale, le fait qu'elle ne se soit jamais mariée et ait seulement eu une enfant assez tard est mentionné comme pouvant être en contradiction avec ses vues politiques sur la famille traditionnelle[17].
D'abord supportrice de la Lazio de Rome, elle dit ensuite soutenir le club rival de l'AS Roma[20]. L'historien Fabien Archambault, spécialiste du football italien, écrit : « Ce changement fait partie de sa stratégie d’institutionnalisation et de dédiabolisation. Dans sa jeunesse, elle est « laziale » puisqu’elle est déjà très politisée et que c’est la Lazio que soutiennent alors les groupes néofascistes. »[21].
Giorgia Meloni est passionnée par Le Seigneur des anneaux. Certains médias affirment que le livre et les films auraient influencé sa vision de la politique[22],[23].
Ascension politique
Débuts militants
Giorgia Meloni s'engage en politique en 1992, à 15 ans, révoltée par l'assassinat des juges Giovanni Falcone et Paolo Borsellino par la mafia en Sicile. Elle fonde la coordination étudiante Gli Antenati (« Les Ancêtres ») et milite au sein de l'organisation étudiante de droite Azione studentesca (« Action étudiante »), qu'elle finit par diriger[24]. En parallèle, elle adhère au Front de la jeunesse du Mouvement social italien (MSI), considéré comme l'héritier du Parti national fasciste de Benito Mussolini[25].
Trois ans plus tard, en 1995, elle devient responsable nationale de l'action étudiante de l'Alliance nationale (AN) de Gianfranco Fini, qui a succédé au MSI. En 1998, elle décide de s'engager davantage en politique, notamment au sein du Front de la jeunesse d'AN, avec comme mentor l'élu Fabio Rampelli[3]. À l'issue des élections de 1998, à l'âge de 21 ans, elle est élue conseillère de la province de Rome.
En 2004, elle est élue présidente d'Azione Giovani, le mouvement de jeunesse de l'Alliance nationale, lors du congrès de cette organisation qui se tient à Viterbo.
Parmi les membres de l'Alliance nationale, elle est la titulaire de la plus haute charge institutionnelle au cours de la XVe législature. Elle perd ses fonctions à la suite de la dissolution parlementaire de 2008 consécutive à la chute du gouvernement de centre gauche de Romano Prodi.
Ministre pour la Jeunesse
Réélue députée lors du scrutin de 2008, elle est nommée ministre pour la Jeunesse dans le quatrième gouvernement dirigé par Silvio Berlusconi. Âgée de 31 ans lors de son entrée au gouvernement, elle est la deuxième plus jeune ministre de l'histoire italienne, et la plus jeune femme ministre[25],[b].
Elle combat le « caractère factieux des livres d'école », trop à gauche selon elle[27]. Elle se déclare également favorable au boycott par les athlètes italiens des Jeux olympiques de Pékin de 2008.
En 2009, l'Alliance nationale de Gianfranco Fini fusionne avec Forza Italia, parti présidé par Silvio Berlusconi, au sein du Peuple de la liberté (PdL). Giorgia Meloni rejoint la nouvelle formation, dont elle dirige l'organisation de jeunesse, Giovane Italia[24].
Elle reste ministre jusqu'en , lorsque la fin du gouvernement Berlusconi est précipitée par le rejet du budget par la Chambre des députés.
Lancement et présidence de Frères d'Italie
Après l'annonce de l'annulation des élections primaires du parti, en , Giorgia Meloni quitte le PdL et crée aux côtés de deux anciens membres du gouvernement, Ignazio la Russa et Guido Crosetto, une nouvelle organisation, Frères d'Italie - Centre-droit national. Le , elle est élue présidente du parti, rebaptisé Frères d'Italie - Alliance nationale, reprenant également dans son logo la flamme tricolore de l'ancienne formation[3]. En 2017, le parti abandonne dans son nom sa référence à l'Alliance nationale.
Giorgia Meloni est réélue députée, en Lombardie, sur les listes de son nouveau parti lors des élections parlementaires de 2013. Alors qu'elle est tête de liste Frères d'Italie dans toutes les circonscriptions du pays aux élections européennes de 2014, le parti obtient 3,7 % des voix, échouant à franchir le seuil des 4 % lui permettant d'obtenir des élus.
Le , alors qu'elle est enceinte, elle annonce sa candidature au poste de maire de Rome. Au sujet de sa grossesse et en réponse aux attaques dont elle est l'objet, en particulier de la part de son ancien allié Silvio Berlusconi, qui affirme qu'elle ne pourrait pas assumer les responsabilités qui sont celles du maire de la capitale tout en élevant un enfant, elle déclare : « Dans une ville qui a comme symbole une louve qui allaite des jumeaux, cela ne sera pas un problème. » Elle arrive troisième à l'issue du premier tour de l'élection, avec 20,62 % des voix[28]. Elle est néanmoins élue au conseil communal, où elle siège ensuite.
Affirmation nationale et médiatique
Élections parlementaires de 2018
En vue des élections parlementaires de 2018, dans le cadre de la coalition de centre droit, elle s'allie avec la Ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi. Au cours de la campagne, elle se rend à Budapest, où elle est reçue par le Premier ministre Viktor Orbán. À l'issue du scrutin, elle est reconduite à la Chambre des députés (circonscription Latium-2 – Latina), tandis que son parti sort renforcé, avec trente-deux députés et dix-huit sénateurs élus, contre douze députés et trois sénateurs à la fin de la législature précédente.
Élections européennes de 2019 et gain de popularité
Giorgia Meloni gagne ensuite en visibilité médiatique et s'affirme sur les réseaux sociaux. En 2019, son parti progresse significativement dans les intentions de vote et dépasse Forza Italia de Silvio Berlusconi, pourtant arrivé dix points devant Frères d'Italie aux élections parlementaires de l'année précédente[29]. Aux élections européennes de , son parti enregistre un score de 6,4 % des suffrages et obtient sept élus au Parlement européen[30].
À la fin de l'année 2019, Frères d'Italie passent la barre des 10 % d'intentions de vote au niveau national[33],[34]. À l'occasion des élections régionales d' en Ombrie, son parti devance pour la première fois lors d'un scrutin le Mouvement 5 étoiles (M5S) et remporte l'élection avec la coalition de centre droit[35]. Par ailleurs, son parti est le seul à progresser en voix par rapport aux élections européennes lors des élections régionales de en Émilie-Romagne et en Calabre[32],[36].
Bénéficiant d'une image d'authenticité et de son talent oratoire, elle devance alors en opinions favorables Matteo Salvini, par rapport auquel elle se qualifie « plus à droite », et se voit parfois présentée comme une concurrente de celui-ci pour la direction de la coalition de centre droit[3],[32]. À partir de la fin de l'année 2020, elle devient la dirigeante préférée des Italiens, devançant le président du Conseil, Giuseppe Conte[37]. L'universitaire française Anaïs Voy-Gillis indique à ce sujet : « Bien que son parti se veuille l'héritier du MSI, le mouvement néo-fasciste italien, l'image qu'elle renvoie est différente de celle renvoyée par Salvini, qui apparaît comme un personnage outrancier dans son discours et dans son style politique. […] [Au Parlement européen également], les Conservateurs ont un discours moins radical tout en étant très fermes sur l'immigration. Il y a dans le groupe une volonté forte de pousser à une réforme de l'Europe et de la zone euro, mais qui est plus nuancée que dans le groupe Identité et démocratie[38]. »
À la suite de la chute du second gouvernement Conte au début de l'année 2021, durant la pandémie de Covid-19, elle refuse d'apporter son soutien à Mario Draghi pour la présidence du Conseil. Elle se différencie ainsi des autres partis du Parlement, y compris de ses alliés de la Ligue et de Forza Italia, qui entrent au gouvernement. Pour justifier sa décision de rester dans l'opposition, Giorgia Meloni avance son refus de siéger au côté de la gauche, ses désaccords avec l'ancien président de la Banque centrale européenne et son souhait d'élections parlementaires anticipées, qui étaient jusque-là réclamées par l'ensemble de la coalition de centre droit. Elle précise que son parti reste au sein de cette dernière[40],[41],[42].
En tant que principale figure de l'opposition parlementaire, elle combat en particulier les mesures sanitaires prises par le gouvernement. Son profil contestataire lui vaut notamment de réussir à s'implanter significativement dans le sud du pays. En hausse dans les sondages, elle modère sa critique de l'Union européenne et quelques positions anti-migrants[43]. En mai 2022, la publication de ses mémoires est « l'ouvrage de non fiction le plus vendu de la période » en Italie[44]. Elle progresse lors des élections locales de juin de la même année, se retrouvant dans les sondages en tête des partis de droite[24].
Le , Frères d'Italie arrive en tête du scrutin, avec 26 % des suffrages, loin devant ses alliés de la Ligue (9 %) et de Forza Italia (8 %), le parti de Salvini réalisant une contre-performance y compris dans ses fiefs d'Italie du Nord. Giorgia Meloni est réélue députée avec 51,5 % des voix lors de l'unique tour de scrutin (circonscription Abruzzes – L'Aquila).
Se présentant comme « une femme, une mère, une chrétienne »[46], elle défend une vision « sociale, nationale et populaire »[32]. Bien qu'elle affirme ne pas être post-fasciste, elle a tenu par le passé plusieurs déclarations favorables à Benito Mussolini : en 1996, à 19 ans, elle affirme ainsi à une équipe de Soir 3 que Mussolini a été « un bon politicien », le définissant même comme le « meilleur politicien des 50 dernières années »[47]. Dans ce même entretien, elle dit penser que Mussolini est « une personnalité complexe à considérer dans son contexte historique »[48].
Encore en 2022, des membres de son parti mobilisent ouvertement la référence au fascisme, ce qui vaut à Frères d'Italie d'être classé dans la lignée de cette idéologie par des politologues et médias[49], et la flamme fasciste (reprise au Movimento sociale italiano, héritier direct du parti fasciste de Mussolini[50]) figure toujours comme symbole de son parti.
Selon le sociologue Ugo Palheta, si Giorgia Meloni ne reprend pas ouvertement à son compte l'antisémitisme qui caractérisait le fascisme mussolinien, « la rhétorique employée aujourd'hui par Giorgia Meloni vis-à-vis des minorités autres que la minorité juive, comme les roms, les musulmans ou les immigrés, n'a rien à envier à l'antisémitisme de l'entre-deux-guerres »[51]. Giorgia Meloni reprendrait la théorie « néo-fasciste » du « grand remplacement », qui, selon lui, interprète toute thématique « à travers le prisme de l'omniprésence des immigrés et des minorités »[51].
Gilles Gressani, président du Groupe d'études géopolitiques et de la revue Le Grand Continent, maître de conférences à Sciences Po, écrit en septembre 2022 : « Giorgia Meloni n'incarne pas le retour du fascisme, mais l'apparition d'une nouvelle formule politique. […] Elle a imprimé un tournant à la ligne de son parti (soutien à l'effort de guerre en Ukraine, alignement, au moins partiel, sur l'Europe, etc.)[52]. »
En , pour le politologue Moisés Naím, si elle ne se réclame plus ouvertement de Mussolini, « elle ne semble guère s'être éloignée de ses idées » et continue à être dans la lignée de l'héritage du dictateur fasciste[53].
Quelques jours avant son investiture en tant que présidente du Conseil en octobre 2022, elle dénonce, à propos de la rafle du ghetto de Rome, « la déportation vile et inhumaine de Juifs romains aux mains de la fureur nazie-fasciste » et le fait que « femmes, hommes et enfants ont été arrachés à la vie, maison par maison »[54],[55].
Économie
Sur le plan économique, partisane d'un interventionnisme modéré, elle souhaite la fin du revenu de citoyenneté mis en place par le premier gouvernement Conte, et prône des mesures en faveur de l'emploi et du logement qui seraient réservées aux Italiens[3].
Immigration
En matière d'immigration, elle dénonce « l’islamisation » de l'Europe, se prononce pour la fermeture des ports afin d'empêcher les navires d'ONG de débarquer des migrants, et propose une multiplication des centres de surveillance et des expulsions. En , alors que l'arrivée du navire de l'ONG Proactiva Open Arms avec 147 migrants à bord cristallise les désaccords entre les partis politiques italiens, elle propose de créer un blocus naval qui empêcherait l'embarquement des migrants depuis la Libye ou la Tunisie ; selon une étude réalisée pour le quotidien Il Giornale, 51 % des Italiens sont favorables à cette idée[56].
Elle affiche à plusieurs reprises son opposition personnelle à l'avortement, qu'elle ne juge pas compatible avec le bien des femmes et présente comme « une défaite »[62]. Lors de sa campagne de 2022, elle ne remet pas en cause le droit à l'avortement[44], déclarant qu'elle « ne changera pas la loi »[63], mais fait campagne sur le « droit de ne pas avorter » et aux « alternatives » à l'avortement[57]. Elle affiche une volonté de lutter contre les causes de l'avortement et de soutenir la maternité, par exemple en diminuant la TVA sur les articles et services pour la petite enfance[64],[65].
Politique européenne et étrangère
Qualifiée d'eurosceptique, et ayant maintes fois exprimé des positions critiques à l'égard de l'Union européenne, Giorgia Meloni se dit néanmoins en faveur d'une Europe confédérale entre les 27 États membres, qui ne devrait pas entraîner de cessions majeures de souveraineté, contrairement au projet d'une Europe fédérale[66]. Or, elle ne réclame pas la sortie de l'Italie de l'Union européenne ou de l'euro, déclarant qu'« il y a une gamme infinie de positions possibles entre la décision de sortir de l’Union et la totale soumission aux intérêts français et allemands »[32]. Elle critique une politique ayant mis à mal les économies de plusieurs États membres, et prône la défense de la souveraineté des pays de l'UE sur les plans économique, sécuritaire et migratoire[32]. En raison de ses positions conservatrices et de sa personnalité, elle a été comparée à la femme politique française Marion Maréchal[3],[67].
Giorgia Meloni a voté en faveur de l'intervention militaire de 2011 en Libye ; en 2019, elle a toutefois critiqué la justification française de l'intervention, affirmant que c'était à cause de l'opposition de Mouammar Kadhafi, chef d'État nationaliste, au franc CFA[68].
Elle dénonce également les francs CFA, monnaies qu'elle qualifie de « coloniale[s] »[69].
Après avoir tenu des propos louangeurs sur la Russie de Vladimir Poutine — déclarant notamment qu'elle « fait partie du système de valeurs européennes, elle défend l’identité chrétienne et combat le fondamentalisme islamique » —, elle soutient la décision du gouvernement Draghi de fournir des armes défensives à l'Ukraine envahie par la Russie et assume, selon Mediapart, « un atlantisme sans nuance »[25],[70]. Lors de la guerre en Ukraine, elle soutient Kiev, à la différence de Matteo Salvini[24].
Au début de son mandat, plus partisane d'un libéralisme atlantiste et européen que d'autres personnalités proches de son positionnement, elle tient également en tant que défenseuse de l'Occident des positions plutôt favorables à Israël[71],[72], mais, par la suite, du point de vue des conséquences humanitaires, elle adopte une idéologie plus nuancée, intervenant surtout dans le débat public en se faisant critique des opérations militaires de ce pays. En , sur le conflit israélo-palestinien, elle déclare vouloir fournir 35 millions d'euros pour aider la population palestinienne. Elle juge par ailleurs « inacceptable » qu'Israël vise les Casques bleus déployés au Liban. Elle appelle à un cessez-le-feu immédiat[73],[74],[75].
Présidente du Conseil des ministres
Nomination
Le 21 octobre 2022, Giorgia Meloni est chargée de former un gouvernement par le président de la République, Sergio Mattarella. Elle annonce la composition de son futur gouvernement dans la foulée et se voit assermentée avec l'ensemble de ses ministres le lendemain, le 22 octobre, au palais du Quirinal, succédant à Mario Draghi et devenant la première femme à diriger le gouvernement italien[76],[77].
Alors que son arrivée au pouvoir inquiète certains pays occidentaux, elle reçoit le 23 octobre à Rome le président de la République française, Emmanuel Macron, qui est le premier chef d'État qu'elle rencontre depuis sa prestation de serment. La rencontre est qualifiée de « franche et exigeante » par le président français[78].
Questions économiques
Apparaissant prudente, elle ne modifie presque pas le budget de son prédécesseur Mario Draghi pour l'année 2023[79]. Elle poursuit la politique d'austérité en place, réduisant notamment les prestations sociales[80],[81]. Elle réforme également le marché du travail[81].
Politique migratoire
À ses débuts à la tête du gouvernement, Giorgia Meloni est confrontée à une vague migratoire sans précédent.
En , conformément à sa promesse de ne pas accueillir les bateaux de naufrage de la Méditerranée, elle s'oppose à l'accostage en Italie de l'Ocean Viking, un navire transportant 230 migrants en provenance d'Afrique. Sur cette question se poursuit ainsi avec la France un conflit diplomatique commencé en 2018, lorsque Matteo Salvini était ministre de l'Intérieur. La France accueille alors le navire et annonce des mesures de rétorsion envers l'Italie, une réaction jugée « agressive, incompréhensible et injustifiée » par Giorgia Meloni[82],[83]. En , le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, déclare qu'elle est « incapable de régler les problèmes migratoires », ce qui provoque une crise diplomatique entre la France et l'Italie[84].
Si elle prônait la fermeté pendant la campagne électorale de 2022, Giorgia Meloni infléchit rapidement sa position sur l'immigration clandestine et se voit critiquée par une partie de ses soutiens, qui considèrent qu'elle renonçait à trop d'engagements[79]. Elle est notamment contrainte de créer des centaines de places d'accueil pour les migrants. Tout en mettant désormais l'accent sur la lutte contre les passeurs, elle simplifie, dans le même temps, les procédures d'immigration légale et facilite le recours aux travailleurs étrangers face aux pénuries d’emplois[85],[86]. Son gouvernement annonce être prêt à accueillir plus de travailleurs formés en Tunisie en contrepartie d'une lutte renforcée contre l'immigration clandestine[87]. En 2023, elle affirme que l'Europe et l'Italie ont besoin d'immigration et que seule l'immigration clandestine doit être combattue au profit de l'immigration légale[88],[89].
Après six mois d'exercice du pouvoir, le chercheur Lorenzo Castellani qualifie ainsi son positionnement de « techno-souverainisme » à travers le fait de « séparer la rhétorique des actes concrets » sous le poids de « la contrainte extérieure » : « Les craintes et les risques d’une dérive eurosceptique, que l’on craignait pendant la campagne électorale, se sont révélés infondés — il n’y a pas eu d’actions militaires de blocus contre le droit international pour arrêter l’immigration, pas de lois budgétaires imprudentes ou de politiques de dépenses plus controversées que celles des gouvernements précédents »[90].
Elle donne cependant des gages à son électorat en interdisant dès les premiers jours les « rave parties », en maintenant une forme dure d'emprisonnement à perpétuité ou en imposant aux bateaux d'ONG des règles de sauvetage et de débarquement des migrants sur le sol italien qui freinent leur activité[91]. En novembre 2023, Giorgia Meloni annonce l’ouverture, en territoire albanais, de centres de « gestion des migrants illégaux » placés sous juridiction italienne, issus d'un protocole d'accord entre l'Italie et l'Albanie ; deux structures prévues pourraient prendre en charge 36 000 personnes par an, l'équivalent d'un quart des migrants qui arrivent sur le territoire italien chaque année[92].
En 2024, elle peut se prévaloir d'une forte baisse de l'entrée de migrants clandestins en Italie. Les statistiques du ministère italien de l’Intérieur montrent une chute de 65 % du nombre d’entrées irrégulières par rapport à 2023 avec 40 138 clandestins arrivés dans le pays au , contre 113 469 à la même date l’année précédente. Parmi ces clandestins, le nombre de mineurs non-accompagnés est pratiquement divisé par quatre. Ces succès seraient dus à une politique d’accords et de coopérations avec les pays méditerranéens d’où est issue l’immigration illégale. Elle permet également au gouvernement italien de multiplier les rapatriements de clandestins : plus de 9 000 ont eu lieu en 2024 selon Il Giornale, dont au moins 5 000 vers la Libye et près de 4 000 vers la Tunisie[93]. Citée en exemple par ses partenaires européens, elle a accueilli en septembre 2024 son homologue britannique, Keir Starmer, venu pour « s'inspirer des solutions de l'Italie » en la matière[94].
Mesures sociétales
En , son gouvernement prend une mesure visant les familles homoparentales. Concernant l'enregistrement à l'état civil des enfants, une circulaire du ministère de l'Intérieur interdit désormais d'inscrire un nom de parent qui ne serait pas le parent biologique de l'enfant. Ainsi, le parent non-biologique perd son autorité parentale[95]. De plus, le parti Frères d'Italie, soutenu par les autres membres de la coalition de centre droit, fait voter une loi le définissant la gestation pour autrui comme un « crime universel » passible de deux ans de prison et d'un million d'euros d'amende[96].
En , dans une allocution prononcée au Vatican, elle déclare : « Nous voulons une nation où ce ne sera plus un scandale de dire que, quelles que soient les orientations individuelles, nous sommes tous nés d'un homme et d'une femme, où ce n'est pas un tabou de dire que la maternité n'est pas à vendre, que les utérus ne sont pas à louer[97] ».
Projet de réforme institutionnelle
Giorgia Meloni présente son projet de « IIIe République ». Celui-ci permettrait l’élection du président du Conseil au suffrage universel, pour un mandat de cinq ans (modifiant l’article 59 de la Constitution). Les élections législatives auraient lieu le même jour, réunissant les deux scrutins. En cas d’adoption de la réforme, la liste liée au chef du gouvernement élu obtiendrait une prime de sièges au Parlement afin qu’elle soit assurée d’obtenir la majorité absolue dans l’hémicycle. Cette réforme ne modifierait pas le rôle du président de la République, élu par le Parlement. Les prérogatives du président du Conseil ne seraient pas modifiées : il ne nommerait pas son gouvernement, ne pourrait pas révoquer ses ministres, rendant les remaniements très difficiles et, en cas de rupture de la majorité, ne pourrait pas dissoudre les chambres[98],[99],[100].
Pour être adoptée, la réforme devra passer deux fois par les deux chambres, avec trois mois d’intervalle entre deux lectures. Si elle n’est pas votée à la majorité des deux tiers les quatre fois, mais seulement à la majorité simple, elle pourra faire l’objet d’un référendum constitutionnel si la demande est faite par au moins 500 000 électeurs inscrits sur les listes électorales, ou au moins un cinquième des membres de l'une des deux chambres, ou au moins cinq des vingt conseils des régions d'Italie[101].
Relations internationales
Dès son arrivée au pouvoir, elle charge des personnalités modérées de dialoguer avec l'Union européenne[79]. Le Monde diplomatique analyse qu'elle devient « en quelques mois une partenaire sérieuse et raisonnable » des pays occidentaux, notamment en raison de sa politique d'austérité économique lui permettant d'« obtenir la manne du plan de relance européen (191 milliards d’euros d’ici 2026)[80]. » L'essayiste français Alain Minc estime même qu'« il n’y a pas plus militante pour l’Europe et pour l’euro que Giorgia Meloni »[80].
Se rangeant du côté de l'OTAN, elle maintient un soutien actif à l'Ukraine et réclame des sanctions plus importantes contre la Russie ainsi que des armes plus sophistiquées pour Kiev[80].
Aux élections européennes de 2024, les FdI remportent 28 % des voix, confirmant leur statut de parti le plus populaire du pays depuis les élections générales de 2022. Cette victoire renforce la position de Giorgia Meloni tant en Italie qu'en Europe[102].
Durant son mandat, Giorgia Meloni entretient des relations tendues avec le président français Emmanuel Macron[103].
Lors des élections législatives de 2006, 2008 et 2013, Giorgia Meloni n'est pas élue sur son nom propre mais dans le cadre d'un système de représentation proportionnelle à liste bloquée.
(it) Io sono Giorgia. Le mie radici, le mie idee, Rizzoli, 2021, 326 p. (ISBN978-8817154680).
(fr) : Mon itinéraire : autobiographie d'une leader politique conservatrice, Chora, 2022, 350 p. (ISBN978-8831414050).
Sur Giorgia Meloni
(it) Francesco Giubilei, Giorgia Meloni. La rivoluzione dei conservatori, Giubilei Regnani, 2020, 165 p. (ISBN978-8898620821).
Distinctions et influence
Elle est identifiée par le Time comme faisant partie des vingt personnalités qui « pourraient changer le monde en 2020 »[104].
En 2021, le média Politico la classe parmi les 28 personnalités européennes les plus puissantes d'Europe, à la troisième place de la catégorie « Disrupteurs »[105]. L'année suivante, le magazine Forbes la classe septième dans sa liste des femmes les plus puissantes du monde[106], quatrième en 2023[107], puis troisième en 2024.
Notes et références
Notes
↑Le parti se nomme « Frères d'Italie - Alliance nationale » jusqu'en 2017.
↑Son ascension ministérielle est aussi fulgurante que celle du comte Ciano, nommé ministre au même âge par Mussolini.
↑Élue dans le cadre d’un système de représentation proportionnelle à liste bloquée.
↑(en-US) Jason Horowitz, « Hobbits and the Hard Right: How Fantasy Inspires Italy’s Potential New Leader », The New York Times, (ISSN0362-4331, lire en ligne, consulté le )
↑Gilles Gressani, « « Giorgia Meloni n’incarne pas le retour du fascisme, mais l’apparition d’une nouvelle formule politique » », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
↑(it) « Giorgia Meloni continua ad attaccare la Francia, ma anche lei votò per l'intervento in Libia » [« Giorgia Meloni continue d'attaquer la France, mais elle a voté pour l'intervention en Libye. »], Giornalettismo, (lire en ligne [archive du ], consulté le ).
↑« Italie : « Je jure d’être fidèle à la République », le serment de Giorgia Meloni et son gouvernement d’extrême droite », Sud-Ouest, (lire en ligne, consulté le ).